La situation des finances locales en République fédérale d'Allemagne - CPL (6) 3 Partie II + Addendum

Rapporteur: M. Frécon (France)

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EXPOSÉ DES MOTIFS

Partie I - Présentation

Dans le cadre de l’examen de la mise en œuvre de la Charte Européenne de l’Autonomie Locale, la Chambre des Pouvoirs Locaux, à la demande de la délégation allemande, a mandaté le Rapporteur pour examiner la situation de la démocratie locale en Allemagne, en particulier dans le domaine des finances locales.

La République Fédérale d’Allemagne a signé la Charte européenne de l’Autonomie Locale dès qu’elle fut ouverte à signature le 15 mai 1985, et l’a ratifiée en 1987, après avoir obtenu l’accord des Chambres fédérales, le Bundestag et Bundesrat, conformément aux dispositions prévues dans la Loi Fondamentale (article 59 paragraphe 2). Après avoir procédé à la consultation de l’ensemble des onze Länder qui constituaient alors la République Fédérale d’Allemagne et obtenu leur assentiment conformément à « l’Accord de Lindau » du 14 novembre 1957, la République Fédérale d'Allemagne a procédé au dépôt de l’instrument de ratification de la Charte le 17 mai 1988 en indiquant dans sa Déclaration que le champ d'application de la Charte serait limité aux Gemeinden [communes], Verbandsgemeinden [regroupement de communes] et Kreise dans le Land de Rhénanie-Palatinat et aux Gemeinden et Kreise dans les autres Länder. Par ailleurs, la République Fédérale d'Allemagne se considère liée par tous les paragraphes de la Partie I de la Charte, avec, dans le domaine des ressources financières des collectivités locales, les exceptions suivantes : « 1. dans le Land de Rhénanie-Palatinat, l'article 9, paragraphe 31, ne s'applique pas aux Verbandsgemeinden et aux Kreise ; 2. dans les autres Länder, l'article 9, paragraphe 3, ne s'applique pas aux Kreise ».

Il convient de souligner que l’Allemagne constitue un Etat de tradition démocratique, où le fédéralisme est devenu une valeur ancrée dans la pratique administrative. Le processus de réunification allemande s’est traduit par une extension du système fédéral à cinq nouveaux Länder, ce qui a représenté une absorption de population de 17 millions de personnes et de 6295 communes2. Un effort politique considérable a été réalisé par les autorités allemandes pour permettre le fonctionnement rapide de l’ensemble des collectivités locales et régionales, notamment grâce au soutien et à l’assistance apportée par les Länder de l’Ouest depuis la chute du Mur de Berlin.

Le Rapporteur a entrepris de préparer le premier rapport concernant la mise en œuvre, par un Etat fédéral, de la Charte européenne de l’Autonomie Locale conformément à la Résolution 31 (1996) du Congrès. L’organisation des collectivités locales relève dans ce pays de la compétence des états fédérés [Länder]. L’examen de la situation de la démocratie locale en Allemagne s’est appuyé sur le rôle des collectivités locales dans la structure fédérale allemande, le fonctionnement des mécanismes de péréquation fiscale et financière entre le niveau fédéral [Bund], le niveau régional [Land] et les collectivités locales, tout en tenant compte de l’organisation des collectivités locales propre à chaque Land. Sur la base de cette analyse, le Rapporteur a formulé des propositions de recommandations.

Les principales associations de pouvoirs locaux et régionaux ont été entendues au cours de la préparation de ce rapport. Trois grandes associations présentes au niveau fédéral ont ainsi été entendues par le Rapporteur : le Deutscher Städtetag (l’Union des grandes villes), regroupant les grandes villes, le Städte- und Gemeindebund (association des villes et communes) et le Landkreistag (l’Union des Kreise). Dans la mesure du possible, les sections régionales de ces associations ont été rencontrées lors des différentes missions effectuées. Lors de sa première mission, le Rapporteur a souhaité rencontrer à Bonn les représentants des Ministères fédéraux de l’Intérieur et des Finances. Il s’agissait de prendre connaissance de la position des autorités centrales concernant les difficultés rencontrées par les collectivités locales, celles-ci estimant que l’adoption de certaines lois fédérales affecte le budget des communes et constitue une charge financière supplémentaire sans faire l’objet d’une compensation financière suffisante.

Dans le cadre de l’examen de la situation financière des collectivités locales dans différents Länder, la délégation a effectué quatre missions, au cours desquelles les principaux partis politiques au pouvoir dans les Länder ont été  entendus :

· La délégation s’est rendue en Rhénanie du Nord - Westphalie, qui constitue l’un des Länder les plus peuplés de l’Allemagne avec 17 millions d’habitants. Ce Land présente une organisation décentralisée des pouvoirs locaux.

· La délégation s’est ensuite rendue en Bavière, qui, en raison de son histoire, présente une situation spécifique en Allemagne. L’organisation des collectivités locales y est davantage centralisée. La Bavière constitue un Land dont la contribution au système de péréquation financière fédéral est plus importante que les contributions qui lui sont versées par la Fédération.

· A la lumière des informations collectées, la délégation a souhaité effectuer une visite dans le Land de Bade-Wurtemberg où le « principe de connexité » est inscrit dans la Constitution de ce Land. Le Rapporteur a souhaité examiner la mise en œuvre de ce principe.

· L’évaluation de la situation des finances locales dans un nouveau Land, issu de l’ex République Démocratique Allemande (RDA), suite aux restructurations politiques et administratives qui se sont déroulées depuis 1989 dans l’est de Allemagne, s’imposait. Parmi les cinq nouveaux Länder, le Land de Thuringe semblait présenter, dans son développement économique, une situation médiane. Ce Land est par ailleurs bénéficiaire du système de péréquation financière.

Les différentes rencontres ont fait l’objet de comptes-rendus figurant en annexe du présent rapport [Doc. CPL (6) 3 Addendum], et qui ont été soumis pour information et vérification aux interlocuteurs rencontrés. Une riche documentation a permis de compléter les renseignements recueillis au cours des visites.

La partie II du présent rapport, établie principalement par le Professeur Günter Hedtkamp sous l’égide du Rapporteur décrira dans un premier temps la structure des collectivités locales et leurs relations avec la Fédération et les Länder. Les dépenses des collectivités locales seront examinées dans un second temps, notamment à la lumière du principe dit «de connexité ». Cette partie décrira enfin les ressources financières des collectivités locales, leur participation au processus décisionnel et les principaux problèmes rencontrés. La contribution d’un expert s’est révélée indispensable, vu la grande complexité du système fédéral et des mécanismes financiers de répartition des ressources et de péréquation entre les différents niveaux. Le Rapporteur souhaite ici remercier le Professeur Hedtkamp pour sa contribution et son expertise.

Les conclusions du Rapporteur font l’objet de la Partie III du rapport et montrent d’une part la profonde culture de la démocratie locale en Allemagne et, d’autre part, l’existence de difficultés réelles au niveau de l’autonomie financière des pouvoirs locaux dues à l’action concomitante de la crise économique, de l’immense effort de solidarité vis-à-vis des cinq nouveaux Länder et de quelques dysfonctionnements dans les relations financières entre Fédération, Länder et pouvoirs locaux.

Le Rapporteur souhaiterait ici remercier les membres de la délégation allemande auprès du Congrès, son Président le Dr Karl-Christian Zahn, le Dr Josef Hofmann, Vice-Président du Congrès et le Dr Gerhard Engel, Président du Groupe de travail chargé du suivi de la Charte Européenne de l’Autonomie Locale, les principales associations de pouvoirs locaux et les autorités locales, régionales et fédérales allemandes, pour leurs conseils et leur assistance au cours de ce travail.

Partie II - Description de l’organisation des pouvoirs locaux en Allemagne et de leurs financements

1. Les relations entre la Fédération, les Länder, les Kreise et les communes

1.1 La structure de l’Etat Fédéral

En Allemagne, la position des collectivités locales découle de la structure spécifique de la Fédération, laquelle est régie par le principe de subsidiarité. On distingue trois niveaux d’administration territoriale : la Fédération, les seize Etats fédérés (Länder) et les collectivités locales (14808 communes et 322 Kreise)3.

