Strasbourg, 2 septembre 2010                                                            CCPE-GT(2010)8

GROUPE DE TRAVAIL DU
CONSEIL CONSULTATIF DE PROCUREURS EUROPEENS

(CCPE-GT)

Rapport de la 7ème réunion

Strasbourg, 23 – 24 juin 2010

 

Document du Secrétariat, préparé par la

Direction générale des droits de l'homme et des affaires juridiques


I.    Introduction

1.        Le Groupe de travail du Conseil consultatif de procureurs européens (CCPE-GT) a tenu sa 7ème réunion à Strasbourg les 23 et 24 juin 2010. La réunion était présidée par M. Olivier de BAYNAST (France).

2.        L'ordre du jour et la liste des participants figurent respectivement aux Annexes I et II.

II.   Préparation de l’Avis n°5 sur les principes d’action publique en matière de justice des mineurs

 

3.             Le CCPE-GT avait, lors de sa précédente réunion (Strasbourg, 24 – 26 février 2010), préparé une structure détaillée (Voir rapport de sa 6ème réunion, document CCPE-GT(2010)2), désigné un Groupe de rédaction composé de A. Boskovic (Monténégro), A. Giraldi (Danemark), P. Polt (Hongrie), A. Tasyurt et S. Kaymaz (Turquie), C. Visart de Bocarme (Belgique), J. Zezulova (République tchèque), A. Zvyagintsev/V. Zymin (Fédération de Russie) et chargé H. Range (Allemagne) de coordonner les travaux de rédaction et d’établir un avant-projet d’Avis.

4.             Sur la base de cet avant-projet, le CCPE-GT convient de préparer, comme pour l’avis n°4 sur les relations juges/procureurs, un Avis bref, contenant des principaux généraux, qui sera accompagné d’un rapport explicatif destiné à expliciter les principes contenus dans l’Avis. L’avis, ainsi que son rapport explicatif, aura la structure suivante :

1) Introduction

2) Les particularités de la justice des mineurs

3) Les mineurs avant le procès

4) Les mineurs pendant le procès

5) Exécution des décisions concernant le mineur/Suivi du mineur

5.             Il rappelle que des Avis brefs permettent une meilleure visibilité de ses travaux et de se focaliser sur le rôle du procureur dans la justice des mineurs et de ne pas élargir le champ d’application de l’Avis à la justice des mineurs en général, déjà largement traitée dans d’autres instruments notamment du Conseil de l’Europe. L’Avis ne devrait pas excéder deux pages.

 

6.             Le Groupe de travail décide d’utiliser dans l’ensemble du document le terme «mineur» en français et «juvenile» en anglais, ainsi que d’utiliser les définitions pertinentes des Recommandations Rec(2003)20 concernant les nouveaux modes de traitement de la délinquance juvénile et le rôle de la justice des mineurs; Rec(2006)2 sur les Règles pénitentiaires européennes et Rec(2008)11 sur les Règles européennes pour les délinquants mineurs faisant l’objet de sanctions ou de mesures.

7.             Le Groupe de travail rédige le projet d’Avis qui figure à l’Annexe III du présent document. Il prépare également un projet de rapport explicatif contenant les contributions des membres du Groupe de rédaction (Document CCPE-GT(2010)7). Il charge H. Range et le Secrétariat de finaliser le rapport explicatif à la lumière des principes de l’Avis, de l’envoyer fin août aux membres du CCPE-GT pour commentaires avant envoi début octobre à l’ensemble des membres du CCPE.

III.  Préparation de l’Avis du CCPE pour 2011.

8.             Le Groupe de travail procède à un échange de vues sur le thème de l’Avis prévu en 2011, à savoir les relations entre les procureurs et l’administration pénitentiaire. Il note l’importance de délimiter le sujet aux relations entre les procureurs et les autorités pénitentiaires et de ne considérer dans l’Avis la prison que comme lieu de détention. Il convient également de tenir compte du fait que dans certains Etats membres, les procureurs n’ont pas de compétence dans le domaine des prisons. La Recommandation Rec(2006)2 sur les règles pénitentiaires européennes devra également être dûment prise en compte lors des travaux préparatoires de l’Avis. Par ailleurs, le CCPE-GT exprime le souhait de travailler étroitement en collaboration avec le Service du Conseil de l’Europe compétent pour l’organisation des Conférences des directeurs d’administration pénitentiaire (CDAP).

