Comité des Ministres – Groupe de Rapporteurs sur la Démocratie (GR-DEM)

Réunion du 9 septembre 2014

Echange de vues avec Karl-Heinz Lambertz, Président de la Commission de la Gouvernance du Congrès et porte-parole thématique sur la cooperation avec le secteur inter-gouvernemental du Conseil de l’Europe

Discours introductive par Karl-Heinz Lambertz

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,

Je suis très heureux de lancer ce premier échange de vues entre le Congrès et le GR‑DEM, sous votre présidence. Permettez-moi de commencer par exprimer l’espoir que perdurera la précieuse contribution que la Norvège a apportée jusqu’ici aux travaux du Congrès, grâce à la fois à sa puissante association nationale et à Halvdan Skard (notre Président de 2006 à 2008).

Bien qu’à certains égards, la rencontre d’aujourd’hui ouvre des perspectives nouvelles, elle n’en reste pas moins une étape naturelle dans un processus que le Congrès a engagé il y a plusieurs années afin de renforcer le dialogue politique entre le Congrès et le Comité des Ministres.

La consolidation de ce dialogue politique entre les instances du Conseil de l'Europe est une priorité du Congrès. Nous constatons, avec satisfaction, que nous continuons à faire des progrès en la matière. Le Bureau du Congrès a tenu des échanges de vues avec vos deux prédécesseurs (Madame l’Ambassadeur Gacek de Pologne et, plus récemment, en février de cette année, avec Madame l’Ambassadeur Berends des Pays-Bas).

Dans le cadre de ce processus de renforcement de notre dialogue institutionnel, le Congrès m’a nommé « Porte-parole thématique sur la coopération avec le secteur intergouvernemental du Conseil de l'Europe ».

Je suis honoré d’être la première personne à occuper ce poste ; c’est une fonction qui est, à mon sens, capitale.

Les pouvoirs locaux et régionaux sont des acteurs de plus en plus importants s’agissant de relever les défis politiques d’aujourd’hui et sont devenus, à cet égard, des partenaires clés pour les gouvernements nationaux. Le Congrès est à l’avant-garde de cette action car il est, en Europe, la seule assemblée politique à suivre régulièrement l’évolution de la démocratie locale et régionale, à faire rapport au Comité des Ministres, à présenter des recommandations et à œuvrer à leur application.

Vous nous avez confié ce rôle important et nous sommes engagés dans un dialogue politique régulier avec vos autorités nationales sur les questions relatives à l’administration locale et régionale grâce à nos activités de suivi, d’observation d’élections et de post-suivi.

Partant de ce dialogue, nous développons nos activités de coopération et notre participation aux plans d’action du Conseil de l'Europe destinés à tel ou tel pays. Les réactions des Etats membres sont très encourageantes et nous recevons de plus en plus de demandes de la part de leurs gouvernements pour ce type de coopération.

Nous sommes déterminés à continuer d’intensifier nos synergies avec le secteur intergouvernemental et d’autres partenaires institutionnels, tant au sein de l’Organisation qu’à l’extérieur, afin de devenir non seulement une assemblée plus pertinente politiquement mais aussi un organe opérationnel tourné vers l’action et l’obtention de résultats.

Permettez-moi de souligner le caractère politique de ce dialogue. Nous siégeons au Congrès en tant que responsables politiques, en tant que représentants élus de nos pays respectifs. Le Congrès est une assemblée politique dotée d’un mandat unique en son genre – c’est le fruit d’une suite d’événements historique particulière – qui donne au Conseil de l'Europe et à ses Etats membres une occasion sans précédent de nouer un dialogue politique avec les autorités locales et régionales de ses Etats membres. Il importe que le Conseil de l'Europe tire le meilleur parti de cet avantage.

Le dialogue politique entre les divers niveaux de gouvernement est capital. C’est une question majeure dans nombre de nos Etats membres. L’absence d’un tel dialogue risque de provoquer des tensions et des conflits qui pourraient être évités et un vaste gaspillage d’énergie et de ressources. Il faut donner l’impulsion requise et montrer l’exemple.

Nous appliquons le concept de synergie à un niveau concret et nouons un dialogue constructif avec différents échelons administratifs. Nous pratiquons véritablement un tel dialogue avec plusieurs de vos comités directeurs. Nous réaffirmons notre disponibilité et notre ouverture à une telle coopération.