Les grandes villes ne font généralement pas partie d’un Kreis distinct4 ; elles constituent à elles seules à la fois une commune et un Kreis. Les petites villes et communes sont regroupées en Kreise. Ceux-ci adhèrent tous volontairement à l’Association allemande des Kreise (Deutscher Landkreistag).

Dans les grands Länder comme la Rhénanie du Nord-Westphalie5 et la Bavière il existe de plus une troisième échelle communale, les associations provinciales (Landschaftsverbände) en RNW et les districts (Bezirke) en Bavière. Les députés de ces derniers sont élus au même suffrage que celui des communes et Kreise. En RNW, le gouvernement a toutefois envisagé une réforme portant sur la structure des collectivités publiques au-dessous du niveau du gouvernement. Selon ce projet qui devrait être réalisé d’ici l’an 2004, les communes seraient dotées de compétences élargies ; à la place des présidents des régions (Regierunsgpräsidenten) et des associations provinciales, une nouvelle administration, conçue comme centre de services régionaux (regionale Dienstleistungszentren), serait créée. Il est prévu de transférer aux communes notamment les tâches des associations provinciales en matière de santé, de culture et de planification routière. Par cette réforme, la voie hiérarchique devrait être raccourcie et l'efficacité de l’administration améliorée.

Les Länder sont souverains en matière financière ; ils possèdent leur propre constitution et jouissent de l’autonomie administrative, notamment en matière budgétaire, tout en étant tenus à la loyauté vis-à-vis de la Fédération. La Constitution fédérale définit les collectivités locales comme des entités constitutives des Länder.Il ressort de ces dispositions de la Loi fondamentale que la Fédération n’a en principe aucune relation directe avec les collectivités locales. Toute loi fédérale touchant aux intérêts des Länder ou de leurs collectivités locales requiert l’approbation, c’est-à-dire l’accord du Bundesrat, qui constitue la seconde chambre du Parlement, formée de représentants des Länder.

Ainsi la Constitution fédérale ne régit que les relations entre la Fédération et les Länder tandis que les constitutions des Länder règlent les relations entre le Land et les collectivités locales et leurs relations entre elles. En conséquence, chaque Land possède sa propre législation régissant le fonctionnement des pouvoirs locaux, notamment leurs finances. Il s’agit de la « Gemeindeordnung » (statuts communaux) pour les communes et de la « Kreisordnung » pour les Kreise qui englobent plusieurs communes et forment une collectivité locale indépendante. L’autonomie dont jouissent les Länder pour organiser et structurer leurs collectivités locales est toutefois limitée par la Constitution fédérale. L’article 28 de cette Constitution, appelée Loi fondamentale, garantit un statut d’autonomie aux communes ainsi qu’aux Kreise. L’article 106 énumère pour sa part les différents impôts et indique leur répartition entre la Fédération, les Länder et les collectivités locales. Cette disposition représente donc une garantie constitutionnelle de l’autonomie fiscale des communes et contraint les Länder à accepter cette structure fondamentale de l’autonomie et des finances locales. Mais il subsiste toutefois de grandes différences.

1.2 Les relations entre le centre et les Etats membres de la Fédération

Les Etats membres de la Fédération allemande sont extrêmement différents en ce qui concerne leur construction, leur taille et leur force financière. Nous trouvons des grandes villes comme Berlin, Hambourg et Bremen qui ont en même temps le statut d’un Etat et d’une ville et profitent des impôts communaux ainsi que ceux des Länder et font partie du système de péréquation au niveau des Länder. Il y a des grands Länder géographiquement parlant ayant une population dépassant les 16 millions d'habitants et des petits Länder dont le plus petit est Bremen avec 400 000 habitants. D'un point de vue financier, les différences sont aussi extrêmement importantes entre les Etats riches au sud de l’Allemagne comme la Hesse, le Bade-Wurtemberg et la Bavière et les Etats pauvres comme la Sarre, Bremen et surtout les nouveaux Länder de l’ex-RDA et en particulier le Mecklenburg-Vorpommern. Néanmoins la Constitution de la Fédération prescrit comme but le rapprochement du niveau de vie dans la Fédération tout entière. La partie de la Constitution intitulée « constitution financière » (Finanzverfassung) tient compte de ce problème et son objet principal est le système de péréquation. La question essentielle à résoudre était la répartition des impôts entre les divers niveaux d’une part et la péréquation entre les pouvoirs financiers d’autre part. A partir d’un système de séparation des impôts au départ, il s'est développé un système d'impôts partagés qui comprend aujourd’hui plus des deux tiers de la masse des impôts. Presque tous les grands impôts comme l’impôt sur le revenu (y compris l’impôt sur les salaires), l’impôt sur les bénéfices des sociétés, la TVA et la taxe professionnelle sont aujourd’hui des impôts partagés. Des grands impôts, seuls l’impôt sur la consommation et l’impôt sur le pétrole sont restés à la Fédération tandis que quelques impôts moins importants, comme ceux sur les successions, sur la bière et l’impôt foncier restaient aux Länder. La compétence législative pour les impôts partagés appartient à l’Etat fédéral, à condition que la deuxième chambre où sont représentés les Länder donne son accord. L'Etat central est libre dans sa législation pour les seuls impôts fédéraux.

La répartition des impôts partagés se fait selon l’Art. 107 de la Constitution. L'impôt sur le revenu ainsi que l'impôt sur les sociétés sont partagés entre la Fédération et les Länder en parts égales. La part destinée aux collectivités locales est fixée par une loi fédérale à 15 %.
L’impôt est distribué aux différents Länder selon le revenu collecté sur leur territoire, après quelques corrections tenant compte des distorsions de la matière imposable. L’élément élastique du système est la distribution de la TVA qui veut tenir compte du développement différent des besoins financiers. Après la réunification de l’Allemagne, la part revenant aux Länder a été considérablement augmentée et représente depuis 1995 44%. Puisque la part revenant aux Länder est distribuée par tête et non par son rendement local, elle a un premier effet de péréquation entre les Länder. Mais depuis 1995, au maximum 25 % de la part revenant aux Länder (Ergänzungsanteile) sont soustraits pour réaliser une péréquation de la capacité fiscale de tous les Länder à raison de 92 % de la moyenne.

Depuis la réunification, le fonds de péréquation entre les Länder a gagné beaucoup d’importance. Par les versements des Länder qui se situent au-dessus de la moyenne de la capacité fiscale et les subventions données aux autres, le but est de garantir à chaque Land 95 % de la moyenne. Pour les contributions à ce fonds, on compare la capacité fiscale par tête (revenus d’impôts des Länder en plus 50 % des impôts de la taxe professionnelle) avec leurs besoins (calculés d’après les écarts de la moyenne par tête, corrigés par les charges des ports - seulement pour Bremen, Hamburg et Mecklenburg-Vorpommern - et des charges résultant de la densité de la population seulement pour les Etats-Villes). La différence constitue la base de calcul de la péréquation et est évaluée à un taux progressif de 15 % pour la différence entre 100 et 101 %, de 66 % pour les écarts de 101 à 110 % et de 80 % pour tous écarts au-dessus.

Cette péréquation horizontale entre les Länder, moyennant un fonds alimenté par les pays riches au profits des pays pauvres, s’ajoute à la part de la TVA versée par la Fédération au profit des Länder qui, après toutes les prestations du système de péréquation, n’ont pas encore atteint 90 % du niveau de capacité financière moyenne des Länder. Ce sont les fameux montants compensatoires des transferts fédéraux complémentaires. De plus, l’Etat central verse aux Länder de l’est 14 Mrd de DEM à titre de compensation des charges spéciales auxquelles ils sont confrontés. Le Land de Thüringe couvre, par exemple, environ 30 % de ses dépenses avec les subventions venant de l’Etat fédéral. Néanmoins, le Land doit s’endetter de 9 à 10 % par an.

Ce système aboutit à un nivellement extrême au détriment de l’intérêt d’exploiter la matière imposable dans les Länder qui doivent contribuer au fonds de péréquation. Ces Länder se trouvent souvent, après toutes les formes de péréquation, dans une situation qu’ils estiment pire que celle des Länder bénéficiaires du système. C'est pourquoi, ils ont introduit un recours en 1998 devant la Cour constitutionnelle.