9.             Sous réserve de l’adoption du mandat du CCPE pour 2011 par le Comité des Ministres, le Groupe de travail charge P. Polt de rédiger un questionnaire sur les procureurs et l’administration pénitentiaire dont les réponses serviront de base à l’élaboration d’un projet d’Avis sur ce thème. Ce questionnaire devrait être examiné en vue de son adoption par les membres du CCPE lors de la prochaine réunion plénière.

IV. Divers

10.          Le Secrétariat rappelle que la 5ème réunion plénière du CCPE se tiendra à Erevan (Arménie) du 19 au 21 octobre 2010 à l’invitation du Procureur général d’Arménie.


Annexe I - ORDRE DU JOUR

1.    Ouverture de la réunion

2.    Adoption de l’ordre du jour

3.    Communication du Président, des membres du Bureau et du Secrétariat

4.    Préparation de l’Avis n°5 sur les principes d’action publique en matière de justice des mineurs

5.    Discussion du programmede travail général pour 2010

6.     Divers
Annexe II - LISTE DES PARTICIPANTS

MEMBERS CCPE-GT / MEMBRES CCPE-GT

BELGIUM / BELGIQUE

M. Cedric VISART de BOCARME, Procureur Général de Liège, LIEGE

CZECH REPUBLIC / REPUBLIQUE TCHEQUE

Ms Jana ZEZULOVA, Public Prosecutor, Supreme Public Prosecutor’s Office, Analytic and Legislative Department, BRNO

DENMARK / DANEMARK

Ms Alessandra GIRALDI, Deputy Chief Prosecutor, COPENHAGEN

GERMANY / ALLEMAGNE

Mr Harald RANGE, Generalstaatsanwalt, Generalstaatsanwaltschaft, CELLE,

Hungary / Hongrie

Mr Peter POLT, Chief Prosecutor, Head of Criminal Trial Cases, Office of the Prosecutor General, BUDAPEST

MONTENEGRO

Mr Veselin VUCKOVIC, Deputy Supreme State Prosecutor, Supreme State Prosecutor’s Office, Podgorica

Ms Ana BOSKOVIC, Assistant for International Cooperation, Supreme State Prosecutor's Office, Podgorica

Russian Federation / Fédération de Russie

Mr Alexander Grigorievich ZVYAGINTSEV, Deputy Prosecutor General, Office of the Prosecutor General, MOSCOW

Mr Vladimir ZIMIN, First Deputy Chief, Prosecutor General’s Office, the General Department of International Legal Co-operation, MOSCOW

Ms. N.V. Ruzhitskaya interpreter

                                               

Spain / Espagne

Mr Antonio VERCHER NOGUERA, Deputy Attorney General, Fiscalia General del Estado, MADRID

TURKEY / TURQUIE

Mr Ahmet TASYURT, Public Prosecutor, Court of Cassation, GANKAYA / ANKARA

MEMBERS CCPE-BU / MEMBRES CCPE-BU

FINLAND / FINLANDE

Ms Raija TOIVIAINEN, State Prosecutor, Head of the International Unit, HELSINKI

FRANCE

(Chair/Président CCPE)

M. Olivier de BAYNAST, Procureur Général près de la Cour d’Appel d’Amiens, AMIENS

Italy / Italie

M. Antonio MURA, Deputy Prosecutor General of the Supreme Court, ROMA

Portugal

(Vice-Chair/Vice-Président CCPE)

M. João Manuel DA SILVA MIGUEL, Eurojust, The Hague

OTHER/AUTRE

Ecole Nationale de la Magistrature

Mme Marion METELLUS

Mme Perrine LANNELONGUE

Mme Sophie DURBECQ

COUNCIL OF EUROPE’S SECRETARIAT /

SECRETARIAT DU CONSEIL DE L’EUROPE

Directorate General of Human Rights and Legal Affairs/

Direction Général des Droits de l’Homme et des Affaires Juridiques

E-mail : [email protected]

Fax : +33 (0) 88 41 37 43

Mme Muriel DECOT, Secretary of the CCJE, Secrétaire du CCJE

Tél: +33 (0)3 90 21 44 55, E-mail : [email protected]

Mme Christel SCHURRER, Co-Secretary of the CCJE, Co-Secrétaire du CCJE

Tél : + 33 (0)9 21 56 12, E-mail : [email protected]

Mme Emily WALKER, Assistant / Assistante,

Tel. +33 (0)3 90 21 48 39, E-mail: [email protected]

INTERPRETERS / INTERPRÈTES

Mme Rebecca BOWEN-YOBE

M. Didier JUNGLING


Annexe III

Projet d’Avis N° 5 du CCPE sur

« Le rôle du ministère public dans la justice des mineurs »

préparé par le CCPE-GT lors de sa 7ème réunion

Introduction

1.    Les procureurs sont des autorités chargées de veiller, au nom de la société et dans l'intérêt général, à l'application de la loi lorsqu’elle est pénalement sanctionnée. Pour se faire, ils tiennent compte d’une part, des droits des individus et, d’autre part, de la nécessaire efficacité du système de justice pénale, conformément à la Recommandation Rec(2000)19 du Comité des Ministres aux Etats membres sur le rôle du ministère public dans le système de justice pénale.

