« La participation des résidents étrangers à la vie publique locale - les conseils consultatifs » - CPL (9) 5 Partie II

Conclusions de l’audition de Stuttgart (Allemagne), 14 décembre 2001

Rapporteurs :

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EXPOSE DES MOTIFS

1Le Conseil de l’Europe œuvre depuis plus de 25 ans, conformément à ses principes fondateurs liés à la protection des droits de l’homme, à la reconnaissance des droits sociaux et politiques des étrangers légalement établis sur le territoire de ses Etats membres.

Pour autant, force est de constater que le débat sur les étrangers reste un sujet de controverse dans une grande majorité des Etats de l’Europe, y compris dans certaines des jeunes démocraties de l’Europe centrale et orientale, nouvellement accueillies au sein du Conseil de l’Europe.

La Convention sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local du 5 novembre 1992, texte de référence en la matière, est signée à ce jour par seulement 9 Etats membres mais n’a été ratifiée que par 6 d’entre eux : le Danemark, la Finlande, l’Italie, les Pays-Bas, la Norvège et la Suède. Pourtant les mécanismes de participation proposés sont souples et progressifs, adaptables à la réalité de chacun des Etats. Il s’agit de :

- mesures destinées à informer pleinement les résidents étrangers de leurs droits et de leurs devoirs civiques ;
- la création de comités consultatifs ou d’autres mécanismes permettant aux résidents étrangers de faire valoir leurs points de vue au niveau des autorités locales ;
- l’octroi aux étrangers remplissant les conditions de résidence spécifiques, du droit de vote et d’éligibilité au niveau local.

Afin de mieux faire connaître cette convention et les mesures qu’elle préconise, le CPLRE a organisé récemment deux rencontres majeures :

- une grande conférence organisée en coopération avec la ville de Strasbourg et son Conseil Consultatif des Etrangers, qui a réuni 400 participants dans l’hémicycle du Conseil de l’Europe, intitulée « Quelle participation des résidents étrangers à la vie publique au niveau local ? » (Strasbourg, les 5 et 6 novembre 1999)2. A l’issue de cette conférence un Appel était adopté qui figure à l’annexe de ce document. Mme Helene Lund (Danemark) en a fait rapport à la 7ème  Session plénière du CPLRE et la Recommandation 76 (2000) et la Résolution 92 (2000) sur la participation des résidents étrangers à la vie publique locale ont ainsi été adoptées3.

- l’audition de Stuttgart, a été organisée le 14 décembre 2001 à l’initiative de la commission de la culture et de l’éducation de la Chambre des pouvoirs locaux et sur invitation du Maire de Stuttgart, membre de cette Commission. Cette audition a réuni une centaine de personnes et avait, quant à elle, pour but d’approfondir la réflexion et l’échange d’expérience sur une des mesures proposées par la Convention du Conseil de l’Europe sur la participation des résidents étrangers à la vie publique locale, à savoir : les conseils consultatifs. Le programme de l’audition figure en annexe au présent rapport et des actes complets en sont publiés séparément.

Ces deux rencontres, il faut le souligner, ont eu pour intérêt majeur de faire se rencontrer sur la question de la participation des étrangers à la vie publique locale, à la fois des responsables institutionnels dont de nombreux élus et des citoyens engagés sur cette question, pour la plupart militants et responsables associatifs. Beaucoup d’entre eux même actifs de longue date n’avaient pas eu l’opportunité d’échanger ou de confronter leur expérience hors du territoire national et quelquefois local. Les étrangers eux-mêmes, bien que très directement concernés, ont très rarement la parole.

La manifestation de Strasbourg avait été conclue par l’«Appel de Strasbourg» adressé aux institutions européennes, aux Etats membres du Conseil de l’Europe et à leurs pouvoirs locaux ainsi qu’aux partis politiques pour qu’ils permettent aux résidents étrangers, sans distinction de nationalité, d’obtenir le droit de vote et d’éligibilité au niveau local. Il souligne également la nécessité pour les Etats membres de signer, de ratifier et d’appliquer les dispositions de la Convention du Conseil de l’Europe du 5 novembre 1992.

La rencontre de Stuttgart s’inscrivait dans le prolongement de cet événement, elle marque une volonté et une nécessité de passer sur cette question du débat d’expert au débat citoyen.

Le CPLRE offre ainsi un lieu privilégié d’expression d’une préoccupation et d’un mouvement d’idée, à la fois européen, national et local :

- européen, parce que la mise en œuvre du traité de Maastricht a introduit l’existence d’une citoyenneté européenne. «Il est institué une citoyenneté de l’Union. Est citoyen de l’Union toute personne ayant la nationalité d’un Etat membre […] » rendant de fait possible l’exercice d’une citoyenneté de résidence indépendante des droits attachés à la nationalité. La perspective est tracée mais la réalité d’aujourd’hui est bien celle d’une nouvelle discrimination à l’égard de certains résidents étrangers devenus de seconde zone, car exclus des dernières consultations électorales européennes et locales. Le Parlement européen s’était pourtant prononcé à plusieurs reprises pour l’extension du droit de vote et d’éligibilité aux élections municipales et européennes à l’ensemble des citoyens extra-communautaires résidant depuis plus de 5 ans sur leur territoire.

- national, car la question du statut des étrangers fait débat en Europe. Débat sur le contrôle aux frontières et l’expulsion des clandestins, les règles du droit d’asile, le code de la nationalité. Il devient un enjeu électoral parfois majeur. C’est le cas par exemple, depuis près de 20 ans en Allemagne, en Autriche et en France, cela a été le cas tout récemment au Danemark.

- local, les responsables politiques locaux, sont très directement confrontés aux conséquences des politiques d’immigration. La question des discriminations à l’emploi, au logement et dans les loisirs est posée, celle des religions l’est aussi et d’abord dans nos villes et nos quartiers. Selon le contexte et les personnes, elles sont abordées très diversement, avec une réflexion politique et éthique ou parfois de seules arrières-pensées sécuritaires.

Nous reviendrons en premier lieu sur les expériences qui sont menées en Europe pour faciliter la participation des populations immigrées à la vie locale, avant d’aborder la question du droit de vote et celle du débat sur la citoyenneté de résidence.

