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MCL-17(2011)3

Conférence du Conseil de l’Europe

des Ministres responsables

des collectivités locales et régionales

17e Session, Kyiv, 3 - 4 novembre 2011

Gouvernance locale en temps critiques: des politiques pour la crise, le redressement et l’avenir durable


GOUVERNANCE LOCALE EN TEMPS CRITIQUES:

DES POLITIQUES POUR LA CRISE, LE REDRESSEMENT ET L’AVENIR DURABLE

RAPPORT

Préparé par le Comite Européen sur la Démocratie Locale et Régionale (CDLR),

en partenariat avec Open Society Foundations (OSF) et l’aide du Conseil des communes et régions d’Europe (CCRE)

Adopté par le CDLR le 21 septembre 2011


TABLE DES MATIERES

CHAPITRE I :  GÉNERALITÉS: VIVRE DANS L’INCERTITUDE. 4

Une ère d’incertitude accrue. 4

Vivre dans l’incertitude. 5

Stabiliser les bases de recettes 6

Tirer le maximum des ressources limitées 7

Renforcer les partenariats pour relever les défis à long terme. 7

Conclusion. 8


CHAPITRE II :  RECETTES: PERFORMANCE ET POLITIQUES. 10

A.     Performance des recettes des budgets locaux en crise. 10

B.     Politiques relatives aux recettes 22


CHAPITRE III :   TIRER UN PARTI MAXIMUM DES RESSOURCES LIMITÉES. 28

Contraction budgétaire. 28

Réorganisation territoriale. 29

Rationaliser la fourniture de services 30

Emploi 32

Partenariats public-privé. 33

Contrôle des coûts 34

Contrôle de gestion. 35

Transparence. 37


CHAPITRE IV :   CONSEQUENCES SOCIALES DE LA CRISE. 38

Responsabilités sociales partagées 38

Impacts du ralentissement économique sur la société. 38

Le contexte national 40

Responsabilités sociales et budgets locaux. 41

Ciblage de l’aide sociale. 43

Soins de proximité. 43

Coopération intercommunale. 45

Responsabilités sociales partagées 45


CHAPITRE V :  DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DURABLE: RÔLE DES COLLECTIVITÉS LOCALES  46

Financement des dépenses d’investissement locales 46

Sources de financement des dépenses d’investissement locales 48

Etablir des partenariats avec le secteur privé. 51

Fourniture de services locaux par le secteur privé. 52

Promouvoir le développement économique local 54

Efficience énergétique. 57


CHAPITRE I:

GÉNERALITÉS: VIVRE DANS L’INCERTITUDE

Une ère d’incertitude accrue

Quelles ont été les répercussions de la crise financière en Europe sur les collectivités locales? Quelles ont été les réponses des collectivités locales et de leurs gouvernements nationaux? Telles étaient les questions posées lors de la réunion ministérielle qui s’est tenue à Utrecht en 2009 et qui devaient être examinées pendant deux ans jusqu’à la prochaine réunion de Kyiv.

Apporter des réponses est l’objet même du présent bilan, qui a été préparé grâce aux enquêtes conduites dans les pays par des membres du CDLR et du Conseil des communes et régions d’Europe (CCRE) et un groupe d’observateurs indépendants, ainsi qu’aux présentations faites lors des deux conférences de Strasbourg. 

Certaines conclusions sont claires. A partir des enquêtes et des données publiées par Eurostat et Dexia, nous savons que:

Cela étant, l’évolution de la situation est loin d’être claire. Nous ne savons pas:


Nous ne connaissons pas non plus les autres événements qui pourraient déstabiliser l’environnement dans lequel opèrent les budgets locaux. L’imprévisible est la seule certitude. A Utrecht, par exemple, nous ne pouvions ni prévoir le «printemps arabe» ni le «tsunami japonais».

Vivre dans l’incertitude

Nous ne savons pas si la crise est terminée. En République tchèque ou en Turquie, elle semble ne jamais avoir eu lieu. En Espagne, elle est peut-être plus grave que jamais. La plupart des pays retiennent encore leur souffle.

L’incertitude qui se prolonge est d’autant plus déstabilisante qu’elle contraste avec la vague de croissance et d’optimisme qui prévalait avant la crise. «Hier, tous nos problèmes semblaient si lointains». On pouvait développer les services, augmenter les salaires et emprunter de l’argent apparemment en toute confiance. Tout ceci appartient au passé mais les collectivités locales ne se sont pas effondrées, les rues sont encore nettoyées et les enfants suivent les cours. Comme l’a écrit Chesterton: «Dieu s’accomplit Lui-même de bien des façons, même par l’autonomie locale.» La Conférence de Kyiv peut:

Trois stratégies se dégagent de la partie fondamentale du présent rapport. Elles consistent à:

 

Stabiliser les bases de recettes

Les budgets locaux sont grevés par des frais de fonctionnement fixes. C’est le cas lorsqu’ils comprennent les salaires des enseignants, l’assistance sociale ou les services médicaux, mais la plupart prennent en charge également l’entretien de la voirie, la gestion des déchets, les soins aux personnes âgées et l’approvisionnement en eau. Ils ont donc besoin de recettes relativement stables pour assumer ces responsabilités.

L’expérience récente montre clairement que certaines ressources sont plus stables que d’autres. Les stratégies de financement devraient s’inspirer des enseignements suivants:

Les budgets locaux ne peuvent pas être indéfiniment protégés contre les baisses de recettes ou les déficits budgétaires que connaissent les Etats. Il ne faut pas pour autant procéder à des réductions arbitraires et immédiates qui nuisent aux services publics. Les restrictions ne doivent pas être disproportionnées par rapport aux économies budgétaires nationales et leurs effets peuvent être atténués lorsque les collectivités locales sont prévenues à l’avance (un an, voire davantage) que des réductions vont être appliquées, ce qui leur permet de prévoir comment elles peuvent être le mieux absorbées. Les restrictions, si elles sont vraiment nécessaires, doivent être réparties selon des formules objectives afin qu’elles soient équitables et politiquement neutres.


Relancer les dépenses d’investissement sera crucial pour le redressement. Il faudra, pour y parvenir, de nouveau dégager des excédents opérationnels suffisants pour les financer directement ou rembourser les dettes. Mais l’endettement croissant suppose une amélioration de la réglementation relative à l’emprunt et à l’insolvabilité. Cela s’applique également aux relations financières opaques qui existent entre les budgets des communes et ceux de leurs prestataires de services publiques.

Tirer le maximum des ressources limitées

Le chapitre III recense les différentes manières dont les collectivités locales ont réduit les coûts pour faire face aux pertes de recettes. Elles sont diverses et dans la plupart des cas générées localement. Les suivantes méritent d’être citées en exemple: 

En revanche, quelques pays ont réduit la contribution du secteur privé et des mécanismes du marché à la fourniture efficiente de services d’utilité publique, ce qui peut constituer un risque potentiel pour la réussite des partenariats au cours des trois prochaines décennies.  

Renforcer les partenariats pour relever les défis à long terme

Les collectivités locales sont confrontées à des défis à long terme qui perdureront après la crise. À cet égard, l’autonomie garantie par la Charte européenne devrait leur donner le pouvoir d’innover pour relever ces défis et une certaine sécurité relative aux ressources. Mais elles doivent toutes acquérir un style et l’habitude des partenariats avec d’autres acteurs essentiels comme d’autres échelons gouvernementaux, le secteur privé, les universités et d’autres membres des secteurs de la recherche et de la formation, des entreprises sociales et des organisations non gouvernementales. Pour relever ces défis, il sera particulièrement important de:


·         s’adapter au changement climatique. Rendre les actifs municipaux plus efficients en énergie, accroître l’utilisation des énergies renouvelables, convertir les moyens de transport, renforcer les capacités des égouts pluviaux sont autant de tâches que les collectivités locales devront mener à bien en établissant des partenariats avec des sociétés de transport et des prestataires de services collectifs, des sociétés promouvant des technologies «vertes» et d’autres acteurs compétents disposant des moyens et de l’engagement nécessaires. Les cadres de planification, par exemple, reposent souvent sur la fabrication, l’assemblage et la distribution de produits dans des lieux multiples disséminés dans le monde entier malgré les coûts liés au transport et à l’environnement. La viabilité de ce modèle devrait être de plus en plus remise en cause.

·         aider les plus vulnérables en portant une attention spéciale aux enfants et aux personnes âgées. La capacité de porter assistance à un nombre croissant de personnes âgées dépendra des stratégies employées pour encourager l’assistance communautaire et aider les membres de la famille et d’autres à fournir une assistance non officielle. Des services comme le développement de l’enfant au stade précoce, qui contribuent d’une manière importante aux droits fondamentaux des groupes vulnérables, devraient être protégés dans les périodes d’austérité. Il faudra peut-être fournir cette assistance d’une manière plus restrictive en ciblant notamment les foyers les plus nécessiteux.

Conclusion

L’impact de la crise sur la conformité à la Charte européenne de l’autonomie locale est mitigé. Le chapitre I présente des exemples dans lesquels l’autonomie fiscale locale s’est renforcée et d’autres dans lesquels elle a diminué. On constate que certains gouvernements, en Irlande et en Hongrie par exemple, interviennent dans les moindres décisions budgétaires locales. On craint par ailleurs que l’UE essaie d’imposer un gouvernement économique commun au sein de la zone euro et que cela réduirait la capacité des collectivités locales à fixer le montant de leurs dépenses budgétaires. En revanche, d’autres gouvernements ont décidé d’atténuer les contrôles et les conditions à remplir afin d’éviter d’être responsables des coupes budgétaires dans les services.


La crise a évolué à une vitesse fulgurante au cours de ces trois dernières années et sa thématique a changé: crise du crédit immobilier, effondrement des banques, récession économique, dettes souveraines, survie de certaines monnaies. Elle s’est propagée des pays baltes aux pays méditerranéens. Il n’est donc pas surprenant que les commentateurs hésitent à porter un jugement sur l’impact de cette crise sur les services publics locaux. Des données quantitatives font état d’un ralentissement des investissements dans les infrastructures malgré les dépenses accrues de l’UE et prouvent que les dépenses discrétionnaires consacrées à l’aide des groupes vulnérables ont été réduites, ce qui est préoccupant.

La bonne nouvelle est que la crise a contraint les collectivités locales à faire preuve davantage de responsabilités en matière de gestion, à mieux utiliser leurs ressources et à renforcer leur coopération avec leurs voisins et d’autres partenaires locaux. Nul doute qu’elles seront ainsi mieux armées pour relever les défis sociaux, économiques, démographiques et environnementaux qui perpétueront bien au-delà de la récession.


CHAPITRE II

RECETTES: PERFORMANCE ET POLITIQUES

A.      Performance des recettes des budgets locaux en crise

Au milieu de 2011, nous avons pour la première fois la possibilité de faire le bilan des trois années de crise économique (2008-2010) et d’évaluer ses effets sur les budgets infranationaux dans l’ensemble de l’Europe. Cet exercice n’est pas facile, pour les motifs exposés ci-dessous. Il est cependant très important de pouvoir établir une distinction non seulement entre les pays, ou les groupes de pays, mais aussi entre ce que l’on pourrait appeler, certes arbitrairement, la première et la deuxième phase de la crise, à savoir les tendances budgétaires 2008/2009 par rapport à celles de 2009/2010. On remarquera que le début de la crise et notamment son impact sur les budgets publics ne se sont pas produits au même moment dans les pays et qu’il existe des décalages temporels importants entre eux. 

Les vues instantanées ou les indicateurs moyens relatifs aux pays européens ont tendance à obscurcir ce qui est par ailleurs un tableau très contrasté de la situation. Un thème commun unit cependant l’ensemble des pays européens: ces deux ans de crise ont modifié radicalement les hypothèses inébranlables et les attentes des décideurs locaux et des marchés. Avant la crise, pendant un bon nombre d’années, les budgets locaux et régionaux étaient en augmentation dans presque tous les pays ainsi que les principales sources de recettes. Les taux de croissance étaient même supérieurs à ceux de leurs PIB nationaux respectifs. Les prévisions incorporées dans les budgets pluriannuels anticipaient la poursuite de cette hausse tendancielle.

L’euphorie économique a rendu les communes de plus en plus confiantes et tentées de profiter de la prospérité en comptant sur des sources de recettes directement liées au cycle économique (positif) et provenant soit des taxes professionnelles sous des formes diverses, soit des taxes sur les transactions immobilières, ajustées afin de suivre étroitement la hausse tendancielle des marchés. Elles ont également démultiplié leurs capacités budgétaires en recourant à une dette dont le service était potentiellement insoutenable.

Les répercussions de ces deux années de crise dans les budgets publics ont surtout débouché sur une hétérogénéité accrue dans les pays européens. Les tendances économiques, les réponses institutionnelles au choc économique et leurs effets ont été beaucoup plus divergents et très éloignés de la situation calme qui régnait avant la crise. Il ne pouvait guère en être autrement pour les raisons suivantes:

Tous ces facteurs ont débouché sur des réponses politiques divergentes à la crise en ce qui concerne les autorités infranationales. Il a fallu soit que les gouvernements centraux les protègent contre les effets les plus néfastes des coupes budgétaires, soit prendre en charge une part disproportionnée des conséquences de la crise. Ces réponses divergentes s’expliquent d’autant mieux que l’attention politique accordée à la dépense locale n’est pas la même dans les pays où les collectivités infranationales ne fournissent pas des services sociaux essentiels. Les sections qui suivent s’efforcent d’identifier certaines tendances lourdes qui se sont dégagées au cours des trois cycles budgétaires précédents dans ce paysage par ailleurs complexe et changeant.

Tendances comparatives concernant les recettes locales et nationales

La figure 1 regroupe sur les mêmes graphiques les deux étapes de la crise: tout d’abord les changements en valeur nominale et compte tenu de l’inflation, représentée séparément (figure 1A); et les changements en valeur réelle (figure 1B).

Figure 1A. Tendances comparatives des recettes nationales et locales, en valeur nominale et compte tenu de l’inflation; 2008/2009 local, 2009/2010 local, 2008/2009 national, 2009/2010national, taux d’inflation 2009+2010.

