Manuel sur les pouvoirs locaux et la prévention de la criminalité urbaine - CPL (8) 2 Partie II

 

Rapporteur
Jan MANS (Pays-Bas)

 

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PROJET DE MANUEL

Introduction

Le public, tout comme les politiques, s’inquiète de l’ampleur que prend le phénomène de la criminalité, de la délinquance et autres formes de violence dans les villes européennes

Des batailles électorales se jouent sur cette question. Des organisations internationales s’intéressent à la question : la lutte contre la criminalité et le terrorisme est l’une des grandes priorités de la déclaration finale du Deuxième Sommet des chefs d’Etat du Conseil de l'Europe, et elle occupe une place fondamentale dans les priorités du Secrétaire Général pour les années 2001-2005.

Si l’on observe depuis quelque temps des exemples réussis de réduction de la délinquance et de mise en place d’un climat de sécurité et de confiance, le public n’en reste pas moins confronté à un nombre alarmant de cambriolages de maisons, de garages, de locaux commerciaux, et il est victime de multiples comportements contraires au civisme : troubles de voisinage, bruit, graffitis, déchets sur la voie publique, signes visibles de dégradation des liens de voisinage, vandalisme, délits à motivation raciale, violences domestiques, conduites répréhensibles chez les jeunes, troubles dans les centres-villes, délinquance automobile, délits liés à la consommation de drogues ou d’alcool mais aussi actes de violence gratuits.

Par ailleurs, le nombre d’exclus et de sans-logis augmentent, la mendicité se répand dans les grandes artères urbaines ; de nouveaux lieux de délinquance apparaissent, notamment dans les centres commerciaux et les gares.

Ces symptômes d’un malaise social sont surtout visibles dans les villes. En effet, si la ville est traditionnellement le lieu du développement économique et culturel, elle est aussi, inévitablement, le lieu où s’expriment avec acuité les problèmes de société. Et la délinquance en fait partie.

Comment expliquer cet état de fait?

On explique souvent la délinquance par un certain nombre de facteurs : le chômage et la difficulté à se procurer par des voies légales un revenu suffisant pour bénéficier de conditions de vie acceptables, la multiplication des tentations et la diminution de la pression sociale, l’exclusion et la misère, la monotonie et la dégradation du cadre de vie, les mauvaises conditions de logement, les problèmes familiaux, la perte de l’identité ou des repères religieux et moraux, l’absence d’esprit de solidarité dans les quartiers, les effets nocifs de la violence véhiculés par les médias.

D’une façon plus générale, on peut considérer que les modifications structurelles et les mouvements politiques majeurs intervenus en Europe depuis une dizaine d’années ont eu des incidences profondes sur la délinquance et l’insécurité urbaines, débouchant sur de nouvelles formes de criminalité. Les conséquences des afflux de réfugiés, des flux démographiques et des bouleversements économiques dans certains pays, l’absence d’une culture ou d’une éthique politique, le développement du tourisme et la multiplication des communications, tous ces phénomènes ont entraîné une augmentation de la consommation de drogues et des délits liés à la drogue, et une expansion spectaculaire de la criminalité organisée internationale – de plus en plus sophistiquée –, des trafics d’immigrants clandestins, de la fraude économique, du détournement des matières premières, du trafic d’armements et de la concentration des activités criminelles le long des nouvelles frontières.

Un élément particulièrement troublant est l’augmentation de la délinquance liée à l’intolérance, qu’elle vise des cultures étrangères, d’autres races, des préférences sexuelles ou des particularités physiques.

Les taux de signalement de la délinquance a continué par ailleurs à baisser. Le pourcentage des délits signalés à la police est en baisse ; les citoyens ont de moins en moins confiance dans les institutions chargées d’enquêter sur les crimes et de les poursuivre. Les taux de récidive restent élevés, ce qui sème le doute sur l’efficacité ou la pertinence du système actuel de répression.

De plus, les exemples de corruption politique et officielle ne manquent pas, et ils font l’objet d’une large publicité, ce qui ébranle la confiance du public dans les systèmes politiques censés lutter contre la délinquance.

Enfin, la délinquance fait peur, surtout aux personnes âgées et aux femmes. La place que les médias accordent à certaines affaires, notamment concernant les jeunes, la prise de conscience qui en résulte dans le public et l’exploitation politique qui en est parfois faite sont autant de facteurs qui contribuent à développer le sentiment d’insécurité chez les citoyens.

1. LA CLÉ DE LA PAIX CIVILE : LA MENACE À LA DÉMOCRATIE, LE DROIT À LA SÉCURITÉ URBAINE

La criminalité et l’insécurité urbaines sont une question brûlante, une préoccupation quotidienne, un sujet prioritaire de recherche et de débat qui intéresse au premier chef les collectivités locales.

La délinquance touche un pourcentage important de la population, elle a des coûts sociaux et économiques élevés, elle occasionne des pertes, des dommages et des troubles affectifs pour les familles et les victimes, et elle empêche les citoyens de profiter librement du bien-être matériel.

En outre, elle mine la confiance que le public porte au processus démocratique, encourage les mouvements extrémistes, alimente parfois des sentiments anti-européens, menace les droits de l'homme et les institutions démocratiques, provoque une crainte ou une insécurité excessives chez le public ou, pire encore, favorise les envies de représailles ou les affrontements ethniques.

Elle constitue une menace réelle pour la démocratie en s’appuyant sur des pulsions racistes et en appelant à une forme de justice « sommaire » qui ne se soucie guère du respect des libertés ni de la dignité humaines ; elle favorise la création de polices ou de justices parallèles et demande des interventions plus rigoureuses et efficaces de l’Etat pour pallier les insuffisances des collectivités locales.

La délinquance pose également des problèmes de respect de la vie privée, avec des risques de violation de certains droits ; c’est le cas de la surveillance vidéo, reconnue comme moyen légitime de prévention de la délinquance, mais qui n’en est pas moins contestable à certains égards.

La Charte urbaine européenne évoque le droit des citoyens européens à « une ville plus sûre et sans danger, protégée, dans la mesure du possible, contre la criminalité, la délinquance et les agressions ». L’article 29 du Traité d’Amsterdam rappelle le but de l’Union européenne qui est d’offrir aux citoyens un niveau élevé de protection dans un espace de liberté, de sécurité et de justice, en élaborant une action en commun entre les Etats membres dans le domaine de la coopération policière et judiciaire en matière pénale.

Pour faire face à de telles menaces et donner aux citoyens un sentiment de sécurité qui corresponde à une réalité, il est donc important pour les pouvoirs publics et les collectivités territoriales de :

a. reconnaître qu’il n’y a pas de liberté sans sécurité, et que vivre dans un cadre sûr devrait constituer un droit fondamental de l’homme ;

b. veiller à ce que la lutte contre la criminalité devienne une priorité et bénéficie de ressources adéquates ;

c. reconnaître que la prévention de la criminalité n’est pas seulement moins coûteuse que la répression, mais que cette approche est aussi plus respectueuse de la dignité humaine ;

d. encourager un sentiment de citoyenneté parmi la population et rappeler que si les citoyens bénéficient de certains droits, ils doivent aussi en contrepartie respecter l’intégrité et la sérénité d’esprit de leurs concitoyens.

2. LE RÔLE ESSENTIEL DES COLLECTIVITÉS LOCALES DANS LA PRÉVENTION DE LA DÉLINQUANCE

Si l’Etat a une responsabilité claire à assumer en créant un cadre juridique de prévention et de répression de la délinquance, en allouant des ressources financières suffisantes et en donnant l’impulsion politique nécessaire, c’est néanmoins au niveau local que le problème est perçu de la manière la plus aiguë et que se manifeste quotidiennement le sentiment d’insécurité.