Il est courant d’opposer les instances participatives quel que soit leur statut et le droit de vote comme forme aboutie de la démocratie. Cette opposition n’est pas nécessairement pertinente.

Les instances participatives

Quelques-unes des différentes variantes d’instances participatives ont fait l’objet de présentations détaillées, à Stuttgart. Elles sont reprises dans des synthèses écrites et nous n’y reviendrons pas. Les conditions de leurs mises en oeuvre méritent en revanche que l’on s’y attarde. La démarche poursuivie est à l’évidence une condition de la bonne réussite du dispositif.

C’est en ce sens que l’on peut affirmer qu’il n’y a pas de modèle unique d’instance participative. De même, les politiques nationales peuvent être incitatives ; elles n’ont pas nécessairement vocation à fixer un cadre trop strict. La démocratie participative ne se décrète pas.

La notion de participation elle-même mérite d’être précisée. Il s’agit bien de participation politique : donner les moyens à des individus d’être des acteurs, de prendre part à la vie de la cité, de peser sur leur destin au sein d’une communauté d’habitants ou encore d’avoir accès à l’élaboration des choix politiques, même si ceux-ci restent du ressort des élus titulaires de la légitimité du suffrage universel.

Les résidents étrangers dans l’Union européenne sont pour la plupart issus de vagues successives d’immigration en provenance d’autres pays européens en premier lieu, d’autres continents par la suite. La dernière arrivée massive d’étrangers a pris fin avec la crise économique des années 70 à 80. Depuis lors, l’immigration est globalement restreinte au regroupement familial et aux réfugiés, situation qui sera amenée à évoluer dans l’Europe de l’ouest en raison de la diminution par vieillissement, de la population active.

Parmi ces étrangers certains ont été naturalisés, d’autres se sont installés définitivement en conservant la nationalité du pays d’origine. Ils abandonnent pour la plupart tôt ou tard tout projet de retour, en raison souvent de la présence d’enfants définitivement installés dans le pays d’accueil ; duquel beaucoup d’entre eux auront acquis la nationalité.

Dès lors se pose la question de la représentation politique de ces étrangers. Les premières formes de participation ont été sociales au travers du mouvement associatif et syndical. Ce n’est que plus tard, et souvent pour faire face aux difficultés (ségrégations, échec scolaire, constitution de quartiers ghettos), que le débat a été posé en terme de droits politiques, d’égalité des droits ou d’accès à la pleine citoyenneté.

Le développement de l’autonomie locale partout en Europe a beaucoup contribué à la prise en compte de la nécessité d’une meilleure compréhension et à une autre approche des populations étrangères. C’est sous l’impulsion et par la volonté d’élus locaux confrontés très directement à la réalité sociale de leur population qu’ont été mises en œuvre, souvent à titre expérimental et sous des formes très diverses, les instances participatives pour les résidents étrangers.

S’il n’existe pas de modèle de participation, de forme aboutie d’instance qu’il suffirait de reproduire pour assurer aux résidents étrangers la reconnaissance à laquelle ils aspirent, il ressort cependant de l’examen des différentes politiques mises en œuvre des caractères communs.

L’expression d’une reconnaissance politique

La collectivité territoriale «reconnaît l’étranger résident non pas par une identité spécifique, mais par des droits et des devoirs qu’il partage avec les autres résidents de la commune». Cet extrait de la charte des résidents étrangers de Strasbourg, signée en 1992, illustre ce qui peut être considéré comme le principe d’une reconnaissance politique, la manifestation d’une volonté de prendre en compte une communauté de destin au-delà de ses spécificités, au-delà des limites imposées par la loi en matière de participation politique. C’est dans cet esprit qu’ont été créés les conseils consultatifs des résidents étrangers. Ils se distinguent fondamentalement des commissions municipales ouvertes ou extra-municipales, instances techniques de débat sans réelle portée politique, dont ils ont quelquefois pris le relais.

La participation politique des étrangers est avant tout perçue ou revendiquée comme palliatif à l’absence de droit de vote. Le corps électoral d’une part et les représentants élus d’autre part, ne traduisent pas la réalité du corps social. Il s’agit bien de réduire cet écart en impliquant une plus large part de la population. Les instances participatives poursuivent l’objectif de mise en œuvre concrète du principe d’égalité des droits.

L’acceptation tout à la fois de la différence mais aussi de valeurs partagées

L’intégration et l’assimilation ne doivent pas être confondues. Chaque individu porte une culture particulière, il appartient à la société de donner à chacun les meilleures conditions pour qu’il développe toutes ses potentialités sans pour autant devoir renoncer à ses particularismes. Chacun doit pouvoir se réclamer d’une identité culturelle, ethnique, religieuse ou nationale respectée de tous.

Dans ce processus d’apprentissage, la confiance que l’on peut avoir dans ses propres valeurs ne peut que favoriser l’acceptation de valeurs communes. La citoyenneté consiste à revendiquer, mettre en avant, défendre ces valeurs communes.

La prise en compte de besoins spécifiques

La population étrangère a à faire face dans son ensemble à des difficultés particulières, des problèmes sociaux spécifiques liés à la langue, la culture, l’intégration économique, des difficultés administratives, volonté de maintenir des liens culturels ou familiaux avec des pays parfois lointains, etc. Vouloir résoudre ces difficultés c’est aussi vouloir impliquer tous les acteurs : les résidents étrangers eux-mêmes mais aussi les élus qui ont en charge l’intérêt général et la préservation de la cohésion sociale.

La recherche d’un lieu d’expression commune

Il est quelquefois reproché aux responsables politiques mettant en œuvre des instances spécifiques de participation pour les résidents étrangers d’éthniciser les rapports sociaux. Pour autant, des divers témoignages sur le fonctionnement effectif des conseils consultatifs, il ressort que très rapidement il en émerge une expression commune, celle des résidents étrangers qui ne se confond pas avec les intérêts propres à chaque communauté représentée. La mise en œuvre d’un lieu d’expression collective favorise la prise en compte de la diversité des populations étrangères mais dans une dimension collective, à partir de problématiques communes, en dépassant l’identité propre à chacun.

