Rencontre internationale des Territoires de la Coresponsabilité

Mulhouse, France, 25 septembre 2009

Allocution de Valerio Prignachi, Président de la Commission de la cohésion sociale, Congrès des pouvoirs locaux et régionaux, Conseil de l’Europe

INTRODUCTION À LA TABLE RONDE (14h30 – 16h)

Comme je vous le disais, dans mon discours d’ouverture, la stratégie de cohésion sociale révisée adopté par le Conseil de l’Europe en 2004 définit la cohésion sociale comme « la capacité d’une société à assurer le bien-être de tous ses membres, à minimiser les disparités et à éviter la polarisation ».  Elle décrit une société cohésive comme « une communauté solidaire composée d’individus libres poursuivant des buts communs par des voies démocratiques » .

Outre la reconnaissance des droits de l’homme codifiés dans la Convention européenne des Droits de l’Homme et la Charte sociale européenne révisée, cette stratégie met en avant la responsabilité sociale et partagée ou coresponsabilité des acteurs pour assurer le bien-être de tous les membres de la société, en particulier de ceux menacés par la pauvreté ou l’exclusion.

Sa mise en œuvre implique donc un processus de concertation entre pouvoirs publics, acteurs sociaux et citoyens, la prise en compte de leurs attentes et de leurs objectifs spécifiques ainsi que l’identification d’indicateurs permettant ultérieurement de mesurer si les politiques sociales conduites ont répondu à ces attentes.

Telle est l’approche préconisée par le Conseil de l’Europe, précisée dans le Guide méthodologique pour l’élaboration concertée des indicateurs de la cohésion sociale, élaboré par la Direction Générale de la Cohésion sociale du Conseil de l’Europe, contribuant ainsi à la création d’un cadre commun de référence pour les gouvernements et favorisant l’échange et le dialogue sur les concepts et pratiques entre les acteurs concernés par la cohésion sociale.

Convaincu de l’utilité de donner au Guide méthodologique un prolongement pratique au niveau des pouvoirs locaux et régionaux, le Congrès a décidé de mener, en partenariat avec la Ville de Mulhouse, une expérience d’élaboration concertée d’indicateurs de la cohésion sociale. Celle-ci a permis de valider l’intérêt de la démarche proposée par le Guide, notamment en termes de dialogue social, de participation citoyenne et de démocratie locale donnant lieu à une diversité d’actions pilotes de coresponsabilité comme celles que vous avez pu découvrir ce matin.

Le processus conduit à Mulhouse, repris ensuite dans d’autres villes et territoires, comme vont en témoigner les personnes présentes à cette table ronde, a permis non seulement de tester l'approche et de vérifier sa faisabilité, mais également de préciser et d'affiner les méthodes de concertation et de construction d'indicateurs partagés.

Alors que l'élaboration du Guide a été réalisée essentiellement à partir de tests partiels pour préciser les indicateurs généraux ou propres à quelques domaines spécifiques, pour la première fois à Mulhouse, puis ensuite dans d’autres villes et territoires, il a été possible de mettre en œuvre la démarche dans sa globalité. Les enseignements que l'on a pu tirer sont nombreux, non seulement sur la faisabilité et la validité de l'approche proposée par le Guide, mais également sur un ensemble de questions méthodologiques concernant l'élaboration des indicateurs eux-mêmes, leur mesure et leur utilisation pour évaluer l’impact de politiques et concevoir des actions et un plan d’action. 

Notamment ces exercices ont conduit à sortir d'une vision étroite des indicateurs statistiques quantitatifs, souvent difficilement lisibles et compréhensibles par l'ensemble de la population, pour établir des indicateurs qualitatifs compréhensibles par tous, grâce à l'introduction de quelques règles de mesures. Ils ont aussi permis de donner aux indicateurs un sens d’appréciation et pas seulement de mesure : préciser dans quelles conditions on considère qu’une situation est bonne ou mauvaise.

Les expériences réalisées montrent qu'un processus de ce type peut être mis en œuvre sans grands investissements. Il peut s'appuyer simplement sur la mobilisation des acteurs et peut être réalisé dans son intégralité avec un nombre limité de réunions représentant un temps relativement bref pour chacun. Des outils ont également été élaborés facilitant l’application de l’approche.

En ce sens il s'agit d'une approche aisément transférable dans tout territoire. S'appuyant sur des principes méthodologiques pour l'élaboration d'indicateurs et non sur des indicateurs prédéfinis, cette approche est applicable dans tout contexte, quel qu'il soit.

Bien évidemment, il n'existe pas de systèmes d'indicateurs universels qui puissent s'appliquer dans toute situation, ni de méthode unique pour leur élaboration et leur mesure. Chaque contexte appelle une réflexion spécifique qui conduira les habitants à faire leur propre choix. En revanche, les principes de l’approche sont les mêmes et les solutions qui ont été trouvées et développées dans des situations spécifiques, telle qu’ici à Mulhouse et dans les autres territoires qui ont repris l’approche, peuvent en inspirer d'autres.

Convaincu de l’importance de cette expérience conjointe et des enseignements tirées, le Congrès à adopté, en 2006,  des textes officiels dans lesquels il appelle, notamment, les pouvoirs locaux et régionaux a élaborer de manière concertée, à l’échelle locale et/ou régionale, des indicateurs de cohésion sociale sur la base des principes contenus dans le Guide et d’évaluer régulièrement si les politiques sociales mises en œuvre contribuent effectivement, selon les indicateurs retenus par chaque territoire, au développement de la cohésion sociale.

Ainsi, la diversité des processus conduits dans différents contextes locaux et régionaux à travers l’Europe et même ailleurs - puisque sont ici présentes des personnes qui ont appliqué l’approche au Cap Vert et au Gabon - est un facteur d’enrichissement permettant d’affiner les méthodes et d’aller plus loin dans l’utilisation des indicateurs jusqu’à la construction et la mise en œuvre de plans locaux concertés.

Merci.