Les collectivités locales sont donc les mieux placées pour mener des politiques ou élaborer des approches qui appréhendent de façon globale le problème de la prévention de la délinquance, notamment en développant des peines de substitution à la prison, en mettant en place des politiques de quartier, en luttant contre l’illettrisme, en encourageant l’éducation civique ; pour entreprendre également des recherches et des activités de communication, et coordonner les programmes des différents partenaires.

Par leur proximité, les administrations municipales apparaissent, aux yeux du public, comme les instances les plus accessibles et les mieux informées sur les situations de crise réelles ou potentielles.

Les collectivités locales peuvent également jouer un rôle efficace de conciliation et de médiation, et tenter ainsi d’éviter l’aggravation des tensions, et faire ainsi l’économie d’un recours à la police ou à la justice.

Elles peuvent d’autre part jouer un rôle indirect essentiel en intervenant au niveau des objectifs de certaines politiques sectorielles qui relèvent de leur responsabilité, et de veiller à ce que toutes intègrent une dimension sécuritaire. Ce rôle peut porter sur :

– l’urbanisme, et notamment les transports en commun, l’éclairage public et les mesures de sécurité aux carrefours ;

– la création d’équipements publics, écoles, terrains de jeu, stades, piscines, centres socio-éducatifs ;

– les politiques d’assistance familiale qui se proposent d’aider les parents à mieux assumer leurs responsabilités ;

– la mise en place d’agents de maintenance, de surveillance et de sécurité dans les institutions et organismes publics ;

– la mise en place de services sociaux et éducatifs extrascolaires ;

– la création d’une police municipale.

En conséquence, les Etats sont invités, en coopération étroite avec les collectivités locales, à :

a. accepter que les politiques locales de réduction de la criminalité et de l’insécurité urbaines deviennent des volets fondamentaux des programmes de réduction de la criminalité, et admettre que les problèmes locaux exigent des solutions locales ;

b. renforcer les collectivités locales et la démocratie locale dans le sens défini par la Charte européenne de l’autonomie locale ;

c. renforcer les responsabilités des collectivités locales en matière de prévention de la criminalité, et assortir cette responsabilisation de ressources financières appropriées ;

d. réduire la centralisation et le contrôle de l’Etat afin que les décisions puissent être prises au niveau local, là où les besoins locaux sont les mieux compris et où il est plus facile de trouver des solutions adaptées ;

e. veiller à ce que le budget et les ressources locales soient utilisés à l’intérieur de la collectivité ;

f. encourager le développement d’une capacité de réaction au niveau des quartiers par une éducation à la citoyenneté.

3. PARTENARIAT

La criminalité étant la résultante d’une grande diversité de facteurs, sa prévention fait appel à la responsabilité commune de plusieurs secteurs de la société.

La police et les tribunaux ne peuvent plus être considérés comme les seules réponses possibles aux conflits de la vie quotidienne.

Il convient donc d’encourager la création d’organes multisectoriels plutôt que d’organes spécialisés de lutte contre la criminalité au niveau local.

Ces nouveaux organes peuvent avoir une composition très larges : représentants des pouvoirs publics, politiques, secteurs privé et bénévole, médias, instances éducatives, universités, police, associations locales de résidents, jeunesse et sport, affaires sociales et sanitaires, services de l’emploi, administration pénitentiaire, système judiciaire, conseils de jeunesse, comités d’aide aux étrangers, responsables des transports en commun, organismes de logement social, associations de locataires, secteurs des affaires, associations de médecins et de pharmaciens, etc.

Pour être efficace, de tels partenariats doivent être dotés des ressources budgétaires et opérationnelles nécessaires.

La collaboration entre les différents organismes concernés est un phénomène récent. Certaines institutions – la police, la justice, les administrations locales, les associations bénévoles, les entreprises privées de sécurité et les associations de quartier – n’ont pas l’habitude de travailler ensemble. Elles continuent donc de fonctionner de façon indépendante et en suivant leurs propres règles ou procédures. Tout en étant conscientes de l’importance d’une action commune, elles se heurtent à des résistances visant à sauvegarder l’indépendance de chaque organisation et à éviter toute ingérence d’autrui.

Il est donc parfois nécessaire de désigner des coordonnateurs des politiques locales afin de résoudre ces difficultés et de donner au partenariat une assise plus permanente.

De telles politiques doivent renouveler les approches adoptées jusqu’ici dans le passé ; elles doivent montrer qu’elles peuvent efficacement et fondamentalement renforcer la sécurité et être prolongées à une période raisonnable d’au moins cinq ans, et répondre aux problèmes de la localité concernée.

Les pouvoirs publics et les collectivités locales sont donc invités à :

a. accepter la nécessité de nouveaux instruments politiques pour apporter une réponse plus profonde et plus efficace au problème de la délinquance urbaine ;

b. adopter une approche plus stratégique et holistique, en évitant la sectorisation en matière de lutte contre l’insécurité urbaine ;

c. comprendre que la sécurisation du milieu urbain est un processus complexe qui exige la contribution d’un grand nombre d’acteurs travaillant en partenariat ;

d. intégrer dans les structures de partenariat des systèmes de financement, d’audit et d’évaluation des résultats obtenus ;

e. encourager l’échange positif d’informations entre organismes afin d’utiliser au mieux les maigres ressources disponibles.

4. DIAGNOSTIC ET BILAN

Une approche plus systématique de la réduction de la criminalité suppose un certain nombre d’opérations : étudier les quartiers sensibles, qui bénéficieraient par la suite de ressources spécialement ciblées, identifier les bonnes pratiques et les faire connaître, définir le rôle précis des différents partenaires, fixer des objectifs mesurables qui permettent de suivre les progrès accomplis, et évaluer les résultats obtenus pour avoir des références futures avant de s’engager sur la suite des programmes.

Les informations peuvent être recueillies auprès d’un grand nombre de services publics officiels, de professionnels et d’ONG engagés dans le travail associatif local et s’intéressant aux questions d’insécurité et de délits non signalés ou aux interactions entre les différents groupes de citoyens ou les différentes communautés. Elles peuvent provenir également de recherches sociologiques et psychologiques, par exemple d’enquêtes sur les victimes ou de renseignements réunis par des îlotiers pour permettre à la police d’affiner les mesures à adopter pour les quartiers difficiles.

Il s’ensuit donc que les collectivités locales devraient :

a. élaborer un plan qui définisse la nature et le type de délinquance à combattre, fixe des objectifs, un calendrier et des propositions d’action, et s’appuie sur une étude globale et récente des statistiques de criminalité et des diagnostics que l’on peut porter ;

b. mener une analyse plus approfondie des actions qui donnent de bons résultats, et des raisons de leur succès, avant de recommander de bonnes pratiques ;

c. éviter les approches à courte vue et adopter des actions qui puissent être poursuivies sur le long terme au lieu d’apporter des palliatifs de courte durée dans le cadre d’un mandat électoral par exemple ;

d. élaborer une approche plus proactive, qui anticipe et prévienne les problèmes au lieu d’y réagir après coup ;

e. élaborer et tenir à jour de tels documents dans la transparence, en veillant à établir un lien entre la population locale, les décideurs et les spécialistes.

5. LA PEUR DE LA CRIMINALITÉ

La peur du crime, qu’elle soit réelle ou seulement ressentie, est un vrai motif d’inquiétude pour le public.