La valorisation du fait associatif

Les associations d’immigrés ou de soutien jouent un rôle primordial, quelle que soit la forme retenue de l’instance participative. Instance élue comme à Stuttgart, la sensibilisation, la campagne, l’organisation matérielle des élections, passent par les associations. Instance composée de représentants associatifs, ce sont encore elles qui en fondent la légitimité. Tous les responsables politiques se plaisent à souligner le rôle majeur du fait associatif dans la démocratie locale. Parfois, le dialogue est difficile voire imposé, on se souviendra des associations maghrébines et turques investissant des immeubles vides à Amsterdam avant d’être reconnues par les autorités locales, d’en obtenir la mise à disposition et les moyens de les entretenir. Beaucoup d’immigrés ont quitté leur pays pour des raisons politiques, ils se sont naturellement organisés dans le pays d’accueil dès que cela a été possible avec parfois des relations difficiles avec les autorités consulaires des pays d’origine. Ils forment encore le noyau dur des militants pour l’égalité des droits. Certains d’entre eux soulignent que par manque de moyens financiers ils ne peuvent jouer un rôle plus actif dans le débat européen. Le CPLRE fait exception en la matière, en permettant l’échange d’expériences et la libre parole.

La formation citoyenne

Si la prévention ou la résolution des conflits sociaux est un objectif partagé, donner accès à la gestion publique locale peut être un moyen efficace pour y parvenir. La transparence, la compréhension des enjeux contribuent à faire porter l’attention sur les problèmes réels et non pas supposés, à préciser les limites du champ politique du possible. La participation facilite la transmission des valeurs citoyennes à l’intérieur des familles, elle peut inciter les enfants dont beaucoup seront naturalisés, à exercer eux aussi leurs devoirs lorsqu’ils en auront la capacité. Il s’agit là de favoriser l’épanouissement des immigrés dans la société d’accueil. L’échelon local parce qu’il est directement lié aux réalités du quotidien, est le plus pertinent pour permettre la bonne compréhension et la pratique de la démocratie, pour assurer une réelle intégration dans la société d’accueil. Les instances participatives jouent alors un rôle d’entraînement et ont valeur d’exemple.

Un moyen de favoriser l’ouverture culturelle

L’affirmation de son identité propre cela a été dit, n’est en rien contradictoire avec l’intégration. La mise en valeur de sa culture d’origine favorise l’épanouissement nécessaire à chaque individu pour exister pleinement. La participation à la vie de la cité est aussi culturelle. De très nombreuses initiatives montrent que la culture est un vecteur fort du message politique, des valeurs de tolérance, de lutte contre la xénophobie et le racisme. La reconnaissance passe d’abord par la connaissance : fêtes des cultures, fêtes des peuples animations multiculturelles, ce sont bien souvent des moments privilégiés de rencontre où l’expression des différences favorise l’échange autour de valeurs communes. L’apport des associations à l’animation d’un quartier d’une ville est reconnu de tous. Des moments de fête et de convivialité peuvent permettre la réflexion et l’engagement aussi bien des immigrés que des autochtones. La participation des étrangers, ne saurait se définir ni se limiter à l’action culturelle, mais beaucoup d’associations utilisent ce vecteur, avec succès, dans leurs moyens d’action.

Ces objectifs étant posés, il convient également d’aborder les moyens à mettre en œuvre pour permettre leur réussite.

Des moyens de travail

Généralement issus du mouvement associatif et largement sollicités à ce titre, en plus d’une activité professionnelle, ces acteurs de la vie publique que sont les animateurs des instances participatives ont très souvent de grandes difficultés à faire face au surcroît de réunions, déplacements, rencontres qui sont nécessairement induites par toute forme d’action publique. Le défraiement est quelquefois le seul avantage proposé pour couvrir les déplacements. L’indemnisation au même titre que d’autres élus reste l’exception. De même, la création d’une cellule administrative de soutien au sein de la collectivité s’avère indispensable. Il s’agit de décharger des bénévoles des tâches administratives, courriers, comptes rendus, mais aussi d’assurer ce lien permanent avec les élus, de permettre le suivi et l’impulsion de projets. Assurer les moyens administratifs de la participation c’est avoir la volonté d’intégrer de façon concrète le fonctionnement de l’instance participative à la gestion municipale.

Un secrétariat permanent rattaché à l’administration, un budget d’action et un budget de formation, un journal ou bulletin d’information, pour diffuser et faire connaître le travail accompli, sont quelques-uns des moyens qu’il est souhaitable de mettre en œuvre. La formation doit faire l’objet d’une attention toute particulière. Donner les moyens de comprendre le fonctionnement de la collectivité et les mécanismes de la prise de décision, mais aussi celui d’un organisme bailleur par exemple, s’avère indispensable si l’on souhaite des échanges fructueux. L’information est la clé du pouvoir, c’est aussi vrai lorsqu’il y a volonté de partage du pouvoir. L’expérience montre également que la formation lorsqu’elle est assurée par les responsables des différents services administratifs est un excellent moyen de diffuser la connaissance de l’existence d’un conseil consultatif à l’intérieur de la collectivité. Il s’agit de ne pas la cantonner à quelques interlocuteurs élus où fonctionnaires, dont le rôle serait la prise en charge exclusive des préoccupations des résidents étrangers. Chaque échelon de l’administration locale doit se sentir et être concerné.

Un fonctionnement démocratique

Les formes d’instances participatives sont nombreuses et variées. Elles vont des conseillers associés élus par les résidents étrangers qui s’apparentent aux autres conseillers mais en étant privés de voie délibérative, jusqu’aux commissions ou conseils communaux des immigrés dont les représentants sont choisis ou élus parmi la population immigrée tout entière ou encore au sein d’un collège de représentants associatifs. Le choix est vaste. Pour autant les limites de ces structures participatives se trouvent toujours dans leur capacité à impliquer la plus large partie de la population concernée. Permettre l’émergence d’une élite ou de leaders issus de l’immigration n’est pas sans intérêt, mais si l’on veut progresser dans la prise en compte de la réalité de la vie des résidents étrangers il convient de réduire le plus possible la distance entre les personnes que l’on veut consulter et leurs représentants. Ceci implique des moyens de fonctionnement et d’information, nous n’y reviendrons pas mais aussi un cadre de travail clairement défini. La transparence et la contractualisation sont des facteurs de réussite. Certaines collectivités tiennent à formaliser leurs relations avec les conseils consultatifs sous la forme de chartes signées conjointement, fixant les grands principes, les moyens, les objectifs et les limites de la participation. Cela ne peut qu’accentuer la crédibilité de la démarche, un acte fondateur fait référence et fait sens. Dans certains pays c’est la loi qui à l’échelon national fixe le cadre institutionnel de la participation.