2.    Cet avis vise à s’assurer que dans toutes les procédures concernant les mineurs dans lesquelles les procureurs sont impliqués, les droits fondamentaux sont appliqués en tenant compte du niveau de maturité, de vulnérabilité et de capacité mentale de ce mineur qu’il soit délinquant, victime ou témoin. Ces principes s’appliquent avant le procès, pendant le procès, lors de l’exécution de la décision et également lors du suivi du mineur à l’issue de la procédure.

3.    Dans les affaires impliquant des mineurs, les procureurs devraient accorder une attention particulière à la préservation d’un équilibre entre, d’une part l’intérêt public et les objectifs de la justice pénale, et d’autre part les besoins spécifiques et la vulnérabilité des mineurs.

4.    Dans les Etats où les procureurs ont des compétences en dehors du domaine pénal (en particulier en matière de droit de la famille et de droit de garde), ils devraient toujours  promouvoir les droits et libertés fondamentaux et en particulier ceux concernant la protection des mineurs, tel qu’explicités dans cet avis.  

Définitions/Champ d’application

5.    Le rôle des procureurs varie considérablement d’un pays à un autre; le but de cet avis est d’établir des lignes directrices visant à guider l’action de tous les procureurs impliqués dans la justice des mineurs. Les lignes directrices suivantes s’appliquent dans le cadre des compétences reconnues aux procureurs et conformément aux lois nationales en vigueur.

6.    “Mineur”, toute personne de moins de 18 ans.

7.    "Délinquant mineur”, toute personne de moins de 18 ans, suspectée d’avoir commis ou ayant commis une infraction. 

8.    “Infraction”, tout acte ou omission qui constitue une violation de la loi  et dont connait une juridiction pénale ou toute autre autorité judiciaire ou administrative. 

9.    Si les Etats membres le souhaitent, les lignes directrices du présent avis peuvent également être appliquées aux jeunes majeurs.

Particularités de la justice des mineurs

10. La justice des mineurs, en raison de la fragilité de ceux qui en font l’objet, doit bénéficier d’une attention particulière de la part de tous les acteurs sociaux ou judiciaires. Quel que soit le système pénal en vigueur, le procureur devrait prendre en compte l’état de minorité et mettre tout en œuvre pour le respect et la promotion de l’application des dispositions légales relatives à la procédure et aux sanctions, et accorder une attention particulière à l’exercice des droits de la défense. Le mineur est, en effet, un justiciable particulier.

11. Les sanctions devraient tenir compte de l’éducation, de l’histoire et de la personnalité des mineurs concernés et ne pas seulement sanctionner une infraction pénale ou un comportement. Les mesures visant à limiter la liberté des mineurs devraient être exceptionnelles, précisées par la loi et limitées aux strictes nécessités de protection de la société.

12. Le procureur devrait s’assurer que tout contact du mineur, qu’il soit délinquant, victime ou témoin, avec le système judiciaire devrait faire l’objet de précautions particulières visant à un accueil personnalisé et lui permettant de recevoir l’information nécessaire, par des moyens que son âge lui permet de comprendre, sur le déroulement de la procédure, le rôle des acteurs judiciaires et les mesures dont il est susceptible de faire l’objet. 

13. Les procureurs devraient disposer de tous les moyens utiles pour l’exercice de leurs compétences à l’égard des mineurs ou que ceux-ci soient disponibles pour les services compétents qui interviennent à l’égard des mineurs. Ils doivent en particulier bénéficier d’un système de recrutement et des formations appropriées ainsi que de la mise à disposition du personnel, du matériel et des services spécialisés indispensables.

14. Le ministère public devrait disposer d’unités ou bureaux spécialisés pour les mineurs délinquants. 

15. Lors des poursuites ou procédures pénales impliquant des mineurs, les procureurs devraient porter une attention particulière aux délais et s’assurer que de telles affaires sont traitées en priorité et sans retard injustifié.

