Drago Kos : « Les outils de lutte contre la corruption des Etats peuvent s’adapter au niveau local et régional ».

Magistrat slovène et actuel président du « Groupe d’Etats contre la corruption »  (GRECO) du Conseil de l’Europe, Drago Kos explique comment cette structure peut aider les collectivités locales et régionales à combattre ce phénomène à leur niveau.

Interview – 5 mai 2010

Question : La corruption de la classe politique en général, mais aussi de certaines administrations, exaspère les citoyens européens. Si la plupart des Etats disposent désormais de législations destinées à favoriser la transparence à leur niveau, ce n’est pas toujours le cas à l’échelon local et régional. Comment améliorer là aussi la transparence des choix et des décisions ?

Drago Kos : Les outils établis au niveau européen et national pourraient parfaitement être utilisés aussi par les régions et les collectivités locales, car les principes de la lutte contre la corruption sont les mêmes à tous les échelons du pouvoir. La transparence peut s’appliquer aussi bien pour des décisions d’ordre municipal que pour des mesures impliquant un Etat. Néanmoins, les élus locaux et régionaux ne sont pas assez conscients de l’existence de ces outils, et n’attachent pas non plus assez d’importance aux enjeux de la lutte contre la corruption, que ce soit sur le plan humain, politique ou économique.

Question : De même qu’il existe des Etats plus corrompus que d’autres, y a-t-il des régions ou des villes où celle-ci est plus répandue qu’ailleurs ?

Drago Kos : La corruption est un phénomène global. Lorsqu’elle règne au sommet de l’Etat, elle s’observe aussi à tous les autres niveaux de gouvernement, y compris local. Simplement, les enjeux ne sont pas les mêmes : il y a moins d’argent en jeu, mais les cas sont beaucoup plus nombreux… et la souffrance des citoyens qui en sont victimes est parfois très grande. Quand on vous refuse un emploi, un logement ou un permis d’activité professionnelle sans raison, alors que votre voisin l’obtient immédiatement, c’est extrêmement difficile à vivre. La corruption ne se traduit pas que par des délits de nature pénale, mais aussi par des comportements immoraux, dans la vie quotidienne. Ce sont tous ces comportements, à tous les niveaux, qu’il faut combattre.

Question : Que peut faire le Congrès pour lutter contre la corruption au niveau local et régional ?

Drago Kos : Le Congrès dispose, avec son Code de conduite européen relatif à l’intégrité des élus locaux et régionaux, d’un excellent outil dans ce domaine. Malheureusement, il ne s’applique qu’aux élus, et devrait concerner l’ensemble des fonctionnaires locaux et régionaux, afin de les soumettre aux mêmes règles d’équité et de moralité. En outre, l’application effective de ce code devrait faire l’objet d’un monitoring, d’un suivi régulier. Le Congrès peut aussi contribuer à adapter les outils « nationaux » déjà existants au niveau local et régional. Toutefois, il faut veiller au respect du principe de l’autonomie locale et régionale : ces outils doivent répondre aux réalités du terrain et ne pas donner l’impression qu’ils ont été « dictés » par l’Etat.