30ème Session du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe– 22 to 24 mars 2016

Herwig van Staa : « Les élus locaux et régionaux doivent devenir des modèles pour promouvoir l’éthique publique et lutter contre la corruption »

Engagé depuis de longues années pour la transparence et contre la corruption au niveau local et régional, le Congrès prépare une stratégie dans ce domaine, d’autant plus importantes qu’aucun pays n’est à l’abri de la corruption publique. Past- président du Congrès et rapporteur thématique sur l’éthique publique, Herwig van Staa (Autriche, PPE/CCE) a rappelé, lors d’un débat tenu le 22 mars à Strasbourg, comment la corruption menace l’Etat de droit, et a invité des experts à travailler avec le Congrès sur cette thématique.

Dans de nombreux pays, les transferts de compétences au profit des villes et des régions ont encore accru le risque de corruption au niveau local et régional, a souligné Herwig van Staa en énumérant les menaces qui sapent les piliers de la démocratie, comme le manque de transparence en matière de recrutements, d’attribution de marchés et de services ou les conflits d’intérêt. Le Congrès se mobilise depuis plus de 15 ans contre la corruption, et soutient la mise en place de nombreux outils de contrôle et de prévention, y compris les cours des comptes locales et régionales. Mais les « index de la transparence » montrent que tout cela ne suffit pas, et qu’il faut aller encore plus loin. La commission de la gouvernance du Congrès élabore actuellement une stratégie pour développer la transparence et renforcer l’éthique publique, en coopération avec d’autres partenaires dont le Comité des Régions de l’Union européenne.

Les collectivités territoriales doivent définir elles-mêmes les outils de la transparence

Selon Francesco Merloni, professeur de droit membre de l’Autorité nationale anti- corruption d’Italie, une telle stratégie doit inclure la mise en place de mesures prises au niveau le plus proche des citoyens, et leur définition par les administrations concernées elles-mêmes. « Ces mesures doivent être partagées par tous les agents et fonctionnaires, dont il importe de garantir l’impartialité », at-il ajouté, avant de rappeler l’importance, pour les collectivités territoriales, de définir elles- mêmes leurs mesures de prévention : « si l’Etat central s’en charge à leur place, il y a un vrai risque de recentralisation », estime-t-il. Il a rappelé que les articles 3 et 6 de la Charte européenne de l’autonomie locale permettent la mise en place de telles politiques, qui pourraient faire l’objet d’un suivi par le Congrès. Pour lui, il faut lutter contre la corruption en recherchant les règles d’organisation les mieux adaptées à chaque administration, et formuler clairement les devoirs de comportement des agents à tous les niveaux, notamment à travers des codes de conduite.

Juge croate et président du Groupe d’Etats contre la corruption, accord partiel du Conseil de l’Europe, relève que les politiques anticorruption restent encore largement définies au niveau national mais que, quel que soit le niveau d’action, « l’éthique et la transparence sont les ennemies naturelles de la corruption ». La transparence doit être développée notamment en matière de recrutements et de carrières, mais concerner aussi le patrimoine et le revenu des élus. Selon lui, les « lanceurs d’alerte » doivent pouvoir s’exprimer sans peur des représailles, et les codes d’éthique et de déontologie doivent être largement diffusés et utilisés. « La transparence n’est pas une panacée, mais un premier pas indispensable pour lutter contre la corruption, dont la prévention passe aussi par l’éducation », a-t-il conclu.

Des règles régionales pour prévenir les dérives

Lors du débat, des membres du Congrès ont présenté les politiques menées dans leurs pays respectifs, notamment l’Allemagne, l’Azerbaïdjan, la Fédération de Russie et l’Ukraine, pour lutter contre la corruption. Certaines régions allemandes, comme la Bavière, se sont dotées de règles spécifiques, par exemple une rotation obligatoire des fonctionnaires, et ont fait de la corruption au niveau local un délit pénal. L’interdiction des cadeaux aux fonctionnaires ou la tenue de réunions publiques avant certains actes importants de la vie économique concourent aux mêmes objectifs.  S’il est indispensable de lutter contre le secret et la confidentialité, il ne faut pas pour autant, selon d’autres membres, trop alourdir les procédures de contrôle. Pour la jeune déléguée géorgienne, la lutte contre la corruption passe aussi par « la prévention du népotisme ». Répondant aux questions, Marin Mrcela soulignait que les administrations doivent acquérir la volonté d’agir concrètement, ce qui n’est pas encore partout le cas, tandis qu’ Herwig van Staa concluait les échanges en rappelant que s’il faut travailler ensemble pour lutter contre « le cancer de la corruption ».