Figure 1B. Tendances comparatives des recettes nationales et locales, en valeur nominale; 2008/2009 local, 2009/2010 local, 2008/2009 national, 2009/2010 national

Un examen attentif des tendances montre que l’hypothèse formulée dans l’analyse préliminaire de 2010 est vérifiée: 

Cette seconde tendance est évidente dans de nombreux pays de l’Europe centrale et de l’Est (Hongrie, Roumanie, Slovaquie, Bulgarie, Estonie, Croatie, Serbie) mais également dans certains des États membres plus anciens (France, Italie, Irlande). C’est uniquement la chronologie des diverses micro-tendances qui est différente, mais l’effet net est le même. D’autres pays pour lesquels les données sont partielles (Espagne, Grèce) appartiennent très probablement à cette catégorie également. Dans un certain nombre d’entre eux, on sait que les gouvernements centraux ont délibérément fait pression sur les budgets locaux pour créer un espace fiscal au centre afin de gérer les effets de la crise, soit en réduisant les transferts et en l’accès au crédit local, soit en contraignant les collectivités locales à dégager des excédents (Roumanie, Serbie et Bulgarie).


Certains grands pays qui semblaient avoir bien absorbé les chocs de la première phase de la crise ont enregistré l’année suivante des baisses en valeur nominale des recettes budgétaires locales, ce qui confirme la tendance générale, avec seulement un temps de retard (Pologne, Espagne, France).

Ce n’est que dans une poignée d’Etats que les gouvernements centraux ont réussi à protéger les budgets locaux contre l’impact de la récession, en augmentant le volume des transferts durant la première année de la crise (France, République tchèque, Slovénie et Russie) ou la seconde (Pologne), mais aussi en revoyant à la hausse les taux des impôts locaux qui sont fixés par la législation nationale (République tchèque). Au Royaume-Uni également, il semble que les budgets locaux ont été relativement protégés pendant la crise, contrairement aux budgets centraux (même s’ils doivent faire face désormais à des coupes importantes qui commenceront en 2011).

Le groupe des pays scandinaves (Suède, Danemark, Finlande) s’est également bien comporté pendant toute la durée de la crise: ils sont parvenus à protéger leurs imposants budgets locaux contre toute forme de restrictions alors que leurs budgets centraux ont reculé pendant la première année, dans les trois cas de figure. Cela est dû principalement à l’action des stabilisateurs automatiques incorporés dans les mécanismes de transfert intergouvernementaux, qui ont contribué à neutraliser l’impact des chocs budgétaires sur les services sociaux les plus sensibles.

Enfin, en Turquie et en Ukraine, les tendances subissent les effets des changements importants des règles de l’allocation financière, ce qui rend les comparaisons difficiles concernant la période 2008-2010: sans la réallocation considérable de recettes aux communes, il est clair qu’une contraction des budgets locaux aurait été également notée en Turquie. 


Figure 2.1 Endettement des collectivités locales

Endettement des collectivités locales en % du total des recettes locales

(tous échelons confondus)

2008

2009

2010

Espagne

169,7%

182,5%

Plus de 220%

­­

Allemagne

153,0%

171,7%

187,4%

­

Turquie

120,8%

126,0%

127,0%

­

Irlande

100,0%

114,0%

­

Suède

46,3%

50,5%

45,8%

Lettonie

39,7%

57,0%

62,0%

­­

Estonie

37,7%

45,9%

44,8%

­

Hongrie

32,2%

36,6%

43,3%

­

Croatie

29,1%

32,2%

30,2%

Danemark

29,3%

29,3%

Slovaquie

26,7%

31,8%

38,4%

­­

République tchèque

24,5%

26,2%

24,7%

Finlande

22,4%

23,8%

23,2%

Roumanie

21,8%

26,0%

27,1%

­­

Pologne

20,3%

26,0%

33,8%

­­

Slovénie

15,9%

22,4%

25,4%

­­

Moldova

6,4%

5,0%

4,0%

Russie

6,1%

7,6%

8,0%

­

Bulgarie

2,7%

6,2%

6,5%

­­

Serbie

0,0%

0,0%

30,6%

­­

Source: observateurs nationaux


Figure 2.2 Endettement des collectivités locales en % du PIB

2007

2008

2009

2010

Augmentation durant la crise de 2008/2010

Norvège

9,6

9,8

11,7

12,6

29%

Pays-Bas

7,1

7,3

8,0

8,4

15%

France

7,2

7,5

8,2

8,3

11%

Italie

8,0

8,1

8,6

8,3

2%

Danemark

6,3

6,6

7,3

7,2

9%

Finlande

5,3

5,4

6,6

6,6

22%

Lettonie

3,3

4,1

5,8

6,4

56%

Zone euro (16 pays)

5,5

5,6

6,1

6,1

9%

EU (27 pays)

5,1

5,1

5,7

5,8

14%

Suède

5,6

5,5

5,5

5,6

2%

Portugal

4,2

4,5

5,1

5,2

16%

Allemagne

4,9

4,8

5,2

5,2

8%

Belgique

5,0

4,8

4,8

5,1

6%

Royaume-Uni

4,6

4,7

4,8

4,9

4%

Hongrie

3,1

3,9

4,1

4,6

18%

Pologne

2,2

2,3

3,0

3,9

70%

Estonie

2,7

3,2

4,0

3,7

16%

Irlande

2,5

3,0

3,6

3,6

20%

Espagne

2,8

2,9

3,3

3,3

14%

Autriche

1,9

1,9

2,3

2,8

47%

Slovaquie

1,8

1,9

2,4

2,7

42%

République tchèque

2,5

2,5

2,7

2,6

4%

Roumanie

1,7

1,9

2,3

2,4

26%

Luxembourg

2,2

2,2

2,3

2,3

5%

Chypre

2,0

1,9

2,0

2,0

5%

Slovénie

0,7

0,9

1,5

1,7

89%

Lituanie

1,0

1,2

1,6

1,6

33%

Bulgarie

0,6

0,6

1,0

1,2

100%

Grèce

0,8

0,8

0,9

0,9

13%

Islande

4,8

7,6

9,4

Croatie

0,5

0,6

0,6

Turquie

0,4

0,6

0,8

Source: Eurostat

L’endettement des collectivités locales a explosé, à quelques exceptions près: le groupe des pays scandinaves et quelques autres pays comme la Croatie ou la République tchèque. Il existe cependant une grande disparité entre les plus anciens États membres de l’UE ou la Turquie, ou l’endettement municipal est supérieur à 100% du montant total des recettes locales, et les pays scandinaves et les nouveaux Etats membres de l’UE, où il est encore bien inférieur (figure 2.1).


D’autres pays ayant des problèmes récents d’endettement public pour lesquels nous n’avons encore que des informations directes incohérentes de nos opérateurs nationaux peuvent être analysés en utilisant les données d’Eurostat (figure 2.2). Les deux séries de données – la nôtre et celle d’Eurostat – montrent dans l’ensemble des tendances analogues, à la réserve près que les chiffres d’Eurostat doivent être interprétés en ayant à l’esprit que la taille du secteur des collectivités locales est très différente en pourcentage du PIB de chaque pays. En moyenne, le noyau de la zone euro affiche une faible augmentation de la dette infranationale, notamment durant la première année de la crise (9%). Pour l’UE élargie, l’augmentation est un peu plus élevée tout en restant modérée.

Certaines tendances divergentes existent entre les pays qui font actuellement l’actualité. Ainsi la dette des collectivités locales de l’Italie et de la Grèce n’a presque pas augmenté entre 2008 et 2010 (en Italie, cependant, les dépenses des collectivités infranationales sont beaucoup plus importantes qu’en Grèce) et celle du Portugal est modérée. En d’autres termes, les problèmes de la dette publique dans ces pays ne semblent pas dus au fait que l’endettement des collectivités infranationales échappe à tout contrôle. Cependant, en Espagne, en Grèce ou en Turquie, bien que la dette locale ne représente pas un pourcentage important du PIB, elle est néanmoins assez élevée par rapport au montant total des recettes locales.

Si elle se situe encore à des niveaux modérés, l’augmentation rapide de l’endettement municipal de nouveaux Etats membres comme la Lettonie, la Roumanie, la Hongrie ou la Slovaquie est préoccupante. En effet, pour l’ensemble du groupe, la hausse a atteint voire dépassé 50% en seulement trois ans. Certes, cette hausse se produit durant le cycle budgétaire européen 2007-2014, c’est-à-dire une période pendant laquelle l’absorption des fonds structurels devrait s’accélérer d’autant que de nombreux projets d’infrastructure sont mis en œuvre par les collectivités locales. Néanmoins cette tendance, qui concerne également la Serbie, où une explosion anormale de l’endettement a été enregistrée en 2010 (due principalement à des paiements à court terme et d’arriérés), doit être suivie de près.

En revanche, les collectivités locales de la Croatie et de la République tchèque sont parvenues d’une façon ou d’une autre à mieux maîtriser l’emprunt municipal, qui est resté stable pendant la crise. Cela est encore plus vrai pour la Bulgarie, qui a appliqué un contrôle strict de l’emprunt municipal, probablement comme mesure de sécurité dans cette période d’incertitude. Le niveau d’endettement y est donc semblable à celui de la Moldova, où les conditions de marché, et non la réglementation, rendent le crédit difficile d’accès.


Excédents dégagés lors de l’exécution des budgets des collectivités locales

Une autre façon d’appliquer des règles strictes aux collectivités locales dans certains pays a été de les obliger à dégager des excédents opérationnels en fin d’exercice annuel, afin d’obtenir une marge de manœuvre plus grande pour équilibrer les comptes nationaux (voir section 1 ci-dessus). Des informations tangibles à ce sujet[1] indiquent que cette stratégie a été appliquée délibérément par les gouvernements de la Bulgarie et de la Roumanie, par exemple, qui étaient contraints de limiter leurs dépenses. 

L’Espagne a commencé à suivre une tendance analogue au cours des deux derniers exercices fiscaux car sa situation fiscale globale frôle le pire. Et des mesures similaires ont été annoncées en Grèce dans le cadre d’un train de mesures visant à réformer les collectivités locales, mais il n’existe pas actuellement de données disponibles pour évaluer leur impact réel. 

Figure 3. Excédents dégagés lors de l’exécution des budgets des collectivités locales (tous échelons confondus)

2008

2009

2010

Bulgarie

9,4%

8,0%

7,2%

Arménie

-7,6%

6,1%

2,7%

Roumanie

3,3%

3,3%

6,2%

Finlande

-1,1%

1,8%

4,8%

Danemark

1,0%

1,0%

0,3%

Espagne

-1,2%

0,8%

Suède

-0,5%

-1,2%

0,2%

Ukraine

-1,2%

-1,3%

-0,2%

Albanie

-1,4%

-1,7%

-1,6%

Russie

-0,5%

-2,2%

-0,4%

Hongrie

0,5%

-2,6%

-7,3%

Moldova

-5,2%

-3,8%

0,1%

Lettonie

-6,2%

-4,6%

3,9%

Estonie

-4,4%

-5,2%

1,7%

République tchèque

3,8%

-6,6%

-0,3%

Slovaquie

-1,3%

-6,7%

-8,9%

Slovénie

-9,2%

-7,7%

-6,1%

Croatie

-1,0%

-8,3%

-0,7%

Pologne

-1,8%

-8,4%

-9,2%

Allemagne

2,2%

-9,9%

-9,2%

Serbie

-0,9%

-14,9%

-9,7%

Impact par échelons de collectivités infranationales

Le graphique 4 montre que, tendanciellement, les recettes ont été beaucoup plus volatiles aux échelons supérieurs des collectivités infranationales (régions, départements) qu’aux échelons inférieurs (communes). C’est vrai dans les pays où ces échelons intermédiaires jouent un rôle important (Italie, France, Pologne, Allemagne) ou relativement mineur (Serbie, Turquie).

On ne saurait en déduire qu’il s’agit d’une tentative délibérée de protéger les collectivités infranationales les plus vulnérables (par exemple les petites communes) contre les effets nuisibles des récessions. L’explication tient probablement davantage au fait que les sources de recettes affectées à cet échelon de collectivité sont par nature beaucoup plus fluctuantes (taxes professionnelles) ou que les investissements représentent une proportion plus élevée de leurs dépenses: les investissements ont été réduits (comme en Roumanie durant la deuxième année de la crise), stimulés (comme en Allemagne), ou ont suivi une tendance imprévisible pendant tout l’intervalle (Italie, Pologne).

Figure 4. Tendances comparatives des recettes par échelon de collectivité infranationale : 2008/2009 communal, 2009/2010 communal, 2008/2009 échelon II, 2009/2010 échelon II, 2008/2009 régions, 2009/2010 régions


Tendances par types de recettes

Pour ce qui est des principaux types de recettes, les données que nous avons en main ne sont pas suffisantes pour tirer des enseignements probants. La plupart de ces informations fiscales proviennent des pays d’Europe centrale ou de l’Est, l’Italie étant le seul grand État membre historique de l’UE qui soit inclus dans l’analyse. Des informations fragmentaires indiquent que l’Espagne pourrait suivre les mêmes tendances que l’Italie concernant la collecte des impôts locaux.

Les graphiques 5 et 6 montrent que la taxe foncière a fait effectivement preuve d’une grande stabilité pendant la crise, au moins si on la compare à l’impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP): à l’exception de l’Albanie et de la Roumanie pendant la première année de la crise, et de l’Italie pendant la deuxième, le rendement de l’impôt foncier a augmenté dans l’ensemble des dix pays pour lesquels des données étaient disponibles. En revanche, la collecte de l’IRPP a enregistré une baisse dans la plupart des pays, même la Pologne, où il n’y avait pas, techniquement, de récession.

L’explication tient à une combinaison de facteurs. De nombreux pays disposaient d’une grande marge de manœuvre pour améliorer le fonctionnement des mécanismes de la fiscalité locale et augmenter le taux de collecte, et les collectivités locales qui étaient confrontées à une pénurie de recettes ont donc naturellement adopté cette solution pour les sources de recettes qu’elles contrôlent directement. C’est ce qu’il s’est passé en Serbie, Roumanie, Bulgarie et Albanie. En revanche, le gouvernement central a relevé le taux d’imposition par la loi en République tchèque; un changement analogue aura lieu en Ukraine au début de 2012, lorsqu’un véritable impôt sur le patrimoine sera mis en place parallèlement à la «taxe foncière» actuelle.

Concernant l’IRPP, il n’est pas certain que toutes les baisses de recettes qui apparaissent sur le graphique 6 soient «naturelles»: en Roumanie, entre autres, le gouvernement a réduit la part d’IRPP allouée aux collectivités locales pour renforcer le budget central. 