1.3 Le régime des collectivités locales dans les divers Länder

Tandis qu'en Allemagne du Nord règne la tradition prussienne liée à la réforme du ministre des Finances, Reichsfreiherr vom und zum Stein, qui a été inspiré par le système britannique et qui était un partisan engagé de l’autonomie communale, la Bavière ainsi que le Bade-Wurtemberg et la Rhénanie-Palatinat se voient toujours dans la tradition de la réforme centraliste (1803-1806) napoléonienne, initiée en Bavière par l’ancien ministre des Finances, le comte Montgelas. Toutefois, les communes de ces Länder ne se plaignent pas trop de la tutelle exercée par ces Länder.

La répartition des compétences publiques entre les différents niveaux administratifs obéit au principe de subsidiarité qui régit l’ensemble du droit constitutionnel et administratif allemand. Ce principe de subsidiarité veut que seules soient transférées à un niveau administratif supérieur les fonctions qui ne peuvent être remplies correctement et efficacement par l’instance inférieure. Le postulat sur lequel se fonde ce principe est que toute fonction doit être assumée au plus bas niveau possible. Cette règle a pour but de garantir que le territoire sur lequel est entreprise une activité donnée corresponde autant que possible à l’aire de compétence politique de l’autorité administrative qui en assume la responsabilité. En vertu de ce principe, toutes les décisions devraient être prises au niveau le plus proche possible du citoyen. Du point de vue économique, les retombées des activités publiques devraient couvrir autant que possible l’ensemble du territoire pour lequel cette autorité administrative est compétente. Cette règle est en outre inspirée par le principe de l’internalisation des externalités.

La taille des collectivités locales conditionne largement leur aptitude politique et économique à remplir leurs fonctions. Plus elles sont petites, plus elles seront à même de prendre des décisions « proches des citoyens », c’est-à-dire correspondant le plus possible au goût des consommateurs, même pour les biens et services publics définis par la science financière comme biens publics. Considérée sous cet angle, l’action des collectivités locales correspond aussi au principe individualiste de l’économie de marché. De l’autre côté, compte tenu du principe de subsidiarité et de l’exigence économique d’internalisation des externalités, les compétences des niveaux administratifs supérieurs croissent en fonction de la taille des collectivités locales. En effet, plus ces dernières sont de taille réduite, plus elles ont de mal à remplir leurs fonctions locales. Entre ces deux pôles, un compromis doit être trouvé car il n’y a pas de solution optimale.

Certains Länder, comme la Rhénanie du Nord-Westphalie, la Hesse, la Bavière et le Bade-Wurtemberg, ont procédé à des réformes plus ou moins profondes pour réduire le nombre de collectivités locales. Les anciens Länder en comptaient 8.513 en 1994, alors que les nouveaux Länder de l’ex RDA se composaient de 6.295 communes. Sur ce total de 14.908 communes, 49,1% avaient une population inférieure à 1.000 habitants en 1994. Ces petites communes ne représentaient que 4,1% de la population totale. Une réforme structurelle est à l’étude pour éliminer la plupart des communes de moins de 1.000 habitants. A cet égard, la réforme menée par le Land du Bade-Wurtemberg est la plus avancée ; elle a permis de ramener le nombre de communes de 3.379 à 1.111, la plupart d’entre elles comptant désormais entre 1.000 et 10.000 habitants. En Rhénanie-Nord-Westphalie, les communes sont encore bien plus importantes puisque les plus petites dépassent les 4.000 habitants. Seules quarante-huit communes plus petites subsistent, pour des raisons historiques ou autres.6 En Bavière, il y a 2031 communes groupées en 71 Kreise et 25 villes qui ne font pas partie d’un Kreis.

Dans les nouveaux Länder de l’Allemagne de l’Est, on a procédé à des réformes régionales avec beaucoup d’hésitation, étant donné qu’il est difficile d’obtenir l’accord des populations pour ce qu'elles considèrent comme un retour au centralisme. Il y a même des Länder comme la Saxe où cette réforme n’a pas encore été accomplie. En ce qui concerne le Land de Thüringe, les réformes de 1995 et 1997 ont réduit le nombre des communes de 1700 à environ 1000, parmi lesquelles plus de 200 ont moins de 300 habitants tandis que la plupart des communes c’est-à-dire plus de 400 ont une taille entre 300 et 999 habitants. Seulement dans 174 communes, le nombre d’habitants dépasse 3000. Ce résultat de réforme paraît assez modeste si on le compare avec ce qui a été réalisé dans l’Ouest du pays. Pour garantir quand même une administration efficace, on a créé en Thüringe une institution nouvelle pour les petites communes de moins de 3000 habitants, les centres d’administration commune (Verwaltungsgemeinschaften) qui englobent en règle générale 5000 habitants. Chaque commune qui y participe délègue un représentant à cette institution, seuls les membres du conseil communal ainsi que les maires des communes étant élus. Ainsi cette institution est différente de celle de la Rhénanie-Palatinat qui connaît une institution semblable, les Fédérations de communes (Verbandsgemeinden)7, où les représentants des communes membres sont, en tant que tels, élus et où la Verbandgemeinde peut accomplir des tâches communales. Les tâches des Verwaltungsgemeinschaften en Thüringe consistent à avoir une administration efficace qui, sous l’autonomie de chaque commune membre qui a son propre budget et reste autonome, s’occupe de l’administration courante, prépare et exécute les projets soit de la commune soit de la Verwaltungsgemeinschaft.

En outre, la Thuringe a formé des Kreise qui, après la réforme (réduisant le nombre de Kreise de 35 à 17), sont assez grands avec à peu près 100 000 habitants dont font partie les communes au-dessus de 3000 habitants et les Verwaltungsgemeinschaften. Les compétences et le financement des Kreise correspondent à ce que l'on trouve dans l’Ouest de l’Allemagne comme en Bavière d’où venaient les conseillers et une partie du personnel au lendemain de la réorganisation de Thuringe.

1.4. Les relations entre les communes et le Kreis

Les communes se répartissent en communes urbaines et rurales. Les villages et les petites villes sont regroupées au sein de collectivités locales de second niveau, à savoir les Kreise, vers lesquelles ne sont transférées que les responsabilités locales que les petites communes ne peuvent raisonnablement assumer, notamment dans le domaine de l’éducation, de la santé et de l’infrastructure. Les relations entre les communes et le Kreis sont de nature complémentaire et n’impliquent aucune subordination, contrairement aux relations établies au sein des institutions de coopération volontaire existant entre les collectivités locales8 dont l’importance a du reste diminué après les réformes territoriales intervenues dans les années 1970. Le Kreis est une collectivité territoriale placée constitutionnellement au même niveau que la commune, ce qui le différencie très nettement des syndicats intercommunaux français. L’assemblée des Kreise, le Kreistag, est élue au suffrage direct. En général, le président de cette assemblée, le Landrat, qui dirige le Kreis, est lui aussi élu au suffrage direct.

La Loi fondamentale allemande garantit l’autonomie locale non seulement aux villes et villages, mais également aux Kreise (art. 28). Le Kreis possède sa propre administration. L’administration du Kreis remplit dans la plupart des Länder des fonctions centrales du Land et est ainsi à la fois une collectivité locale et l’instance administrative inférieure du Land. Cette administration remplit donc, de même que son chef, le Landrat, une double fonction. Souvent le Land nomme un fonctionnaire qui dirige l’administration du Land au sein du Kreis mais c’est toujours le Landrat qui a le droit de décision finale. C’est pourquoi, dans certains Länder qui n’ont pas procédé à la décentralisation des fonctions centrales au profit des communes, le gouvernement du Land se réserve un droit d’intervention sur la nomination ou la candidature du Landrat9. Quoi qu’il en soit, dans tous les Länder, le gouvernement délègue certaines de ses compétences aux collectivités locales, qui doivent les exercer selon ses instructions, notamment pour ce qui est du contrôle de l’urbanisation, de l’application de la législation sur les étrangers, etc.

