Mercedes Bresso : « Dans les relations entre le Comité des régions et le Congrès, le mot-clé est : complémentarité »

Mercedes Bresso, Présidente du Comité des régions de l’Union européenne, prononcera un discours lors de la 19e session du Congrès à Strasbourg le 27 octobre 2010. Dans son interview, elle souligne la complémentarité des deux institutions : le Comité des régions intervient dans les mécanismes décisionnels et législatifs de l’Union européenne, le Congrès inscrit son action  dans la proximité des populations, d’une part, en particulier via les associations nationales de  collectivités territoriales et dans la consultation directe des gouvernements nationaux, d’autre part.

Interview du 20 octobre 2010

Question : Quel devrait être, selon vous, le volet essentiel de l’action locale et régionale dans l’Europe d’aujourd’hui ?

Mercedes Bresso: Le Traité de Lisbonne apporte ici une excellente réponse à votre question. C’est le premier traité qui reconnaît le principe de l’autonomie locale et régionale dans les États membres de l’Union européenne. Il confère un rôle plus important aux niveaux local et régional dans le contexte du principe de subsidiarité. Aux termes du traité, toute nouvelle législation communautaire devra en effet s’accompagner d’un examen détaillé des conséquences qu’elle pourrait entrainer pour les collectivités territoriales. 

Il accorde aussi des pouvoirs plus étendus au Comité desrégions pour lui permettre de suivre un projet de cadre à travers toutes les étapes du processus législatif. Il dote ainsi l’Assemblée de l’UE des représentants régionaux et locaux de plus de moyens politiques et juridiques. Dans toute l’Europe, à tous les niveaux,  les gouvernements devront travailler ensemble plus qu’ils ne l’ont fait jusqu’ici. Pour relever les défis à venir, le Comité des régions est disposé à contribuer à l’élargissement des compétences des collectivités territoriales.

Par conséquent, je crois que le volet essentiel de l’action locale et régionale consiste à mettre en œuvre les idées et les principes inscrits dans le Traité de Lisbonne.

 

Question : On dit que le Congrès du Conseil de l'Europe et le Comité des régions sont des partenaires naturels dans le renforcement de la démocratie locale et régionale. Comment voyez-vous leurs rôles respectifs dans le paysage politique européen d’aujourd’hui ?

Mercedes Bresso : Je crois que les deux institutions ont raison de suivre les suggestions formulées par le Premier ministre luxembourgeois, Jean‑Claude Juncker, dans son rapport sur les relations entre l’Union européenne et le Conseil de l'Europe. Elles travaillent certes l’une et l’autre  avec les collectivités territoriales, mais chacune à sa manière, et ce, non seulement du fait de leur différence de taille, mais aussi de leur différence de composition :  le Conseil est une instance intergouvernementale, l’Union est une entité politique supranationale. Ce n’est pas un handicap, bien au contraire. Si le Comité des régions intervient dans les mécanismes décisionnels et législatifs de l’UE, le Congrès quant à lui, œuvre au plus proche des citoyens, en particulier via les associations nationales de collectivités territoriales et, agissant sous l’autorité du Conseil de l'Europe, il peut de plus consulter directement les gouvernements nationaux. La «  complémentarité » est ici le mot-clé.

Question : Le Comité et le Congrès ont signé deux accords de coopération, le premier en 2005, et l’Accord révisé en novembre 2009. Comment qualifieriez-vous l’état de la coopération entre les deux institutions aujourd’hui ? Comment la renforcer ?

Mercedes Bresso: Notre coopération porte sur un large éventail de domaines, de la participation pleine et entière du Comité des régions à la Semaine européenne de la démocratie locale au renforcement de nos liens dans la question de la gouvernance multi-niveau. Il s’agit maintenant de passer à la vitesse supérieure, et d’élaborer, par exemple, une charte de la gouvernance multi-niveau, comme le propose le Livre blanc du Comité des régions.

Nous coopérons mieux dans les domaines où l’action commune peut apporter un plus, par exemple, dans l’observation des élections. Nous devons  encourager -sans cesse- la démocratie locale, en particulier, lorsque nous parlons avec nos partenaires d’Europe orientale. Nous devons   utiliser -sans cesse- les nouveaux instruments politiques que présente le Comité des régions pour mettre pleinement en œuvre le Partenariat oriental de l’Union européenne. La prise de mesures complémentaires de cette nature serait  peut-être indiquée aussi pour renforcer la démocratie locale dans les Balkans.

Par ailleurs, et juste un peu au-delà des frontières de l’Europe, les deux institutions ont récemment établi un dialogue structuré avec le littoral sud de la Méditerranée, nous offrant ainsi une autre occasion- à ne pas manquer- de propager l’idée de démocratie locale.  La nécessité d’élaborer des codes de conduite pour encourager l’intégration des immigrants et le dialogue interculturel, notamment dans les régions urbaines, et œuvrer ce faisant à la consolidation de « communautés durables » pourrait donner lieu à d’autres travaux conjoints.

Enfin, la vaste expérience du Congrès concernant les Eurorégions et celle du Comité des régions concernant les nouveaux instruments juridiques présentés par l’UE pour les groupements eurorégionaux de coopération (GEC) pourraient utilement se conjuguer et se compléter,  lorsqu’il s’agit de traiter de  nouvelles formes de coopération, telles que les macrorégions.

Parallèlement, nous devons aussi améliorer sans cesse la coordination de nos travaux, afin d’éviter les malentendus ou tout simplement les doubles emplois.