Figure 5. Changement relatif dans la collection de l’impôt foncier

Figure 6. Changement relatif dans la collecte de l’IRPP


7. Recettes courantes et part des impôts, en % des budgets

L’effet combiné des baisses tendancielles et des réponses institutionnelles des gouvernements est illustré par le graphique 7, qui montre l’évolution d’un indicateur très primaire de l’autonomie financière locale, qui est la somme de la fraction des recettes courantes et des impôts partagés, en pourcentage des budgets cumulés (tous les échelons des collectivités infranationales confondus). A l’extrémité gauche de l’échelle, on trouve un groupe de pays pour lesquels cet indicateur a reculé. La tendance devrait être interprétée avec prudence car il faut tenir compte de celle concernant la taille des budgets en valeur absolue (voir figure 1). En Slovaquie, Roumanie ou Allemagne, ce recul est réel, qu’il s’agisse du montant total des ressources dont les collectivités locales peuvent disposer ou de leur indépendance financière. En Pologne, en revanche, il exprime seulement le fait que les transferts provenant du centre ont augmenté plus vite que les recettes courantes.

La même prudence est nécessaire pour interpréter l’autre extrémité de l’échelle: l’autonomie financière semble avoir augmenté en Hongrie, Irlande, Serbie ou Bulgarie, mais c’est uniquement parce que les gouvernements ont réduit les transferts vers les collectivités locales. En fait, les budgets locaux ont reculé en valeur réelle. Ou bien, comme en Estonie et en Croatie, les transferts centraux ont été réduits approximativement dans la même proportion que la baisse des recettes courantes, mais en définitive l’effet est le même puisqu’il se traduit par une contraction des budgets locaux.


Somme toute, peu importe pour la stabilité des budgets locaux en crise que la valeur de l’indicateur du graphique 7 soit élevée ou faible. Le véritable enjeu est d’assurer une base large et diversifiée de recettes courantes en évitant d’être trop tributaire d’un impôt unique important, et de mettre en place des mécanismes de transfert incorporant des stabilisateurs automatiques tels que ceux qui sont utilisés en Europe du Nord pour financer les services sociaux.

B.      Politiques relatives aux recettes

Affectation

La récession a aggravé les craintes actuelles concernant l’impact des impôts locaux sur les sociétés commerciales. Ce problème présente plusieurs aspects. Du point de vue des collectivités locales, des bases de ressources comme l’impôt sur les bénéfices ou le chiffre d’affaires des sociétés peuvent s’avérer extrêmement vulnérables à une récession économique générale et se traduire par une volatilité qui ne permet pas de financer les dépenses récurrentes fixes comme les salaires des enseignants ou l’entretien de la voirie. Du point de vue des sociétés commerciales, ce type d’impôt peut constituer un fardeau intolérable en période de récession s’il est basé sur des critères comme la valeur des actifs, qui ne reflètent pas l’évolution des revenus constituant la base de l’imposition. Il peut également être considéré comme une tentation pour les politiciens locaux d’imposer des obligations disproportionnées aux non-votants.

Ces arguments ont longtemps visé la taxe professionnelle, qui est la principale source de recettes fiscales des collectivités locales en France. La récession a redonné vigueur aux demandes des sociétés commerciales de supprimer un impôt fondé essentiellement sur les valeurs locatives des actifs et la législation l’a remplacé par la cotisation économique territoriale, qui incorpore la valeur ajoutée produite par l’entreprise dans la base d’évaluation. Le changement le plus important pour les collectivités locales est qu’elles ont perdu le pouvoir de fixer les taux, qui font désormais l’objet d’un décret national. Autre changement important: la redistribution d’une partie des droits de mutation entre les départements, qui avaient souffert considérablement de la baisse du marché des biens immobiliers tout en devant supporter parallèlement la hausse des coûts de la protection sociale.

La récession a également redonné une nouvelle vigueur au débat sur la réforme de la taxe locale sur les bénéfices des entreprises allemandes (Gewerbesteuer). Des propositions pour la supprimer ou la réduire en échange d’une augmentation de la contribution d’autres impôts comme l’IRPP ou la TVA ont été examinées par une commission fédérale mais sans conclusion.

Certaines autres taxes locales sur les sociétés ont aussi été supprimées ou limitées dans un souci général d’alléger le poids de la fiscalité dans un contexte économique peu favorable. En Estonie, les taxes locales sur les ventes et les bateaux disparaîtront en 2012. Les communes irlandaises ont en grande partie entendu les appels du gouvernement à modérer l’augmentation des taxes foncières, et le pouvoir des communes slovaques de fixer les taux de la taxe foncière des entreprises a été limité, tout comme le pouvoir des municipalités albanaises de varier les taux de l’impôt sur les petites entreprises.


On observe en revanche une augmentation de certaines sources de recettes locales. La part du montant de l’impôt sur les revenus des sociétés dans les recettes des communes finlandaises est passée temporairement à 32% jusqu’en 2011. En Moldova, le taux de l’impôt sur les véhicules à moteur a augmenté de 30%. En Croatie, 54 collectivités ont utilisé des pouvoirs renforcés pour majorer l’IRPP. Une taxe foncière municipale sera perçue en Ukraine à partir de 2012. Les communes irlandaises ont obtenu le droit d’imposer les résidences secondaires et une taxe générale sur l’immobilier résidentiel a désormais été réintroduite. Le gouvernement britannique a annoncé son intention de redonner aux collectivités locales le droit de conserver une part de la taxe foncière qu’elles perçoivent des sociétés; à l’heure actuelle, cette taxe est redistribuée dans sa totalité sur une base nationale en fonction du nombre d’habitants.

Plus radicales sont les propositions soumises au parlement italien d’accroître la décentralisation financière. Elles prévoient notamment que les revenus locatifs ne seraient plus imposés au titre de l’impôt national sur le revenu mais au titre d’une taxe foncière municipale révisée. Les impôts nationaux sur les entreprises pourraient aussi être majorés par régions. Ces mesures, si elles sont adoptées sur le plan législatif, se démarqueraient beaucoup de la tendance actuelle européenne à la réduction de l’autonomie fiscale locale.

Encadré 1

Collaboration intergouvernementale en Finlande

Les consultations régulières entre l'Association finlandaise des pouvoirs locaux et régionaux et le ministère des finances a conduit à l'adoption d'un certain nombre de mesures pour atténuer les pressions sur les budgets locaux entre 2009 et 2011. Celles-ci ont surgi en particulier de l'augmentation des dépenses de protection sociale et la nécessité de combattre le chômage des jeunes.

Ces mesures comprenaient:

  • Une augmentation temporaire de la part municipale des impôts d'entreprise de 22,03% à 32,03%.

  • Réduction de la part municipale de la contribution nationale d'assurance pension en 2009 et l'abolition totale à partir de 2010.

  • Des changements législatifs pour permettre aux municipalités d'augmenter leurs taxes foncières dans les limites redéfinies.

                                                      

  • Les municipalités ont également reçu une assistance spéciale dans certains secteurs et ont reçu des augmentations substantiels des subventions de l'Etat.

Des groupes de travail ont également examiné les implications de la réorganisation territoriale proposée par le nouveau gouvernement en 2011.


Autonomie fiscale

Certains pays plafonnent encore les taux d’imposition locaux ou imposent des majorations, sur l’IRPP par exemple. Cette pratique est contre-productive, notamment lorsque toutes, ou presque toutes, les municipalités atteignent le taux plafonné. Dans ce cas, le contribuable local, sachant qu’il est protégé contre une hausse des impôts, se désintéresse de la maîtrise comptable des budgets et d’un possible dérapage des dépenses. Le plafonnement des taux d’imposition met fin à la gestion responsable et encourage l’aléa moral des collectivités locales. En effet, comme il n’existe pas d’autres alternatives pour engager la responsabilité des citoyens, c’est le gouvernement central qui est tenu de venir à la rescousse des budgets locaux déséquilibrés. En outre, la possibilité d’augmenter les impôts locaux ne devrait pas être limitée car on peut toujours avoir besoin de faire appel au contribuable pour un éventuel financement de la dette.

Globalement, les réponses institutionnelles à la crise ont réduit le pouvoir des collectivités locales de déterminer leurs taux d’imposition, à quelques exceptions près. Cette situation amoindrit la conformité à la Charte européenne de l’autonomie locale.

Il faut cependant reconnaître que le sens des responsabilités des conseils locaux envers leurs entreprises contribuables peut s’avérer moins développé qu’à l’égard de leurs résidents. Des restrictions au pouvoir de fixer le taux d’imposition afin d’éviter toute discrimination à l’encontre des non-votants peuvent donc se justifier. Des restrictions appliquées à des taux d’IRPP excessifs peuvent également se justifier lorsqu’elles ont un impact prouvé sur l’emploi.

Evaluation de la taxe foncière

Comme il a déjà été noté par ailleurs, l’impôt foncier ou la taxe d’habitation ont fait preuve d’une stabilité assez remarquable en Europe pendant la crise. Les collectivités locales ont pu de ce fait compenser certaines pertes de recettes en augmentant les taux ou en améliorant les encaissements. 

Ni la Charte européenne de l’autonomie locale ni les recommandations du Conseil de l’Europe n’indiquent que les impôts fonciers doivent être basés sur des valeurs de marché bien que cette idée soit régulièrement reprise par des experts internationaux. Cependant, la taxe foncière calculée en fonction de la valeur de marché effective n’a pas beaucoup de tradition en Europe (à quelques exceptions près, comme le Danemark et la Suède), et là où elle a été appliquée, par exemple aux Etats-Unis, ses inconvénients sont apparus au premier plan pendant la crise récente. Les taxes foncières devraient reposer sur des valeurs statutaires et être révisées de temps en temps. Les révisions devraient refléter les évolutions du marché à long terme et non pas les fluctuations à court terme.


Le montant de la taxe foncière devra être modifié à intervalles réguliers entre les réévaluations périodiques afin de refléter l’augmentation des dépenses municipales qu’il finance. Il ne devra pas cependant subir les variations excessives que subissent parfois les valeurs de marché des biens immobiliers. Ces fluctuations pourraient en effet avoir un impact potentiellement négatif sur les budgets municipaux lorsque les valeurs de marché sont à la baisse ou sur le portefeuille des contribuables lorsqu’elles augmentent fortement. Indexer la base d’évaluation à l’indice des prix à la consommation est une solution possible. Augmenter régulièrement les taux d’imposition fixés par les conseils locaux en est une autre. La pratique des conseils britanniques et polonais, par exemple, qui consiste à augmenter chaque année les taux juste au-dessus du taux d’inflation, a permis de dégager progressivement un volume important de recettes sans opposition politique sérieuse.

Volatilité

La recommandation Rec(2005)1 du Comité des Ministres[2] indique que «la fiscalité locale devrait être raisonnablement stable, permettant la continuité et la prévisibilité des services publics, …»). La récession a eu des effets particulièrement néfastes sur des budgets locaux lourdement tributaires de ces bases de recettes fiscales très irrégulières que sont les bénéfices ou le chiffre d’affaires des sociétés ainsi que les transactions immobilières. L’affectation de ces recettes doit être sérieusement examinée.

La bonne solution n’est pas immédiatement évidente. Les sociétés, comme les individus, doivent contribuer au coût des services et des infrastructures qu’ils utilisent; quelle que soit la base d’évaluation, l’impôt doit être payé en fonction de revenus qui fluctuent. Les profits et le chiffre d’affaires, dans cet ordre, sont les meilleurs indicateurs de la capacité à payer, mais l’équité envers le contribuable ne fournit pas aux budgets locaux la stabilité dont ils ont besoin. Tout est une question d’équilibre. Les impôts sur les activités commerciales doivent faire partie des recettes versées au budget local, mais les plus volatiles d’entre elles, telles que les impôts sur les sociétés, ne devraient pas supporter une partie exagérée des dépenses locales. 

Lorsque le produit d’impôts volatils est déjà affecté aux collectivités locales et que des changements législatifs sont difficiles à mettre en œuvre, ces collectivités doivent élaborer des mécanismes «tampons» permettant d’affecter les recettes dégagées pendant les périodes de prospérité au financement de la dette locale ou de créer une «réserve» pour les mauvais jours. 

Transferts intergouvernementaux

Dans presque tous les pays, les recettes des gouvernements nationaux ont été initialement beaucoup plus touchées par l’impact de la récession que celles des collectivités locales, même si cette tendance s’est inversée en 2010. La tentation a donc été très forte de réduire les déficits nationaux en limitant les transferts intergouvernementaux, afin que les communes contribuent aux efforts. 


Certains gouvernements n’ont pas pu résister à cette tentation. En 2010, le parlement serbe a amendé la législation en indexant les dotations au budget national afin que les communes ayant des recettes par habitant supérieures à la moyenne obtiennent moins que ce qu’elles auraient reçu par ailleurs, au moins pendant un an. L’année dernière, le gouvernement bulgare a conservé 15% de la dotation aux fonctions déléguées à partir du milieu de l’année. En 2010/2011, les dotations du gouvernement britannique ont été amputées de 1,16 milliards de livres (2,1%).

La plupart des gouvernements ont été mieux disposés à l’égard des budgets locaux. En 2009, plusieurs pays, notamment l’Autriche, l’Allemagne, la Norvège, l’Espagne et le Royaume-Uni, ont fourni des financements à court terme pour des petits projets d’investissement prêts pour le «premier coup de pioche», afin de maintenir le secteur du bâtiment en activité. Toujours en 2009, plusieurs pays, dont l’Albanie, le Danemark, la Finlande, la Norvège, la Pologne, la Slovaquie et la Suède, ont augmenté temporairement les transferts de type courant afin de compenser les pertes de recettes fiscales subies par les collectivités locales.

 

La plupart de ces mesures, à caractère ponctuel, ont été plus ou moins reprises en 2010. A compter de 2011, cependant, les doutes concernant la capacité d’assurer le service de la dette souveraine ou de la rééchelonner ont entraîné une réduction des dotations dans des pays comme la Grèce, l’Irlande, l’Italie, le Portugal et l’Espagne. Des réductions délibérées et à plus long terme des transferts sont appliquées dans plusieurs autres pays comme la Roumanie et le Royaume-Uni, qui déploient de gros efforts pour réduire les déficits structurels de leurs comptes publics. Au Royaume-Uni, les réductions de dotation sont échelonnées et atteindront 12% par an d’ici 2015. Ceci confirme les conclusions de l’OCDE selon lesquelles les conséquences financières de la récession sont ressenties plus durement par les budgets locaux lorsque l’économie redémarre et que les gouvernements nationaux essaient de réparer les dégâts causés aux finances publiques en général.