Les responsabilités locales du Kreis se divisent en compétences obligatoires et compétences facultatives. Entrent, par exemple, dans la première catégorie l’aide sociale et l’assistance aux jeunes, pour lesquelles les collectivités locales sont chargées d’appliquer les lois fédérales. Les compétences facultatives concernent, par exemple, la culture, les théâtres, etc. Dans d’autres domaines, tels que la santé, la médecine vétérinaire, le transport, la chasse et l’environnement, la répartition des compétences est régie par la législation spécifique de chaque Land. Certaines des dépenses afférentes à ces compétences sont également intégrées au budget des communes. La répartition précise des compétences dépend de la législation du Land, de la taille des communes, et de certaines conditions spécifiques. Dans certains Länder du Nord de l’Allemagne (Rhénanie-Nord-Westphalie) le Kreis effectue aussi une certaine péréquation entre les différentes communes qui le constituent en procédant à des transferts pour l’exécution de certaines compétences.

Les grandes villes remplissent aussi les fonctions des Kreise sous la responsabilité du maire et du magistrat. Dans ces villes il n’existe pas une administration distincte pour les tâches remplies au nom du gouvernement du pays. Ces fonctions sont remplies par la ville en tant que compétences déléguées. Il est vrai qu’il existe dans les grandes villes en Bavière un conseiller dit de Kreis (Kreisverwaltungsrefent) qui est, lui aussi, désigné par le magistrat et fait partie de l’administration de la ville. Sa fonction spécifique est la surveillance de l’ordre public, la sûreté et la police étrangère. Le maire est en contact permanent avec l'administration régionale (Regierungspräsident) et est obligé de donner toutes les informations concernant l’administration des affaires étatiques et des tâches déléguées (droit des étrangers, droit du travail, droit concernant le domicile, les affaires de famille, droit de circulation routière, administration de police etc.).

En fait, en Allemagne, la Fédération ne dispose pas d'une administration territoriale et la plupart des lois fédérales sont exécutées par les Länder, les Kreise ou les communes.

Les Kreise et les communes doivent présenter leur budget en deux parts distinctes : le budget de fonctionnement et le budget d’équipement. Le budget de fonctionnement doit (ou devrait) être équilibré tandis que le budget d’équipement reflète la possibilité d’une autorité locale d’améliorer son infrastructure. Dans les Kreise des Länder du Sud, le budget d’équipement représente environ 10% du budget général mais dans les Länder plus pauvres de l’Allemagne du Nord ou de l’Est, cette part du budget est plus petite et parfois inexistante.

Toutefois, toutes les restrictions budgétaires imposées par la loi sont parfois contournées par les grandes collectivités locales, qui tentent de financer certaines activités hors cadre budgétaire en créant par exemple des fondations qu’elles financent souvent par la réalisation d’actifs ou par l’intermédiaire des entreprises publiques.

Le Kreis n’a pratiquement pas de ressources propres. En Rhénanie du Nord-Westphalie, les impôts prélevés par le Kreis ne représente que 0,14 % de ses recettes, ce qui constitue l’un des motifs de mécontentement de l’association des Kreise. Les Kreise sont surtout financés par des contributions obligatoires des communes (Kreisumlage) et en second lieu par les dotations accordées par le Land.

Le taux de contribution de chaque commune est fixé par l’assemblée des Kreise (Kreistag) en fonction de leurs ressources propres (impôts locaux et dotations globales). La contribution des communes membres varie dans une proportion de 35 % à 75 % de leur capacité fiscale qui est mesurée d’après la capacité financière de la commune définie normalement en fonction du rendement des impôts communaux et partagés. Ces contributions font partie des revenus propres du Kreis et sont assimilés à des impôts locaux par un système de taux fictifs. Par exemple, un Kreis en Bavière a fixé cette contribution à 40,1 % de la capacité fiscale de chaque commune membre de ce Kreis

Les Kreise sont aussi financés par des droits et redevances, des revenus de capitaux, par la vente d’actifs, des bénéfices des entreprises locales et, de manière substantielle, du remboursement de l’aide sociale (dans certains Länder comme la Rhénanie du Nord-Westphalie et la Bavière, cette aide est financée par les Kreise mais gérée par les communes). Dans les grandes villes de RNW, l’aide sociale représente environ 15 % des dépenses totales. C’est la raison pour laquelle les Kreise et les grandes villes qui n’appartiennent pas à un Kreis se plaignent généralement de l’insuffisance de leurs ressources. En Rhénanie du Nord-Westphalie, la part des contributions des communes membres du Kreis est inférieure aux dépenses sociales de celui-ci, bien que ces contributions atteignent le plafond maximum. Les tâches des Kreise sont celles dont l’importance dépasse le territoire d’une commune. Beaucoup de dépenses sont obligatoires comme celles pour les hôpitaux, les routes, le traitement des ordures et, comme il a été indiqué plus haut, les dépenses sociales qui se sont considérablement accrues.

La situation des collectivités locales dans les nouveaux Länder de l’Est de l’Allemagne n'est guère meilleure même si le nombre de réfugiés et de demandeurs d’asile a un peu baissé. Les compensations du Land de Thüringe, par exemple, atteignent environ 40 %, ce qui est substantiel. Exceptionnellement, les communes et les Kreise reçoivent à travers le budget du Land également de l’argent de la Fédération (pour la construction d’écoles, la distribution d’eau, etc).

En ce qui concerne les subventions globales du Land accordées aux collectivités locales, la loi fixe chaque année dans quelle proportion les moyens financiers sont partagés entre communes et Kreise. Par exemple, la loi bavaroise stipule pour 1998 que 64 % de la masse totale consacrée aux collectivités locales est destinée aux communes et 36% aux Kreise.

1.5. Le troisième échelon des collectivités locales

Certains Länder comme la RNW et la Bavière possèdent des institutions spécifiques
- la Rhénanie du Nord-Westphalie dispose de deux associations provinciales de (Landschaftverbände), qui sont des institutions traditionnelles et historiques remplissant des tâches spécifiques financées par les Kreise et les grandes villes.

- Les 7 districts (Bezirke) en Bavière correspondent dans leur espace aux 7 gouvernements régionaux (Regierungsbezirke) et une coopération intense existe entre le gouvernement et ces districts: ainsi, le personnel administratif vient partiellement du gouvernement. Les députés (au Bezirkstag) sont élus. Les districts sont financés comme les Kreise par des contributions. Le président du district est élu par l’assemblée de district tandis que le président du gouvernement régional est nommé par le Land mais après avoir consulté le district. Les tâches principales concernent l’assistance sociale dans la mesure où elles dépassent les compétences communales ainsi que l’administration des eaux. Elles sont financées d’une part par une contribution des Kreise et des grandes villes, définie en pourcentage de leur capacité fiscale (Bezirksumlage), d’autre part, et pour la majeure partie, par les subventions du Land. En moyenne, la contribution du Kreis s’élève à 1,7 % de sa capacité fiscale. Après des augmentations de ces contributions dans les années précédentes, la Bavière a décidé d'abaisser ces contributions et de les remplacer par une augmentation des subventions du Land.

L’existence des Landschaftsverbände en RNW et des districts en Bavière l'existence des districts est sans cesse mise en cause.

1.6 Le contrôle des collectivités locales

Le contrôle du Land sur les activités des collectivités locales constitue un contrôle de légalité en ce qui concerne les tâches propres (eigener Wirkungskreis) et un contrôle de fonds en ce qui concerne les fonctions déléguées (übertragener Wirkungskreis). C’est uniquement sur ces tâches déléguées que le budget des collectivités locales doit être approuvé par les Länder. Ce contrôle est pratiqué à plusieurs niveaux : au niveau des Kreise pour les communes membres, au niveau de la présidence régionale – division administrative du Land, existant dans les grands Länder - 10 et finalement au niveau du Land, où le contrôle est effectué par le ministre de l’Intérieur. En outre, le contrôle des comptes est fait, en règle générale, à chaque échelle par des offices spécialisés d’administration après avis des commissions élues par les conseils respectifs. En dernier lieu, c'est la Cour des comptes qui veille à l’exécution du droit budgétaire.

Le contrôle le plus important porte sur les emprunts. Cela se justifie par le fait que d’une part les ressources financières propres et réelles sont nécessairement complétées par les emprunts locaux et, d’autre part, par le fait qu’il y a une garantie de facto donnée par les Länder en cas de faillite. Par ailleurs, les communes tendent à se comporter dans leurs dépenses d’une façon cyclique (elles augmentent leurs dépenses en période de croissance économique et les diminuent lors des phases de récession) et il est nécessaire de veiller à une répartition équitable des infrastructures au sein des Länder et de la Fédération qui est prescrite par la Loi fondamentale.

