31ème Session du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe – 19 au 21 octobre 2016

Le Congrès adopte une feuille de route contre la corruption aux niveaux local et régional

« Condition indispensable pour la stabilité de la démocratie », la lutte contre la corruption et la promotion de l’éthique publique aux niveaux local et régional ont constitué le thème central de la 31ème session du Congrès, qui s’est ouverte, le 19 octobre, sur deux débats suivis de l’adoption de deux résolutions destinées à mieux concrétiser ces principes.

Engagé depuis de longues années dans la lutte contre la corruption, Herwig van Staa  (Autriche, PPE/CCE) a rappelé l’importance de doter les régions de cours des comptes indépendantes des dirigeants politiques, un impératif d’autant plus nécessaire que les régions gèrent, à travers les fonds européens, des budgets de plus en plus considérables. Il a présenté ensuite une « feuille de route » en 6 points, associant mesures concrètes et principes politiques.

Le Congrès établira six rapports portant respectivement sur l’utilisation abusive des ressources administratives pendant les processus électoraux, sur les marchés publics, sur la transparence, sur les conflits d’intérêt, ainsi que sur la protection des lanceurs d’alerte et sur le népotisme. Il entend en outre inclure le thème de la corruption et de la transparence dans ses rapports de suivi, et souhaite actualiser le Code de conduite européen sur l’intégrité des élus locaux et régionaux dont la dernière version date de 1999, et qui ne tient pas compte de certains faits nouveaux, comme le développement d’Internet. Il souhaite de même inclure l’éthique dans ses programmes de coopération avec les collectivités locales et régionales,  renforcer sa coopération avec les autres organes du Conseil de l’Europe sur ce thème et améliorer lui-même sa propre transparence, tout en perfectionnant la formation des élus et des fonctionnaires territoriaux face à ces questions.

Lutter contre la corruption : des enjeux éthiques, mais aussi économiques

A l’issue de cette présentation, plusieurs délégués jeunes du Congrès ont rappelé l’importance qu’ils attachent à la transparence des politiques locales et régionales, mais se sont inquiétés aussi de la corruption qui règne parfois dans le milieu éducatif et scolaire, et qui peut entraver leurs chances d’avenir. Manuela Bora (Italie, SOC), a insisté pour sa part sur le développement de la transparence en ligne, comme plus globalement face à toutes les nouvelles technologies. Yuliya Svitlychna (Ukraine, PPE/CCE) a souligné quant à elle les progrès menés dans son pays pour la démocratie et la gouvernance, et qui doivent maintenant porter sur les régions. Dans la région de Kharkov, le développement de « guichets uniques » et le recours aux démarches administratives par voie électronique ont permis, au-delà d’une meilleure transparence, des économies avoisinant les 4 millions d’euros.

Luc Martens (Belgique, PPE/CCE) a insisté sur l’importance de l’éthique et de la transparence pour renforcer la confiance des citoyens dans leur administration, avant qu’Irène Dourou ( Grèce, NI) n’ajoute que la corruption « dévalorise la politique et favorise l’émergence de partis racistes ». Rafet Vergili (Turquie, CRE) a présenté, lui, « l’exemplarité » de sa ville, Karabük, ajoutant qu’il ne touche pas de salaire car il le donne aux étudiants sous forme de bourse, et n’utilise pas de voiture de fonction :  « nous ne devons rien à personne », s’est-il félicité, tout en appelant le Congrès à se montrer vigilant face à la « corruption exportée,  notamment par des grandes firmes internationales mais aussi par les fonds de l’Union européenne ». Andreas Galster ( Allemagne, PPE) a relevé enfin qu’à côté  de la prévention, la lutte contre la corruption passe en même temps par un Etat de droit fort et une justice indépendante.

Utilisation des ressources administratives lors des élections : une « quasi normalité »… inacceptable

Stewart Dickson (Royaume-Uni, GILD) a présenté ensuite le premier des six rapports prévus par le Congrès sur le thème de la corruption et de la transparence, consacré à l’utilisation abusive des ressources administratives pendant les processus électoraux. Fort de son expérience dans le domaine de l’observation des élections, il a déploré que certaines de ces pratiques, concernant par exemple les modes d’enregistrement des candidats ou les  relations avec les médias, « soient tellement ancrées dans les habitudes de certains pays qu’elles finissent par sembler normales  alors qu’elles sont inacceptables ». S’il existe des règles de conduite au niveau national, le Congrès souhaite les adapter précisément aux niveaux local et régional, après avoir identifié les problèmes les plus importants et les plus fréquents, qui « donnent un visage concret à cette forme de corruption ».

A l’issue de sa présentation, plusieurs membres du Congrès ont cité des exemples de pratiques parfois douteuses en matière d’utilisation des ressources administratives, comme l’utilisation des écoles et de leur personnel lors des campagnes électorales, pointée par  Xavier Cadoret (France, SOC), lequel s’est demandé aussi s’il fallait compléter les codes de conduite par des mesures plus coercitives. La Région italienne du Piémont, a souligné Giovanni Maria Ferraris (Italie, GILD) s’est dotée pour sa part d’un plan de transparence pour tous les actes administratifs, qui aborde aussi les dépenses électorales.

Aleksev Ostrovsky (Fédération de Russie, GILD) a présenté quant à lui les progrès réalisés en Russie en matière de transparence électorale. Pour illustrer son propos, il a souligné que dans sa région de Smolensk,  personne n’a contesté le scrutin qui a vu sa réélection, alors même que 14 listes étaient en présence et qu’il est lui-même opposé au gouvernement central. Enfin, Andreas Galster (Allemagne, PPE/CCE) a rappelé que l’utilisation abusive des ressources administratives lors d’un vote s’inscrit dans un tout : « si celui qui dispose d’un mandat est honnête pendant tout son mandat, alors il le sera aussi au moment du vote ».