Observation des élections locales en Géorgie, le 15 juin 2014, par le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux

Conclusions préliminaires de Jos WIENEN (Pays-Bas, PPE/DC), Chef de la délégation et Rapporteur du Congrès

J’ai le plaisir de vous présenter les conclusions préliminaires de l'observation des élections locales en Géorgie. Je m’appelle Jos Wienen et suis maire de la ville de Katwijk, aux Pays-Bas.

Comme vous le savez, notre délégation compte 22 membres issus de 15 pays d’Europe, et représente le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe et le Comité des Régions de l’UE. Nous sommes à Tbilissi depuis mercredi, ce qui nous a permis de rencontrer des dirigeants du gouvernement et de l’opposition, des candidats, des représentants d’ONG, les médias, la communauté diplomatique et la Commission électorale centrale. Dès la fin du mois de mai, je me suis rendu dans votre pays dans le cadre de la délégation préélectorale.

Hier, les 11 équipes d’observation été déployées dans différentes régions de Géorgie ont visité les bureaux de vote de nombreuses villes, dont Tbilissi, Koutaïssi, Batoumi, Gori, Mtsketha, Roustavi, Gardabani, Telavi, Marneuli, Bolnisi, Tetri Tskaro, Ninotsminda, Akhalkalaki, Dmanisi, Tsalka, Zougdidi et plusieurs autres villes et villages. Au total, les observateurs du Congrès étaient présents dans plus de 150 localités du pays.

Nous sommes tous heureux de pouvoir déclarer que, dans l’ensemble - malgré les informations que nous avons reçues sur les incidents qui se sont produits localement et quelques irrégularités isolées - les élections d’hier se sont déroulées dans le calme et de manière pacifique. Après une campagne très controversée, marquée par des tensions, des déclarations très dures et des actions violentes, ce résultat n’était pas acquis d’avance.

Ajoutons que la gestion des élections, sous la direction de la Commission électorale centrale, a continué de progresser dans les aspects techniques de l’organisation des élections en Géorgie. Je tiens à féliciter la CEC pour cette performance professionnelle dans un contexte très difficile.

L’environnement électoral s’est amélioré, notamment du point de vue de la liberté des médias et de l’accès à ces derniers pour les opposants politiques, et les forces de l’ordre paraissaient, dans l’ensemble, moins polarisées que lors des scrutins précédents. Nous avons en outre reçu des échos positifs au sujet de l'ouverture de l'électorat et de l'absence de pressions sur les électeurs, et notamment sur les fonctionnaires, pour les inciter à voter en faveur de tel parti ou de tel autre. Il s’agit d’un progrès important pour le pays.

Nous saluons les efforts consentis par les autorités géorgiennes pour empêcher la fraude électorale et mettre en place un nouveau système de vérification de l’identité des électeurs s’appuyant sur les photos numériques intégrées aux listes électorales. Hier, ce système a réussi son baptême du feu. La campagne menée par le gouvernement pour fournir de nouvelles cartes d’identité au plus grand nombre de citoyens possibles les aide à limiter le risque d’utilisation frauduleuse de fausses cartes d’identité, une pratique naguère très répandue en Géorgie.

Sur le plan de la consolidation de l’autonomie locale en Géorgie, nous sommes heureux qu’un grand nombre de candidats, plus de 16000 au total, se sont disputés les sièges des 71 municipalités et les postes de maire des 12 villes autonomes et de gamgebelis dans 59 communes autonomes. Cette désignation au suffrage direct de tous les maires et présidents de ville de Géorgie est conforme aux recommandations du Congrès, et nous nous en félicitons.

Il faudrait toutefois apporter quelques modifications supplémentaires à la législation électorale. Ainsi, le nouveau système continue de donner un avantage aux forces sortantes, et n’est pas favorable aux petits partis et aux candidats indépendants. La composition actuelle des commissions électorales illustre bien cette situation. Six des 13 membres des commissions électorales de circonscription sont nommés par les hautes instances de l’administration électorale, et 7 par les partis politiques ; un seul d’entre eux appartient au principal parti d’opposition. Les autres partis d’opposition en sont totalement absents. Nous estimons que cette situation engendre un déséquilibre électoral et devrait être corrigée par les autorités géorgiennes.

Sur un plan pratique, il est également nécessaire de réexaminer les procédures de dépouillement. À l’issue d’une journée de scrutin bien organisé, les observateurs du Congrès ont constaté - dans la plupart des localités où ils étaient présents - des procédures de dépouillement longues et laborieuses, notamment en raison d’une interprétation excessivement bureaucratique du règlement, et en partie à cause d’une gestion déficiente au niveau local. De ce point de vue, il conviendrait d’améliorer la formation du personnel électoral, et en particulier de ceux qui président les commissions. Sur le plan des locaux, des améliorations pourraient être apportées dans les possibilités d’accès aux bureaux de vote pour les personnes handicapées.

En outre, nous avons été désagréablement surpris par le fait que des candidats de partis d’opposition se sont retirés de listes de partis pour le scrutin proportionnel parce qu'ils auraient subi des pressions. Quel que soit leur nombre effectif, chacun de ces cas est un incident de trop, et nous prions instamment les autorités géorgiennes de veiller à ce qu’ils fassent l’objet d’enquêtes judiciaires efficaces et transparentes. Il en va de même pour les violences commises avant les élections et même hier, d’après des témoignages individuels qui nous sont parvenus.

Dès lors, dans la perspective de l’organisation du deuxième tour dans plusieurs villes, et en particulier dans la capitale Tbilissi, la tolérance zéro doit être de mise à l’encontre des violences électorales et des déclarations dégradantes ou inspirées par la haine. J’appelle tous les acteurs du monde politique à contribuer à l’adoption d’une telle ligne de conduite!

Dans un système d’équilibre des pouvoirs, le gouvernement et l’opposition ont tous deux un rôle à jouer. Le gouvernement assume une responsabilité spécifique pour la situation générale. S’il ne s’abstient pas des déclarations dégradantes ou inspirées par la haine et ne condamne pas clairement les incidents violents, cela engendre une mauvaise impression et nuit à l’image du pays dans son ensemble. De même, dans l’opposition, la politique partisane ne devrait pas supplanter les véritables enjeux politiques au niveau local.

Je suis persuadé que tous les acteurs du monde politique sauront tirer les leçons du passé et les garder à l’esprit au cours des prochains jours, avant le deuxième tour. A présent, je cède la place, pour sa déclaration, à mon collègue Jerzy Zajakala - qui s’exprimera au nom des membres de notre délégation qui représentent le Comité des régions de l’UE.