Le sentiment d’insécurité, la peur de la délinquance et la crainte d’être soi-même victime d’actes malveillants hante de nombreux citoyens, notamment les personnes âgées ou fragilisées. Ce ne sont pas nécessairement les formes les plus sérieuses de délinquance qui provoquent l’anxiété. Une analyse de la peur du crime doit tenir compte d’éléments de la vie de la collectivité qui, même s’ils ne peuvent être qualifiés de « délits », n’en sont pas moins ressentis par la population comme des atteintes à son bien-être et à sa sécurité.

Cependant, il se trouve aussi que les actes de terrorisme, qu’ils soient le fait d’extrémistes politiques ou racistes ou de différents groupements d’intégristes, contribuent de leur côté à accroître ce sentiment d’insécurité.

La peur du crime nuit à la confiance dont peuvent jouir les autorités locales auprès de la population ; elle a des incidences négatives sur le développement économique et sur l’investissement intérieur, et elle réduit la qualité de la vie dans les villes.

Les médias jouent un rôle très important dans le développement du sentiment d’insécurité. Les informations relatives à la criminalité jouent un rôle majeur dans la communication sociale. En tant que témoins impartiaux, les médias ne peuvent, en principe, être rendus responsables du sentiment d’insécurité. Néanmoins, si les médias ont un rôle fondamental à jouer en diffusant des informations sur la criminalité et la prévention de la délinquance, ils peuvent aussi avoir un impact négatif en dramatisant les choses et en exagérant la situation.

Il est donc important d’inviter les collectivités locales à :

a. prendre les mesures qui s’imposent pour réduire la peur du crime, par exemple développer les actions de proximité et le soutien aux victimes pour redonner confiance aux résidents d’un quartier ;

b. prendre des mesures pour inciter les médias, et en particulier la presse locale, à participer aux efforts entrepris pour améliorer la situation ;

c. donner une large publicité aux programmes, et notamment à ceux qui visent les jeunes, pour leur assurer une grande visibilité ;

d . stimuler la confiance des entreprises locales en les associant à des stratégies de revitalisation et de développement de l’emploi.

6. LES POLITIQUES SOCIALES DANS LES VILLES

De nombreuses villes européennes renferment des quartiers défavorisés, caractérisées par de multiples facteurs : désintégration de la vie familiale, perte de l’identité communautaire, sentiment d’aliénation, absence de participation des locataires dans la gestion des logements, sentiment d’insécurité parmi les habitants, manque d’équipements collectifs (crèches, installations de loisirs, équipements sportifs, etc.), fréquence de l’usage de stupéfiants, fort taux de chômage et manque de respect des différences sociales, raciales et ethniques.

L’érosion des structures familiales remet en question les valeurs et la discipline acceptées par les générations précédentes. La perte d’autorité et de sens des responsabilités des parents contribuent à désorienter les jeunes.

D’autres autorités, notamment l’Eglise, qui fixaient autrefois les limites du comportement individuel, ont cessé de jouer ce rôle, contribuant ainsi à la désorientation morale et civique des jeunes en particulier.

L’environnement social des villes se caractérise aujourd’hui par l’apparition de nouvelles drogues, l’extension de la toxicomanie à de nouvelles catégories de consommateurs (jeunes, sportifs, adeptes de certaines formes de divertissement), le besoin d’argent des usagers de drogue et les méthodes criminelles permettant de se procurer cet argent, les circuits et réseaux de distribution pour blanchir les bénéfices « commerciaux ».

Il est essentiel d’inviter les collectivités locales à :

a. encourager le retour des habitants vers le centre ville, éviter les rues désertes le soir, garantir dans la mesure du possible dans les centres villes un mélange de fonctions et éviter la concentration des minorités, des personnes socialement défavorisées et des délinquants en un seul lieu ;

b. prendre des mesures pour éradiquer les activités criminelles dans certains quartiers de leur municipalité et éviter de former des groupes défavorisés et démunis, en particulier parmi ceux qui ont le sentiment de n’avoir rien à perdre ;

c. concevoir des mesures ciblées pour lutter contre la violence familiale, contre la culture de la violence, contre la discrimination fondée sur la race, la religion, l'origine sociale et le sexe, et faire la promotion de la notion de citoyenneté ;

d. mettre au point et appliquer des programmes contre la toxicomanie et l'alcoolisme, en partenariat avec les services sanitaires et sociaux ; élaborer des programmes d'information destinés en particulier aux jeunes, à l'école et en dehors de l'école ;

e. renforcer la pression sociale par des politiques appropriées visant à mêler dans un même secteur les fonctions résidentielles et commerciales, à créer des structures commerciales adéquates dans les zones d'habitation, à rapprocher les écoles des logements, etc.;

f. valoriser le rôle de l’éducation familiale dans la lutte contre la criminalité en mettant en œuvre et en soutenant des règlements favorables à la famille dans les programmes de logement et les programmes d’éducation et de protection sociale ;

g. améliorer la pratique du sport et l’accès aux équipements sportifs pour tous les habitants, quels que soient leur origine sociale, leur situation économique et leurs revenus, leur âge ou leur appartenance ethnique ;

h. veiller à ce que de tels équipements sportifs s’inscrivent dans la vie du quartier de sorte que la population puisse s’identifier à ces centres sportifs et acquérir un sentiment de propriété, ce qui limite les risques de vandalisme et de délinquance.

7. LES MINORITÉS

L’immigration fait partie de l’histoire de l’Europe.

Ce phénomène a souvent créé des difficultés avec la population locale, difficultés qui augmentent en période de crise économique et d’insécurité financière et sociale. La population locale craint que les étrangers ne viennent rompre l’équilibre social et ne constituent une menace à ses droits en postulant pour des emplois et en exerçant leurs droits au logement et à la santé. On leur impute en outre la plupart des crimes et délits commis.

Ces préoccupations sont souvent exacerbées par des considérations ethniques et raciales, que certains mouvements politiques sont prêts à exploiter.

De nombreux pays sont le théâtre d’un racisme qui s’exprime parfois sous des formes moins violentes. Le sport, plus particulièrement le football, est un terrain privilégié de cette forme de délinquance. Les événements sportifs à la fois locaux et nationaux sont maintenant entachés d’un comportement et d’un langage racistes.

En raison de leur nombre et de leur concentration dans certains secteurs particuliers, l’intégration et l’assimilation des immigrés dans la société urbaine est souvent difficile. Les groupes minoritaires eux-mêmes éprouvent souvent un sentiment très répandu de malaise, une peur de l’avenir et, surtout chez les jeunes, un sentiment d’absence de perspectives.

Les groupes d’immigrés sont incontestablement sur-représentés dans tous les systèmes de justice pénale, bien que cette sur-représentation puisse aussi être attribuée à une tendance de la police à prendre ce groupe pour cible. Quoiqu’il en soit, le pourcentage de ressortissants étrangers dans la population carcérale est en augmentation constante.

Les collectivités locales et la police doivent accepter :

a. de respecter le mode de vie différent des diverses communautés, qui constitue un enrichissement de l’environnement social, et, si besoin est, de prendre des mesures particulières afin de garantir l’expression individuelle de ces communautés ;

b. de veiller à accueillir les réfugiés et à les intégrer à la société, malgré les difficultés que cela présente, avec le soutien des pouvoirs publics ;

c. d’accroître les effectifs des travailleurs sociaux et des agents de probation issus des minorités ;

d. de refléter la composition multiculturelle de la société dans le recrutement des policiers, aussi bien pour des postes dans les services administratifs que pour l’îlotage ;

e. d’encourager les policiers à établir des contacts plus étroits avec les communautés étrangères, en consultation avec les organismes spécialisés dans les questions de racisme et de multiculturalisme ;

f. de donner un rôle politique précis aux groupes de minorités à travers, par exemple, la création de conseils consultatifs, et d’encourager les instances nationales compétentes à ratifier la Convention européenne sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local.

