Strasbourg, le 4 novembre 2010                                                          LR-GG(2010)10

                                                                                                                         

COMITE EUROPEEN SUR LA DEMOCRATIE LOCALE ET REGIONALE

(CDLR)


COMITE D'EXPERTS SUR LA BONNE GOUVERNANCE

DEMOCRATIQUE AUX NIVEAUX LOCAL ET REGIONAL

(LR-GG)

FAISABILITE D'UNE RECOMMANDATION SUR LA BONNE

GOUVERNANCE DEMOCRATIQUE AUX NIVEAUX

LOCAL ET REGIONAL

Note du Secrétariat

établie par la Direction générale de la

démocratie et des affaires politiques

Direction des institutions démocratiques


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Ce document est public. Il ne sera pas distribué en réunion. Prière de vous munir de cet exemplaire.


Introduction

Sur proposition du Comité d’experts sur la bonne gouvernance démocratique aux niveaux local et régional (LR-GG), le Comité européen sur la démocratie locale et régionale (CDLR), à sa réunion d’octobre 2010, est convenu qu’une étude devait être menée pour évaluer la faisabilité d’une recommandation aux États membres sur la bonne gouvernance au niveau local. Le CDLR a confié cette tâche au LR-GG et nommé Mme Greta Billing (Norvège) rapporteur.

À sa réunion de novembre 2010, le LR-GG doit examiner et adopter un avis sur la faisabilité d’une recommandation aux États membres sur la bonne gouvernance démocratique aux niveaux local et régional. Le rapporteur aimerait que le Comité examine les points suivants :

1.            L’approche du CDLR concernant l’établissement de normes est fondée sur le critère de la valeur ajoutée et non sur la production de normes perçue comme une fin en soi. Avant de conclure qu’une recommandation est faisable, il faut par conséquent démontrer qu’elle a une valeur ajoutée pour les États membres et, par le biais de leurs autorités publiques, pour les citoyens. Il faut par ailleurs que les États membres soient suffisamment mobilisés (politiquement) pour que cette valeur ajoutée prenne une forme concrète.

2.            L’acquis actuel du Conseil de l’Europe, c’est-à-dire les Conventions et les Recommandations adoptées par le Comité des Ministres, ne couvre pas et ne traite pas la question de la bonne gouvernance démocratique au niveau local. La Charte européenne de l’autonomie locale est centrée sur la relation entre les autorités locales et centrales et s’appuie sur le principe de l’autonomie locale. La plupart des recommandations du Comité des Ministres portent également, pour l’essentiel, sur ce point. Certaines parties de l’acquis traitent de questions liées à la gouvernance locale, notamment en ce qui concerne la participation à la vie publique. Citons à cet égard la Convention sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local (STCE n° 144), le protocole additionnel à la Charte européenne de l’autonomie locale sur le droit de participer aux affaires des collectivités locales (STCE n° 207) ainsi que les recommandations (2001)19)1 et (2009)5)2. Par ailleurs, des recommandations sur la gestion financière au niveau local, comme la recommandation Rec (2004)1)3, et sur les services publics Rec (2007)4)4 abordent des questions qui font partie du concept élargi de bonne gouvernance au niveau local. On se gardera néanmoins de considérer que l’acquis traite la question de la bonne gouvernance démocratique en tant que telle, ainsi que l’ensemble de ses composantes.

1)         Rec(2001)19 sur la participation des citoyens à la vie publique au niveau local / 5 février 2009

2)         Recommandation CM/Rec(2009)5 du Comité des Ministres aux Etats membres visant à protéger les enfants contre les contenus et comportements préjudiciables et à promouvoir leur participation active        au nouvel environnement de l’information et de la communication

3)             Recommandation Rec(2004)1 sur la gestion financière et budgétaire aux niveaux local et régional

4)         Recommandation Rec(2007)4 sur les services publics locaux et régionaux


3.            Cependant, outre l’acquis tel qu’il est décrit ci-dessus, le Conseil de l’Europe aborde directement la question de la bonne gouvernance au niveau local en s’appuyant sur la Stratégie pour l’innovation et la bonne gouvernance au niveau local, qui repose sur un ensemble de douze principes de bonne gouvernance démocratique. Ces douze principes sont les suivants:

Principe 1

Elections conformes au droit, représentation et participation justes

Ø  Les élections locales sont tenues librement et correctement, conformément aux normes internationaleset à la législation nationale, et sans fraude.

Ø  Les citoyens sont placés au coeur de l’action publique et sont impliqués d’une manière clairement définie dans la vie publique au niveau local.

Ø  Tous les hommes et toutes les femmes ont le droit de faire entendre leur voix lors de la prise de décisions, que ce soit directement ou par l’intermédiaire d’organes légitimes qui représentent leurs intérêts. Cette conception de la participation, qui fait intervenir l’ensemble des citoyens, repose sur les libertés d’expression, de réunion et d’association.