Mais n’oublions pas que dans une démocratie, le contrôle des collectivités locales n’est pas simplement administratif. Il s’exerce naturellement au moment des élections des conseils municipaux et de ceux des Kreise.

2. Les dépenses des communes

Les dépenses publiques, hors service de la dette, proviennent pour environ 28 % des collectivités locales, la part restante se répartissant à égalité entre les Länder et la Fédération (subventions comprises), soit 36 % pour chacun de ces niveaux.

Comme nous l’avons déjà indiqué, chaque Land possède sa propre loi définissant le statut des communes ; la Constitution fédérale impose cependant aux Länder de garantir dans leur législation l’autonomie des collectivités locales (art. 28 et 106). Ils doivent reconnaître aux communes (au-delà de leur administration propre) des compétences en matière de culture, de loisirs et de sports, de même que pour les écoles maternelles et certaines activités dans le domaine social. Ces fonctions sont dévolues exclusivement aux collectivités locales. Elles ne peuvent être transférées vers d’autres institutions que dans l’hypothèse où, conformément au principe de subsidiarité, une organisation privée à but non lucratif (église, institution sociale, organisation caritative) souhaite assumer ces tâches et est en mesure de le faire.

Apres la réunification de l’Allemagne, il n’existait pas sur le territoire de l’ex RDA des autorités locales stricto sensu. La plupart des tâches qui incombent traditionnellement aux communes étaient remplies soit par les entreprises de l’Etat soit par l’administration centrale qui utilisait les administrations locales au niveau des Bezirke. Trop de personnel se trouvait à tous les niveaux, et après la restauration des collectivités locales il a fallu réduire radicalement leur nombre. D'un autre côté, on avait hérité, en raison du marché du travail dans les pays communistes employant presque toute la population (hommes et femmes), de services sociaux comme les crèches dont le personnel ne pouvait pas être réduit. En Thuringe, des 140 000 employés qui travaillaient auparavant dans le service public local, il ne reste plus que 55 500 personnes qui touchent aujourd’hui un salaire équivalant à 86,5% du salaire de l'Ouest. A Erfurt par exemple, il subsiste une abondance de personnel, la ville ayant été forcée de prendre en charge le personnel qui travaillait jusqu’à présent à la restitution des propriétés privées et qui ne peut pas être affecté à des tâches communales.

Le personnel dont les collectivités locales disposait au lendemain de la réunification, était, pour la plupart, insuffisamment formé. De plus, la concurrence entre les entreprises offrant des services aux collectivités locales faisait défaut. Ainsi, les sommes énormes versées aux Länder et collectivités locales de l’Allemagne de l’Est ont été, les premières années, d’une efficacité réduite. Aujourd’hui, l’associations des villes de Thuringe estime que l'on peut construire actuellement au tiers du coût de 1990. Les ressources financières manquent pour financer non seulement les coûts de fonctionnement des infrastructures déjà réalisées mais aussi les nouveaux investissements nécessaires, étant donné que de nombreuses communes ne sont pas en mesure de financer la dotation obligatoire (venant du budget de fonctionnement) pour le budget d’équipement. Cela a été confirmé par la ville de Erfurt, une ville plutôt riche11, où des projets d’investissements, notamment dans le réseau routier et dans les moyens de transport dépassent de loin les possibilités actuelles de la ville. Il y a une certaine contradiction avec l’impression de l’association des Kreise, qui assure que les moyens sont suffisants mais reconnaît que de gros projets d’investissement pourront être réalisés pendant au moins sept ans, soit pour la reconstruction des bâtiments et des rues, soit pour répondre aux exigences du droit européen, par exemple en matière de traitement des eaux usées.

L’essentiel des dépenses budgétaires des collectivités locales est constitué par l’aide sociale accordée aux parents isolés, aux réfugiés12, aux demandeurs d’asile et, dans certains cas, aux chômeurs13. Ces dépenses ont connu une forte augmentation, passant de 19,3 milliards en 1986 à 36,2 milliards en 1996.

Il existe certains Länder comme la Thuringe où les écoles relèvent de la compétence des communes ce qui donne lieu à des discussions permanentes sur les coûts autres que le salaire des professeurs qui sont payés par le Land. Ainsi, les compensations données par le Land en fonction du nombre d’élèves et du type de l’école sont jugées insuffisantes. Seules les grandes villes de l’Allemagne de l’Ouest disposent traditionnellement d’écoles communales que ces communes ont souvent proposé de céder au Land, celui-ci les ayant refusé en considérant les charges budgétaires qui en résulteraient. En Bavière, et en particulier à Munich, le personnel des écoles communales relève, en règle générale, de la compétence de l’Etat tandis que la plupart des autres dépenses, surtout pour les bâtiments, relèvent de la compétence communale.

La plupart des autres fonctions remplies au niveau local relèvent des compétences obligatoires ou déléguées par les niveaux administratifs supérieurs. Outre les dépenses sociales définies dans un sens très large, les autres compétences déléguées ou obligatoires se sont considérablement accrues : la santé publique, les transports, le logement, l’urbanisme, l’environnement, la voirie, la collecte des ordures ménagères, le traitement des eaux usées, la distribution d’eau et d’électricité, etc.

Dans la plupart des Länder, la police, la justice et certaines institutions fondamentales du système scolaire sont de la compétence exclusive du Land. Les seuls cas de compétence concurrente concernent les grandes villes où il y a parfois des écoles communales et quelques fois une police municipale.

En conclusion, la crise des finances locales se traduit en Allemagne de façon plus ou moins visible par la réduction de la part des collectivités locales dans les impôts partagés ou par la réduction des subventions globales et spécifiques (constructions des routes, des écoles primaires, etc.). En outre, les communes ont à verser au Land une contribution (Umlage) dite de solidarité14 qui se mesure d’après la capacité fiscale, dite "Umlagekraft" (impôts et une partie des subventions globales).

Depuis la réunification de l’Allemagne, les collectivités locales de l'Ouest contribuent également au financement de la réunification.

La contribution des autorités locales aux dépenses prévues pour les nouveaux Länder est substantielle. Le Land de Rhénanie du Nord-Westphalie a dû transférer en 1998 environ 5 milliards de DEM vers l’Est et a répercuté environ 42 % (soit 2,1 milliards de DEM) de cette somme sur les collectivités locales. Ces ponctions dans leurs finances se sont traduites par une crise financière et une forte diminution des investissements locaux au cours de ces dernières années. L’activité économique s’en ressent gravement car, en Allemagne, les collectivités locales réalisent les deux tiers de l'ensemble des investissements publics.

3. Le principe « de connexité »

Pour toutes les compétences déléguées, la collectivité locale reçoit des subventions qui, très souvent, ne couvrent pas les dépenses. On estime à Munich que seulement 40 % de ces coûts sont compensés par le Land. L'association des communes estime cette couverture en moyenne à 50 %. Le ministère de l'Intérieur et le ministère des Finances présentent un calcul différent, contrôlé par la Cour des comptes, qui aboutit à la conclusion que les coûts des tâches déléguées sont couverts de 100, voire à plus de 100 %. Le ministère de l'Intérieur reconnaît qu’il y a une différence entre les grandes villes et les Kreise du fait que le Land ne met pas à la disposition des grandes villes le personnel nécessaire, comme il le fait en faveur des Kreise, la disposition du personnel étant prise en compte dans ses calculs.

Les collectivités locales ont réclamé un dédommagement intégral pour ces dépenses déléguées, de même que pour les dépenses engagées pour la construction et l’exploitation de crèches et jardins d’enfants, la législation fédérale leur ayant imposé des obligations supplémentaires dans ce secteur. Les communes protestent contre cette obligation, mais l’Etat fédéral fait remarquer que la seconde chambre, le Bundesrat, où sont représentés les Länder a aussi voté pour ces lois. Les communes doivent donc se tourner vers les Länder et exiger d'eux qu'ils mettent en valeur le principe dit de connexité. Ce principe15 exige que les obligations qui leur sont imposées par la loi, qu’elle soit fédérale ou du Land, afin de remplir des objectifs politiques, doivent donner lieu à une compensation financière intégrale. Cette exigence doit être prise d’autant plus au sérieux que la part des impôts sur le revenu attribuée aux communes des anciens Länder a été réduite, après la réunification, afin de subventionner la partie orientale du pays, car cette charge s’est avérée beaucoup trop lourde pour la seule Fédération.

