32e Session du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe

La gestion des flux migratoires s’installe durablement dans l’agenda politique des régions frontalières en Europe

Le débat « Les régions frontalières face aux flux migratoires », organisé le mercredi 29 mars dans l’Hémicycle du Conseil de l’Europe, lors de la 32ème session du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux, a mis en exergue la diversité et la complexité de la situation migratoire en Europe. Les régions frontalières qui sont directement impactées par les politiques nationales et européennes doivent pouvoir bénéficier directement des aides de l’UE. En outre, la question des enfants migrants non accompagnés constitue une véritable urgence.

Quelques exemples : affectée par une crise économique sans précèdent depuis 2009, la Grèce revendique à juste titre, plus d’aide dans le cadre des mécanismes de solidarité européenne. Irena Dourou, membre de la Chambre des régions et Gouverneure de la Région de l’Attique, a mis en cause l’inefficacité du mécanisme de Dublin. Les régions, selon elle, doivent être en mesure de bénéficier directement des aides financières de l’UE pour la gestion du flux migratoire. D’où sa demande que la Chambre des régions s’engage officiellement à défendre cette position auprès de l’UE. Le règlement de Dublin est jugé inopérant par beaucoup de pays qui admettent que la charge pesant sur les régions frontalières est en effet insupportable. L’exemple d’une région hongroise, située sur la route des Balkans, Csongrád County, incite à considérer le problème migratoire au-delà de son aspect purement humanitaire : « Nous devons gérer de manière juste et équilibrée les intérêts de nos concitoyens et ceux des migrants », insiste Anna Magyar (Hongrie, PPE/CCE).

« On doit faire la différence entre ceux qui cherchent à fuir la guerre et le système de passeurs qui fait débarquer en Europe des milliers d’immigrés économiques. » La position de la représentante hongroise Anna Magyar quant à la nécessité « d’éteindre le feu là où il a commencé » est partagée par Alexey Ostrovsky (Russie,GILD), qui a plaidé en faveur d’un changement de la politique extérieure de l’UE en Syrie et en Moyen Orient. Osman Sanli (Turquie, CRE) a, pour sa part, alerté les membres du Congrès quant aux mauvais traitements infligés aux migrants à certaines frontières à l’intérieur de l’Europe et a rappelé que son pays a déjà accueilli 3 millions de migrants.

Dans le contexte très complexe de la crise migratoire, une question a été soulevée de manière urgente au-delà des différences politiques et nationales : le sort des mineurs non accompagnés.  D’après la rapporteuse Lora Pappa, présidente de l’ONG grecque METAdrassi, il s’agit du «groupe le plus vulnérable et exposé aux diverses dépravations. » Les deux dernières années, l’incapacité de l’Etat grec à mobiliser des moyens supplémentaires pour gérer l’arrivée de 80 000 enfants non-accompagnés sur son territoire a généré des situations très pénibles. La fermeture de la frontière entre la Grèce et FYROM a bloqué 2.300 mineurs non accompagnés sur le territoire grec dont seulement 1312 ont été pris en charge, pour l’instant, par des organismes de la société civile.  Malgré l’engagement des municipalités grecques qui gèrent le problème migratoire depuis les années 90 avec peu de moyens, les autorités locales n’ont pas une politique spécifique et adaptée en direction des mineurs. Diverses villes européennes, en capacité d’aider, n’ont pas encore répondu aux appels lancés par la Grèce. Les membres du Congrès ont encouragé les régions à suivre l’exemple positif d’une plateforme civique portugaise qui, malgré les obstacles bureaucratiques, a pu organisé l’accueil de 5 enfants dans des familles portugaises.

Les expériences constructives quant au traitement spécifique des migrants mineurs non accompagnés menées par les régions allemandes frontalières, telles que Baden Wurtemberg et la Bavière, ont également été mises en exergue lors du débat comme des modèles d’initiatives qui pourraient aider les régions grecques à gérer la crise en cours.

L’exemple de l’ONG grecque METAdrasi, qui dispose d’une expertise spécifique pour l’accompagnement des migrants mineurs non accompagnés, représente également un espoir que la situation peut être résolue à l’aide des mécanismes de solidarités au niveau municipal, régional, national et surtout européen.

La nécessité de la mise en place d’un modèle de coopération au niveau européen figure également parmi les conclusions principales du rapport de Carolina Darias San Sebastián, Présidente du Parlement régional des Canaries en Espagne. Elle a insisté sur la nécessité, en premier lieu, de sauver des vies en se référant à « la crise des caïques » traversant l’Atlantique. Après avoir dressé un répertoire détaillé des mesures destinées à prévenir des catastrophes à l’image de celle de Lampedusa, elle a insisté sur la nécessité de coopérer avec les pays d’Afrique pour traiter le problème à la source. La Présidente du Parlement régional des Canaries a conclu que si le XXème siècle fut celui de la révolution technologique, on se rappellera du XXIème siècle comme d’une époque de crise migratoire, crise de l’humanité toute entière qui appelle une réponse solidaire sur la base des valeurs humanistes de l’Europe.