Ø  Toutes les voix, y compris celles des plus défavorisés et des plus vulnérables, sont entendues et prises en compte lors de la prise de décisions, entre autres celles qui concernent l’allocation de ressources.

Ø  Des efforts raisonnables sont toujours entrepris pour tenter de concilier divers intérêts légitimes et de parvenir à un large consensus sur ce qui est dans l’intérêt de l’ensemble de la communauté, ainsi que sur les moyens d’y parvenir.

Ø  Les décisions sont prises en fonction de la volonté de la majorité des citoyens, tout en respectant les droits et les intérêts légitimes de la minorité.

Principe 2

Réactivité

Ø  Les objectifs, règles, structures et procédures sont adaptés aux attentes légitimes et aux besoins des citoyens.

Ø  Les services publics sont assurés et il est fait suite aux demandes et aux plaintes dans un délai raisonnable.

Principe 3

Efficacité et l’efficience

Ø  Les résultats sont conformes aux objectifs fixés.

Ø  Les ressources disponibles sont utilisées de façon optimale.

Ø  Des systèmes de gestion de la performance permettent de mesurer et d’améliorer l’efficacité et l’efficience des services.

Ø  Des audits sont effectués à intervalles réguliers afin d’évaluer et d’améliorer les services.


Principe 4

Ouverture et la transparence

Ø  Les décisions sont prises et appliquées conformément aux normes et réglementations.

Ø  Toutes les informations qui ne sont pas classées pour des raisons bien spécifiées par la loi (telles que la protection de la vie privée ou la garantie de l’impartialité dans les procédures de passation des marchés) sont publiquement accessibles.

Ø  Le public est informé des décisions, de la mise en oeuvre des politiques et des résultats obtenus, de sorte qu’il puisse suivre efficacement les travaux des collectivités locales et y contribuer.

Principe 5

Etat de droit

Ø  Les collectivités locales respectent la loi et les décisions judiciaires.

Ø  Les normes et les réglementations sont adoptées conformément aux procédures définies par la loi; elles sont appliquées de manière impartiale.

Principe 6

Comportement éthique

Ø  L’intérêt général est placé au-dessus des intérêts individuels.

Ø  Il existe des mesures efficaces pour prévenir et combattre toutes les formes de corruption.

Ø  Les conflits d’intérêt sont déclarés en temps voulu; les personnes impliquées doivent s’abstenir de prendre part aux décisions qui s’y rapportent.

Principe 7

Compétences et les capacités

Ø  Les capacités professionnelles des personnes qui assurent la gouvernance sont entretenues et renforcées en permanence afin d’obtenir une production et un impact plus importants.

Ø  Les fonctionnaires sont encouragés à améliorer continuellement leurs performances.

Ø  Création et utilisation de méthodes et de procédures pratiques visant à changer les aptitudes en compétences et à obtenir de meilleurs résultats.

Principe 8

Innovation et ouverture d’esprit face au changement

Ø  Des solutions nouvelles et efficaces aux problèmes sont recherchées et des méthodes modernes sont employées pour assurer les services.

Ø  Il existe une disponibilité d’accepter de piloter et de tester de nouveaux programmes, ainsi qu’à apprendre de l’expérience des autres.

Ø  Il est instauré un climat favorable aux changements en vue d’atteindre de meilleurs résultats.


Principe 9

Durabilité et orientation à long terme

Ø  Les politiques actuelles prennent en compte les besoins des générations à venir.

Ø  La durabilité de la communauté est constamment prise en compte. Les décisions sont prises dans l’objectif d’internaliser tous les coûts et d’éviter de transmettre aux générations futures les tensions et les problèmes, qu’ils soient d’ordre environnemental, structurel, financier, économique ou social.

Ø  L’avenir de la communauté locale est envisagé à long terme, selon une large perspective; cette conception s’accompagne d’une conscience des besoins qu’entraîne un tel développement.

Ø  Cette perspective se fonde sur une compréhension des complexités historiques, culturelles et sociales.

Principe 10

Gestion financière saine

Ø  Les charges n’excèdent pas le coût des services assurés et ne réduisent pas la demande de façon trop importante, notamment dans le cas des services publics essentiels.

Ø  La gestion financière est assurée avec prudence, en particulier lorsqu’il s’agit de contracter des prêts et d’utiliser cet argent, d’estimer les ressources, les recettes et les provisions, et d’utiliser les recettes exceptionnelles.

Ø  Des programmes budgétaires pluriannuels sont préparés en consultation avec le public.

Ø  Les risques sont calculés et gérés correctement, ce qui passe notamment par la publication des comptes consolidés et, dans le cas des partenariats public-privé, par un partage réaliste des risques.

Ø  La collectivité locale participe aux accords de solidarité entre communes, à la répartition équitable des charges et des bénéfices et à la diminution des risques (systèmes de péréquation, coopération intercommunale, mutualisation des risques, etc.).

Principe 11

Droits de l’Homme, diversité culturelle et cohésion sociale

Ø  Les Droits de l’Homme sont respectés, protégés et appliqués, et la discrimination, fondée sur quelque critère que ce soit, est combattue, dans la limite des compétences des collectivités locales.