8. LES JEUNES ET LA DÉLINQUANCE

La fréquence de la délinquance juvénile est alarmante, de même que l’âge de plus en plus jeune des délinquants.

Les jeunes qui abandonnent leur scolarité, sont souvent absents à l’école, vivent de graves problèmes familiaux ou passent à travers les mailles du filet des services sociaux sont devenus le symbole des jeunes délinquants en Europe.

Les actes de vandalisme, la dégradation d’équipements publics et des transports publics, les incendies de voitures, actes commis par les jeunes des quartiers défavorisés agissant en bande, sont une nouvelle forme de violence. Les bandes urbaines commettent des vols avec violence dans les centres commerciaux ou intimident les passants avec des couteaux et détériorent les biens publics.

Le week-end, les jeunes sortent généralement en discothèque, prennent la route souvent après avoir consommé de l’alcool ou de la drogue, et conduisent dangereusement.

Ne parlons pas de la violence dans les écoles.

Les grandes organisations criminelles font de plus en plus appel aux jeunes pour accomplir certaines tâches liées à leurs activités.

Plus généralement, des milliers d’enfants dans le monde sont victimes d’abus et de violences sexuelles, qu’ils n’osent pas dénoncer par peur ou en raison de pressions familiales. La prostitution enfantine se multiplie rapidement dans tous les pays.

L’accroissement de la délinquance juvénile est peut-être favorisé par certains facteurs : affaiblissement des structures familiales, poids du chômage et absence de perspectives professionnelles, étalage de biens sans possibilité de se les offrir. Face à la violence montrée sur les écrans de télévision, les jeunes ne font plus clairement la distinction entre ce qui est permis et ce qui ne l’est pas.

Le recours à la délinquance peut aussi être vu, de manière erronée, comme un moyen d’affirmation de soi et de dignité.

Le niveau élevé de pauvreté parmi les jeunes affecte les cellules familiales stables, engendrant des hommes déracinés ou sans attaches familiales, pouvant être séduits par la criminalité. Le départ des membres les plus stables d’une communauté la prive de modèles positifs.

Or, il ne faut pas perdre de vue que les jeunes sont l’avenir de nos collectivités et qu’ils risquent fort d’être eux-mêmes victimes de la criminalité. Les collectivités locales devraient faire tout leur possible pour que les jeunes, en particulier ceux qui sont le plus exposés, ne soient pas perçus uniquement comme des délinquants, mais aussi comme des victimes, et s’efforcer de les intégrer aux processus civiques à tous les niveaux, et pas seulement dans le cadre scolaire.

En particulier, les collectivités locales sont invitées à :

a. accepter le fait que les structures et méthodes traditionnelles utilisées pour lutter contre la délinquance juvénile ne sont plus appropriées. Il convient de tout réétudier – écoles, tribunaux et institutions spécialisées, personnel – afin de remédier à la situation ;

b. reconnaître formellement le rôle clé des jeunes dans les quartiers et chercher activement à promouvoir leur participation et leur coopération ;

c. accorder une attention spéciale aux jeunes, cherchant à faire participer ceux qui sont particulièrement menacés, en veillant à ce qu’ils aient un rôle important à jouer dans la réhabilitation de leurs quartiers ;

d. reconnaître qu’il existe un lien entre la délinquance et le faible niveau d’éducation et prendre des mesures afin d’améliorer les niveaux actuels d’instruction ;

e. établir un véritable dialogue avec les jeunes, en posant les vraies questions ; écouter leurs réponses ; associer les jeunes aux décisions qui les concernent directement, accepter le fait que les jeunes sont une partie de la solution à leurs problèmes et qu’ils doivent être traités comme des partenaires ;

f. octroyer un soutien financier aux initiatives de jeunes, à la mise en place d’instances de discussion locales et régionales et à la création de conseils locaux permanents de jeunes ;

g. encourager l’acquisition de savoir-faire sociaux et professionnels dans le cadre de programmes du type « New Deal » ;

h. associer les parents, la police, les institutions éducatives, les représentants des associations de quartier et les conseillers municipaux à la gestion des établissements scolaires afin d’améliorer les relations avec la population locale, organiser régulièrement des cours sur la lutte contre le vandalisme ; fournir des conseils et un soutien psychologique aux jeunes ainsi que des conseils éducatifs ; prendre des mesures plus strictes pour lutter contre l’échec scolaire.

9. LA VIOLENCE À L’ÉCOLE

La sous-réalisation scolaire représente un coût économique et social énorme pour l’individu et la société. Ce manque d’engagement des enfants et des adolescents est aussi l’un des principaux facteurs de violence à l’intérieur et autour des établissements scolaires. En particulier, il est souvent à l’origine de deux problèmes scolaires graves qui se posent dans toute l’Europe, la toxicomanie et les comportements d’intimidation.

Trop de jeunes, notamment issus des milieux défavorisés, ne vont pas au bout de leurs possibilités au sein du système éducatif. De ce fait, beaucoup d’entre eux quittent l’école avec de graves difficultés en calcul, en lecture et en écriture et ont beaucoup de mal à trouver un emploi.

Cette situation s’explique par plusieurs raisons : accès à des possibilités moins étendues et moins intéressantes que celles qui peuvent être offertes ailleurs, manque de soutien, d’éducation et d’encouragement de la part des parents, faible revenu familial et mauvaises conditions de vie.

Un élément dont l’incidence sur le comportement et les résultats des jeunes est particulièrement importante est le groupe de pairs auquel ils choisissent de s’associer.

Il est établi que les facteurs suivants améliorent les résultats scolaires et réduisent la violence et les intimidations :

– gestion dynamique et expérimentée par le personnel de direction et soutien sans réserve du conseil d’établissement ;

– objectifs clairs et acceptés par tous ;

– personnel enseignant et administratif très compétent et stable ;

– forte implication et soutien énergique des parents ;

– participation active des entreprises locales et des associations de quartier à la vie de l’établissement ;

– encouragement d’un soutien actif et efficace de la part d’autres organismes tels que services de jeunesse, services d’orientation professionnelle, bibliothèques, clubs sportifs, services sociaux.

Les collectivités locales devraient :

a. faire tout leur possible pour que les établissements scolaires qui relèvent de leur compétence soient dotés d’un personnel motivé et hautement qualifié et conservent ce personnel afin d’assurer un environnement stable ;

b. demander aux établissements scolaires d’adopter des politiques et des objectifs définis clairement et en concertation, et notamment des stratégies visant à éviter la toxicomanie et les intimidations ;

c. faire en sorte que les élèves puissent bénéficier d’un soutien scolaire aussi étendu que possible, y compris pendant les horaires scolaires ;

d. encourager le soutien actif d’autres services compétents et faciliter les relations entre les établissements scolaires et les services de jeunesse, les services d’orientation professionnelle, les entreprises, les bibliothèques et les institutions artistiques et sportives ;

e. veiller à ce que les établissements scolaires offrent un service complet de protection sanitaire et sociale aux élèves, notamment à ceux issus de secteurs défavorisés qui peuvent avoir besoin de l’aide des services sanitaires et sociaux pour résoudre leur problème de sous-réalisation scolaire ;

f. encourager les relations au sein de la communauté scolaire et un usage plus diversifié des locaux de l’établissement ; de même, l’utilisation d’un établissement scolaire de quartier comme centre d’apprentissage pour les adultes et lieu de réunion contribue à régénérer et renforcer les liens au sein de la population locale ;

g. encourager les parents et les associations de quartier à apporter leur soutien, car ils peuvent jouer un rôle déterminant dans la lutte contre l’exclusion sociale et l’amélioration des résultats, de la motivation et des attentes des élèves ;

h. lorsqu’un problème particulier (toxicomanie, par exemple) se pose dans un établissement, l’aborder de manière globale en impliquant les parents, le conseil d’établissement, les élèves, les enseignants et la population locale afin de définir une stratégie concertée, coordonnée avec le programme d’enseignement.

