Text Box: La lutte contre l’homophobie

La lutte contre l’homophobie

Points essentiels

·         Le Conseil de l'Europe défend les droits fondamentaux des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres au nom du principe d’égalité et de non-discrimination, élément clé de la protection des droits de l’homme et des droits des minorités.

·         Le Comité des Ministres, l'Assemblée parlementaire et le Congrès des Pouvoirs locaux et régionaux ont formulé ces dernières années plusieurs recommandations et résolutions afin d'appeler les gouvernements et les autorités locales à prendre les mesures qui s'imposent pour lutter contre l'incitation à l’homophobie. « Bien que l’homosexualité ait été dépénalisée dans toute l’Europe, les préjugés restent », a déclaré Thorbjørn Jagland, Secrétaire général du Conseil de l’Europe, à l’occasion de la journée mondiale annuelle de lutte contre l’homophobie, le 17 mai 2010.

·         Dans cet esprit, le Comité des ministres du Conseil de l’Europe a adopté le 31 mars 2010 une recommandation à destination des États membres "visant à combattre la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre". Ce texte demande aux Etats d'examiner toute situation de discrimination à l'égard des personnes LGBT, d'adopter des mesures spécifiques pour lutter contre ces discriminations, de veiller au respect de ces personnes, de promouvoir la tolérance à leur égard et de s'assurer que les victimes de telles discriminations bénéficient de recours juridiques. Premier texte juridique international consacré expressément au problème de l’homophobie, il représente une avancée saluée par la communauté LGBT.

Questions et réponses

Qu’est-ce que l’homophobie ?

Bien que l’homophobie en tant que telle ne fasse pas l’objet d’une définition légale unique, les actes qualifiés d’homophobes sont quant à eux sanctionnés par les législations nationales lorsqu’ils sont générateurs de discrimination ou de violence. L’homophobie englobe ainsi la violence physique et verbale (crimes et/ou discours de haine), les restrictions injustifiées de la liberté d’expression, de réunion et d’association, les violations du droit au respect de la vie privée et familiale, les violations des droits à l’éducation, au travail et à la santé, ainsi que la stigmatisation récurrente. (Résolution 1728 adoptée en 2010 par l’APCE).

Quelles sont les situations respectives au sein des Etats membres du Conseil sur cette question ?

ILGA-Europe, ONG qui regroupe des associations de défense des droits des LGBT présentes dans les 47 Etats membres du Conseil, a mis en place un classement pays par pays, destiné à évaluer les législations et pratiques nationales relatives aux personnes LGBT au regard des normes de protection des droits de l’homme.

Sur une échelle de 1 à 10, la Suède (10), la Belgique (9) ou encore les Pays-Bas (9) font figure d’exemple, alors que l’Ukraine (-2), la Russie (-2), la Turquie (-1) et la Moldova (-1) ont un indice négatif.

Pour plus d’informations, la carte détaillée est consultable ici.

Quels sont les principaux instruments du Conseil de l’Europe en matière de lutte contre l’homophobie ?

Le principe d’égalité et de non-discrimination est un élément fondamental de la protection des droits de l’homme et des droits des minorités, garanti par la Convention européenne des Droits de l'Homme à l’article 14, et renforcé par le Protocole n°12 à cette Convention qui interdit de manière générale toute forme de discrimination par une autorité publique et sous quelque motif que ce soit.

En 1997, le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe a adopté une Recommandation sur le discours de haine selon laquelle ce terme « doit être compris comme couvrant toutes formes d’expression qui propagent, incitent à, promeuvent ou justifient la haine raciale, la xénophobie, l’antisémitisme ou d’autres formes de haine fondées sur l’intolérance, y compris l’intolérance qui s’exprime sous forme de nationalisme agressif et d’ethnocentrisme, de discrimination et d’hostilité à l’encontre des minorités, des immigrés et des personnes issues de l’immigration ».

Le discours homophobe constitue également une catégorie de discours de haine.

Considérant que le sport est un facteur clé de l’intégration sociale, que la participation au sport doit être ouverte à tous selon les termes de la Charte européenne du sport, et tenant compte des plaintes exprimées par les gays et les lesbiennes souvent exclus des activités sportives, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a adopté le 25 novembre 2003 une recommandation (n°1635) relative à la situation des lesbiennes et des gays dans le sport, qui invite les Etats membres à lancer des campagnes actives contre l’homophobie dans le sport.

En 2007, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux a adopté une résolution destinée à garantir la liberté d’expression et d’assemblée pour les lesbiennes, gays, bisexuels et transsexuels. Au nom des articles 10 (liberté de réunion) et 14 (non discrimination) de la CEDH, le Congrès a appelé les autorités locales dans les Etats membres du Conseil à prendre toutes les mesures qui s’imposent pour garantir que les citoyens LGBT jouissent pleinement, dans l’ensemble des Etats membres du Conseil de l’Europe, de leurs droits à la liberté de réunion et d’expression.

En octobre 2007, le Centre international pour la protection juridique des droits de l’homme (INTERIGHTS) a introduit une réclamation collective contre la Croatie au motif que les contenus des programmes scolaires nationaux remettraient en cause le droit à l’éducation sexuelle à l’école sans discrimination, énoncé dans le préambule de la Charte sociale européenne. Le Comité des Ministres a ensuite appelé de ses vœux la Croatie à se mettre en conformité avec la Charte, dans une résolution CM/ResChS(2009)7.