Une instance réellement consultative

Liée au fonctionnement institutionnel local, l’instance participative, lorsqu’elle joue pleinement son rôle, est amenée à interpeller l’autorité en place ou à l’inverse à répondre à ses sollicitations. Il s’agit alors de prendre l’avis des résidents étrangers avant les décisions qui pourraient les concerner, de les intégrer à la réflexion et de faire de cette concertation un élément du processus décisionnel. La complexité de la décision, le poids des techniciens, la place prépondérante des exécutifs municipaux font qu’à de très rares exceptions, les instances participatives ne sont que peu consultées, pas plus hélas que d’autres commissions municipales ou extra-municipales. Mais il pourrait là être donné une crédibilité nouvelle à ces structures.

La durée

Il est parfois difficile pour des élus locaux soumis à des calendriers politiques contraints, d’inscrire leur action dans la durée. Il s’agit pourtant d’une condition indispensable à la réussite de toute forme de participation. La confiance est un climat qui se crée dans la durée tout comme le maniement de la langue du pays d’accueil, faute de quoi l’absence de références communes sont de réels obstacles à un dialogue fructueux. La pratique de la démocratie élective n’est pas nécessairement acquise par tous les résidents étrangers et la citoyenneté est de prime abord une notion abstraite. Plusieurs exemples dont celui de Stuttgart montrent bien que c’est avec le temps, que progressivement se façonne un conseil consultatif : de membres nommés, à l’origine l’on est passé à des membres élus sur des listes de candidats regroupés par nationalités, puis à des listes pluriethniques dont le point de convergence de chacune d’entre elle est désormais de défendre un projet commun, une même approche de la ville. Dix années ont été nécessaires pour arriver à ce résultat. L’alternance politique n’entraîne pas nécessairement la remise en cause des structures en place mais elle peut aussi parfois conduire à la mise à bas d’années d’effort. C’est un argument souvent avancé par les partisans du droit de vote pour le déclarer comme seul moyen réel parce que pérenne de la participation politique pour les étrangers.

Inscrire ce travail dans la durée c’est aussi prendre en compte les changements de personnes inhérents à l’engagement politique ou associatif. La transmission d’une pratique, d’un savoir collectif est alors intégrée dans le fonctionnement même de la structure participative. Un renouvellement régulier mais partiel des instances s’avère de ce point de vue judicieux de manière à ce qu’un changement de présidence ou de membres du bureau, s’il en existe un, ne déstabilise pas l’ensemble de la structure.

Des résultats concrets

La reconnaissance politique se nourrit de symboles et s’illustre par des actes. La crédibilité de toute instance participative se mesure aussi à ses réalisations concrètes, aux avancées perceptibles dans la vie quotidienne, en matière de lutte contre la marginalisation et les discriminations.

Pour autant, l’implication des résidents étrangers au travers d’instances participatives n’est pas considérée comme un remède suffisant au déficit démocratique de nos sociétés. Pour beaucoup le droit de vote reste la revendication majeure, la seule traduction concrète et acceptable du principe d’égalité des droits.

Le droit de vote au niveau local

Souvent présentée comme la forme la plus aboutie de la participation des étrangers aux affaires publiques, dans la mesure ou nationaux et non nationaux sont sur un même pied d’égalité, le droit de vote n’en demeure pas moins l’exception dans les pays européens. Faut-il rappeler que seuls le Danemark, la Finlande, l’Irlande, la Lituanie, les Pays-Bas, la Norvège, la Suède accordent à ce jour, ce droit à tous leurs ressortissants étrangers4. Majoritairement, ces pays se revendiquent du principe de la pluriculturalité, à la différence d’autres états qui mettent en avant l’intégration républicaine et les liens indissociables entre citoyenneté et nationalité.

Dès lors, pour ceux qui s’opposent au droit de vote, l’acquisition de la nationalité, par la manifestation de volonté qu’elle suppose, est la condition incontournable de l’attribution d’une pleine citoyenneté et des droits politiques qui l’accompagnent. Permettre aux nationaux et non nationaux de disposer des même droits porterait en germe le risque d’un enfermement communautaire celui de maintenir les étrangers dans leur condition d’étranger, de ne pas favoriser leur cheminement vers une intégration parfaite qui en ferait des citoyens comme les autres.

A l’inverse rappelons quelques-uns uns des arguments généralement avancés en faveur du droit de vote.

La question de l’équité

Accepter dans une démocratie moderne la cohabitation de deux et maintenant de trois catégories de citoyens, ceux qui participent pleinement, ceux qui, nationaux d’un pays de l’Union participent pleinement et ceux qui sont exclus de toute consultation électorale, est contraire aux principes démocratiques élémentaires. Il s’agit d’une discrimination qui ne peut que fragiliser la cohésion sociale5.

La question de l’exemplarité

Elle se pose à différents niveaux. De nombreux immigrés sont issus de pays non démocratiques. Certains d’entre eux les ont fuit pour des raisons politiques et en sont rejetés, mais la grande majorité retournent ou ont des relations sur place. Si l’on souhaite que la démocratie puisse progresser dans d’autres états ou continents, il faut aussi croire en sa valeur d’exemplarité et en faire bénéficier le plus grand nombre. Si la démocratie est une valeur universelle on ne peut valablement avancer le principe de réciprocité pour s’opposer au droit de vote des étrangers.