10. LES FEMMES, LA VIOLENCE FAMILIALE, LES PERSONNES ÂGÉES ET LES ENFANTS

On observe une prise de conscience croissante du phénomène de la violence à l’encontre des femmes, à la maison et sur leur lieu de travail, notamment par les collectivités locales qui ont à résoudre les problèmes sociaux et de santé découlant de cette violence. Toutefois, les femmes restent toujours très silencieuses à ce sujet et les autorités ne font que trop souvent la sourde oreille.

La violence familiale, tant physique que sexuelle, est étroitement liée au secret, à la honte et à la solitude. Les femmes craignent d’être victimes de représailles et d’autres violences si elles portent plainte ou résistent. Les statistiques officielles ne peuvent pas donner une estimation fiable du problème.

Beaucoup de ces actes de violence criminelle au foyer ne sont pas signalés et l’intervention de la police est souvent assez inefficace.

La violence familiale représente dans certains pays un quart des crimes violents, l’agresseur étant dans la plupart des cas un homme bien connu de la victime. La moitié des femmes victimes de meurtre sont tuées par leur partenaire ou leur ancien partenaire.

Les femmes sont aussi extrêmement sujettes à la peur du crime, que le risque soit réel, anticipé ou potentiel. Le sentiment d’insécurité limite la liberté de mouvement et l’indépendance des femmes.

Les personnes âgées risquent moins d’être victimes d’un crime mais ont un sentiment d’insécurité plus développé.

Elles peuvent être victimes de violences de la part de leur entourage immédiat, sans qu’elles osent le dénoncer pour différentes raisons : peur de représailles, honte d’en parler en public, dépendance financière.

Un autre phénomène alarmant est la violence physique et sexuelle à l’encontre des enfants.

Les collectivités locales sont invitées à prendre les mesures suivantes :

a. adopter, en concertation, une définition de la violence familiale et élaborer en conséquence des politiques spécifiques et des guides de bonne pratique relatifs à cette forme de violence ;

b. mettre en place un mécanisme objectif de suivi et de contrôle des services fondé sur la collecte périodique d’informations auprès des usagers et prêter en particulier attention au point de vue des femmes et des enfants qui utilisent les services ;

c. veiller à ce que les services destinés aux femmes et aux enfants maltraités soient un élément central, et non marginal, des politiques locales ;

d. briser les tabous et le silence qui entourent ces questions et créer un climat de confiance dans lequel les femmes pourront exprimer leurs craintes et affronter leurs agresseurs ;

e. lancer des campagnes pour sensibiliser la population au problème des violences physiques et sexuelles endurées par les femmes, notamment par des affiches ou par le choix d’emplacements moins traditionnels comme les stades de football, les salles de spectacle ou les taxis ;

f. veiller à ce que le droit pénal et civil protège suffisamment les victimes de la violence familiale ;

g. améliorer les transports urbains, par exemple en multipliant les services de taxi de nuit ;

h. aider les personnes âgées à rester actives, car les personnes qui ont toujours quelque chose à apporter à la communauté éprouvent moins souvent un sentiment d’insécurité ;

i. faire participer des personnes âgées bénévoles à des activités avec des enfants, comme aller les chercher à l’école ou organiser des activités de loisirs devant les immeubles ;

j. prendre des mesures, en coopération avec la police, pour aider à déceler les cas de violences contre les enfants et de violences sexuelles.

11. L’ENVIRONNEMENT BÂTI

La question de la sécurité est bien souvent négligée dans la conception et l’aménagement urbains. Peu de professionnels ont la formation ou l’expérience requises pour concevoir et aménager des villes sûres et sans danger pour la population.

Or, il existe une corrélation directe entre la criminalité et le logement dans ses différentes dimensions : configuration, qualité, entretien et forme de gestion.

Une politique du logement mal réfléchie (démolition et relogement des habitants) peut entraîner la disparition de l’environnement familier, engendrer un climat de tension et d’insécurité, affaiblir la vie collective et se solder par une augmentation de la délinquance.

Les grands ensembles d’habitation anonymes que l’on trouve souvent en banlieue sont des foyers de désespoir, de solitude et de violence.

Il importe que les collectivités locales admettent que l’environnement urbain a une incidence sur la stabilité sociale des villes et qu’une amélioration de sa qualité peut faire baisser la criminalité et réduire les occasions de commettre des délits.

L’urbanisme devrait notamment avoir pour objectif de créer un environnement stimulant dans lequel les individus peuvent s’épanouir, acquérir un sentiment d’appartenance et être fiers de leur lieu de résidence.

En conséquence, les collectivités locales sont encouragées à :

a. s’opposer à ce que l’on continue de construire des ensembles d’habitation monotones et à forte densité de population, entourés, comme on le voit souvent, de terrains vagues sinistres et ouverts à tous vents ;

b. éviter la destruction de logements anciens et familiers ainsi que leur remplacement par des constructions dépourvues d’intérêt social et architectural ;

c. préserver le patrimoine architectural en réhabilitant les constructions anciennes pour les mettre aux normes du confort moderne tout en respectant leur caractère originel ;

d. assurer un environnement agréable de jour comme de nuit et par tous les temps, en prêtant particulièrement attention aux dimensions, aux formes, aux couleurs, à l’aménagement paysager, aux matériaux et à l’entretien des bâtiments et des espaces ;

e. veiller à ce que les espaces libres, les abords des cours d’eau et des canaux, les parcs, les trottoirs et les zones piétonnes soient propices aux activités humaines et incitent à la fréquentation afin de donner à la population un sentiment de contrôle et de sécurité;

f. élaborer un « plan-lumière » pour leur ville afin d’assurer un éclairage adéquat des lieux publics - gares routières et ferroviaires, lieux et recoins isolés – et de donner ainsi un sentiment de sécurité aux citoyens ; veiller à ce qu’un système efficace soit en place pour surveiller les équipements électriques et signaler les incidents en vue de leur entretien et de leur réparation ;

g. maintenir et améliorer la qualité des espaces ouverts publics en évitant le vandalisme et les dégradations ;

h. garantir l’égalité d’usage de l’espace public à toutes les composantes de la population sans distinction d’âge, de sexe, de race ou de handicap, dans le but de favoriser une fréquentation mixte ou équilibrée ;

i. développer la télévision en circuit fermé, en particulier dans le centre des villes, en informant le plus largement possible le public de la présence de caméras et en plaçant celles-ci bien en vue ;

j. concernant le logement, réduire les obstacles à la propriété immobilière et faciliter celle-ci afin d’encourager l’investissement, de favoriser un entretien satisfaisant des logements et de développer un sentiment de responsabilité et d’appartenance ;

k. profiter des possibilités résultant de l’excédent de logements en propriété et de
logements sociaux dans certaines zones pour répondre aux besoins locaux par des formules innovantes ;

l. encourager la collaboration entre la police et les urbanistes et paysagistes professionnels, et veiller à ce que les policiers soient formés et conseillés au sujet de la relation entre la criminalité et l’environnement bâti, par exemple en nommant des agents de liaison spécialistes de l’architecture ;

m. élaborer et diffuser, à l’intention du grand public, des brochures explicatives sur le lien de cause à effet entre environnement et criminalité.