Dans quelle mesure de telles réductions de la dépense publique sont-elles nécessaires? Cette question, spécifique à chaque pays, n’entre pas dans le champ d’études du présent rapport. Il est important cependant que les réductions de transferts soient appliquées de la manière la plus transparente, équitable et prévisible possible afin que les collectivités locales soient prévenues à l’avance et aient la possibilité d’ajuster en conséquence les prestations de services et l’emploi. Etablir l’assiette fiscale ou partager les transferts sur la base de prévisions en procédant à des ajustements ex post en fonction des données réelles (comme au Danemark par exemple) est un autre mécanisme permettant d’atténuer les pertes budgétaires et de stabiliser les flux de recettes.

Endettement

La dette infranationale courante a augmenté dans l’UE de 9,9% en 2009 et de 6% en 2010, soit 13% du déficit total du secteur public.


Dans certains Etats membres, l’endettement insoutenable des collectivités locales est devenu un problème. On constate à cet égard que lorsque les ressources affectées aux communes sont particulièrement volatiles et très sensibles au cycle de l’activité économique, en particulier les recettes courantes mais également les ressources issues de transferts, il se produit un phénomène d’«expansion-récession». En clair, les communes ont été relativement insouciantes pendant la phase d’expansion économique et incité à investir leurs excédents dans des projets d’équipement pharaoniques et à embaucher outre mesure. Pire, considérées comme très solvables pendant les «bonnes années» et pouvant emprunter facilement sur les marchés, les communes les plus prospères ont démultiplié leurs capacités budgétaires en recourant à une dette dont le service est désormais insoutenable.

Dans ces cas de figure, des mesures doivent être prises pour corriger les déséquilibres financiers du secteur des collectivités locales, et il faut recourir à une politique de restructuration de la dette municipale et de redressement des collectivités locales en difficulté financière. Se pose alors le problème plus fondamental du contrôle de l’endettement sans ingérence abusive dans l’autonomie locale et du renforcement du contrôle public de l’emprunt municipal. La structure réglementaire doit trouver un équilibre entre la liberté de s’endetter et la gestion de l’insolvabilité.

Les critères de Maastricht incitaient un certain nombre de pays à mettre en place un mécanisme intergouvernemental, baptisé «pacte de stabilité interne» ou «frein à l’endettement», visant à limiter la capacité d’emprunt du secteur public. Le Conseil de l’Europe a formulé des recommandations en 2004 et NALAS (Réseau des Associations de pouvoirs locaux du Sud-Est de l'Europe) a récemment publié des lignes directrices très complètes sur l’endettement des collectivités locales dans l’Europe du Sud-Est. Celles-ci méritent d’être consultées en permanence.


CHAPITRE III

TIRER UN PARTI MAXIMUM DES RESSOURCES LIMITÉES

 

Contraction budgétaire

Réduire la dépense publique ou non, et si oui de combien et à quelle échéance, sont des questions politiques très sensibles au niveau national, que l’on se trouve à Washington, à Whitehall, à Athènes ou à Madrid. Confrontées à une contraction croissante de leurs budgets, les collectivités locales ont moins d’espace pour le débat macroéconomique et idéologique. Exploiter au mieux les ressources limitées disponibles sera vraisemblablement un défi permanent à relever.

Comme on le verra au chapitre V, les dépenses ont pu être réduites en grande partie rien qu’en reportant les dépenses d’équipement. Des rapports révèlent cependant que de nombreuses initiatives ont été lancées pour améliorer l’efficience et l’efficacité des budgets locaux. Deux approches globales, l’une ascendante, l’autre descendante, ont été appliquées par les deux pays les plus gravement atteints par la récession: l’Irlande et l’Islande. 

Le gouvernement irlandais a mis en œuvre des réformes radicales, notamment: 

La ville de Reykjavik, confrontée à une baisse des recettes de 20% sur deux ans, a imposé: 

D’autres mesures d’austérité ont été souvent utilisées mais elles étaient ponctuelles et rarement stratégiques. Elles sont classées par catégories ci-après.

Réorganisation territoriale

La taille moyenne des collectivités locales varie énormément entre les régions; la moyenne de la population municipale s'étend de 1.640 en République tchèque et 1.720 en France contre 56.570 en Lituanie et 139.480 au Royaume-Uni.

La période 1980-1990 a été marquée par un certain nombre d’évolutions qui ont laissé une structure plus élaborée dans plusieurs pays, en particulier:

Alarmés par la crise financière, les pays ont porté une attention accrue au coût de cette prolifération institutionnelle et identifié une augmentation des frais généraux administratifs, une dilution des ressources professionnelles ou le manque d’économies d’échelle. Certains appliquaient déjà certaines mesures. En 2008, le Danemark avait fusionné 271 municipalités pour en créer 98. La Géorgie avait remplacé 985 municipalités, des villages pour la plupart, par 64 grandes collectivités de district fondées sur les anciens districts, politique déjà adoptée en Lituanie. Le nombre de municipalités finlandaises est passé de 447 à 348.  

La crise financière a donné un nouvel élan à ce processus dans trois des pays les plus gravement atteints. La Grèce a réduit le nombre de collectivités municipales de 1 034 à 325, l’Islande de 7 200 (en 1990) à 76, et la Lettonie de 500 à 118. Le nouveau gouvernement finlandais propose un regroupement important des municipalités à un échelon qui est actuellement régional (en prenant les centres urbains et les trajets domicile-travail comme idée maîtresse pour la rénovation).

Des municipalités plus grandes doivent consacrer une part plus faible de leurs ressources aux frais généraux et réaliser de plus grandes économies d’échelle. Toutefois, si le regroupement des communes peut permettre aux collectivités locales de fournir un éventail plus large de services ou des services de meilleure qualité, il n’est pas prouvé qu’il soit globalement une source d’économies. Mis à part les coûts ponctuels afférents au redécoupage, on observe une tendance des collectivités fusionnées à reprendre à leur compte les habitudes les plus coûteuses de leurs prédécesseurs.

L’approche consistant à renforcer les partenariats entre les municipalités permet de réaliser des économies plus rapidement en réduisant les coûts politiques. Elle a largement été accélérée par la crise et revêt différentes formes.


La première, qui résulte plus du processus d’adhésion à l’UE que de la crise, consiste à établir des sociétés intercommunales pour construire et exploiter des infrastructures environnementales telles que des décharges municipales et des usines de traitement de l’eau en réalisant d’importantes économies d’échelle. En Hongrie, le nombre de décharges municipales a diminué de 90% grâce à la constitution d’établissements publics communs capables d’exploiter au maximum les technologies modernes et les fonds structurels de l’Union européenne. Un cinquième des municipalités croates ont créé des entreprises des services publics communes.

La deuxième approche, également en cours, prévoit la mise en œuvre de la planification et de la prestation de services publiques dans le cadre de conurbations, comme en témoigne la forte augmentation des communautés urbaines françaises (et la création d’un nouvel niveau intercommunal, la métropole).

 

Une approche très utilisée dans le contexte financier actuel est celle qui consiste à mettre en commun les ressources professionnelles et les équipements nécessaires pour des opérations administratives comme la collecte de l’impôt, le contrôle de l’aménagement urbain, la gestion de la masse salariale, l’audit interne et les technologies de l’information. Les initiatives conjointes en matière des enchères publiques permettent d’obtenir des offres plus avantageuses et de réduire les frais d’administration.

 

En Slovaquie, la création de bureaux communs a permis de décentraliser des services publics comme l’éducation et l’aide sociale dans le cadre d’un système communal très fragmenté. Même au Royaume-Uni, où les collectivités locales comptent en moyenne des populations exceptionnellement nombreuses, la crise a incité à une gestion commune des services plus importante. La ville de Westminster s’est regroupée avec les communes voisines de Kensington et Chelsea pour gérer un service éducatif unique.

Le rapport néerlandais indique que les petites municipalités résistent au processus de regroupement mais considèrent comme acceptable la mise en commun des processus administratifs. Il s’agit là du résultat le plus répandu de la crise. Les collectivités irlandaises ont formé des « coalitions » pour gérer les appels d’offres, les technologies de l’information et le contrôle de l’aménagement urbain, au nord et au sud de la frontière. L’Espagne a enregistré l’année dernière 780 nouveaux accords intercommunaux.

Rationaliser la fourniture de services

 

La crise a stimulé la fermeture d’institutions de service public sous-utilisées. La Bulgarie, le Danemark, la Hongrie, la Moldova, la Roumanie, l’Ukraine et le Royaume-Uni font tous état de telles mesures, qui ont le plus souvent visé de petites écoles rurales. Dans de nombreux cas, la récession a donné l’occasion de procéder aux changements dus à l’évolution démographique. 

 

Ces mesures ont un coût social. L’association des autorités locales du Danemark note une réduction des visites des personnes âgées du fait des regroupements des centres d’accueil et l’Ukraine signale que les minorités ethniques ont du mal à suivre un enseignement dans leurs langues maternelles.


Il est fréquent que certaines dispositions administratives et financières incitent les collectivités locales à fournir des services inutilement coûteux. Ainsi, dans un certain nombre de pays comme la Hongrie ou l’Ukraine, la prestation de soins aux personnes âgées et malades en établissements spécialisés et de soins hospitaliers relève de la compétence des échelons supérieurs de l’administration locale, tandis que les municipalités se voient confier les soins à domicile et les soins de santé primaires. Le financement des services assurés par les collectivités de plus haut niveau repose parfois sur des formules de calcul qui prennent en compte le nombre de personnes accueillies ou traitées. Les dispositions de ce type risquent donc d’inciter fortement à placer certains clients des services sociaux en foyers ou d’hospitaliser des patients, alors que cela n’est peut-être pas la réponse la plus adaptée à leurs besoins, ni la plus compatissante. Dans la plupart des cas, il s’agit de la solution la plus coûteuse.

Les régimes de rémunération des prestataires à l’admission ou à l’acte peuvent gonfler les dépenses de soins médicaux. L’effet pervers de ces aides est largement admis et des systèmes de financement selon une classification en groupes homogènes de diagnostic (DRG, diagnostic-related group) ont été conçus pour l’éviter. Toutefois, des réformes de ce type n’ont pas été adoptées partout et la crise ne fait qu’accentuer leur urgence.

Les exemples d’excès dans les dépenses des services sociaux abondent. Des établissements scolaires dont le nombre d’élèves scolarisés diminue, par exemple, conservent souvent le même nombre d’enseignants, alors que le nombre d’heures qu’ils passent au contact des élèves est plus que faible.

Les réglementations nationales font souvent obstacle aux collectivités locales qui voudraient réduire leurs dépenses. Des services coûteux comme l’éducation, les services sociaux et les soins de santé sont souvent réglementés par des normes précises relatives à leur prestation, et leur gestion par les collectivités locales est placée sous le contrôle étroit de leur ministère de tutelle. Généralement, ces normes réglementaires régissent les moyens plus que les résultats.

C’est en particulier le cas dans les pays qui font la distinction entre les missions «autonomes» et les missions «déléguées» des collectivités locales et placent les coûteux services à la personne dans la première catégorie. Ainsi, les collectivités locales ukrainiennes ne sont pas habilitées à fermer des établissements scolaires en sous-effectif notoire, ni des institutions sociales ou culturelles, sans le consentement du ministère national, lequel est souvent refusé. Or, ces institutions peuvent parfaitement avoir perdu leur clientèle du fait de l’évolution démographique ou des préférences du public.

Le problème est généralement exacerbé par le fait que les ministères de tutelle concernés ne sont pas confrontés aux conséquences du maintien de services non rentables, étant donné que le financement des compétences déléguées relève souvent de la compétence exclusive du ministère des Finances. Plusieurs rapporteurs nationaux relèvent que l’incapacité à satisfaire à des normes de prestation non viables est chose courante, mais tolérée. D’autres considèrent que l’insistance de leurs autorités nationales sur le respect de ces normes constitue un problème sérieux. Les signataires de la Charte européenne doivent veiller à ce que les ministères nationaux n’assurent pas une micro-gestion des services confiés aux collectivités locales, qu’il s’agisse ou non de délégations techniques.


Emploi

En général les contribuables considèrent que les mairies sont en sureffectifs. La bureaucratie pléthorique, qu’elle soit un mythe ou une réalité, fait partie de l’inconscient collectif. Les réponses à la récession ont donc très vite et très largement inclus des solutions consistant à réduire les effectifs ou les salaires (ou les deux).

Dans certains cas, les mesures de réduction ont été radicales. Les collectivités locales irlandaises ont supprimé 6.600 emplois au cours des trois dernières années. Les établissements municipaux danois ont vu leurs effectifs réduits de 2,6% en 2009. En Albanie, la réduction a été de 3% en 2010. Le gouvernement ukrainien a fixé un objectif général de 20% de réduction des emplois dans le secteur public.

Mais de nombreux autres États ou collectivités ont essayé d’évider les compressions d’effectifs, parce que les coûts des indemnités de départ sont importants et pour éviter d’aggraver la récession. D’autres solutions, notamment les gels et les baisses de salaires, ont été largement adoptées. En Espagne, les salaires ont été diminués de 5%. Ils l’ont été de 15% en Estonie et en Lettonie, et de 25% en Roumanie. Le gouvernement grec a réduit le salaire et les primes tandis que la Hongrie a gelé le treizième mois de salaire en 2009 et en 2010, sauf pour les salariés les moins payés. La même approche progressive a été adoptée au Portugal où des réductions ont été imposées sur tous les revenus du personnel gagnant plus de 1.500 euros, l’ampleur de la réduction augmentant avec le salaire jusqu’à un maximum de 10%. Les salaires de tous les fonctionnaires britanniques sont gelés en 2011/2012. La Lettonie n’a pas diminué les effectifs mais a réduit la semaine de travail à quatre jours. Les municipalités islandaises, quant à elles, ont réduit le nombre d’heures de travail et d’heures supplémentaires.

Ces réductions sont généralement considérées comme temporaires et ont pour but de maintenir l’attractivité à long terme des services publics. La métropole d’Istanbul a évité les licenciements mais a réduit d’autres dépenses comme l’usage des téléphones et des voitures officielles.

Depuis 2009, le gel des recrutements s’est généralisé. La Roumanie ne permet de pourvoir qu’un poste sur sept. La Serbie a légiféré pour imposer un plafond de quatre fonctionnaires municipaux pour 1 000 habitants. Un certain nombre de municipalités ont préféré licencier leurs fonctionnaires et leur sous-traiter ensuite les tâches dont ils étaient responsables auparavant. 

Les élus n’ont pas entièrement été épargnés par ces sacrifices. Le parlement slovaque a voté une loi réduisant les salaires des maires, et lorsque les mandats des conseils locaux hongrois ont expiré en 2010, le nombre des conseillers a été réduit de 30 à 40%.