Plus près de nous, aucun pays européen n’échappe aux difficultés ressenties par une partie de sa jeunesse, difficultés qui s’expriment parfois de manière violente. La jeunesse immigrée ou issue de l’immigration est confrontée très directement aux maux de notre société. L’exigence d’une autorité parentale plus forte, est souvent mise en avant par la classe politique, comme remède à ces maux, la « responsabilisation » est à l’honneur. Permettre aux parents d’exercer la responsabilité politique serait également un signe fort. Les valeurs démocratiques comme les valeurs morales se transmettent de génération en génération.

La question de l’exclusion

Les élus locaux, les premiers confrontés aux difficultés sociales, n’en sont pas pour autant insensibles aux contingences politiques et électorales. La non prise en compte dans les politiques publiques des intérêts des populations étrangères peut parfois s’expliquer par leur faible poids électoral. Le droit de vote et d’éligibilité ne pourrait que renforcer la recherche de solutions pour lutter efficacement contre toutes les formes d’exclusion de populations trop souvent marginalisées.

Au-delà des arguments en faveur ou en défaveur du droit de vote, il faut regretter que l’approche politique du statut des immigrés, ait été essentiellement et durablement une approche négative et défensive. Il n’existe pas de consensus entre Etats européens sur les conditions d’entrée et de séjour des étrangers, ni sur l’accès à la nationalité et aux droits politiques. Il aura fallu les événements tragiques de l’automne 2001 pour relancer la mise en place des politiques communes en matière de lutte contre le terrorisme. Mais rien de semblable ne se dessine encore dans le domaine de la citoyenneté européenne, il faut le regretter.

Le traité de Maastricht avait pourtant ouvert un champ nouveau en la matière. En définissant une citoyenneté européenne basée sur un principe de réciprocité entre Etats membres de l’Union, sur une différenciation claire entre citoyenneté et nationalité, il rendait possible une approche nouvelle plus cohérente, avec d’une part la réalité de nos sociétés et des populations immigrées qui y sont durablement établies et d’autre part, celle de la libre circulation des personnes devenue irréversible sur notre continent. Ainsi, la citoyenneté de résidence est indissociable de la construction européenne et de l’aspiration de plus en plus forte de ses citoyens à un monde ouvert et en mouvement. Rappelons ce que recouvre cette citoyenneté de résidence et quelques arguments qui plaident en faveur de sa reconnaissance.

La citoyenneté de résidence

La citoyenneté est anciennement attachée à la nationalité dans la conception traditionnelle des états nations. Les étrangers ont des droits sociaux, économiques mais sont pour la plupart privés des droits politiques. Cependant, ces droits leurs seraient conférés par une citoyenneté de résidence non pas en raison de leur appartenance à la communauté nationale mais en raison de leur capacité à prendre une part active, à participer à la vie publique locale. Cette citoyenneté implique une durée de résidence continue comprise entre 3 et 5 ans, les avis divergent, ainsi que la manifestation d’une volonté, celle de l’inscription sur la liste électorale.

La reconnaissance des droits attachés à la personne

Les sociétés démocratiques modernes ont en commun la capacité de leurs membres à circuler librement. Accepté et mis en œuvre dans le domaine économique, le principe de libre circulation s’applique aussi aux individus ; dès lors lorsque les conditions d’entrée et de séjour sont respectées, il apparaît juste et légitime que l’immigré ait des droits attachés à sa personne, basés sur les mêmes fondements que ceux qui valent pour un national. Cette approche reviendrait à considérer que les droits politiques des étrangers au même titre que le droit à la vie, à la santé, à l’éducation, à la liberté de penser, tels que définis par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, la Convention européenne des droits de l’homme et la Charte sociale européenne, sont des droits de la personne humaine indifférents de la notion de nationalité.

Citoyenneté de résidence et nationalité

Plutôt que de faire de la naturalisation un préalable du plein exercice des droits politiques, avançons que la citoyenneté de résidence, en ce qu’elle permet d’exercer des droits et des obligations partagées avec les nationaux, valorise la participation et accroît l’intérêt de rejoindre une communauté nationale dans laquelle l’étranger serait pleinement parti prenante.

Rappelons que les critères d’acquisition de la nationalité varient fortement selon les pays et que les décisions administratives de refus sont parfois arbitraires et non motivées. La démarche de naturalisation peut elle-même être liée à des intérêts propres, celui de l’accès aux emplois réservés à des nationaux par exemple, qui ne prouve aucunement une bonne intégration ni même une volonté de participation qui justifierait que soient accordés des droits politiques. A l’inverse, il est parfaitement compréhensible qu’après des années de résidence dans une ville on désire contribuer au choix des représentants élus qui influent de manière décisive sur la vie quotidienne, sans pour autant renoncer à sa nationalité d’origine.

La citoyenneté de résidence peut ouvrir la voie d’une intégration qui serait pleine et volontaire, dont certains auteurs affirment, en évoquant la naturalisation, qu’elle comprend nécessairement une dimension symbolique et affective.

La citoyenneté de résidence rendrait-elle inutile toutes les formes de participation proposées aux immigrés qui ne seraient alors que des solutions transitoires, palliatives, jusqu’à l’obtention du droit de vote ? De nombreux témoignages provenant des pays accordant ce droit, vont à l’encontre de cette affirmation.

La participation, nouvel enjeu démocratique

La participation politique ne se limite pas à l’exercice du droit de vote. Face à la distance grandissante entre gouvernants et gouvernés, de plus en plus inquiétante pour nos démocraties, face à une montée assez générale du vote protestataire et de l’abstentionnisme, il convient de s’interroger sur les réformes à mettre en œuvre pour reconquérir les opinions. Les populations fragiles et marginalisées, particulièrement, sont les plus sceptiques sur les capacités du politique à résoudre leurs difficultés, à proposer un modèle social.

Il n’y a pas d’aspiration collective naturelle, pas plus au sein des populations étrangères qu’autochtones, qui porterait chaque individu à s’intéresser à la chose publique. Ceux qui sont culturellement et socialement défavorisés ont encore plus de mal à exprimer leurs attentes, leurs besoins. A cela s’ajoute la perte d’influence considérable des corps intermédiaires, syndicats, partis politiques, mouvements familiaux, qui autrefois structuraient la demande sociale.

Le système classique de la représentation élective ne parvenant plus à faire face à ce bouleversement de l’organisation sociale, il est devenu indispensable de trouver les moyens, de faire en sorte que les citoyens puissent à nouveau conquérir ou reconquérir leur droit, leur devoir à la parole, à la réflexion, à l’action.