12. LES TRANSPORTS PUBLICS ET LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE

Beaucoup de villes n’ont pas encore réalisé un équilibre harmonieux entre tous les usagers de la rue – transports en commun, piétons, cyclistes et automobilistes.

Bien souvent, les villes sont saturées par les véhicules privés, avec toutes les conséquences que cela entraîne : risques accrus d’accidents, temps de trajet imprévisibles et pollution.

On observe par ailleurs une augmentation préoccupante du nombre d’accidents mortels sur la route, touchant notamment les jeunes.

Or, un système de transports publics de qualité, assurant une desserte fiable et fréquente, peut sensiblement réduire l’usage des véhicules privés, améliorer la qualité de l’environnement et accroître la sécurité, comme en témoigne par exemple le rétablissement d’excellents réseaux de tramways dans certaines villes européennes.

Il est donc important d’inviter les collectivités locales à :

a. mettre en œuvre des stratégies visant à atténuer l’inquiétude du public à l’égard de la criminalité et de la peur de la criminalité associées aux déplacements en autobus, en taxi, en métro, en train, à pied, à vélo ou en voiture ;

b. instaurer un corps de « responsables de la sécurité dans les transports » et d’agents de sécurité et d’information opérant dans les transports en commun ou à proximité de ces derniers, recourir à la télévision en circuit fermé et mettre en place un système d’alerte satisfaisant pour signaler les comportements antisociaux dans les transports publics ;

c. reconnaître la nécessité d’améliorer et de développer l’éducation des enfants concernant les transports en commun et l’importance de les respecter ;

d. tirer parti des réserves d’expérience inexploitées qui existent dans les services compétents en matière de sécurité (police, pompiers et services sociaux) et pourraient être mises à la disposition des instances chargées de l’urbanisme, du logement, de la voirie et des transports ;

e. prendre, en collaboration avec les services de police et les autorités scolaires, des mesures visant à réduire le nombre d’accidents de la route, telles que des sanctions plus lourdes en cas d’infraction, des dispositions pour assurer le respect du code de la route, le développement des programmes éducatifs ainsi que des programmes obligatoires de sensibilisation pour les auteurs d’infractions graves.

13. LA POLICE ET LES COLLECTIVITÉS LOCALES

Ni les forces de police, ni les collectivités locales ne peuvent mener de politiques de prévention de la criminalité sans se concerter et coopérer activement.

Dans certains pays, de nouvelles législations imposent une obligation de partenariat entre les collectivités locales et les forces de police.

Cette coopération peut porter, par exemple, sur les décisions concernant l’îlotage et les horaires des rondes locales et des patrouilles mobiles ou sur l’information des citoyens concernant les moyens de réduire les risques de vol et d’autres infractions.

Il doit y avoir, par conséquent, dans certains pays, de bons arguments pour la création de polices municipales.

Celles-ci sont en effet les mieux placées pour écouter les habitants de la ville et les mieux informées des préoccupations du public. Il leur est également plus facile de faire passer à la population locale des messages relatifs à la criminalité, par exemple lors de campagnes de prévention.

Elles ont une bonne connaissance de la situation locale et sont les mieux en mesure d’établir des relations de confiance avec la population.

Elles peuvent participer à des réunions de quartier avec les représentants de toutes les autres instances compétentes, contribuer à des programmes de prévention concernant les jeunes, les enfants et les femmes.

Elle peuvent jouer un rôle de médiateur, écouter les citoyens, prendre part aux campagnes des diverses autorités locales, garantir la présence d’un policier dans chaque quartier.

En conséquence, il est important d’inviter les collectivités locales à : -

a. supprimer tout obstacle bureaucratique ou administratif excessif entravant la lutte contre la criminalité et sa coordination ;

b. veiller à une bonne coordination et éviter les conflits entre les divers organes intervenant dans la prévention de la criminalité ;

c. reconnaître que les patrouilles de policiers à pied et en uniforme sont perçues par le public comme la méthode policière la plus efficace pour prévenir la criminalité locale et que leur développement est susceptible de favoriser la coopération du public avec la police en vue d’une meilleure prévention de la délinquance ;

d. encourager les forces de police à refléter dans leur composition la diversité de la structure de la population locale;

e. éviter la prolifération de forces de sécurité indépendantes, opérant souvent en dehors de tout contrôle démocratique ;

f. conclure les accords nécessaires avec les instances gouvernementales et les autorités de police compétentes pour étudier la possibilité de créer des polices municipales ;

g. faire en sorte que ces forces de police municipales, une fois créées en vertu d’une législation claire, soient placées sous le contrôle des autorités locales, aient des responsabilités bien définies, soient dotées de ressources financières suffisantes, d’un équipement technique de qualité et d’un personnel qualifié ;

h. trouver une formule de coopération entre les forces de police nationales et municipales, en précisant leurs rôles complémentaires, mais distincts.

14. LA PARTICIPATION DU PUBLIC

La participation du public à la démocratie locale devrait être un processus mutuellement profitable qui responsabilise la population locale tout en permettant aux collectivités locales de répondre à ses besoins et d’améliorer les services fournis. Elle devrait contribuer à accroître la confiance du public et la qualité de vie en faisant régresser la criminalité, le sentiment d’insécurité et les comportements antisociaux.

De fait, la participation des habitants devrait être un élément fondamental de tout programme de développement collectif et social des quartiers, qu’il concerne l’amélioration de l’environnement, l’action en faveur de l’emploi, ou encore l’organisation, la dotation en ressources humaines, l’amélioration et le développement des services publics, en particulier dans le but d’assurer des services efficaces à moindre coût.

Un ensemble de mesures simples mises en œuvre de manière systématique et en faisant participer la population locale à la recherche de solutions s’avère très efficace. Les collectivités locales devraient s’efforcer d’associer le plus possible la population à l’organisation et à la prestation des services.

Il s’ensuit, en particulier, que le public devrait être étroitement associé à la prévention de la criminalité.

Les organisations non gouvernementales spécialisées dans ce domaine constituent de précieuses sources d’expérience pratique, d’information et de contacts.

En conséquence, les collectivités locales sont invitées à : -

a. renforcer la participation du public, par le biais de systèmes de surveillance du voisinage et d’autres mécanismes encourageant les citoyens à se mobiliser pour leurs convictions, à protéger eux-mêmes leur sécurité et leur bien-être, et à prendre conscience de leur devoir civique de lutter contre la discrimination et de prendre activement position contre la criminalité;

b. mettre en œuvre, en collaboration avec les instances chargées du logement, des stratégies visant à créer un espace défendable, rendre les zones résidentielles plus sûres, les nettoyer et les entretenir pour décourager le vandalisme et le désordre, encourager les initiatives locales de gestion des logements en location et la participation directe des locataires à la gestion des résidences ;

c. recueillir régulièrement les points de vue de la population locale au moyen d’enquêtes, de journées portes ouvertes, de réunions de quartier et de questionnaires ciblés afin d’évaluer en permanence le sentiment du public à l’égard de la criminalité et de la peur de la criminalité ;

d. mettre sur pied une stratégie de communication active faisant appel à tout un arsenal de techniques pour informer un public aussi large que possible et en obtenir des informations en retour : dépliants et bulletins, documents de consultation sur des sujets spécifiques, procédures d’examen des plaintes, réunions publiques, réunions avec les responsables politiques locaux, réunions de quartier, enquêtes, panels de citoyens et groupes de partenariat ;

e. veiller à procéder à des consultations au niveau le mieux indiqué eu égard à la question traitée et le plus constructif pour la population locale ; chaque fois que cela est possible, ces consultations devraient tenir compte des communautés naturelles plutôt que de secteurs géographiques délimités artificiellement.

