29e Conférence du Conseil de l’Europe des ministres de la Justice - « Brisons le silence – unis contre la violence domestique »

Tromsø, Norvège, 18-19 juin 2009

Discours du Vice-Président Günther Krug, Congrès des pouvoirs locaux et régionaux, Conseil de l’Europe

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs les Ministres,

Excellences,

Mesdames et Messieurs,

Je m’adresse à vous aujourd’hui au nom des villes et régions d’Europe, les plus de 200 000 collectivités territoriales de notre continent que représente mon assemblée, le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux. Elles sont nos partenaires naturels dans nos efforts pour garantir la bonne gouvernance de nos sociétés, veiller au bon fonctionnement de nos démocraties et prendre en compte tous les aspects de la gouvernance, parmi lesquels la lutte contre la violence domestique.

Le thème de cette Conférence est d’une importance cruciale pour chacun d’entre nous, mais il l’est peut-être encore davantage pour le Congrès, car les collectivités locales et régionales sont en première ligne dans la lutte contre ce fléau, auquel elles sont confrontées quotidiennement et de très près. Parce qu’elles en ont une connaissance directe, elles peuvent vous apporter une contribution précieuse en tant qu’« acteurs sociaux », en relayant vos politiques et mesures sociales au niveau de leurs villes et régions et en les adaptant, grâce à leurs services locaux, aux besoins de leur population.

Nous aimerions que vous écoutiez leurs propositions. L’intérêt du Congrès pour cette question n’est pas nouveau : il s’était en effet déjà associé à la campagne du Conseil de l’Europe contre la violence domestique, qui s’est achevée l’année dernière. D’ailleurs, dans le cadre de cette campagne du Conseil de l’Europe, le Congrès a conduit, avec la participation de collectivités de tout le continent, sa propre campagne intitulée « Les villes et régions d’Europe s’engagent contre la violence domestique ».

Nous sommes convaincus que les résultats de la dimension locale de la campagne doivent être pris en compte par les gouvernements et les parlements nationaux lors de l’adoption de mesures de prévention contre la violence domestique, et que les collectivités territoriales doivent être associées, à un stade précoce, à des consultations régulières sur les problèmes de violences domestiques. Ces collectivités peuvent en effet, mieux que quiconque, adapter l’arsenal des mesures de prévention aux réalités du terrain et sensibiliser leur population au problème et à ses solutions, au cadre de prévention et de traitement existant et aux services locaux disponibles.

Certaines propositions sont déjà appliquées : par exemple, le maire de Londres a lancé, dans le cadre du projet The Way Forward, des consultations et un appel à l’action contre les violences envers les femmes ; plus récemment, la France a créé des unités d’intervention, appelées « brigades », qui sont chargées de combattre les violences familiales. Je pourrais citer de nombreux autres exemples en Europe, qui ont tous abouti à ce résultat essentiel : la violence domestique n’est plus aujourd’hui un sujet tabou, elle n’est plus considérée comme un problème d’ordre privé ou familial. La violence domestique est un délit, et relève en tant que tel de la sphère publique ; elle est une question d’intérêt public ou même, si l’on veut, de santé publique.

Les réponses face à la violence domestique sont toutefois une toute autre question. Les mesures préventives et la prise en charge des victimes, qui seront évoquées lors de cette Conférence, sont absolument nécessaires, mais il convient dans le même temps de s’attaquer aux causes premières de ce fléau. La violence domestique se produit dans le cadre familial et, de ce point de vue, cette Conférence est liée à la Conférence des ministres chargés des affaires familiales, dont les travaux viennent de s’achever à Vienne cette semaine et à laquelle le Congrès a aussi participé. Nous devrions je pense étudier les possibilités de synergies entre ces deux domaines de compétence entre lesquels il existe un lien évident.

Mesdames et Messieurs les Ministres, Mesdames et Messieurs,

Les mesures préventives et les politiques familiales ont en commun que leurs résultats sont ressentis dans nos collectivités territoriales et que leur succès dépend de l’adhésion plus ou moins forte des populations locales. Dans ces conditions, et compte tenu en outre des processus constants et de plus en plus rapides de la décentralisation, il est de la plus haute importance que les collectivités locales et régionales disposent des compétences adéquates mais aussi des ressources financières et humaines nécessaires pour pouvoir exercer leurs responsabilités dans ce domaine. Et il est tout aussi important que la dimension locale et régionale apparaisse dans le cadre juridique de la lutte contre la violence domestique, qui peut être par exemple un instrument juridiquement contraignant.

C’est pour cette raison qu’en mars dernier, en accord avec l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, le Congrès a souscrit pleinement à l’idée d’une convention sur la prévention de la violence domestique contre les femmes.

Bien entendu, le Congrès se félicite vivement d’avoir été associé au groupe de rédaction et de pouvoir apporter sa contribution. Nous avons d’ores et déjà formulé plusieurs propositions concernant le texte, qui sont en voie d’être acceptées, et nous nous réjouissons qu’au terme d’intenses discussions les délégations soient parvenues à un consensus sur la portée du futur instrument.

A ce stade, nous avons essentiellement la conviction que la convention devra exiger que les collectivités locales et régionales se voient accorder les compétences et les ressources financières nécessaires pour une mise en œuvre effective de la législation nationale, que la coopération interinstitutionnelle entre les différents services et acteurs soit établie à tous les niveaux (national, régional et local), qu’une formation adéquate soit aussi dispensée aux agents publics et aux élus locaux et régionaux et, enfin, que les femmes appartenant à des groupes vulnérables fassent l’objet d’une attention spécifique.

Nous allons continuer de participer avec le plus vif intérêt à l’élaboration de la convention et nous demeurerons à vos côtés, avec les gouvernements et les parlements nationaux et les ONG, dans ce combat contre la violence domestique, un combat où nous ne pourrons triompher qu’en nous unissant.

Je vous remercie de votre attention.