Au choix d’une démocratie participative correspond la recherche d’une efficacité de l’action politique. La consultation comme élément du processus démocratique peut y contribuer. Il s’agit d’élargir le corps social qui prend part à la gestion locale, d’intéresser le plus grand nombre à ce qui détermine la condition de vie de tous.

C’est dans ce champ que se situent les instances participatives des résidents étrangers. Par la reconnaissance qu’elle implique à l’égard d’une catégorie de population qui présente des particularismes forts et des besoins spécifiques, par la recherche de résultats concrets directement rattachés à la vie quotidienne, par les acquis en matière de compréhension des modes de décision qu’elle procure aux acteurs concernés, par la relation de confiance qu’elle peut permettre d’instaurer avec les responsables politiques, la démocratie locale contribue à inclure les résidents étrangers dans le système politique.

De ce fait, la participation ne s’oppose en rien, bien au contraire, elle devient complémentaire de l’exercice du droit de vote. En considérant les résidents étrangers invités comme les autres habitants à contribuer à la bonne marche de leur lieu de vie, leur quartier, leur ville elle contribue au dialogue et à la construction d’une démocratie vivante.

La démocratie locale reste encore du domaine de l’expérimentation même si la tendance est à l’inscription de ses principes dans la loi, rappelons en quelques caractéristiques essentielles.

La concertation suppose débat et discussion, elle implique une volonté politique affichée de dialogue constructif, avec les citoyens. La concertation ne doit pas être confondue avec la codécision, celle-ci relève de l’autorité politique, néanmoins la concertation s’inscrit dans un processus décisionnel et constitue un élément d’aide à la décision. Comités de quartiers, conseils d’habitants, comités de résidents, commissions extra-municipales, réunions publiques, chartes de la concertation, etc., autant de moyens et bien d’autres encore de la participation à l’échelon local. Il s’agit de donner toute leur place à des citoyens, à toutes les phases de la délibération pour que la construction de la décision soit démocratique. La vie municipale s’y prête, le sentiment « d’appartenance » influe dans la volonté des habitants de se mobiliser pour leur environnement immédiat, pour leur cadre de vie et bien au-delà, jusqu’à des projets de quartier, de ville ou d’agglomérations élaborés avec les habitants, contractualisés et mis en œuvre dans des programmes pluriannuels.

Les instances participatives propres aux étrangers, au même titre que les conseils des jeunes trouvent naturellement leur place au sein ou aux côtés des autres structures participatives notamment de quartier, elles deviennent un maillon d’un dispositif plus large. Les immigrés ne sont plus nécessairement perçus comme une catégorie à part et l’exercice de la citoyenneté en est facilité, dans sa cage d’escalier, son quartier sa commune. La participation au choix des représentants élus, trouve alors tout son sens.

La Convention du Conseil de l’Europe sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local a été ouverte à la signature en 1992 pour répondre aux difficultés qu’éprouvaient la plupart des Etats membres à assurer l’intégration des étrangers au sein de la collectivité dans laquelle ils vivent. A ce jour, 6 pays l’ont ratifiée et en appliquent les dispositions.

Hélas, dix ans plus tard, la participation politique des étrangers reste un sujet de polémique et de controverse politique. Les immigrés et leurs enfants restent largement soumis à l’exclusion sociale. Des politiques publiques très diverses s’attachent à lutter contre ce phénomène, elles sont souvent initiées et mises en œuvre à l’échelle locale.

Les instances participatives, en misant sur la capacité des habitants eux-même à construire des réponses à leurs difficultés, mais aussi à prendre une part active à leur émancipation politique et citoyenne, font partie des mesures qui contribuent au maintien de la cohésion sociale. Pour autant force est de constater que ces structures restent marginales à l’échelle de l’Europe. Très rarement imposées par la loi, elles relèvent avant tout de la libre appréciation et de la bonne volonté des élus locaux, aussi bien pour leur création que pour leur fonctionnement.

La conférence de Strasbourg en 1999 et l’audition de Stuttgart en 2001, à l’instigation du CPLRE, ont permis des échanges riches et une approche convergente des enjeux, conditions et difficultés de leur mise en œuvre. Elles ont aussi illustré de manière forte que le droit de vote aux élections locales et la reconnaissance d’une citoyenneté de résidence restent des revendications prioritaires pour de nombreux résidents étrangers et leurs porte-parole.

Si les termes de la Convention du Conseil de l’Europe restent justes, l’Appel de Strasbourg s’en est fait l’écho : « Les participants soulignent l’actualité et la pertinence de la Convention… Ils demandent aux Etats membres du Conseil de l’Europe qui ne l’ont pas encore fait, de signer et ratifier ce texte et de le mettre en pratique. », avançons qu’il y aurait avantage à en reformuler l’argumentation, selon un principe de référence en matière européenne, celui de la subsidiarité :

- à l’Europe, la citoyenneté de résidence,
- aux Etats, la promotion de la démocratie locale,
- aux collectivités locales, la mise en œuvre des instances participatives.

Le traité de Maastricht crée la citoyenneté européenne, osons l’étape suivante, celle qui attribuerait cette citoyenneté non seulement aux nationaux de chacun des Etats de l’Union, mais à l’ensemble des résidents régulièrement établis sur le territoire de l’un de ces Etats. L’égalité des droits et bien entendu le droit de vote aux élections locales en serait la conséquence naturelle. Ce statut pourrait être repris par les états y compris à l’extérieur de l’Union.

Selon le rapport Duhamel, soumis au Parlement européen en octobre 2001, 70 % des citoyens interrogés, étaient favorables à une constitution de l’Union européenne. Simple prise en compte des traités existants ou constitutionnalisation d’un Etat européen ? Le chemin sera long et difficile mais l’idée est en marche. La Convention sur l’avenir de l’Europe, formulera des recommandations pour juin 2003 à une conférence intergouvernementale. A l’Europe de résidents de se faire entendre.