15. L’INDUSTRIE, LE COMMERCE ET LE SECTEUR PRIVÉ

Pour réduire la criminalité et accroître la sécurité, il est indispensable de nouer des partenariats et de développer des initiatives en collaboration avec le secteur privé. Le secteur industriel et commercial est partout vital pour la qualité de vie. Un taux de criminalité élevé est un frein à l’investissement et l’idée que le public se fait du niveau de criminalité a une influence sur l’attractivité d’une région pour les entreprises. Une nette régression des vols de voiture et des cambriolages entraîne un changement d’attitude de la part des assureurs et, de ce fait, une baisse des coûts de fonctionnement des entreprises.

Les partenariats où le secteur privé joue un rôle de premier plan dans les initiatives elles-mêmes peuvent produire des résultats spectaculaires et donner naissance à un environnement commercial et à des centres-ville de plus en plus fréquentés par la population locale. L’utilisation de la télévision en circuit fermé, la protection des parkings et l’amélioration de la sécurité dans les locaux commerciaux sont des exemples de mesures « situationnelles » auxquelles on peut recourir.

Toutefois, il existe beaucoup d’autres formes de partenariat entre le secteur public et le secteur privé. Le premier qui vient à l’esprit est naturellement le cofinancement. Celui-ci peut souvent être renforcé par la mise à disposition de personnel par différents secteurs collaborant à un programme commun. Ces initiatives peuvent viser à réduire les vols dans les magasins, à prévenir les cambriolages et les actes de vandalisme dans les locaux des entreprises, à améliorer la sécurité des centres commerciaux ou à rendre les rues et les parkings plus attrayants.

La coopération avec le secteur privé en vue de réduire la criminalité et les occasions de commettre des infractions comporte un autre aspect important : il s’agit de ce qu’on appelle généralement la « prévention situationnelle ».

Le développement économique et la surabondance de biens de consommation encouragent la criminalité. Plus le nombre de produits augmente, plus les objets d’usage quotidien y sont exposés. La miniaturisation des produits favorise les vols. En général, les améliorations technologiques visent à rendre les biens plus attrayants plutôt que plus difficiles à voler.

Les pays n’ont pas réussi à adopter une politique uniforme de marquage des produits tels que le matériel audio-visuel. La conception des voitures ne prend pas réellement en compte le problème du vol. Dans les bâtiments publics et privés, les règles de sécurité ne sont pas appliquées et l’accès du public n’est pas contrôlé par des moyens électroniques.

Alors que des systèmes d’inspection visant à prévenir les incendies ou d’autres catastrophes existent dans de nombreux pays, il n’en est pas de même à l’égard de l’insécurité engendrée par la criminalité. Les architectes et les constructeurs ne sont pas conscients de la nécessité de prendre en considération les questions de sécurité.

Les collectivités locales sont invitées à :

a. envisager d’établir avec le secteur privé des partenariats visant des objectifs déterminés et d’associer les secteurs industriel, commercial et privé aux processus de consultation ;

b. tirer parti des compétences du personnel du secteur privé dans le cadre de détachements de courte durée, d’échanges professionnels et d’actions menées en multipartenariat dans le domaine local ;

c. encourager les entreprises industrielles et commerciales locales à pratiquer une prévention « situationnelle », c’est-à-dire à prendre des mesures pour réduire les occasions de commettre des infractions et augmenter les chances de les détecter ;

d. veiller à ce que des plans d’urbanisme prévoyant des règles architecturales et des mesures de sécurité soient élaborés ; des normes de sécurité devraient être définies à divers niveaux : ensembles résidentiels (type de parking, garages privés, aires de jeu), quartiers (taille, densité de population, hauteur des immeubles) ou bâtiments (type d’entrée, dispositifs de sécurité).

16. L’ADAPTATION DE LA JUSTICE ET DE L’APPAREIL RÉPRESSIF ET LE SOUTIEN AUX VICTIMES

Le système judiciaire est souvent lourd et mal adapté pour faire face à certaines
situations.

Il n’est pas toujours en mesure de protéger les citoyens de manière satisfaisante. Il est parfois considéré comme insuffisamment dissuasif et ses institutions ne sont pas toujours à l’abri d’incidents et d’allégations de pratiques irrégulières, si bien que le public n’a plus une confiance totale dans les structures politiques et judiciaires chargées de combattre la criminalité.

D’autre part, il n’y a pas grand-chose à attendre d’une amélioration de la productivité de la police et de politiques de prévention ciblées si les procédures judiciaires sont trop longues, les sanctions mal adaptées à la situation des coupables ou des victimes ou les tribunaux inaccessibles.

Les peines d’emprisonnement restent le pilier central de l’appareil répressif, mais elles ne permettent plus de lutter contre l’insécurité qui règne dans nos villes. La justice pénale intervient au cas par cas, n’appliquant que rarement une politique suivie et cohérente. Un appareil répressif qui fonctionne mal peut contribuer tout autant au sentiment d’insécurité des citoyens que la criminalité elle-même.

Bien souvent, la justice pénale a fermé les yeux pendant des années sur les très nombreuses incivilités et infractions mineures.

Il convient également de réfléchir aux méthodes et aux activités des tribunaux. Il faudrait sans aucun doute mettre en place une justice de proximité et des tribunaux de quartier qui pourraient agir rapidement dans les quartiers et les banlieues, en particulier lorsqu’il existe d’autres solutions que les procédures classiques (conciliation, médiation, réparation, travail d’intérêt général).

Les mesures suivantes pourraient être indiquées :

a. décentraliser les systèmes judiciaires en instaurant des centres judiciaires et juridiques locaux regroupant diverses activités : application des peines, services pour les délinquants juvéniles, conseils juridiques, aide aux victimes, réunions entre les auteurs de délits et leurs victimes, etc. Ces centres pourraient être situés dans les quartiers démunis, éloignés de tout tribunal. Ils peuvent être créés en coopération avec les collectivités locales, celles-ci contribuant à leur financement et à leur fonctionnement ;

b. créer, en multipartenariat, des organes chargés de s’occuper des jeunes délinquants d’habitude. L’idée de créer de tels organes dans les quartiers démunis repose sur quatre postulats : les tribunaux n’offrent pas la meilleure réponse ; la majorité des délinquants ont la capacité de changer ; les chances de succès sont plus grandes si tous les services concernés unissent leurs efforts ; il faut faire en sorte de ne pas éloigner les gens de leur communauté ;

c. mettre en place un programme national de contrats pour les jeunes délinquants offrant à ces derniers la possibilité de participer à des activités agréées (emploi ou formation) en échange de l’abandon des poursuites à leur encontre ;

d. promouvoir et récompenser le courage civique, par exemple en garantissant la protection des témoins ;

e. mettre au point des peines de substitution à l’emprisonnement, comme le travail d’intérêt général, et agir en faveur de l’adoption d’une législation facilitant le recours à ces mesures ;

f. faciliter l’accès à l’emploi ou aider les tiers susceptibles de faciliter l’accès à l’emploi des délinquants, et notamment prendre des mesures en vue de leur ouvrir le marché du travail et les dispositifs d’éducation et de formation professionnelle et à les orienter dans ce domaine ;

g. créer des services nationaux de soutien aux victimes chargés d’informer et de conseiller les victimes d’infractions et leurs familles ainsi que de leur apporter une aide psychologique. Leur personnel devrait être composé de représentants de différents secteurs (police, services sociaux, services médicaux et organismes bénévoles).