Alors que les gouvernements s’efforcent de restaurer la viabilité à long terme des finances publiques, la question connexe des droits à la retraite est venue au premier plan. Confrontées au problème de la longévité croissante des populations, les réformes portent sur trois aspects: le niveau de la contribution aux fonds de pension, l’âge du départ à la retraite et la base d’évaluation. Les propositions concernent en général autant l’échelon national que l’échelon local. En 2010, le gouvernement français s’est opposé aux syndicats pour faire adopter des changements modestes par le parlement. Des changements plus radicaux devraient être adoptés sur le plan législatif au Royaume-Uni.

Partenariats public-privé

 

Autre solution favorite du New Public Management, ou modèle de management public: l’externalisation de la gestion des services locaux au secteur privé. Cette solution pourrait sembler évidente en période de pénurie fiscale car le jeu de la concurrence et des économies d’échelle peut réduire potentiellement les coûts. Cependant, le recours à cette solution n’est que très peu mentionné dans les rapports, ce qui est surprenant. Des conseils de comté britanniques ont bien tenté une ou deux expériences d’externalisation, très médiatisées, mais elles ne se sont pas concrétisées. En France et en Hongrie, on note des cas de résiliation de concessions de services publics.

La crise a également ralenti la généralisation des partenariats avec des acteurs du secteur privé qui assurent l’investissement initial dans un équipement de service public. Ces partenariats restent répandus dans des domaines comme celui du traitement des déchets pour lequel la construction et l’exploitation peuvent être regroupées sous une seule direction et où les coûts peuvent être récupérés directement auprès des bénéficiaires. En revanche, l’efficience n’est pas optimale lorsque la responsabilité de l’exploitation est répartie de manière fragmentée entre les investisseurs commerciaux et les professionnels du service public. Les coûts peuvent également grimper lorsqu’il faut leur ajouter les taux d’intérêt plus élevés liés aux emprunts souscrit par les acteurs du secteur privé. L’Islande et le Royaume-Uni mentionnent les conséquences graves que les variations des prix des biens immobiliers ont sur les transactions de type cession-bail.

En revanche, la crise a accru l’intérêt des partenariats avec des acteurs du secteur du bénévolat et de l’entreprise sociale en vue d’exploiter des services au niveau de la communauté. En Grande-Bretagne, David Cameron a présenté sa vision de «grande société», qui prévoit un partage des responsabilités entre l’État et la communauté. Un projet de loi permettrait à des groupes communautaires de demander le droit de gérer des équipements et des services locaux. Au Danemark, 100 millions de couronnes ont été affectées en 2011 pour encourager la participation bénévole à la gestion des services publics locaux.

La crise, cependant, constitue une menace pour la participation du troisième secteur, en particulier les prestations d’assistance sociale aux groupes vulnérables. Les organismes de bienfaisance britanniques indiquent qu’ils ont perdu 100 millions de livres en 2011 parce que les collectivités locales ont réduit leurs subventions, mais le gouvernement affirme qu’il a fourni un milliard de livres supplémentaires pour l’aide sociale pour la période allant jusqu’en 2014.


Contrôle des coûts

Les rapports des observateurs nationaux dressent l’inventaire des initiatives prises par les collectivités locales pour maîtriser leurs coûts. Les mesures portent surtout sur les frais généraux et incluent diverses réductions sur les postes d’heures supplémentaires, de primes, de cérémonies officielles et d’utilisation du téléphone, cependant que les achats de véhicules et de mobilier ont été gelés. S’agissant de la Roumanie, certaines de ces dispositions ont été dictées par les mesures d’efficacité adoptées avec l’Union européenne en tant que condition requise pour une assistance au budget national. En Serbie, des GPS ont été installés dans les véhicules municipaux de façon que leurs conducteurs sachent se situer et que les autorités municipales puissent les localiser.

Pour justifiées qu’elles puissent être, il s’agit là d’économies temporaires ou ponctuelles qui n’auront pas de grands effets sur l’efficacité à plus long terme. Pour agir sur le plus long terme, il convient de procéder à un examen fondamental de la manière dont les services sont gérés dans la pratique, du champ thématique des analyses de rentabilité de l’investissement et des systèmes d’audit de gestion, mis en place au cours des trente dernières années au nom du modèle du New Public Management, ou modèle de management public. Trois efforts en particulier peuvent être disséminés:

L’étalonnage des performances est l’un des outils conçus pour aider l’opinion publique à examiner à la loupe le soin avec lequel son argent est utilisé. La Charte des citoyens (Citizen’s Charter) en constitue un autre: il s’agit habituellement d’un engagement vis-à-vis des citoyens de garantir le respect de certaines normes dans la prestation des services et d’un ensemble de procédures par lesquelles ceux-ci peuvent vérifier si ces engagements sont tenus. 

Le Conseil de l’Europe contribue au développement des capacités de gestion des performances dans un certain nombre de pays tels que la Bulgarie, la Russie et la Serbie. Il apporte également son aide aux initiatives françaises dans ce domaine. La récession financière en accentue la nécessité.


Le gouvernement roumain a mis un accent accru sur les processus de gestion des communes afin d’éviter l’accumulation des dettes et des arriérés. Les estimations de recettes ne peuvent pas dépasser 95% des recettes réelles de l’année précédente et les paiements courants doivent être inclus dès la première phase d’élaboration des nouveaux budgets. L’augmentation de l’endettement donne une nouvelle importance aux procédures d’insolvabilité des communes inscrites dans la législation hongroise et le programme grec Kallikratis.

L’information joue un rôle essentiel dans la réduction des coûts de nombreux services. A partir de 2012, toute demande du public adressée aux municipalités devra être en ligne. Les citoyens irlandais paient leurs taxes et impôts locaux en ligne. Le «libre-service» est désormais à la disposition des usagers des bibliothèques publiques britanniques qui enregistrent les livres empruntés et rendus sur le terminal de la bibliothèque. En Espagne, les autorités locales sont accessibles aux citoyens par internet.

Contrôle de gestion

En 2006, LGI a examiné l’audit réalisé dans les collectivités locales de douze pays européens d’Europe de l’Est et du Sud-Est. Il a été constaté que la plupart des États disposent d’un cadre législatif adéquat, adopté en grande partie récemment avec l’aide de l’Union européenne, mais que leur application est encore insuffisante.

On note une pénurie de contrôleurs qualifiés dans le secteur public et par conséquent, les audits externes sont en fait rares. Inévitablement, la situation est pire dans les pays où il existe une multitude de petites collectivités (seuls les comptes définitifs de 84 des 7 455 collectivités locales roumaines ont été vérifiés).

Les audits s’attachent essentiellement aux questions de légalité et de respect des procédures prescrites; quoique figurant dans le cahier des charges, l’efficacité et la rentabilité sont rarement examinées. La formation en matière d’audit sur ces questions est souvent insuffisante. En règle générale, l’opinion ne s’intéresse guère aux résultats des audits, et l’opacité coutumière et la prudence qui caractérisent les rapports publiés sur le sujet n’aident guère à susciter plus d’intérêt.

Le Conseil de l’Europe apporte son aide au développement des capacités en audit de gestion dans un certain nombre de pays comme la Bulgarie, la Russie et la Serbie. La récession financière renforce ce besoin. Dans «l’ex-République yougoslave de Macédoine» et en Roumanie, par exemple, les petites municipalités ont utilisé des associations intercommunales pour employer des contrôleurs internes qualifiés.

L’ambitieuse Stratégie pour l’innovation et la bonne gouvernance au niveau local, lancée par le Conseil de l’Europe, prévoit parmi ses mesures de mise en œuvre la création d’un label européen d’excellence dans la gouvernance (ELOGE), qui serait décerné de manière décentralisée à des municipalités atteignant un certain niveau de qualité dans leur gouvernance globale. Reposant en particulier sur un outil d’étalonnage/de mesure spécifiquement conçu pour les besoins des collectivités locales, ce label pourrait, s’il aboutit, se révéler très efficace pour aider à améliorer la gouvernance locale.


Autre forme de contrôle de gestion, l’utilisation d’enquêtes d’opinion auprès des consommateurs. Il s’agit d’une des approches préconisées par la Charte des citoyens.



Encadré 2

Enquêtes de satisfaction auprès des utilisateurs concernant l’usage des services publics locaux au Danemark

Communes

En 2007, le gouvernement danois a publié, dans le cadre de son programme de réforme pour améliorer la qualité, une proposition visant à utiliser des enquêtes de satisfaction pour connaître l’avis des usagers concernant un large éventail de services fournis par les collectivités locales (sachant que les communes fournissent des services d’éducation primaire, des maternelles, une assistance sociale aux personnes âgées et d’autres services sociaux, et que les régions fournissent des services de santé et des hôpitaux). Cette proposition s’inspirait notamment de l’exemple d’un nombre croissant de communes qui considéraient qu’il s’agissait d’un moyen utile pour identifier et améliorer la qualité des institutions municipales. Elle exprimait également une volonté d’être en mesure de comparer les résultats entre les communes.

Une coopération entre le gouvernement et l’Association des Municipalités a permis de lancer un projet pilote qui a débouché sur l’élaboration d’une boîte à outils applicable à chacun des grands services fournis localement. Le nouvel outil a donné des résultats très satisfaisants et les deux parties ont souhaité le déployer pour que les communes puissent l’utiliser. Il n’a malheureusement pas été mis en œuvre à cause d’avis divergents sur le coût de ce programme à caractère obligatoire. Les enquêtes sont désormais conduites sur une base volontaire.

Le gouvernement et l’Association des municipalités ont néanmoins décidé en 2010 de recommander que des enquêtes soient conduites tous les deux ans sur la base d’un ensemble de définitions permettant de comparer les résultats obtenus par diverses communes. Plusieurs fournisseurs privés proposent désormais des programmes de ce type, et le ministère de l’Intérieur et de la Santé met actuellement au point une base de données numérique centralisée pour les nombreux résultats des différentes enquêtes.

Aucune preuve n’a pu être avancée que la satisfaction de l’usager est corrélée à la quantité de ressources disponibles, et c’est peut-être la raison pour laquelle ces enquêtes sont tant appréciées par les collectivités locales. Elles indiquent que l’on peut améliorer la satisfaction de l’usager sans nécessairement dépenser davantage et qu’il suffit de faire les choses en bonne et due forme. Des données probantes montrent également que le fait de révéler qu’une institution n’est pas à la hauteur des attentes des utilisateurs débouche en général sur des mesures qui améliorent la satisfaction dans l’enquête conduite l’année suivante, ce qui laisse entendre que les institutions prennent des mesures correctives lorsque la satisfaction des usagers diminue. 

Régions

Dans les régions, les enquêtes de satisfaction conduites auprès des patients concernant les hôpitaux (y compris les hôpitaux privés et les cliniques hors hôpitaux) sont annuelles et les résultats sont publiés sur le web pour chaque hôpital (ainsi que les informations sur le temps d’attente et d’autres mesures de la qualité de service). Les enquêtes sont réalisées à titre volontaire par les régions qui ont choisi de couvrir une vaste population de 250 000 patients hospitalisés et externes (leur nombre est équivalent à environ 5 pour cent de la population nationale). Les enquêtes sont si complètes que les résultats révèlent également des différences de satisfaction par départements hospitaliers. Les régions estiment désormais que les enquêtes sont des instruments indispensables pour contrôler la qualité des prestations de leurs différentes institutions. 



Transparence

Une approche moins structurée pour comprimer des coûts excessifs a été adoptée par des collectivités locales de pays aussi divers que la Grèce et le Royaume-Uni. Elle consiste à publier sur Internet le détail de tous les postes de dépenses dépassant un certain plafond (600 euros pour Windsor, par exemple) afin que des médias zélés les examinent de très près. Les municipalités tchèques et slovaques sont désormais contraintes de publier en ligne les achats et les contrats.

Encadré 3

Enchères électroniques en Slovaquie

 

Une société logicielle, PROe.biz, commercialise un système d’enchères électroniques depuis 2002. Depuis le début de la crise, ce système a été fréquemment utilisé pour les passations de marchés concernant la construction et la fourniture de biens et de services. Cette procédure est obligatoire depuis avril 2011.

Les appels sont publiés d’une manière normale, mais les offres le sont en ligne. Les soumissionnaires peuvent par la suite réduire leurs prix et modifier d’autres critères comme la date de livraison. Les prix et d’autres facteurs sont pondérés par une formule publiée et l’offre mieux disante est retenue. Des recherches conduites par Transparency International indiquent que des économies de 50% ont pu être réalisées dans le secteur des passations de marchés publics (contre 18% dans le secteur privé).

Certains délégués présents à la Conférence de Strasbourg en 2011 se sont montrés préoccupés par l’opacité des opérations hors budget conduites par les municipalités dans leurs pays respectifs. Non seulement ces transactions échappent au contrôle des conseils locaux élus mais les risques financiers qu’elles supposent peuvent constituer une charge pour les budgets locaux. Le lien entre un budget local et des entreprises publiques détenues par la municipalité pourraient soulever des problèmes de non-transparence, un manque de contrôle politique et un risque financier non prévu. Les délégués ont estimé que l’existence, voire l’accumulation, d’arriérés de paiement des budgets locaux vers les établissements publics locaux constituait un bon indicateur de ces risques. Le lien d’interdépendance qui existe entre les municipalités et leurs établissements publics mérite une attention particulière du Conseil de l’Europe.


CHAPITRE IV

 CONSEQUENCES SOCIALES DE LA CRISE

Responsabilités sociales partagées

Les pays industriels développés, affectés par la crise, sont confrontés non seulement à des défis économiques mais aussi à une croissance de l’insécurité de l'emploi, à une extension de la pauvreté, à une aggravation des inégalités sociales ainsi qu’à des formes d’exclusion sociale plus dures.

Dans le contexte de ce défi, le Conseil de l’Europe élabore actuellement une Charte européenne des responsabilités sociales partagées. Le projet de recommandation du Comité des Ministres aux Etats membres (DGIII/DCS (2011) 09) reconnaît l’idéal de la protection sociale universelle en tant que fondement du modèle social européen et considère qu’il fait partie intégrante du patrimoine européen. Cherchant à le concilier avec la réalité économique, il reconnaît que «le surendettement public, dans un contexte de spéculations financières, expose les Etats aux risques de crises répétées et les affaiblit dans leur mission d’assurer l’accès à la protection sociale et à la santé, à l’éducation, au logement et aux biens communs en général, alors que cet accès égal pour tous représente une source essentielle de confiance et de cohésion sociale».