La participation est un enjeu démocratique partout en Europe. Des mesures particulières aux immigrés, tels les conseils consultatifs et assimilés pourront alors se développer, avec un moindre risque de contestation et de polémique, s’ils sont intégrés dans un dispositif qui s’adresse à tous les habitants indistinctement.

La démocratie participative nécessite souplesse et conviction. Nous croyons que si la question du droit de vote est réglée, si le cadre législatif national fixe les grands principes de la démocratie locale, alors les élus locaux sauront faire preuve d’imagination et d’audace, pour œuvrer avec les résidents étrangers en matière de lutte contre les discriminations, d’éducation pour eux-mêmes et leurs enfants, pour offrir un parcours social et résidentiel à des habitants souvent privés de perspectives valorisantes.

Il reste une question sensible, celle des moyens de diffuser ces revendications, de les porter auprès de la société civile et auprès des décideurs. Le CPLRE et le Conseil de l’Europe y contribuent largement, mais cela reste encore insuffisant.

Madame Hélène Lund, Vice-Présidente de la Commission de la culture et de l’éducation, soulignait en concluant les travaux de la rencontre de Stuttgart et en annonçant une manifestation d’envergure dans cette même ville et sur ce même thème en 2003, à la nécessité fortement ressentie par tous les participants, d’assurer la coordination des acteurs et la diffusion de la connaissance autour de ce thème de la participation politique des étrangers.

Suite à l’audition de Stuttgart et aux propositions de travail futur avancées à cette occasion, les projets de résolution et de recommandation afférents à ce rapport avancent quelques pistes d‘action futures, quelques initiatives à lancer au sein du CPLRE, mais aussi dans d’autres instances ou en coopération avec d’autres secteurs du Conseil de l’Europe afin de mobiliser tous les acteurs aptes à faire progresser le débat, les mentalités et les pratiques partout en Europe.

Nous proposons notamment la création, sous l’égide du CPLRE, d’un réseau de villes dotées de structures consultatives pour résidents étrangers, afin qu’elles échangent leur expérience en la matière, mettent en commun leurs réflexions sur les défis qu’elles rencontrent et fassent connaître aux autres villes européennes les atouts de telles structures. Enfin, nous proposons que le Congrès, avec les autres secteurs concernés du Conseil de l’Europe, établisse un recueil de bonnes pratiques pour la participation des résidents étrangers à la vie publique locale et leur intégration et que soit établie une liste des principes directeurs pour guider les villes européennes dans leurs efforts en la matière.

L’Europe est née d’une volonté politique, mais elle prospère aussi par l’intervention de groupes de pression. Les résidents étrangers ne sont pas prêts d’acquérir l’influence intellectuelle et institutionnelle des lobbies financiers et industriels, il n’en est pas moins essentiel de porter ce débat sur la place publique. L’urgence me semble être de trouver les moyens de faire vivre une structure souple et légère, sous une forme à définir (association, agence, réseau de ville) pour poursuivre la tâche, celle de bâtir une Europe conforme à ses principes démocratiques, celle de donner enfin une voi(e)x, à ceux qui n’en ont pas.

ANNEXE 1

Stuttgart (Allemagne), 14 décembre 2001

Audition / Atelier sur

«La participation des résidents étrangers à la vie publique locale - les conseils consultatifs»

PROGRAMME

10.00 Allocutions d’ouverture

. Dr Wolfgang SCHUSTER, Maire de Stuttgart, Membre de la Commission de la culture et de l’éducation de la Chambre des pouvoirs locaux du CPLRE
. Mme Helene LUND, Vice-Maire de Farum, Vice-Présidente de la Commission de la culture et de l’éducation du CPLRE, Danemark

10.30 – 12.00 1ère PARTIE

Présentations de différentes villes européennes dotées de Conseils Consultatifs pour résidents étrangers dans des pays où ils n’ont pas le droit de prendre part aux élections locales

Présidée par : Mme Helene LUND, Vice-Maire de Farum, Vice-Présidente de la Commission de la culture et de l’éducation du CPLRE, Danemark

STUTTGART (Allemagne)
Mme Isabel LAVADINHO et M. Gari PAVKOVIC, Coordinateurs pour l’intégration des résidents étrangers, Département pour l’intégration de la ville de Stuttgart

BARCELONE (Espagne)
Mme Iria GARCÍA LABANDEIRA, Responsable municipale du programme des minorités ethniques du district de Ciutat Vella et M. Mohamed HILAL BENT ALI, du Centre d'information pour les travailleurs étrangers de Barcelone et représentant du Conseil Municipal d'Immigration de Barcelone

MODENE (Italie)
M. Valter REGGIANI, Président du Conseil Provincial de l’Immigration, Province de Modene

BELGIQUE
M. Michel VILLAN, Directeur, Division de l’Action sociale et des Immigrés, Ministère de la Région Wallone, Namur

GRENOBLE (France)
M. Gilles KUNTZ, Conseiller municipal, délégué aux droits des étrangers, Représentant du Maire pour le Conseil Consultatif des Résidents Etrangers Grenoblois

BOURG-EN-BRESSE (France)
M. Ali ABED, Président du Conseil Consultatif des Etrangers

12.00 – 13.00 Débat / Questions

avec, notamment, les interventions de :

- Mme Khedidja BOURCART, Maire adjointe chargée de l’Intégration, Paris, France
- Mme Gertraud LOESEWITZ, Directrice de l’administration municipale, Munich, Allemagne
- M. Roberto PELLA, Maire de Valdengo et Président du Conseil de la Province de Biella, Italie, Membre du Comité des Régions de l’Union européenne

Déjeuner

14.30 – 15.30 2e PARTIE

Présentations de différentes villes européennes dotées de Conseils Consultatifs pour résidents étrangers dans des pays où ils ont le droit de prendre part aux élections locales6

Présidée par : Mme Veronica DIRKSEN, Membre de la commission de la culture et de l’éducation du CPLRE, Echevin de Maastricht, Pays-Bas

LA HAYE (Pays-Bas)
M. Chris KWANT, Conseiller en communication du Conseil Consultatif des Résidents Etrangers (SAM) et M. Hassan AL-GHAZI, Secrétaire Général du Conseil Consultatif des Résidents Etrangers (SAM)