17. L’INTÉGRITÉ DES FONCTIONNAIRES ET DES RESPONSABLES POLITIQUES

Par suite de nombreux abus de fonction publique commis en vue de gains personnels, les citoyens ont sensiblement perdu confiance dans leurs élus et dans la capacité du système politique à régler de manière satisfaisante le problème de la criminalité.

Les élus locaux exercent leurs fonctions dans le cadre de la loi et conformément au mandat qui leur est confié par les électeurs. Ils sont responsables devant l’ensemble de la population locale, y compris devant les électeurs qui n’ont pas voté pour eux.

Il est fondamental que le respect du mandat confié par les électeurs aille de pair avec le respect des normes éthiques ; un lien de confiance est indispensable pour qu’un élu mène à bien sa mission.

Pourtant, ces dernières années, de nombreux scandales judiciaires ont impliqué des responsables politiques qui se rendus coupables d’infractions dans l’exercice de leurs fonctions et ont profité de leur position pour obtenir des avantages ou des gains personnels, souvent en détournant des fonds publics.

Les responsables locaux doivent absolument :

a. respecter les normes de comportement que les élus sont censés observer dans l’exercice de leurs fonctions ;

b. agir à tout moment conformément à la loi, et poursuivre l’intérêt général et non l’intérêt particulier d’individus dans le but d’obtenir des avantages personnels ;

c. éviter les conflits d’intérêts et s’abstenir de prendre part à toute délibération ou vote ayant pour objet un intérêt personnel direct ou indirect ;

d. s’abstenir d’exercer des fonctions, professions ou charges qui supposent un contrôle sur les missions qui leur incombent en tant qu’élus ;

e. s’abstenir de tout comportement de corruption active ou passive tel que défini par la réglementation pénale nationale ou internationale ;

f. s’abstenir, dans l’exercice de leurs fonctions, de tout détournement de fonds publics ou utilisation de tels fonds à des fins personnelles directes ou indirectes ;

g. s’agissant des relations avec les citoyens, publier et motiver toutes leurs décisions ;

h. veiller à ce que le recrutement du personnel des administrations locales soit fondé sur le mérite, les compétences professionnelles et l’expérience ;

i. répondre de manière sincère et complète aux demandes d’informations relatives à l’exercice de leur fonctions émanant des médias, sans néanmoins divulguer d’informations confidentielles concernant la vie privée d’élus ;

j. s’engager à informer les électeurs au sujet du Code de conduite européen relatif à l’intégrité politique des élus locaux et régionaux élaboré par le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe (CPLRE) du Conseil de l'Europe.

18. LA CRIMINALITÉ TRANSFRONTALIÈRE

On observe une concentration des activités criminelles le long des nouvelles frontières nées, en partie, de la division du territoire européen entre l’espace Schengen et les zones situées hors de cet espace.

Les frontières sont facilement franchies par les activités criminelles, surtout avec l’aide de la technologie moderne, alors qu’elles font toujours obstacle au travail de la police et aux politiques de prévention et de répression.

La frontière est souvent le lieu où se forgent les opinions sur le pays voisin et sur l’intégration européenne en général. Les villes frontalières sont particulièrement menacées par le commerce et les échanges d’articles de contrebande, tels que drogues, armes, voitures et alcool.

Il importe d’inviter les collectivités locales et transfrontalières à :

a. reconnaître que des ressources et des efforts suffisants doivent être consacrés à la lutte contre la criminalité transfrontalière ;

b. promouvoir l’établissement de liens de coopération transfrontaliers entre collectivités locales et régionales en matière de prévention et de répression de la criminalité ;

c. supprimer les obstacles mentaux, juridiques et administratifs empêchant les
collectivités locales, les collectivités régionales et les services de police de s’attaquer efficacement à la criminalité transfrontalière ;

d. promouvoir la conclusion de traités bilatéraux ou multilatéraux permettant aux collectivités locales et régionales et à la police de conjuguer leurs efforts en s’appuyant sur la « Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales » et ainsi de conclure des accords en matière de prévention de la criminalité transfrontalière et/ou de poursuites transfrontalières ;

e. utiliser les organisations transfrontalières de plus en plus nombreuses en Europe et pour la plupart représentées au sein de l’Association des régions frontalières européennes comme vecteurs d’échange d’expériences et d’initiatives ;

f. encourager les organisations internationales à consacrer des fonds aux programmes existants et à de nouveaux programmes d’assistance relatifs à la prévention de la criminalité transfrontalière.

19. LES NOUVEAUX MÉTIERS

La démarche consistant à s’appuyer plus largement sur la population pour prévenir la criminalité conduit les collectivités locales à définir de nouveaux métiers.

Les collectivités locales sont en conséquence encouragées à développer des activités et des fonctions nouvelles. Par exemple :

a. Les « gardiens des espaces publics » sont chargés de surveiller les parkings pour prévenir les comportements susceptibles de menacer la sécurité comme la pratique de la mendicité par des toxicomanes ou les vols de voitures.

b. Les gardiens de résidence accomplissent des travaux d’entretien de nature technique dans les parties communes des bâtiments, surveillent le voisinage immédiat et sont le premier point de contact des résidents en cas de problème.

c. Les médiateurs sociaux locaux peuvent intervenir dans toutes les zones publiques. Leur rôle est de servir de canal de communication aux services publics et de désamorcer les conflits.

d. Les « correspondants de nuit » dans les ensembles de logements publics connaissant une importante activité nocturne surveillent les parties communes des immeubles, se rendent chez les personnes qui demandent leur aide, s’occupent des problèmes d’alcoolisme, de violence familiale, de fugues et de pannes d’ascenseur, en partenariat avec la police, les travailleurs sociaux et les services d’urgence.

e. De jeunes délinquants peuvent être employés par des associations bénévoles pour aider les personnes âgées à porter leurs courses dans les centres commerciaux.

f. Les hôpitaux peuvent engager des agents de sécurité pour faire face au nombre croissant de conflits entre les patients, les visiteurs et le personnel soignant.

20. LA COOPÉRATION EUROPÉENNE ET LES PARTENARIATS INTERNATIONAUX

La prévention de la criminalité nécessite une coopération entre les gouvernements, les services de police et les organismes indépendants.

Elle requiert également une coopération entre les collectivités locales. Celles-ci peuvent en effet contribuer de manière décisive à :

a. encourager les partenariats entre les villes en matière de prévention de la criminalité, notamment avec les villes qui mettent en œuvre des stratégies novatrices efficaces ;

b. faciliter les échanges d’informations, de bonnes pratiques et d’expériences entre les pays, diffuser largement les informations sous une forme aisée à comprendre ;

c. faire en sorte que les citoyens se sentent moins isolés en leur montrant que cette crise touche tout un chacun ;

d. collectivement, en collaboration avec des associations nationales ou internationales, ou dans le cadre d’une organisation intergouvernementale comme le CPLRE, au sein du Conseil de l’Europe :

- encourager les approches intégrées du problème de la criminalité et de la sécurité et promouvoir les expériences qui ont donné de bons résultats ;

- agir pour que les systèmes nationaux de gestion des affaires publiques favorisent le développement de cadres de vie sûrs ;

- élaborer des rapports et organiser une coopération internationale concernant différents aspects de la prévention de la criminalité ;

- inviter les instances internationales à entreprendre des programmes d’action dans ce domaine ;

e. promouvoir la création d’un réseau de centres de documentation afin de faciliter les échanges d’informations sur la prévention de la criminalité, l’assistance aux victimes et d’autres sujets d’intérêt commun entre les pouvoirs publics et les collectivités locales, les universités et les autres instances compétentes.