Le partage de la charge des responsabilités sociales recouvre non seulement l’interdépendance des membres de la société et, le cas échéant, la responsabilité des catégories de la population les plus favorisées en termes de partage des effets négatifs de la crise avec les catégories les moins nanties, mais aussi l’idée selon laquelle, pour compenser l’affaiblissement du rôle des entreprises de l’Etat, il est recommandé aux organisations sociales, familles et individus d’acquérir les compétences et la motivation nécessaires pour exercer et partager des responsabilités sociales.

Ce chapitre examine les impacts sociaux de la crise, le rôle du gouvernement local pour répondre, et la possibilité de partager ce rôle avec d'autres partenaires envisageables.

Impacts du ralentissement économique sur la société

La crise a eu des impacts différents selon les couches sociales, la couche la plus défavorisée ayant été la plus durement touchée. Les données statistiques illustrant ces effets démontrent les tendances suivantes:


négatif sur le budget des ménages dans ces pays, où il n'ya pas de prestations de logement ciblées (tableau 3).

Tableau 1. Taux du chômage en Juillet 2011, ajusté

Source: EUROSTAT

Tableau 2[3]. La privation matérielle par group d’age (%) 2009

 

Tableau 3.[4] Augmentation des coûts des ménages (%) 2009



Certaines de ces caractéristiques étaient évidentes dès avant la crise économique et ont seulement été aggravées. Le taux moyen de pauvreté a progressé dans treize pays (Allemagne, Bulgarie, Chypre, Danemark, Estonie, Finlande, Grèce, Lituanie, Lettonie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas et Suède) entre 2005 et 2009.

 

S’agissant des perspectives à long terme, la situation des pays européens est particulièrement inquiétante, sachant que les enfants y sont plus sévèrement touchés par la pauvreté et la privation que les autres groupes d’âge

Le contexte national

Même si les documents officiels évoquent généralement le modèle social européen et l’Etat providence, en fait les systèmes de protection sociale sont différents en Europe. Les différences concernent, entre autres, la part des dépenses de sécurité sociale financée par des ressources publiques ; les sources des prestations sociales ; la répartition des responsabilités entre les différents échelons de l’administration, le secteur marchand et le secteur non public ; les services et prestations sociales en espèces de caractère obligatoire et non obligatoire. L’impact du ralentissement économique a été vraisemblablement plus marqué dans certains types de systèmes tandis que d’autres ont affiché une plus grande résistance (Tableau 4).

Tableau 4. Total des dépenses publiques générales de protection sociale par pays en 2008 (en % du PIB, par groupe de fonctions)


Dans certains pays, les dépenses de protection sociale ont fait l’objet d’une réduction ou un débat passionné a été engagé sur le caractère inévitable d’une telle réduction.Le projet de recommandation du Comité des Ministres sur la Charte européenne des responsabilités sociales partagées proposée attire l’attention sur la nécessité «[d’aller] au-delà d’une vision réductrice de l’efficacité économique qui ne tient pas compte du bien-être collectif».

Les disparités sont encore plus prononcées si l’on considère les dépenses de protection sociale en parité de pouvoir d'achat par habitant. Ces dépenses s’élevaient en 2008 à 14 057 au Luxembourg et 9 557 aux Pays-Bas, mais à seulement à 1 716 en Roumanie et 1 661 en Bulgarie, par rapport à 6 604 en moyenne dans l’UE-27. (Tableau 5).

Tableau 5. Dépenses de protection sociale en parité de pouvoir d'achat

par habitant, 2008

Responsabilités sociales et budgets locaux

Les principales institutions du système de protection sociale recouvrent les services d’assurance sociale (santé, accidents, retraite et chômage), les prestations sociales en espèces universelles et soumises au critère des revenus et les services sociaux. La responsabilité de la gestion de ces institutions est répartie entre l’administration centrale, les caisses de sécurité sociale et les collectivités locales de différentes façons. En fonction du système propre à chaque pays, il se peut que les administrations locales supportent une partie des coûts croissants des postes suivants:

·         allocations relatives au logement et aux services d’utilité publique (en raison de la baisse des revenus des ménages ou du ralentissement de la procédure de remboursement par l’administration centrale);


·         paiements au titre du «filet de sécurité» aux chômeurs de longue durée et aux autres personnes éligibles à un revenu minimum garanti;

·         aide d’urgence aux familles en attendant l’octroi de prestations sociales par l’Etat;

·         soins à une population grandissante de personnes âgées et handicapées;

·         protection à un nombre croissant d’enfants de familles en situation de dénuement.

En 2010, ces dépenses pour les budgets locaux ont progressé de 10% au Danemark, 22% en Hongrie et 24,5% en Slovaquie.

Ces charges supplémentaires ne sont pas nécessairement permanentes, même s’il est historiquement établi que le niveau de l’emploi se rétablit plus lentement que celui du PIB. Cependant, les tendances démographiques induisent des coûts durables et croissants, sachant que le pourcentage de la population âgée de plus de 65 ans aura progressé de 50% d’ici 2050. Dans de nombreux pays européens, la charge des soins reposera sur un nombre décroissant de personnes en âge de travailler.

Les responsabilités sociales des administrations locales sont soumises à des pressions aussi bien à court terme qu’à long terme. Les soins aux personnes âgées constituent un poste de dépenses qui continuera à croître.

 

La capacité du gouvernement local pour répondre à ces responsabilités croissantes est limitée par les réductions des recettes déjà discuté dans le chapitre 2, et par des réductions de personnel touchant décrit au chapitre 3. (Rapports des observateurs se réfèrent à des réductions dans le nombre et la rémunération du personnel dans 20 pays). Les stratégies pour combler ce fossé entre la demande en hausse et la diminution des ressources comprennent:

·         Amélioration du ciblagedes prestations sociales;

·         Promouvoir les soins en communauté plutôt que résidentiels, en particulier pour les personnes âgées;

·         Accroître la coopération avec autres autorités locales, avec des entreprises privées et sociales et avec les organisations bénévoles.

Ces questions sont abordées à tour de rôle.


Ciblage de l’aide sociale

La crise a commencé à susciter des efforts en vue de mieux cibler les prestations sociales. Ainsi, certaines villes roumaines, y compris Bucarest, ont supprimé les subventions aux entreprises de chauffage pour les remplacer par des aides soumises au critère des revenus en faveur des consommateurs individuels. Chisinau et Zagreb ont toutes deux commencé à appliquer le critère des revenus aux aides relatives aux transports publics. L’accès gratuit aux crèches et à l’éducation préscolaire en Croatie est désormais soumis au critère des revenus. En Roumanie, un projet de loi propose d’appliquer le critère des revenus aux allocations pour enfants.

Un ciblage plus efficace constitue une mesure positive s’il vise à allouer davantage de ressources financières aux familles vivant dans la pauvreté, mais peut marquer une régression s’il s’accompagne des critères de conditionnalité qui excluent certains groupes de la population pauvre du système de protection sociale.

Soins de proximité

Les tendances démographiques appellent des changements fondamentaux dans l’équilibre de la fourniture des soins à long terme aux personnes âgées, domaine dans lequel les administrations locales jouent généralement un rôle primordial de gestion et de financement. La nécessité de corriger toute distorsion institutionnelle ou financière en faveur des soins en établissement a déjà été soulignée, sachant que ces soins sont généralement plus onéreux et souvent moins sympathiques que les soins de proximité.

L’équilibre historique entre les soins en établissement et les soins à domicile aux personnes âgées varie considérablement d’un pays européen à l’autre, les pays postcommunistes étant les plus attachés aux soins en établissement et les pays méditerranéens ayant le plus préservé la tradition des soins dans le cadre familial. Cependant, si les réactions contre le socialisme d’Etat ont réduit la distorsion en faveur des soins en établissement en Europe orientale, les possibilités de soins dans le cadre familial se sont également réduites dans la plupart des pays du fait des flux migratoires croissants des jeunes générations à la recherche d’emploi dans les villes et les pays étrangers. Désormais, les politiques sociales privilégient de plus en plus des soins et un appui financier mixtes pour les personnes âgées, ce qui leur permet de choisir le lieu et le type de soins.

Deux mécanismes financiers ont été promus à cette fin. Le premier correspond à une assurance obligatoire des soins de longue durée. Principalement lancée en Allemagne, il est largement reconnu comme une solution pertinente, mais la crainte d’un renchérissement du coût de l’emploi a jusqu’à présent fait obstacle à son adoption obligatoire ailleurs.


En guise de mécanisme substitutif, plusieurs pays ont désormais remplacé les services en nature aux personnes âgées par des prestations en espèces qui sont basées sur le coût de la vie et pondérées selon le degré de dépendance, mais peuvent de façon souple servir à acheter les types d’assistance les plus nécessaires auprès de toute partie susceptible de les fournir. De telles allocations ont été introduites dans un éventail de pays tels, que la France, la Pologne, la Serbie, la Slovaquie, l’Espagne et le Royaume-Uni. Elles offrent aux bénéficiaires des possibilités de choix, lesquelles favorisent la concurrence, l’efficacité et le respect de la dignité. Des maisons de retraite peuvent proposer des services externes, tels que les repas, les boutons d’alarme, le blanchissage, le jardinage et le ménage, à des personnes âgées non résidentes. En Italie, un nombre élevé de migrants sont employés dans les ménages de personnes âgées, au salaire minimum légal ou en-dessous et financés par l’allocation pour soins. Au Royaume-Uni, des bénévoles peuvent se faire payer des frais de carburant pour conduire des voisins dans un établissement de soins, au supermarché ou à la banque.

Dans la pratique, la plupart des soignants familiaux et bénévoles sont des femmes. Cela doit être reconnu dans des arrangements qui facilitent une combinaison de l'emploi salarié et de soins à domicile en collaboration avec la rentrée dans une carrière à temps plein à un stade ultérieur.

Aider les personnes âgées à rester à leur domicile malgré un handicap implique également un appui aux membres de la famille et à d’autres soignants informels, sur lesquels repose le gros du fardeau le cas échéant. Dans plusieurs pays, tels que la Slovaquie, les travailleurs partant à la retraite de façon anticipée en vue de s’occuper d’un membre de leur famille peuvent bénéficier d’une compensation à titre de perte de revenu de retraite. Des soins en établissement peuvent être dispensés pendant une période courte pour permettre aux soignants habituels de prendre du repos. En Bulgarie et en Roumanie, les soignants informels peuvent être rémunérés sur la base du salaire minimum légal.

Par ailleurs, il est possible d’agir sur le handicap et la dépendance en découlant par la promotion d’un mode de vie actif chez les personnes âgées (loisirs, centres de jour, etc.). Le tai-chi est introduit dans la palette des compétences discrétionnaires des municipalités.

Les soins aux personnes âgées relèvent de plus en plus de l’économie mixte. En Espagne, le secteur privé assure 80% des soins en établissement, sachant que les organismes religieux sont spécialisés dans les soins de santé mentale. En Roumanie, l’église orthodoxe développe actuellement l’offre de soins en établissement. En Bulgarie, les soignants à domicile sont financés par la coopération entre les municipalités, la Croix-Rouge et UniCredit Bank.


Coopération intercommunale

La croissance de la coopérationintercommunale discutée en général dans le chapitre 3 s'appliquespécifiquement à la prestation de services sociaux dans les efforts visant à réduire les frais généraux, et à augmenter les économies d'échelle, conduisant à une meilleure qualité en termes de personnelprofessionnel et variété de services. Ce développement a été signalé en Albanie, Arménie, Autriche, Croatie, République tchèque, Danemark, Estonie, Finlande, Géorgie, Hongrie, Islande, Irlande, Lettonie, Slovénie, Royaume-Uni et l'Ukraine. La coopération intercommunale et le regroupement des fournisseurs de services peuvent avoir un rôle particulièrement important dans les pays avec unepopulation agraire relativement importante.

Responsabilités sociales partagées

Les soins aux personnes âgées ne sont qu’un des domaines de la responsabilité sociale dans lesquels les administrations locales coopèrent de plus en plus avec des partenaires du troisième secteur (des entreprises sociales aux organismes caritatifs sans but lucratif en passant par les bénévoles individuels). Cela reflète la demande et l’offre, cette dernière étant renforcée par la forme et l’énergie des personnes nouvellement retraitées.

Impliquer la communauté et les acteurs de la société civile peut enrichir l'offre de services, favoriser l'innovation et contribuer à la nouvelle interprétation de la cohésion sociale, à savoir le partage des responsabilités sociales. Toutefois, en ce sens, les pays ont suivi des voies différentes, ainsi: certains d'entre eux ont une tradition séculaire de la participation non gouvernementale dans la prestation de services, d'autres, principalement les pays post-socialistes ont à relancer ou à consolider les organismes bénévoles.

Cependant, on a constaté de manière empirique que les dépenses des budgets locaux en appui aux partenaires du troisième secteur se contractent de manière disproportionnée. Il y a au moins deux raisons à cela. Premièrement, les services fournis par ces partenaires sont souvent discrétionnaires et moins réglementés par des normes obligatoires. Deuxièmement, la réduction de ces dépenses n’implique pas des coûts de licenciement d’agents publics.

Cette tendance peut être fâcheuse si les principaux bénéficiaires de ces services sont les ménages les plus vulnérables. Les programmes de développement de la petite enfance préparent les enfants des familles à bas revenus ou immigrantes à l’éducation formelle. Les maternelles et les clubs d’accueil après l’école laissent du temps libre aux mères à bas revenus pour se livrer à des activités rémunératrices. Les partenaires du troisième secteur fournissent des soins appréciables aux personnes handicapées et aux toxicomanes. Donner la priorité à l’appui aux employés publics et aux services obligatoires peut donc avoir des conséquences dommageables pour les besoins des personnes les plus vulnérables et pour la cohésion sociale – danger sur lequel le Commissaire européen aux droits de l'homme a attiré l’attention lors de la conférence de Strasbourg d’octobre 2010 et dont il a récemment réitéré. Certains ministres en charge des administrations locales ont tenté de contrer cette tendance, et on espère que la conférence de Kyiv plaidera dans ce sens.


CHAPITRE V

DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DURABLE: RÔLE DES COLLECTIVITÉS LOCALES

Financement des dépenses d’investissement locales

Les collectivités locales gèrent une part importante des dépenses d’investissement publiques globales. En moyenne, dans les 27 pays de l’Union européenne, la part des collectivités infranationales représente près des deux tiers de la formation brute de capital fixe de l’ensemble du secteur public[5] (graphique 1: 63% en 2010). En période de récession économique, la capacité des collectivités locales de financer et d’engager des dépenses d’investissement est donc fondamentale. Elles contribuent au redressement économique en maintenant le niveau des investissements publics et en lançant de nouveaux projets lorsque les investissements privés ralentissent. Cependant, les collectivités locales dépendent pour une part assez élevée de ressources externes comme les dotations en capital faites par l’Etat, et les dépenses d’investissement peuvent facilement faire l’objet de restrictions. Il s’agit là d’un poste vulnérable du budget public. 