16. L’intérêt de la société exige que les médias reçoivent l’information nécessaire à destination du public sur le fonctionnement du système judiciaire[1]. Néanmoins, l’exposition médiatique des mineurs impliqués dans des poursuites ou procédures pénales peut leur être particulièrement préjudiciable. Les procureurs devraient donc être particulièrement sensibilisés sur leur responsabilité à ne pas révéler une information susceptible de violer les droits des mineurs impliqués ou d’accentuer la victimisation.

17. L’échange d’expériences entre les procureurs ainsi que la coopération internationale au sujet de la justice des mineurs est fortement recommandée.  

Les actions préventives

18. Les procureurs sont convaincus de la nécessité de mettre en place des mesures préventives à l’égard des mineurs qui, en raison de leurs conditions de fragilité, sont susceptibles de commettre des infractions. 

Les mineurs avant le procès

19. Afin de mieux connaître la situation du mineur impliqué dans une procédure, le ministère public devrait jouer un rôle clef dans la coordination et la coopération des divers acteurs de la phase de poursuite pénale (par exemple la police, les services de probation et les services sociaux).

20. Les procureurs devraient au besoin faire appel aux conseils des services sociaux ou des services spécialisés de protection de l’enfance avant de décider de poursuivre ou non et avant de décider quelle santion proposer au tribunal. Ils devraient également être sensibilisés et recourir le cas échéant à des moyens techniques et des experts.

21. Gardant à l’esprit l’éventuel impact négatif des procédures pénales sur le développement futur des mineurs, les procureurs devraient, le plus souvent possible, envisager des alternatives aux poursuites des mineurs délinquants, dès qu’elles peuvent constituer une réponse judiciaire appropriée à l’infraction tout en tenant compte des intérêts des victimes et de l’intérêt général et en étant cohérent avec les buts de justice pénale[2].

22. Les procureurs devraient tout particulièrement vérifier que les buts de la détention préventive ne peuvent être atteints par des mesures moins intrusives et s’assurer que la détention préventive des mineurs s’effectue dans des conditions minimisant ses préjudices éventuels. Selon les normes internationales, la détention préventive des mineurs devrait être uniquement utilisée comme une mesure de dernier ressort et pour une durée la plus courte possible.

23.  Les procureurs en charge des mineurs devraient inspecter fréquemment les établissements gérés par la police dans lesquels la détention des mineurs suspects doit être provisoire, exceptionnelle et limitée à une très courte période.

24. Des lignes directrices sur les mesures appropriées sur les différents types d’infractions commises par les mineurs pourraient être utiles pour assurer l’égalité devant la loi.

Les mineurs pendant le procès

25.  L’importance d’assurer le bien être et les intérêts des mineurs les plus vulnérables pendant le procès devrait être une valeur partagée par tous les procureurs. Les procureurs devraient éviter que la procédure pénale nuise aux délinquants, victimes et aux témoins.

26. Une approche protectrice des mineurs impliqués dans les procédures pénales peut contribuer à ce que ces procédures n’aggravent pas le traumatisme subi par un mineur victime.

27. Le procureur devrait aussi veiller à ce que le mineur puisse connaître les charges retenues contre lui, exercer pleinement sa défense et bénéficier de l’assistance d’un avocat, même gratuitement, dans toutes les procédures qui le concernent. Le mineur devrait aussi pouvoir s’exprimer librement devant l’instance judiciaire compétente.

 

Exécution/Suivi du mineur

28. Les procureurs devraient veiller à ce que des mesures d’éducation et sociales soient utilisées le plus largement possible, telles que la réparation, les instructions, les interdictions, le contrôle par les services sociaux, le traitement, le placement dans des établissements spécialisés pour mineurs, la médiation, ainsi que la mise à l’épreuve, tout en tenant compte de l’intérêt de la victime, de l’intérêt général ainsi que des objectifs de la justice pénale.

29. Les procureurs en charge des mineurs devraient contrôler la légalité de la mise en œuvre de toutes les sanctions ainsi que le placement des jeunes délinquants en établissements spécialisés. Les procureurs devraient fréquemment inspecter les établissements pénitentiaires et spécialisés pour les jeunes délinquants.

30. Les procureurs devraient veiller à ce que le mineur qui a commis une infraction et qui a fait l’objet d’une mesure ou d’une sanction judiciaire, puisse faire l’objet d’un suivi et d’une assistance afin d’éviter au maximum les risques de récidive.



[1] Voir la Déclaration de Bordeaux.

[2] Avis n° 2 du CCPE sur « les mesures alternatives aux pousuites”.