En tant que responsable politique belge pendant trente-trois ans et ancien Ministre-président d’une région dans un système fédéral pendant quinze ans, je sais quelle est l’importance du dialogue ; souvent, en effet, dialoguer est le seul moyen de faire avancer les choses. Nous devons nous réunir et jouer cartes sur table ; et surtout, nous devons nous écouter les uns les autres et tenir compte de ce que disent les autres.

Vous vous demandez peut-être ce que nous attendons de cette rencontre, quelles sont nos priorités concernant l’échange de vues d’aujourd’hui. J’ai simplement deux points à soulever : premièrement, nous proposons de discuter de ce que nous qualifions de « questions récurrentes ». Par cette expression, nous entendons la diffusion de notre expérience du suivi de la Charte européenne de l'autonomie locale qui fait partie de notre mission de regrouper et de mettre en commun les résultats de nos activités de suivi. Notre objectif est d’aller au-delà des questions qui se posent aux différents pays et de cerner les grands problèmes qui exigent des mesures au niveau international.

Je vous renvoie au document qui figure dans votre dossier et que nous avons adressé au Président du Comité des Ministres à la fin de l’année dernière. Il comporte une analyse de plusieurs « questions récurrentes » recensées lors de nos récentes missions de suivi et d’observation d’élections. Nous estimons que chacune de ces questions mérite un examen approfondi avec vous, avec ce Comité.

Permettez-moi de prendre simplement trois exemples : les finances locales, la consultation et les compétences.

Les finances locales sont un indicateur clé de la santé de la démocratie locale. Les autorités locales doivent bénéficier d’une marge substantielle de liberté et de flexibilité en matière de collecte et de gestion de leurs propres ressources financières. Elles doivent surtout disposer de moyens financiers correspondant à leurs responsabilités. C’est trop rarement le cas.

La mise en place de mécanismes de consultation effectifs entre les différents échelons administratifs est un principe majeur de la Charte européenne de l'autonomie locale. Toutefois, il semble que ce soit un principe que de nombreux pays ont du mal à mettre en œuvre. Il nous faut comprendre pourquoi il en est ainsi et examiner ce que nous pouvons faire pour améliorer la situation.

Les compétences des pouvoirs locaux doivent être définies avec beaucoup de soin pour éviter tout chevauchement d’activités avec d’autres échelons administratifs. Le processus de transfert des compétences d’un échelon administratif à l’autre peut aussi s’avérer problématique s’il ne s’accompagne pas des moyens requis pour remplir les tâches confiées.

Deuxièmement, nous, membres du Congrès, sommes plus efficaces dans notre action lorsque nous obtenons des réponses politiques substantielles aux recommandations que nous adressons au Comité des Ministres.

Permettez-moi de prendre pour exemple le projet de réponse à notre Recommandation sur « Les régions et territoires à statut particulier en Europe », que vous allez examiner ce matin.

Ce texte est le résultat de nombreuses discussions au sein du Congrès et de maints débats et délibérations au niveau européen ; il mérite une analyse et une réflexion rigoureuses. C’est, à notre avis, une importante contribution à un sujet qui, du fait de la complexité de notre héritage politique, préoccupe de plus en plus nos gouvernements. Nous constatons qu’un nombre croissant de régions revendiquent une autonomie accrue et une reconnaissance particulière.

C’est parce que cette question s’est avérée difficile à traiter qu’il est particulièrement intéressant pour nous d’obtenir une réponse politique de votre Comité.

Nous considérons que les recommandations que nous adressons au Comité des Ministres sont une contribution à notre dialogue politique avec cette instance. Il est très intéressant et utile pour nous de recevoir une réponse politique du Comité des Ministres.

En conclusion, je voudrais affirmer notre conviction qu’au lieu d’être un échange de vues ponctuel, la discussion d’aujourd’hui devrait être considérée comme un dialogue normal entre nos deux organes, un dialogue qui devrait devenir régulier.

Cette discussion complète l’échange de vues annuel avec le Président du Congrès, les communications du Secrétaire Général du Congrès à l’occasion des rapports d’activité semestriels du Congrès et les nombreux contacts bilatéraux que notre Président a avec vous, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs.

Je saisis cette occasion pour vous inviter, Madame la Présidente, à maintenir la pratique mise en place par vos prédécesseurs et à assister à une réunion du nouveau Bureau du Congrès, qui sera élu le mois prochain, dans l’optique d’un échange de vues.

Je concluerai mon intervention ici. J’ai hâte d’entendre ce que vous avez à dire.

Je vous remercie de votre attention.