Les dépenses d’investissement locales sont étroitement liées au niveau de décentralisation fiscale. Dans les pays plus décentralisés, la part des collectivités locales dans les dépenses d’investissement est bien supérieure à la moyenne de l’Union européenne. Dans les pays où la décentralisation fiscale est moindre – mesurée par le niveau des dépenses infranationales exprimé en pourcentage du PIB –, leur contribution aux dépenses d’investissement est limitée. Des exceptions existent dans des pays où les dépenses d’investissements sont élevées: par exemple dans des pays moins décentralisés comme la Lettonie, l’Irlande et la Slovaquie où les dépenses d’investissement locales sont financées essentiellement par les fonds structurels de l’Union européenne. En Italie et en France, la décentralisation administrative explique partiellement le niveau élevé des dépenses d’investissement infranationales.

Graphique 1 : Dépenses d’investissement infranationales en % du budget national 2009-2010.

Dépenses infrationales en % du PIB


La récession économique a touché les budgets d’investissement des collectivités locales avec un certain retard: la part des collectivités infranationales dans le montant total des dépenses d’investissement publiques était de 65,5% in 2009 avant de diminuer l’année

La récession économique a touché les budgets d'investissement des collectivités locales avec un certain retard: la part des collectivités infranationales dans le montant total des dépenses d'investissement publiques était de 65,5% en 2009 avant de diminuer l'année suivante (63%). Ce décalage était dû aux programmes de relance économique mis en œuvre dans les pays les plus développés d’Europe et à la meilleure capacité d’absorption locale des fonds de l’UE. Il semble qu’à partir de 2010, c’est-à-dire la troisième année de la récession économique, ces ressources aient diminué et que la tendance globale à la centralisation ait réduit le rôle joué par les collectivités locales dans les dépenses d’investissement du secteur public (par exemple dans des pays comme le Portugal, la Bulgarie, le Danemark, la Grèce et l’Estonie).

Dans les 27 pays de l’UE, les dépenses d’investissement des collectivités infranationales ont reculé de 10,5% en 2010 par rapport à l’année précédente (graphique 2). Six pays seulement ont pu augmenter la formation brute de capital à l’échelon local: parmi eux, cinq sont de nouveaux États membres qui bénéficient principalement des dotations de l’UE (Lituanie, Hongrie, Slovaquie, Roumanie, Pologne). Tous les autres ont soit conservé les dépenses d’investissement au même niveau, soit les ont réduites. En dehors des pays les moins décentralisés (Malte, Bulgarie et Chypre), les pays les plus touchés par la crise appartiennent à ce groupe: Grèce, Portugal, Espagne, Italie. 

Aussi, contrairement aux tendances favorables de 2009 qui voyaient les dépenses d’investissement à l’échelon local augmenter de 11,8% dans les 27 pays de l’UE, l’année 2010 a été celle des changements radicaux. A cet égard, la récession économique a touché les collectivités locales avec un an de retard. Elles ont dû faire face à une baisse générale de toutes leurs recettes et ont été contraintes d’équilibrer en premier lieu leurs budgets courants. 

Graphique 2 : Variations de la formation brute de capital à l’échelon national (en % de l’année précédente)


Source: Eurostat


Sources de financement des dépenses d’investissement locales

Au stade ultérieur de la reprise économique, les collectivités locales seront confrontées à de nouveaux problèmes financiers. Les programmes d’incitation fiscale qui ont été mis en œuvre dans la partie développée de l’Europe ne pourront pas être poursuivis car le niveau élevé de déficit budgétaire et d’endettement public limitera la capacité des gouvernements nationaux à lancer de grands programmes d’investissement. La pression qui s’exercera sur le budget courant des municipalités (remboursement de la dette, réductions fiscales, coûts opérationnels des nouveaux investissements, etc.) réduira les ressources locales disponibles pour les dépenses d’investissement. 

Dans les nouveaux Etats membres de l’UE où les principales sources de financement des projets d’investissement ont été les transferts de l’UE, les besoins de cofinancement et la capacité de mise en œuvre des projets pourraient être les principaux facteurs contraignants. L’excédent opérationnel utilisé auparavant pour financer les projets d’investissement s’est réduit ainsi que la capacité d’absorption des fonds de l’UE. Dans certains pays, l’impact du cycle électoral a aussi joué un rôle dans la mesure où les changements de gouvernements en 2010 ont ralenti les engagements et le versement des fonds prévus pour les programmes financés par l’UE (ce qui a été le cas, par exemple, en Hongrie).

Pendant la période des restrictions globales, les collectivités locales ne pourront donc pas continuer à maintenir le niveau précédent de dépenses d’investissement et il est probable que les programmes de financement devront également être changés. Dans les prochaines années, le niveau estimé de l’endettement public global augmentera dans la zone euro et les pays de l’OCDE (tableau 1). En moyenne, les engagements financiers bruts sont égaux au PIB et les variations sont assez considérables entre les pays.

Tableau 1.     Engagements financiers bruts du secteur public en

pourcentage du PIB

Engagements financiers en % du PIB

Zone euro (14 pays)

Total OCDE

2007

71,7

73,1

2008

76,7

79,3

2009

87,0

90,9

2010

92,8

97,6

2011

95,7

102,4

2012

96,6

105,4

Source: OCDE


Le niveau d’endettement public déjà élevé et croissant a réduit les possibilités d’emprunt à l’échelon local (graphique 3). L’emprunt infranational a reculé dans la plupart des pays en 2010 par rapport aux années précédentes. Là encore, les nouveaux Etats membres de l’UE venant d’Europe centrale (hors Etats baltes), certains des pays les plus décentralisés (par exemple les Pays-Bas) et les Etats fédéraux, y compris l’Espagne, ont pu s’endetter davantage en 2010. Les pays les plus endettés ont continué à resserrer le crédit à l’échelon des collectivités locales soit en décourageant les municipalités à recourir à l’emprunt soit en diminuant temporairement le seuil d’endettement local (par exemple en Espagne).

La situation de la fiscalité à l’échelon national détermine en grande partie le coût de l’emprunt local, quelle que soit la solvabilité d’une ville particulière. Les rapports des principales agences de notation du crédit concernent donc également, d’une manière indirecte, l’échelon municipal. L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a déjà élaboré un projet de recommandation sur le surendettement des Etats[6]. Elle attire l’attention sur la responsabilité des agences de notation dans la création d’un cercle vicieux pour les pays très endettés: diminuer la note d’une dette souveraine augmente le coût de l’emprunt et donc limite les possibilités de financer une dette publique déjà élevée. 


Graphique 3: Emprunt (-)/prêt (+) infranational en % du PIB

 

Source: Eurostat


Des réponses au niveau élevé d’endettement public ont été formulées à tous les échelons gouvernementaux, y compris la Commission européenne. Le mécanisme européen de stabilisation fournit une assistance financière sous la forme d’un dispositif de prêt aux pays confrontés à de graves problèmes économiques. La Commission européenne emprunte sur le marché des capitaux et la dette est remboursée par l’Etat membre bénéficiaire[7]. Des ressources peuvent être également accordées le Fonds européen de stabilité financière, doté de 440 milliards d’euros dont 250 milliards sont disponibles sous la forme de prêts[8]. Ces prêts peuvent être utilisés par les pays de la zone euro qui connaissent des difficultés financières. Les seize pays membres garantissent la dette émise par le Fonds.

A l’échelon très local, les municipalités peuvent également essayer de maintenir les dépenses d’investissement au niveau requis. Dans certains pays, les prestataires locaux de services collectifs et d’autres filiales municipales comme les entités de gestion des actifs peuvent également procurer des ressources pour financer les dépenses d’investissement. Cependant, cette méthode de financement ne fait que transférer le poids de l’endettement à ces unités extrabudgétaires. Or les prestataires de services sont aussi confrontés aux conséquences de la récession économique: les arriérés de paiement liés aux redevances d’usage ont augmenté, les réglementations nationales interdisent l’accroissement des recettes, les sources de financement privé et le crédit disponible sont limités. En outre, comme les prestataires de services collectifs empruntent souvent avec la garantie municipale, ce donc en définitive les collectivités locales qui ont la responsabilité finale de ces emprunts.

Si ces obligations financières sont prises en compte, le niveau d’endettement des collectivités locales, les garanties ainsi que les risques augmentent en conséquence. L’observateur national de la Croatie a ainsi indiqué que les arriérés de paiement à l’échelon local avaient augmenté, passant de 47% à 69% de l’endettement direct des collectivités locales. Lorsque la valeur des actifs financiers nets est regroupée avec celle des prestataires de services des collectivités locales, le solde positif (qui était en 2009 de 0,2 million de kunas pour les collectivités locales) est devenu négatif (-5,7 milliards de kunas). Des certains cas, les créditeurs ont bloqué les comptes municipaux à cause des garanties apportées par les collectivités locales.

Etablir des partenariats avec le secteur privé

Malgré les mesures de nationalisation et de «recommunalisation», le secteur public évoluera dans un environnement de marché à plus long terme. La prestation des services municipaux, les moyens d’augmenter les recettes par le biais des redevances d’usage et des investissements privés ainsi que les programmes de développement régionaux et urbains ne peuvent pas être isolés du secteur privé. Les deux dernières décennies ont montré les difficultés, mais aussi les avantages, de cette coopération, qui a permis d’améliorer la qualité des services et l’efficience des services collectifs, et de mutualiser les avantages publics et privés des stratégies de développement économiques sur le plan local et urbain. 


Cependant, la fourniture de services publics par des acteurs privés a récemment fait l’objet d’un changement d’opinion. Les mécanismes de sous-traitance et de partenariat public-privé sont désormais rejetés parce que les projets sont devenus plus complexes et sophistiqués, et les administrations municipales n’ont pas toujours été en mesure de négocier les contrats avec les grandes sociétés multinationales. Les arguments généralement formulés contre toute forme de participation du secteur privé soulignent qu’elle entraîne une augmentation du coût des services due au bénéfice retiré par les prestataires de services privés et que la rigidité des clauses contractuelles a des conséquences négatives. Les coûts résultant des initiatives de financement privé au Royaume-Uni connaissent également une forte augmentation à cause des taux d’intérêt plus élevés payés par les investisseurs privés. Au cours des récentes décennies, les acteurs publics (les clients, les régulateurs) ont généralement tenu à conserver un contrôle direct de ces services car la coopération avec les acteurs privés leur a appris beaucoup sur la manière de financer et de gérer des services communaux. Les opérateurs privés font donc l’objet d’un rejet croissant car les sociétés publiques de prestation de services collectifs sont devenues plus expérimentées et mieux préparées à reprendre la régie de ces services. 

A l’avenir, lorsque le redressement économique exigera d’autres types d’intervention publique que de simples mesures d’austérité, la coopération entre les acteurs publics et privés devra être développée davantage. Les nouvelles formes de partenariat entre les collectivités locales et les organisations commerciales pourraient être ainsi une composante essentielle des réponses à la récession économique. Deux aspects du partenariat pourraient être distingués:

i)             la fourniture de services publics par le secteur privé;

ii)    des initiatives locales conjointes associant des entités publiques et des entreprises. 

Fourniture de services locaux par le secteur privé

Tous les pays ne sont pas au même stade d’apprentissage concernant les coûts et les avantages de la coopération avec le secteur privé pour la fourniture de services publics à l’échelon local. Les collectivités locales qui ont une tradition plus longue de sous-traitance et disposent de systèmes réglementaires établis sont dans une meilleure position que celles qui viennent d’entrer sur le marché récemment, au cours des deux dernières décennies. Ce dernier groupe est davantage tributaire du capital privé, du transfert de technologies et de l’adaptation des méthodes de gestion. C’est pourquoi les cas de remunicipalisation du secteur de la gestion de l’eau sont devenus plus nombreux en France (par exemple le service de la gestion de l’eau à Paris). On note par ailleurs que des plans de «recommunalisation» du secteur de l’énergie sont examinés en Allemagne[9], alors qu’il s’agit encore de cas exceptionnels en Europe centrale et de l’Est.


Les sociétés de service sont souvent critiquées dès que les premiers investissements privés améliorent la qualité du service et que les tarifs augmentent ou que les redevances d’usage sont plus élevées. Dans certains cas, des mesures populistes ont conduit à la remunicipalisation des services lorsque les collectivités locales n’ont que des capacités de réglementation limitées dans un environnement décentralisé. Si cette «recommunalisation» se produit avant le terme convenu du contrat de services, le partenaire privé doit être indemnisé pour rupture d’un contrat de concession à long terme ou d’un contrat d’exploitation, ce qui représente évidemment une charge financière ponctuelle pour les collectivités locales[10].

Le rachat des actifs et des parts municipales des sociétés concessionnaires se produit essentiellement dans les secteurs de l’énergie et de la gestion de l’eau. Cette opération devient possible lorsque l’administration locale et les régies municipales ont amélioré leurs capacités de gestion et que de nouvelles formes de coopération ont été expérimentées. Les collectivités locales elles-mêmes préfèrent conclure des accords intercommunaux pour la fourniture de services collectifs, afin que les économies d’échelle ne puissent pas être réalisées uniquement par les sociétés privées mais aussi par les communes, en tant que fournisseurs de services publics. Elles peuvent également tirer profit du regroupement au sein d’une holding des entités de services qui n’ont qu’une seule fonction. Cela leur permet en effet de réaliser des économies grâce aux synergies dégagées dans la collecte des recettes, à l’utilisation efficace des installations et des équipements, ou à la subvention croisée d’activités ayant des rentabilités différentes. Les collectivités locales pourraient retirer des avantages indirects de ces sociétés indépendantes et compétitives en exécutant des programmes d’économie d’énergie dans les institutions locales ou en mettant en œuvre des sources d’énergie renouvelables, ce qui ne constituerait pas une priorité pour les opérateurs privés.

Toutefois, le partenariat avec le secteur privé est encore considéré comme un outil efficace de fourniture de services municipaux. Certains pays ont adopté récemment des lois réglementant les partenariats public-privé (par exemple en Croatie, en Roumanie) mais la finalité de ces nouvelles réglementations n’est pas toujours explicite (l’observateur national roumain indique qu’il s’agit plus d’une tentative de créer des moyens de contourner la législation sur les passations de marché). En Albanie, des terrains publics sont cédés à des investisseurs en échange de logements sociaux. Les contrats de gestion de biens, comme la cession-bail de biens immobiliers municipaux, ne sont pas beaucoup utilisés dans cette période de récession économique (rapport de l’Islande).