MAASTRICHT (Pays-Bas)
Mme Barbara de la RIVE BOX, Vice-Présidente du Conseil Consultatif des Résidents Etrangers

GÖTEBORG (Suède)
Mme Rosie ROTHSTEIN, ancien membre du Conseil municipal, Coordinatrice pour l’Union européenne pour le développement urbain local

DANEMARK
Mme Hanne FUGLBJERG, Conseil des minorités ethniques, conseil consultatif pour le Ministère de l’Intérieur

15.30 – 16.00 Débat / Questions

avec, notamment, l’intervention de :

- M. Noor Mohamed HUSSAIN, Président du Conseil des Immigrants de la ville de Stavanger et membre du comité de direction de la Fondation Internationale (International House Foundation), Norvège

16.00 – 17.00 Table Ronde

Animée par : M. Karl-Heinz MEIER-BRAUN, Editeur en chef de la « Radio SWR International », Stuttgart

avec, notamment, la participation de :

- M. Ulrich GOLL, Ministre de la Justice et Délégué aux Etrangers du Gouvernement du Land du Bade-Württemberg, Allemagne
- M. Paul ORIOL, Lettre de la Citoyenneté, France
- M. Memet KILIC, Président du Conseil Consultatif des Etrangers de la ville de Heidelberg, Allemagne
- Mme Veronica DIRKSEN, Membre de la commission de la culture et de l’éducation du CPLRE, Echevin de Maastricht, Pays-Bas
- M. Alain KAUFF, Rapporteur Général de l’Audition, ancien adjoint au Maire de la ville de Strasbourg chargé de la démocratie locale, France
- M. Ulrich BOHNER, Directeur exécutif adjoint du CPLRE

Débat avec les participants

17.00 – 17.30 Allocutions de Clôture

. Mme Helene LUND, Vice-Maire de Farum, Vice-Présidente de la Commission de la culture et de l’éducation du CPLRE, Danemark

. Dr Wolfgang SCHUSTER, Maire de Stuttgart, Membre de la Commission de la culture et de l’éducation de la Chambre des pouvoirs locaux du CPLRE

ANNEXE 2

Le 6 novembre 1999

«Quelle participation des résidents étrangers à la vie publique locale ? »

Conférence organisée par le Conseil Consultatif des Etrangers de la ville de Strasbourg et le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe – Conseil de l'Europe

Strasbourg, 5-6 novembre 1999, au Conseil de l'Europe

APPEL DE STRASBOURG

1. Les participants à la conférence de Strasbourg, des 5 et 6 novembre 1999, réunis à l’initiative conjointe de la ville de Strasbourg et de son Conseil Consultatif des Etrangers, d’une part, et de celle du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l’Europe, d’autre part, remercient les organisateurs d’avoir permis la rencontre de près de 400 participants en provenance de plus de 20 pays membres du Conseil de l’Europe.

2. Ils lancent un Appel pressant aux institutions européennes, aux Etats membres du Conseil de l'Europe et à leurs pouvoirs locaux ainsi qu’aux partis politiques pour qu'ils permettent aux résidents étrangers sans distinction de nationalité d’obtenir le droit de vote et d’éligibilité au niveau local.

3. L’octroi du droit de vote au niveau local à tous les résidents étrangers quelle que soit leur origine est aujourd’hui devenu une exigence incontournable fondée sur les principes de la Convention européenne des Droits de l’Homme du Conseil de l'Europe.

4. Dans cet esprit, les participants estiment discriminatoire une citoyenneté limitée aux seuls ressortissants de l’Union européenne.

5. Les participants soulignent l'actualité et la pertinence politique de la Convention sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local, adoptée par les Etats membres du Conseil de l'Europe le 5 novembre 1992 et, à ce jour, signée par 8 Etats membres et ratifiée seulement par 4 d’entre eux : l’Italie, les Pays-Bas, la Norvège et la Suède.

6. Ils demandent aux Etats membres du Conseil de l’Europe qui ne l’ont pas encore fait, de signer et ratifier ce texte et de le mettre en pratique.

7. Par ailleurs, ils constatent la richesse et la diversité des formes de démocratie participative dans les communes et les régions d’Europe, tels que les organes consultatifs de résidents étrangers, et appellent les Etats, les régions, les communes à développer de telles initiatives et à prévoir les moyens administratifs et financiers nécessaires à leur fonctionnement.

8. Ils demandent au Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe (CPLRE), en partenariat avec les collectivités locales, d’approfondir la connaissance réciproque de ces différents modèles de participation au bénéfice de tous les habitants.

9. Les participants réaffirment l'indivisibilité des Droits de l'homme et des libertés fondamentales garanties par la Convention du Conseil de l’Europe de 1950.

10. Aussi demandent-ils instamment aux institutions européennes et aux pouvoirs publics de tous niveaux des Etats membres, non seulement d'accorder le droit de vote et d’éligibilité aux citoyens-résidents, mais également, de développer des politiques garantissant à tous les résidents les mêmes possibilités d'agir et de participer, au niveau local, en tant que citoyens à part entière. Ceci implique l’égalité d’accès et de traitement, au Droit, au marché du travail, au logement, à l’enseignement, à la culture, au culte, aux services de santé publics, ainsi qu'à la sécurité sociale, aux services sociaux et à tous les services publics.

11. Les participants sont convaincus que la démocratie, la liberté et la prospérité en Europe passent par l'engagement de tous les citoyens-résidents à participer de plein droit à l'édification d'une Europe démocratique pour tous.

1 Les Rapporteurs adressent leurs remerciements à M. Alain KAUFF, Rapporteur Général de l’Audition, ancien adjoint au Maire de la ville de Strasbourg chargé de la démocratie locale, France pour sa contribution importante à la préparation de ce rapport.

2 Actes complets de la conférence de Strasbourg : Etudes et Travaux N° 71.

3 Voir document CG (7) 5, rapport de Mme Helene LUND (Danemark).

4 Voir l’exposé des motifs du rapport de Mme Lund CG (7) 5 Partie II du 28 avril 2000.

5 Le collectif français « même sol, même droit, même voix » illustre parfaitement cette revendication d’équité.

6 Les résidents étrangers non ressortissants des pays membres de l’Union européenne