Notamment les villes en Bavière exigent de ce Land qu’il introduise le principe de connexité dans sa Constitution comme cela a déjà été fait dans d’autres Länder tels que la Basse Saxe et le Bade-Wurtemberg (art.71 de la Constitution). En outre, les collectivités locales exigent, de manière unanime, une référence dans la Constitution fédérale au profit des communes. Elles veulent en fait faire reconnaître le principe de connexité selon lequel non seulement les tâches déléguées aux collectivités locales mais également les tâches propres des communes seraient concernées et elles donnent comme exemple la loi sur l’aide pour la jeunesse, qui contraint les communes à de lourdes dépenses.

Les petites communes sont plus hésitantes parce qu’elles craignent de la part des grandes villes avoisinantes des demandes financières basées sur ce principe. Jusqu’à maintenant, les communes qui entourent les grandes villes se refusent à contribuer au financement du transport public de personnes. C’est le Land qui donne des subventions spécifiques. Le ministère des Finances de la Bavière craint que le strict respect de la règle de connexité suscite des querelles et un surcroît de travail administratif et il envisage une situation où le montant global à distribuer entre les collectivités locales serait une dotation forfaitaire mais non liée au principe de connexité. Il estime qu'il n’y aurait pas de ressources supplémentaires pour les collectivités locales, car cela conduirait seulement à un virement d’un compte à l’autre et d’une collectivité locale à l’autre. Ceci est peut-être vrai à l’échelle globale mais non pour chaque commune. De plus, la connexité ne serait guère applicable dans les cas où il ne s'agirait pas de nouvelles tâches mais seulement d'une augmentation des tâches traditionnelles (pour la santé, par exemple).

Le principe de connexité est récemment redevenu d’actualité du fait que le gouvernement fédéral envisage une réduction de l’impôt sur le revenu et des réformes des allocations familiales, une augmentation des dépenses sociales, un nouveau régime pour les emplois à revenu minimum avec un salaire au-dessous de 630 DEM (non imposables) et l’augmentation de l’impôt sur le pétrole ainsi qu’une taxe sur l’énergie qui va augmenter les coûts pour les transports communaux. Tous ces changements pourraient aggraver la situation financière communale sans compensation effective.

C’est dans le Bade-Wurtemberg et en Allemagne de l’est, précisément en Thuringe, que le principe de connexité est inscrit dans la constitution du Land. A Thuringe, le principe de connexité a trouvé sa forme juridique la plus étendue. Ainsi, l'article 93 de la constitution de Thuringe stipule que le Land doit veiller à ce que les collectivités locales puissent remplir leurs tâches et que, dans le cas où des tâches nouvelles leur seraient attribuées, le Land doit fournir les moyens nécessaires pour assurer leur financement.

Parce qu’il est impossible de calculer avec précision l’indemnité pour chaque commune, il subsiste des querelles: par exemple en Thuringe, il s’agit de se contenter d’indemnités forfaitaires par réfugié dont le logement est assuré par les collectivités locales. Le ministère des Finances de Thuringe reconnaît que les indemnités forfaitaires pour les fonctions déléguées sont trop basses et devraient être triplées. Une plainte a déjà été déposée devant la Cour constitutionnelle du Land. Les associations réclament que le Land garantisse à chaque collectivité locale des ressources minimales pour l'exécution de ses tâches, ce qui va au-delà du principe de connexité. Ces associations se plaignent aussi du fait que la Thuringe aurait reçu des fonds de l’unification allemande pour plus de 5 Mrd de DEM, avant le nouveau système de péréquation, et que seulement 1 Mrd. de DEM aurait effectivement été versé dans les caisses des collectivités locales.

4. Les ressources financières des collectivités locales

Comme tous les autres niveaux de l’administration territoriale, les collectivités locales disposent du produit des impôts et des redevances perçus à l’occasion de l’usage des services publics. Pour boucler leur budget, elles ont également la possibilité de contracter des emprunts, en général auprès d’organismes de crédit internes (par exemple, les caisses communales d'épargne). En tant qu’instances administratives de niveau inférieur, les collectivités locales reçoivent également des subventions globales ou spécifiques de la part des instances de niveau supérieur. Dans les nouveaux Länder de l’Est, le volume des subventions spécifiques allouées pour le financement des infrastructures est bien plus important qu’à l’Ouest où la masse des subventions est donnée sans aucune affectation.

L’autonomie financière dont jouit réellement une collectivité dépend de l’importance des fonds qu’elle peut utiliser à sa guise pour créer de nouvelles activités ou étendre celles qui existent, c’est-à-dire du fameux solde financier disponible (freie Spitze), autour duquel tourne tout le débat sur l’autonomie locale en Allemagne. Plus une collectivité locale est directement ou indirectement dépendante des subventions notamment des subventions spécifiques, moins elle est en mesure de s’administrer de façon autonome.

En Allemagne de l’Ouest, les revenus propres des collectivités locales couvrent en moyenne plus de 50 % de leurs dépenses. Ce taux est bien inférieur dans les Länder de l’Est: en Thuringe, on parle de 13 % dont la moitié provient des revenus dont les collectivités locales ont le droit de fixer le taux. Le droit d’imposition est par conséquent assez faible. Les taux d’imposition sont en règle générale plus bas qu’en Allemagne de l’Ouest tenant compte de la situation économique des entreprises16. En outre, les effets du „Fördergebietsgesetz“, c’est à dire de la loi qui a introduit des réductions de l’assiette de l’impôt sur le revenu et de l’impôt sur les sociétés et de la taxe professionnelle, notamment par voie d'amortissements spéciaux, ont réduit le rendement des impôts. Il s'agit de réductions d'impôts accordées aux personnes et entreprises qui investissent dans les nouveaux Länder.

4.1 Les impôts et taxes comme sources de revenus propres des collectivités locales

4.1.1 Taxes et redevances

Il est nécessaire que les collectivités locales disposent de ressources propres qu’elles gèrent elles-mêmes. Elles ont la possibilité de déterminer le taux de certaines redevances, notamment pour la distribution d’eau, le traitement des eaux usées et la collecte des ordures ménagères. En principe, ces redevances sont légalement plafonnées au coût effectif de ces services. Mais une certaine marge existe pour le calcul de ces coûts. L’une de ces sources de revenus, la taxe prélevée sur l’électricité, risque de disparaître si l’Union européenne supprime le monopole municipal de fourniture d’électricité (que les communes concèdent généralement à des entreprises publiques ou privées). Ces ressources leur ont jusqu’à présent permis de subventionner les transports urbains et interurbains (pour un montant de 6 milliards de DEM par an). C’est le fameux „Querverbund, qui est souvent critiqué en raison des distorsions économiques mais qui est essentiel pour le financement des transports urbains.

Les communes allemandes ont considérablement augmenté les redevances sur les services au cours des dernières années. Dans les Länder de l’Ouest, leur montant global est passé de 18,5 milliards de DEM en 1986 à 32,0 milliards de DEM en 1996. Les communes ont adopté cette méthode pour augmenter leurs ressources en réponse à la politique de consolidation de la Fédération et des Länder menée par ces derniers ainsi qu’à la réduction de l’assise financière des collectivités locales par la Fédération. Dans le même temps, les tribunaux ont imposé des limites restrictives au calcul des coûts pratiqués par les collectivités locales, notamment en ce qui concerne les taux d’amortissement plus ou moins fictifs qu’elles intégraient dans le calcul de leurs coûts de fonctionnement. En tout état de cause, les ressources propres des collectivités locales proviennent pour environ 35 % des redevances sur les services publics. La source principale est constituée par les taxes sur les services ; les sommes perçues pour l’utilisation des installations sportives et culturelles sont quant à elles, et comme dans tous les pays, loin de couvrir les coûts d’exploitation réels.

4.1.2 Impôts locaux

La majeure partie des ressources propres est constituée par les impôts locaux. En outre, comme dans la plupart des autres pays, les collectivités locales disposent en Allemagne de certaines taxes mineures, telles que l’impôt sur les chiens et quelques droits locaux (impôts sur les spectacles, impôts sur les résidences secondaires).

