Strasbourg, le 26 avril 2004                                                                                                                

P-PG/ND (2004) 4

L’évolution des modes de consommation et de la prise en charge des utilisateurs

SYNTHESE DES RAPPORTS TECHNIQUES

(P-PG/ND (2004) 2 et P-PG/ND (2004) 3)

(Document élaboré par le Secrétariat)


Les problèmes associés au changement et à l'apparition de nouveaux modes de consommation de drogues, y compris les effets et l'impact de leur utilisation occasionnelle ou fréquente, doivent être abordés dans le but de proposer des mesures destinées à minimiser les conséquences défavorables et pour l'individu et pour la santé publique, ainsi qu'à augmenter la qualité et l'efficacité de la prise en charge.

Dans ce cadre, les experts du GP définissent les "nouvelles drogues" comme celles qui présentent actuellement des caractéristiques changeantes ou émergentes, soit par le type de drogue, soit par le mode de leur consommation, y compris la poly-consommation; leurs usagers sont les personnes utilisant ces produits, aussi bien de façon occasionnelle que régulière; enfin, la prise en charge consiste en la réponse des systèmes sociaux et sanitaires aux besoins et aux demandes de traitement, d'information, de prévention secondaire et d'autres mesures de réduction des risques.

Deux enquêtes ont été lancées pour mieux connaître la dimension du problème en Europe. Leurs résultats sont présentés dans deux documents :

i.          Rapport de synthèse des réponses au questionnaire sur les politiques et les pratiques actuelles menées face aux drogues émergentes ainsi qu'aux nouveaux modes de consommation;

ii.         Rapport de synthèse des réponses au questionnaire sur les données nationales concernant ecstasy, cocaïne et amphétamines.

Cette synthèse essaie de montrer les conclusions les plus pertinentes obtenues à partir des enquêtes susmentionnées.

Tous les pays font état d’une augmentation du nombre global des patients sous traitement pour toxicomanie. Des drogues classiques comme l’alcool, l’héroïne et d'autres opiacés, le LSD et les drogues dites "naturelles" (comme les champignons hallucinogènes, les cactus, le datura, le khat, la salvia) continuent à jouer un rôle important dans les nouveaux modes de consommation. Dans un grand nombre de pays, l'héroïne est suivie par le cannabis en ce qui concerne le nombre d’usagers admis en traitement.

Le cannabis demeure la drogue la plus fréquemment consommée. Cette consommation est en augmentation dans plusieurs pays. Les taux de consommation sont élevés chez les jeunes adultes, en particulier de sexe masculin. Souvent le cannabis est consommé en association avec d’autres substances dans le cadre de la poly-consommation.

La consommation de produits de synthèse (ecstasy, amphétamines) et de  cocaïne semble avant tout être liée aux utilisateurs festifs et dans une moindre mesure aux toxicomanes –usagers réguliers. La consommation de ces drogues a donc lieu souvent dans le cadre de soirées et moins fréquemment dans des lieux privés, où ces substances sont utilisées par des toxicomanes.

L’ecstasy est consommée par voie orale par les utilisateurs festifs et les toxicomanes, alors que les amphétamines sont prises par voie orale ou sniffées par les premiers et injectées par les derniers. Enfin, la cocaïne est sniffée par les utilisateurs festifs et fumée ou injectée par les toxicomanes.

Les nouvelles drogues qui posent le plus de problèmes en raison de leur consommation sont la kétamine, le GHB, des drogues de synthèse telles que benzylpipérazine, 2-CB ou PCP, et encore des solvants et des gaz (protoxyde d’azote, butane).

Il y a aussi le phénomène des produits pharmaceutiques (buprénorphine, méthadone, codéine) détournés de leur utilisation en tant que médicaments pour être vendus sur le marché illicite, phénomène qui n’est pas nouveau en soi.

Toutes ces substances peuvent provoquer des effets graves sur le plan physique et les conséquences psychologiques et sociales de leur consommation sont décrites dans la littérature. Il n’y a pas de différences spécifiques d’un pays à l’autre.

En général, les pays identifient les mêmes substances ainsi que les mêmes modes de consommation, mais des données concrètes concernant la dimension du problème sont rarement indiquées. Bien que globalement des informations et des données fiables manquent, certains pays mentionnent des données chiffrées. Il est à prévoir que les problèmes causés par ces nouvelles substances soient en augmentation, donc visibles à plus long terme.

Dans la plupart des pays, tous ces produits sont accessibles, tant du point de vue de leur disponibilité que de leur prix, ce qui explique que le problème de la poly-consommation associant de nouvelles drogues et des drogues classiques soit en augmentation. Les associations de substances les plus fréquentes sont le cannabis avec l'alcool et la cocaïne avec l’alcool, le cannabis ou l’héroïne.

L’évolution et les changements du marché des drogues sont détectés grâce aux services des Etats (police, douanes, santé). Les pays mettent en place des systèmes d’alerte précoce qui permettent, grâce à la collaboration étroite entre ces différents services, d’obtenir les informations appropriées.

Dans le domaine des drogues illicites, la plupart des pays produisent par ailleurs une recherche scientifique ou sociale. Cette recherche peut-être épidémiologique, pharmacologique, clinique (surtout en neurologie), ou bien thérapeutique (notamment associée au traitement de substitution).

Compte tenu du caractère aléatoire des méthodes d’évaluation actuelles, de la qualité des données et de leur disponibilité, il n’est pas toujours possible d’interpréter les tendances de manière fiable. En outre, il n’existe pas de méthodes d’estimation qui puissent être utilisées dans tous les pays de manière comparable, par conséquent les comparaisons doivent être analysées avec prudence.

La majorité des pays indiquent qu’ils sont activement engagés dans le domaine de la prise en charge des usagers de drogues émergentes (information, prévention, réduction des risques, centres de traitement). La consommation de ces drogues est discutée publiquement par l’intermédiaire des médias telles que la presse écrite et la télévision, par des politiques et par des professionnels travaillant avec les toxicomanes.

Un grand nombre des pays suggèrent un traitement ambulatoire pour les usagers de drogues émergentes, associé à une psychothérapie. Cela doit être souvent combiné avec la pharmacothérapie. Des interventions psychosociales ont été également proposées pour fournir, dans l'ensemble, la thérapie la plus appropriée pour ces usagers.

Il y a un certain consensus parmi les pays sur le fait que la plupart des cas ne requièrent véritablement pas la mise en place d'un dispositif nouveau pour le traitement, mais un développement supplémentaire des différentes approches d'ores et déjà existantes.