Le marché européen de l’accord de partenariat public-privé (PPP) s’est lentement redressé en 2010[11]. La valeur totale des transactions de type PPP était de 18 milliards d’euros pour 112 projets à la fin de l’exercice financier, soit un niveau équivalent à celui de 2002-2004 mais inférieur à celui de la période de prospérité qui prévalait avant la crise, c’est-à-dire 2005-2007. Les pays les plus actifs sont le Royaume-Uni (44 projets), l’Espagne et le Portugal. Ces pays représentent à eux trois 63% de la valeur totale des PPP dans l’Union européenne. En Europe de l’Est, six PPP seulement ont été conclus.


Les projets PPP concernent en général le secteur du transport et le domaine de l’éducation et des soins de santé. Il s’agit donc presque exclusivement de programmes de PPP conclus au niveau du gouvernement national.

Promouvoir le développement économique local

L’autre aspect, plus large, du partenariat, est lié au développement local et régional. Les communes ont appris diverses techniques de développement économique local qui ont été utilisées avec succès pendant la période où la croissance économique était plus ou moins stable et les capitaux et les fonds pour l’investissement relativement abondants. Les programmes de relance économique visaient également les petites et moyennes entreprises et les programmes de l’UE avaient pour but de réduire la charge administrative supportée par ces entreprises.

Au cours des prochaines années, les pays de l’Europe de l’Est seront probablement confrontés à une baisse des investissements étrangers directs et les économies plus développées devront trouver de nouvelles sources endogènes de croissance économique. Dans ce contexte, les stratégies et les programmes de développement mis en œuvre par les collectivités locales devront être également transformés. Les observateurs nationaux ont déjà signalé quelques exemples de mesures visant directement le développement économique local. Elles vont de la simple coopération entre les collectivités locales et les entreprises pour atteindre des objectifs communs (par exemple en promouvant le tourisme en partageant les charges liées au centre d’information touristique local en Albanie) au soutien plus stratégique de la création d’entreprises sociales (par exemple mettreen place une compagnie spéciale de production agricole écologique qui fournit des emplois à la population laplus vulnérable dans une municipalité de Bosnie-Herzégovine).

Les petites et moyennes entreprises ne pourront pas créer suffisamment d’emplois et leur impact global sur la base fiscale locale sera limité. Cependant, le public et le secteur privé cherchent en commun des solutions pour l’emploi. Au Danemark, par exemple, l’unité des assistants sociaux et des conseillers pour l’emploi est physiquement présente dans la société afin d’accroître la coopération entre le gouvernement et les entreprises. 

Des formes spécifiques de développement économique local sont utilisées pendant ces périodes exceptionnelles. Il est essentiel pour celui-ci que les collectivités locales coopèrent et collaborent. Les communes doivent coopérer horizontalement avec leurs voisins, les institutions financières ou les établissements publics de services collectifs, et verticalement avec d’autres échelons des gouvernements élus (régions, zones urbaines) ou avec les entités administratives publiques. Les collectivités locales doivent contribuer activement au développement économique en faisant preuve de davantage de réactivité concernant les stratégies locales de développement urbain, les réglementations de la planification, les investissements dans les infrastructures, les programmes de formation et d’éducation, en créant des conditions favorables à l’innovation, etc. 


Les formes institutionnelles de développement économique local ont été également transformées. Au Royaume-Uni, par exemple, les anciennes agences pour le développement régional ont été remplacées par des partenariats locaux d’entreprise. Ces partenariats entre des acteurs privés et publics ont pour but de soutenir la croissance économique en aidant les petites entreprises qui démarrent et le tourisme, en coopérant avec les universités, et en s’attaquant aux problèmes liés à la planification et au logement, aux priorités locales en matière d’infrastructure et de transport, à l’emploi et au passage à une économie à faible émission de carbone.

Encadré 3.

Pôles de compétitivité en France

Mise en place de 17 pôles économiques pour favoriser le développement économique: coopération entre l’État et les collectivités locales, le secteur industriel et le secteur commercial, et les universités et les ONG.

Les pôles de compétitivité ont été conçus en 2004 comme un outil de politique de développement économique par l'Agence nationale pour le développement régional (DATAR), un organe du gouvernement central. Bien que l'idée n'est pas totalement nouvelle (l'Italie a «districts», l'Allemagne «filets de compétences", en Californie, la Silicon Valley), il a été un changement assez révolutionnaire en France. Le développement régional a été traditionnellement considéré comme une politique de cohésion et de l'égalisation grâce à la coopération entre l’Etat et les administrations locales afin de créer à peu près le même investissement et services publics dans tout le pays. Maintenant, une option claire est prise pour créer des pôles des politiques publiques, polarisés dans certains territoires, avec des projets très divers; les principaux acteurs ne sont plus les administrations publiques, mais les entreprises, centres de recherche, universités, hôpitaux, etc

 L'objectif est de stimuler la coopération entre tous ces acteurs sur des programmes d’innovation à long terme avec un soutien marginal de l'argent public.

 Les pôles et les programmes régionaux ne sont pas dans un sens administratif, pour deux raisons: 1) leur premier centre est situé dans une région donnée, mais les membres peuvent se trouver n'importe où en France, 2) un pôle doit décider du niveau de son ambition: être un leader à l'échelle européenne ou d'un niveau mondial global, et pas seulement focalisé sur un problème régional. Des activités réussies ne peuvent pas être enfermés dans des limites administratives, mais leur développement sera évidemment bénéfique pour la région où ils sont.


La création d'un pôle doit être l'initiative d'un groupe d'entrepreneurs, surtout avec le soutien des collectivités locales, qui soumet un projet après que l'Agence a émis un appel d'offres. Un nombre limité de pôles sont acceptés. A l'origine le nombre devrait être assez faible (10 à 15) et de dimension mondiale (l'espace, les voitures du futur, chimie, pharmacie ...), mais 66 ont été acceptés en 2005 et 5 autres ont été ajoutés en 2007, couvrant presque tous les secteurs économiques. Une évaluation internationale réalisée en 2008 a conclu que 13 ont été faibles, et enfin l'accréditation des 6 pôles avec des performances faibles a été retirée. Mais en 2010 six nouveaux pôles ont été créés, dédié aux écotechnologies (eau, énergie, déchets ...). Le nombre total est toujours 71. Leur statut juridique est de droit privé, la plupart du temps une association à but non lucratif, qui offre une plus grande flexibilité.

Des enchères nationales concurrentielles sont publiées pour des programmes spécifiques avec indication de la somme d'argent disponible, les priorités générales et des informations de procédure. De 2005 à la mi-2011, 1051 projets ont été sélectionnés et ont reçu un soutien. L'appel d'offres de septembre 2011 a été le 11eme. L'argent public vient de ministères en fonction de la nature des projets; des gouvernements locaux, principalement les régions, et de l'Union européenne (FEDER).

Les principes de ces pôles sont les suivants: la coopération entre les acteurs économiques, entre les administrations publiques (ministères, régions, municipalités, etc) et entre le secteur public et privé; un objectif commun et des lignes stratégiques; de viser à être les meilleurs dans un domaine spécifique et sur une certaine gamme, donc à stimuler l'innovation. Il n'y a pas des résultats spectaculaires et tous les pôles ne fonctionnent pas parfaitement, mais l'évaluation provisoire est plutôt positive et la solidarité dans une période de crise est un avantage. Une évaluation complète est préparée pour 2012.[12]

Cette approche stratégique du développement local exige des mesures plus coordonnées et globales de la part des collectivités locales. Les agences internationales de développement et les organisations nationales ont tendance à vouloir relancer l’économie en intégrant des mesures localement ou régionalement. Qu’il s’agisse de la nouvelle approche planifiée du développement régional que la Commission européenne prévoit d’utiliser au cours du prochain exercice budgétaire et qui s’appuie sur le concept de «développement territorialisé[13]», des principes de Barcelone du redressement économique soulignant l’importance d’un leadership local actif[14] ou de la reconnaissance de la nécessité d’élaborer des programmes de développement multisectoriels[15], toutes ces initiatives font appel à la même approche intégrée pour mettre en œuvre des actions de développement qui soient efficaces. Les analyses portant sur les politiques intérieures montrent également l’importance du leadership local et de la qualité du territoire dans le redressement économique[16].

Efficience énergétique

L’utilisation de l’énergie est une question intersectorielle spécifique pour le développement local futur. Programmes nationaux et mondiaux mis à part, il s’agit d’une question qui concerne directement les collectivités locales. Les communes et leurs institutions sont des gros consommateurs d’énergie qui ont une influence directe sur sa consommation, voire indirecte. Elles peuvent en effet, par les réglementations s’appliquant à la construction, le chauffage de district et les systèmes de transport public, déterminer le segment local du marché de l’énergie. Les programmes de rationalisation de l’énergie sont locaux parce que les solutions sont spécifiques et ne peuvent pas être normalisées car l’espace urbain national est très divers.

Il existe par ailleurs des différences énormes en Europe. A l’ouest, dans les pays plus développés, les programmes de rationalisation et d’économie d’énergie ont été lancés il y a des dizaines d’années. En Europe du Sud et du centre, les améliorations de l’efficience énergétique sont une problématique récente. La décentralisation fiscale a contraint les collectivités locales à identifier les économies d’énergie et ouvert également de nouvelles voies pour réduire les dépenses croissantes liées à l’énergie.

La Commission européenne a élaboré une stratégie à long terme qui fixe des jalons importants pour une croissance durable. Dans le domaine du changement climatique et de l’utilisation de l’énergie d’ici 2020, la Commission a pour ambition de diminuer les émissions de gaz à effet de serre de 20% par rapport à 1990 et prévoit que 20% de l’énergie utilisée devra être renouvelable. Elle envisage également d’augmenter de 20% l’efficience énergétique.

La rationalisation de l’énergie dépasse les aspects techniques de l’efficience énergétique et le cadre étroit de l’approche environnementale. Les fournisseurs se penchent généralement sur ces questions d’ingénierie traditionnelles. Le leadership local, lui, se concentre sur les aspects politiques et économiques. Quelles sont les conditions réglementaires et institutionnelles liées à une fiscalité locale encourageant fortement les économies d’énergie? Comment des questions comme la rationalisation de l’énergie et l’utilisation de l’énergie renouvelable peuvent-elles être placées au premier rang du débat politique local? Le changement climatique aura également un impact sur les politiques locales car on observe déjà une demande croissante de systèmes d’égouts pluviaux pour gérer les eaux de pluie et protéger les villes contre les inondations.

Les observateurs nationaux ont noté des initiatives diverses. En Espagne, le plan d’action national de 2008-2012 propose des changements dans la réglementation de l’éclairage urbain et des améliorations dans la consommation, élevée en énergie, de l’approvisionnement en eau et dans les équipements de purification d’eau. Les audits de la consommation d’énergie augmentent l’efficience des équipements municipaux et des entreprises publiques. Des économies peuvent être réalisées en formant les techniciens municipaux à la gestion de l’énergie. Une série de principes pour l'efficacité énergétique ont été mis en place entre le gouvernement central, les régions et les collectivités locales.

Au Danemark, dans le cadre de leurs plans d’action relatifs au climat, les collectivités locales concluent des accords avec des établissements privés de services énergétiques pour développer et financer des projets visant à réduire les coûts d’exploitation et d’entretien de leurs clients. Des compétitions nationales et des récompenses ministérielles accroissent l’intérêt local pour l’atténuation des effets du changement climatique et la promotion de technologies propres.

En Europe de l’Est et du centre, on note plusieurs initiatives visant à jeter les bases d’une rationalisation de l’énergie. En Géorgie, la ville de Tbilissi a adopté un plan d’efficience énergétique fixant des règles que les promoteurs et les sociétés de construction doivent respecter et qui réduiront la consommation d’énergie des maisons d’habitation et des immeubles de bureaux. La modernisation de l’éclairage urbain, l’installation de panneaux solaires sur les bâtiments publics (Croatie), l’élaboration de programmes d’isolation thermique, les projets associant l’efficience énergétique et la rénovation (Estonie) sont des mesures typiquement locales. Elles sont souvent financées par les fonds structurels de l’UE (par exemple en Bulgarie). Les collectivités locales peuvent également profiter de la vente de quotas nationaux de CO2 (Estonie).



[1] Consultations avec des maires durant la conférence de l’Association nationale des municipalités bulgares (NAMRB) de Borovets (Bulgarie), 27 juin 2011.

[2] Recommandation Rec(2005)1 du Comité des Ministres aux États membres

relative aux ressources financières des collectivités locales et régionales: https://wcd.coe.int/wcd/ViewDoc.jsp?id=1378257&Site=DG1-CDLR&BackColorInternet=B9BDEE&BackColorIntranet=FFCD4F&BackColorLogged=FFC679#P1236_146909

[4] Idem

Source: Eurostat

[6] Recommandation 1961 (2011): Le surendettement des États: un danger pour la démocratie et les droits de l’homme.http://www.assembly.coe.int/Mainf.asp?link=/Documents/AdoptedText/ta11/EREC1961.htm

[9] Dans les deux ou trois prochaines années, les municipalités doivent prendre une décision concernant les 12 000 contrats de concession en Allemagne. Doivent-elles prolonger les concessions actuelles ou confier l’exploitation du réseau à une régie municipale ? La proposition d’amendement de la réglementation énergétique, en cours d’examen, a pour but de limiter les contentieux en protégeant les informations pour les municipalités. (Fiches d’information fournies par l’observateur national). Ces nouvelles tendances sont examinées par Wollman, H.-Marcou, G. (2010): The provision of public services in Europe. Edward Elgar Publishing Ltd., Cheltenham, UK.

[10] Ces cas sont assez fréquents en France mais un cas identique s’est produit également dans une grande ville de Hongrie, qui a racheté le concessionnaire dans le secteur de l’eau. Voir: http://www.remunicipalisation.org/

[11]  Market Update. Review of the European PPP Market in 2010. http://www.eib.org/epec

[12] Source: http://territoires.gouv.fr/sites/default/files/datar/201005-poles-competitivite-ciadt.pdf

[13] Barca, F. 2009: AN AGENDA FOR A REFORMED COHESION POLICY. A place-based approach to meeting European Union challenges and expectations. Rapport indépendant élaboré pour Danuta Hübner, Commissaire chargée de la politique régionale.

[15] Romanik, C, 2011: A new definition of local development. http://www.developmentandtransition.net/

[16] The Work Foundation, 2009:  Recession and Recovery: How UK Cities can respond and drive the recovery. London