Ces droits locaux, appelés "taxes bagatelles", sont en principe garantis par la Constitution de façon à ce que les communes puissent elles-mêmes choisir les taxes qu'elles veulent introduire dans leur communauté (c’est le fameux „Steuerfindungsrecht“), et elles peuvent délibérer sur l’assiette et le taux de ces taxes à condition que le Land ne défende l'introduction de certaines taxes par une loi. Les communes et Kreise en Bavière se plaignent que le Land leur ait défendu de percevoir des taxes sur les jeux et spectacles (Vergnügungssteuer) et une taxe sur les résidences secondaires. Ils n’acceptent pas l’argument de l’administration selon lequel le coût administratif du prélèvement de ces taxes serait trop élevé. Il aurait fallu améliorer et simplifier le système d’imposition comme dans d’autres Länder de la Fédération qui connaissent de telles taxes. Par contre, dans le Bade-Wurtemberg, par exemple, les collectivités locales ont la possibilité de lever ces taxes, mais on évalue les coûts administratifs et l'on voit l’avantage de ces taxes non pas dans le rendement mais plutôt dans la possibilité de contrôler l’exercice de ces activités (par exemple, dans le cas de la taxe sur les spectacles)17. Pour les communes très touristiques, la taxe sur les résidences secondaires, par contre, paraît être intéressante.

Les revenus des impôts bagatelles n’ont pas d’impact significatif sur la capacité financière des collectivités locales ; ils ne représentent que 1,5 % des recettes fiscales locales dans le Bade-Wurtemberg.

La fiscalité locale allemande repose sur deux impôts principaux : la taxe professionnelle (Gewerbesteuer) et l’impôt foncier (Grundsteuer). Auparavant, la taxe professionnelle constituait de loin la principale source de recettes fiscales des collectivités locales. Ces deux impôts sont très anciens. Ils furent transférés des Etats aux communes lorsque furent créés l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés, lors des grandes réformes fiscales de la fin du XIXe siècle. Malgré les réformes de la fiscalité locale entreprises notamment dans les années 1930, ces impôts hérités du passé, et introduits sous l’influence de la Révolution française ne sont plus adaptés à un système fiscal moderne. Ils font l’objet de maintes critiques et de nombreuses propositions ont été faites pour une réforme radicale. Quoi qu’il en soit, les collectivités locales retirent des revenus substantiels de ces impôts désuets, et tout spécialement de la taxe professionnelle, qui se place au troisième rang des impôts prélevés en Allemagne en termes de recette fiscale. De plus, ces impôts locaux sont compatibles avec la Charte européenne de l’autonomie locale car les collectivités locales peuvent en fixer les taux sans aucune limitation.18

L’une des composantes de la taxe professionnelle, l’impôt sur le capital d’exploitation, (Gewerbekapitalsteuer), de même que l’impôt foncier, ne se basaient pas sur les revenus et les bénéfices courants effectifs mais sur les revenus qui peuvent être réalisés. Cet impôt sur le capital investi, qui était donc perçu même si aucun revenu ou bénéfice n’était enregistré, a été aboli.

La composante majeure de la taxe professionnelle, à savoir l’impôt professionnel sur les bénéfices (Gewerbeertragsteuer) se base sur les recettes réelles effectives calculées selon une méthode très sophistiquée différente de l’assiette retenue pour l’impôt général sur les sociétés.

A l’origine, la taxe professionnelle se composait de trois éléments : la taxe sur les revenus réels, la taxe sur le capital (les actifs) et la taxe sur la masse salariale totale de l’entreprise. Ce système n’était pas très cohérent d’un point de vue économique, car la première partie (Gewerbeertragsteuer) taxait les recettes réalisées alors que les deux autres portaient sur des revenus hypothétiques. De plus, la première partie, en tant qu’élément synthétique, pesait sur les revenus provenant de tous les facteurs de production, alors que les deux autres composantes taxaient séparément des facteurs de production isolés (éléments analytiques). Loin d’amener une amélioration de cet impôt, qui est le plus important pour les collectivités locales, les diverses réformes introduites se sont soldées par une dégradation de la situation. Dans un premier temps, l’un des facteurs de taxation, à savoir la masse salariale, a été soustrait de la base d’imposition. La taxe professionnelle est par la suite devenue un impôt touchant les grandes entreprises du fait de l’introduction d’exonérations importantes, difficilement compatibles avec une taxe sur les recettes réelles. Ces réformes ont provoqué de grandes distorsions financières et structurelles dans le budget des communes.

Par la suite, il a été décidé qu’une partie du rendement fiscal généré par cet impôt serait reversée à la Fédération et aux Länder à parts égales. Cette mesure a été compensée, en 1970, par l’attribution aux communes d’une part des recettes de l’impôt sur le revenu (fixée à 14 % en 1970, cette part est maintenant de 15 %) ; en moyenne, l’impôt sur le revenu contribue à 45 % aux ressources propres des communes.

Les collectivités locales ne déterminent ni l’assiette ni le taux de l'impôt sur les revenus alors qu’elles supportent généralement sans compensation suffisante toutes les réformes fiscales réduisant la charge d'impôts sur les revenus ainsi que tous les abattements à la base qui sont introduits sous prétexte de rationalisation de l’administration. Les collectivités locales à l’Est souffrent notamment du fait que les allocations pour les enfants sont en 1998 déductibles des impôts sur le revenu.

La taxe professionnelle entre donc aussi dans la catégorie des impôts communs partagés tout en présentant une particularité assez étrange, puisque les communes ont conservé le droit d’en fixer le taux. Il a donc fallu harmoniser la part revenant aux autorités administratives supérieures (c’était équivalent à 120 points du taux d’imposition local). Cette part a été réduite à plusieurs reprises : elle a été diminuée d’un tiers en 1980, lorsque le volet de la taxe professionnelle portant sur la masse salariale a été supprimé et de nouveau de 28 % en 1983. En 1984 elle a été encore une fois réduite. La partie de la taxe professionnelle que les communes doivent verser au Land et à la Fédération qui, elle aussi, porte le nom de „Umlage“ est calculée de la façon suivante: le rendement de la taxe professionnelle est divisé par le taux d’impôt fixé par la commune et le résultat est ensuite multiplié par 84, c’est-à-dire qu’en moyenne entre 20 et 30 % de la taxe professionnelle sont à redistribuer. Sur les 41,7 milliards de recettes réalisées de l'impôt tout entier en 1996, 8,2 milliards ont été redistribués à parts égales entre les Länder et la Fédération. Dans les nouveaux Länder de l’est, étant donné les graves problèmes économiques, le produit de la taxe professionnelle n’a pas dépassé les 2 milliards de DEM en 1996.

Les diverses contributions (Umlagen) qu’une collectivité locale doit verser à titres divers, principalement à des collectivités locales supérieures comme les Kreise et les districts, sont calculés sur la base de la capacité fiscale mentionnée lors du calcul des subventions globales.

Il est rappelé qu’en 1988, le deuxième élément de la taxe professionnelle, celle sur le capital qui se basait sur ses actifs (machines, installations, inventaires – à l’exclusion des terrains et bâtiments, imposés séparément au titre de l’impôt foncier (Grundsteuer B)) a été supprimée. Il ne reste de cette taxe professionnelle qu’un squelette susceptible d’être ébranlé par les cycles de l’activité économique et dépourvu de la flexibilité nécessaire pour faire face aux mutations profondes de la structure des dépenses budgétaires locales. Elle constitue néanmoins l’un des impôts majeurs du système fiscal allemand.

En compensation, les communes reçoivent 2,2 % du produit de la TVA, répartis entre les anciens (pour 85 %) et les nouveaux Länder (pour 15 %)19. Dans le Land, la distribution entre les communes se fait en fonction du rendement de la taxe professionnelle relative et du nombre d’emplois salariés dans chaque commune. La répartition géographique de l’assiette fiscale de l’ancienne taxe sur les actifs et celle de la portion de TVA redistribuée sur la base des critères mentionnés ne coïncident pas. De cette réforme ont donc profité certaines communes alors que d’autres ont vu leurs recettes fiscales diminuer. Certains Länder, comme la Bavière, ont créé un fonds spécial de péréquation destiné à dédommager les villes qui seraient les perdantes de cette réforme. La suppression de la taxe professionnelle sur les actifs est due en partie à la réunification de l’Allemagne. En Allemagne de l’est, il n’existait aucune évaluation fiable ou mise à jour des actifs des entreprises industrielles et commerciales. Il était pratiquement impossible de procéder à une nouvelle évaluation des actifs des vieilles entreprises de l’Est ; le résultat aurait d’ailleurs été négatif pour la plupart d’entre elles. Il aurait été assez incongru d’imposer des entreprises qui réalisaient des pertes pendant la période de transition. En 1998, la suppression de l’impôt sur les actifs des entreprises a été étendue à la partie orientale du pays. L’abolition de cet impôt a également pour but de diminuer la charge fiscale qui pèse sur les entreprises et qui semble bien plus lourde que dans la plupart des autres pays européens.