Ø  La diversité culturelle est considérée comme une richesse et des efforts sont entrepris en permanence pour s’assurer que tous les citoyens ont un rôle à jouer dans leur communauté locale, qu’ils s’identifient à elle et qu’ils ne s’en sentent pas exclus.

Ø  La cohésion sociale et l’intégration des régions défavorisées sont encouragées.

Ø  L’accès aux services de base est garanti, notamment pour les tranches de la population les moins favorisées.


Principe 12

Obligation de rendre des comptes

Ø  Tous les décideurs, qu’il s’agisse de groupes ou d’individus, sont tenus pour responsables de leurs décisions.

Ø  Les décisions font l’objet de comptes-rendus; elles sont expliquées et peuvent être sanctionnées.

Ø  Il existe des mesures efficaces pour remédier aux abus administratifs et aux agissements des collectivités locales qui bafouent les droits civils.

4.            Cette stratégie a été approuvée lors de la Conférence des ministres responsables des collectivités locales et régionales qui s’est tenue à Valence en 2007. Elle a ensuite été approuvée par le Congrès et l’Assemblée parlementaire, puis adoptée par le Comité des Ministres en mars 2008, ce qui lui a donné une grande visibilité. Il s’agit d’un instrument qui permet aux autorités locales d’améliorer, de leur propre chef, la qualité de la gouvernance. Tous les États membres peuvent y adhérer et plusieurs États membres, ainsi que leurs autorités locales, la mettent activement en œuvre. Néanmoins, ni la stratégie ni les principes qu’elle vise à promouvoir et à mettre en pratique ne font partie de l’acquis du Conseil de l’Europe. Il est donc proposé que ces principes soient examinés avec attention en vue d’élaborer un éventuel projet de recommandation.

5.            La bonne gouvernance est une notion qui est utilisée depuis plusieurs décennies principalement dans le domaine des activités liées au développement international. À l’origine, la bonne gouvernance était donc davantage un concept que les bailleurs de fonds internationaux utilisaient pour cadrer les objectifs et les exigences de leurs interventions qu’un concept sur lequel s’appuyaient les gouvernements nationaux pour orienter leur action au plan intérieur. Cela étant, la bonne gouvernance est une notion qui est aussi utilisée dans plusieurs États membres du Conseil de l’Europe.

6.            Les douze principes qui sont au cœur de la Stratégie pour l’innovation et la bonne gouvernance ont été élaborés en portant une attention particulière aux définitions et aux principes adoptés par d’autres organisations internationales. Ce nouvel ensemble de principes a été défini et introduit pour deux motifs principaux : les définitions et principes existants concernaient plus le niveau national que le niveau local, et plusieurs aspects jugés importants pour la démocratie et les droits de l’homme n’étaient pas abordés. Par ailleurs, cet ensemble de principes est singulier parce qu’il fait référence non pas à la bonne gouvernance mais à la bonne gouvernance démocratique. Cette singularité se vérifie encore aujourd’hui.

7.            Si l’on peut donc estimer que l’acquis actuel ne couvre pas la bonne gouvernance démocratique et que les principes élaborés pour la Stratégie pour l’innovation et la bonne gouvernance au niveau local présentent plusieurs caractéristiques qui les singularisent, peut-on en conclure pour autant que ces principes devraient être incorporés dans l’acquis ?


8.            Cette question, cependant, en appelle une autre : l’ajout de ces principes à l’acquis est-il justifié, et dans quelle mesure, au regard du temps et des efforts qu’il exige ?

9.            Les motifs justifiant cet ajout sont présentés ci-dessous et le Comité est invité à les examiner :

-      la notion de bonne gouvernance démocratique au niveau local, qui met l’accent sur le rôle des citoyens et leurs attentes vis-à-vis de leurs autorités locales, est un complément essentiel des concepts de subsidiarité et d’autonomie locale que le Conseil de l’Europe est le premier à avoir promu et placé au cœur de ses activités;

-      la notion ou le concept de bonne gouvernance démocratique au niveau local n’a pas été forgé ou défini au niveau international. Il est dans l’intérêt du Conseil de l’Europe de combler cette lacune afin de pouvoir continuer de jouer un rôle de premier plan dans le domaine de la démocratie locale et régionale;

-      adopter les principes susmentionnés dans une recommandation à tous les États membres renforcera leur visibilité et garantira que leur champ d’application débordera le cadre de la Stratégie pour l’innovation et la bonne gouvernance;

-      dès lors qu’ils seront inscrits dans l’acquis du Conseil de l’Europe, les principes d’une bonne gouvernance démocratique au niveau local pourraient être utilisés pour un large éventail d’activités aux niveaux local, national et international.

Action requise

Le LR-GG est invité à examiner et à adopter un avis sur la faisabilité d’une recommandation aux États membres sur la bonne gouvernance démocratique au niveau local. Cet avis devra être communiqué au CDLR.