Le Comité des ministres du Conseil de l’Europe a adopté le 31 mars une recommandation historique à destination des États membres "visant à combattre la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre". Le texte dresse un inventaire des initiatives à prendre dans tous les domaines concernés par l’homophobie (emploi, santé, éducation, droit à la vie etc.) et incite les Etats à traduire cette recommandation dans les actes (voir dans points essentiels).

Le 29 avril 2010, au terme d’un débat portant sur la discrimination sur la base de l’orientation sexuelle et de l’identité de genre, l’APCE a confirmé sa condamnation des diverses formes de discrimination subies par les LGBT et a appelé le Comité des Ministres à assurer le contrôle de la mise en œuvre de sa récente recommandation tout en allant encore plus loin dans la lutte contre l’homophobie. Dans une résolution, elle a également demandé aux Etats européens qu’ils garantissent « la reconnaissance juridique des couples de même sexe lorsque la législation nationale prévoit une telle reconnaissance» et prévoient la possibilité d’une « responsabilité parentale commune » des enfants de chacun des deux partenaires « en tenant compte des intérêts des enfants ». Tout en rappelant que l’éradication de l’homophobie et de la transphobie « nécessite la volonté politique » des Etats membres, le texte adopté demande également que soit garantie dans la législation et la pratique les droits de personnes transgenres à « des documents officiels reflétant l’identité de genre choisie », ainsi qu’un accès au traitement de conversion sexuelle.

Quels sont les arrêts emblématiques pris par la Cour européenne des droits de l’homme en la matière ?

Des actions homophobes survenues dans plusieurs Etats membres ces dernières années ont mis en lumière une violation systématique des droits fondamentaux des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transsexuelles (LGBT). Elles ont également démontré que, dans de nombreux cas, les mêmes autorités qui ont l’obligation formelle de protéger leurs citoyens contre toute discrimination cautionnent cette injustice et même, dans certains cas, la soutiennent activement.

Une journée mondiale de lutte contre l’homophobie est célébrée chaque année, le 17 mai, dans le but de promouvoir des actions de sensibilisation et de prévention pour lutter contre l'homophobie.

La Cour européenne des droits de l’homme, émanation du Conseil de l’Europe, est un acteur clé du combat pour la reconnaissance des droits des personnes LGBT. Elle a rendu plusieurs arrêts décisifs en la matière, concernant notamment le droit de servir dans l’armée, la remise en cause des lois relatives au consentement ou encore le droit de garde.

Karner c. Autriche (24 juillet 2003)

Siegmund Karner dénonçait le fait que les juridictions autrichiennes avaient estimé que son compagnon ne pouvait lui transmettre son droit au bail, la transmission d’un bail ne s’appliquant pas aux couples homosexuels.

Violation de l’article 14 (interdiction de la discrimination) combiné avec l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale)

Norris c. Irlande (26 octobre 1988)

David Norris se plaignait de l’existence, en Irlande, de lois qui érigent en infractions pénales certains agissements homosexuels entre hommes adultes et consentants.

Violation de l’article 8 (droit au respect de la vie privée)

Bączkowski et autres c. Pologne (3 mai 2007)

Les requérants sont la Fondation pour l’égalité (Fundacja Równości) et cinq de ses membres qui appartiennent également à des organisations non gouvernementales militant en faveur des homosexuels. Ils dénonçaient notamment le refus du maire de Varsovie de les autoriser à défiler dans les rues de la ville dans le cadre d’une campagne baptisée « Les journées de l’égalité ».

Violation de l’article 11 (liberté de réunion et d’association)

Violation de l’article 13 (droit à un recours effectif)

Violation de l’article 14 (interdiction de la discrimination)

EB c. France (22 janvier 2008)

La requête portait sur le refus des autorités françaises de faire droit à la demande d’agrément pour adopter de la requérante en raison, selon elle, de son orientation sexuelle.

violation de l’article 14 (interdiction de la discrimination) combiné avec l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale)

Smith et Grady c. Royaume-Uni (27 septembre 1999)

Les requérants allèguent que les investigations menées sur leur homosexualité et leur révocation subséquente de la Royal Air Force motivée uniquement par celle-ci, en application de la politique d’interdiction absolue des homosexuels dans l’armée britannique suivie par le ministère de la Défense, avait emporté violation de leur droit au respect de leur vie privée.

Violation de l’article 8

Violation de l’article 13

Salgueiro da Silva Mouta c. Portugal (21 mars 2000)

Le requérant reprochait à la cour d’appel de Lisbonne d’avoir attribué à son ex-épouse, plutôt qu’à lui-même, l’autorité parentale sur leur fille M., se fondant exclusivement sur son orientation sexuelle.

violation de l’article 8 de la Convention combiné avec l’article 14

L. et V. c. Autriche (9 janvier 2003)

Le requérant se plaignait du maintien en vigueur de l’article 209 du code pénal, qui érige en infraction les actes homosexuels entre des hommes adultes et des adolescents consentants âgés de 14 à 18 ans, et de sa condamnation en vertu de cette disposition. Il alléguait que son droit au respect de la vie privée avait été violé et que la disposition contestée était discriminatoire car les relations hétérosexuelles ou lesbiennes entre des adultes et des adolescents situés dans la même tranche d’âge n’étaient pas punissables.

La Cour a conclu à la violation de l’article 14 combiné avec l’article 8 au motif que le Gouvernement n’a pas fourni de raisons convaincantes et solides pour justifier le maintien en vigueur de l’article 209 du code pénal et, par voie de conséquence, la condamnation des requérants.

Kozak c. Pologne (20 mars 2010) 

Violation de la Convention en raison du refus de reconnaître à un homosexuel le droit à la transmission d’un bail après le décès de son compagnon.

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