Plusieurs propositions ont été émises, tant en faveur de la suppression pure et simple de la taxe professionnelle que de sa refonte. Certains économistes et responsables politiques préconisent le remplacement de cette taxe par une redistribution du produit de la TVA aux collectivités locales. Cette proposition se traduirait par une perte d’autonomie pour les collectivités locales qui ne pourraient plus décider des taux d’imposition, ce qui serait incompatible avec les principes de la Charte européenne de l’autonomie locale. Les collectivités locales les plus faibles tendent quand même à favoriser cette solution, car leurs revenus fiscaux y gagneraient en stabilité, ce qui leur donnerait une plus grande marge de manœuvre financière. D’un autre côté, cette solution permettrait de renforcer les mécanismes de péréquation car la répartition de tous les impôts communs diffère d’un simple transfert proportionnel des recettes fiscales revenant aux collectivités locales en ce qu’elle inclut toujours des éléments de correction des déséquilibres.

Mais la plupart des collectivités locales, de même que leurs associations, sont conscientes de l’impact que cette solution aurait sur l’autonomie locale et penchent en faveur de réformes qui leur permettraient de continuer à fixer les taux d’imposition.

D’autres approches militent en faveur de la création d’une nouvelle taxe professionnelle. Celle-ci devrait affecter non seulement les entreprises industrielles, artisanales et commerciales, comme c’est le cas actuellement, mais être également prélevée sur les professions libérales, telles que les médecins et les avocats, et sur les administrations publiques, afin de compenser les coûts imputables à leur fonctionnement. Le comité consultatif économique du ministère fédéral des Finances a proposé de remplacer la taxe professionnelle par un impôt local sur la valeur ajoutée. Cette proposition s’inspire d’un principe assez proche du point de vue selon lequel la taxe professionnelle existante obère les revenus de tous les facteurs de production. Cet impôt ne ferait pas double emploi avec la TVA existante car cette dernière est perçue dans tous les pays européens au niveau de la consommation finale et non pas sur la valeur ajoutée au sens économique du terme. Une idée assez proche de celle-ci consiste à rénover la taxe professionnelle en la replaçant sur une base analytique composée des divers facteurs de production et en y assujettissant toutes les entreprises et professions libérales.

Par ailleurs, les associations des villes et communes se plaignent du fait que la Fédération n'a pas encore introduit une surtaxe sur l'impôt sur le revenu au profit des collectivités locales, ce qui est prévu par la Constitution fédérale (Art.106). Le taux de cette surtaxe pourrait être déterminé par les collectivités locales ce qui serait conforme à la Charte européenne de l'autonomie locale.

Le deuxième volet du système fiscal local est une sorte d’impôt sur le patrimoine portant exclusivement sur les biens immobiliers. Cet impôt foncier (Grundsteuer) se compose de deux parties (Grundsteuer A et Grundsteuer B). Les collectivités locales en fixent librement le taux. L’impôt foncier A est prélevé sur les forêts, les terrains et la production agricole ; il est conçu à la fois comme un impôt foncier et un impôt sur l’exploitation agricole et forestière. Comme dans les autres pays, et comme tous les impôts agricoles, son rendement est très faible. Le Grundsteuer A ne représente guère que 0,5 % des recettes fiscales des collectivités locales. L’autre partie de cet impôt, le Grundsteuer B, est beaucoup plus productif. Il est perçu sur tous les autres terrains et immeubles. Il est toutefois en butte aux difficultés d’évaluation et d’actualisation de l’assiette imposable. Cet impôt est répercuté sur les loyers des logements de manière à ce que la charge fiscale soit supportée par l’ensemble de la population d’une commune. La dernière évaluation des terres et immeubles a été effectuée, dans la partie occidentale du pays, entre 1964 et 1974 ; pour les nouveaux Länder, seules des évaluations très partielles remontant à 1935 sont disponibles, aucune évaluation n’existant pour les biens fonciers non recensés à l’époque. La méthode d’évaluation appliquée ces dernières années consistait à multiplier les revenus annuels par différents coefficients selon la structure spécifique de l’assiette fiscale.

Le rendement du Grundsteuer A en 1996 était de 0,5 milliards de DEM dans les Länder de l’Ouest et de 0,1 milliard de DEM dans les nouveaux Länder. Pour le Grundsteuer B, ces montants étaient respectivement de 11 milliards de DEM et 1,5 milliard de DEM.
L’examen de la fiscalité locale fait apparaître la nécessité d’une réforme. Celle-ci devrait préserver quelques-unes des caractéristiques du système, telles que le principe consistant à faire payer les entités génératrices de coûts pour la collectivité, c’est-à-dire les habitants, d’une part, et les acteurs économiques et professionnels, d’autre part. De plus, le nouveau système ne devrait pas réduire, mais au contraire augmenter le produit des impôts locaux. Enfin, il convient de préserver l’autonomie dont jouissent les collectivités locales dans la détermination des taux d’imposition.

Comme nous l’avons déjà mentionné, les recettes fiscales des collectivités locales proviennent en grande partie, pour près de 50 %, de la part de l’impôt général sur le revenu qui leur revient. Le produit de cet impôt commun est partagé entre tous les échelons de l’administration territoriale. Les collectivités locales en reçoivent 15%, les deux autres niveaux que sont la Fédération et les Länder se partageant le reste à parts égales.

La part des collectivités locales est répartie entre elles non pas sur la base du total des revenus locaux mais d’une partie seulement des recettes locales de cet impôt, ce qui élimine partiellement les effets de la progressivité du taux d’imposition et permet de ne pas favoriser les communes les plus riches. Ainsi on réalise un effet de péréquation. La réforme favorise les communes fortement peuplées dans lesquelles le rendement de la taxe professionnelle est faible.

4.2 Les emprunts

En Allemagne, les collectivités locales sont autorisées à financer une partie de leurs dépenses en recourant à l’emprunt. Elles ont en principe le droit d’emprunter aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur. Dans ce dernier cas, les collectivités locales sont obligées d’ouvrir un compte auprès de la Bundesbank. Les collectivités locales de petite et moyenne taille font appel principalement aux caisses d’épargne locales. Les avances de liquidités à court terme n’entraînant en principe qu’un endettement temporaire portant sur l’exercice en cours. Les emprunts à moyen et long terme nécessitent l’accord du ministre de l’Intérieur du Land concerné. Le pouvoir de contrôle a été délégué en partie aux Kreise et, dans les grands Länder, à la présidence régionale (Regierungspräsident)20. Il semble que les collectivités locales aient récemment entrepris, dans certains cas, de financer partiellement leur budget ordinaire en ayant plus ou moins largement recours à des crédits à court terme, avec l’accord tacite des instances de contrôle. C’est là une conséquence de la crise financière des collectivités locales, notamment dans les Länder de l’Allemagne du Nord et de l’Est.

Le risque d’insolvabilité des collectivités locales, pour lesquelles le Land devrait alors se porter garant, amène les ministères de l’Intérieur des Länder à exercer un contrôle de fait, sinon de droit. Le recours à l’emprunt n’est autorisé que lorsque aucune autre source de financement du budget local n’est disponible et si la collectivité locale est en mesure d’assurer, dans les années qui suivent, le service de la dette par les revenus du budget de fonctionnement. Est aussi traité comme crédit le leasing d'objets. Afin d’éviter des décisions arbitraires de la part des ministres, les Länder ont fixé, notamment dans leur législation sur l’organisation des communes (Gemeindeordnung), des critères limitant le pouvoir discrétionnaire dont les ministres disposent pour approuver ou rejeter les demandes des communes. Les emprunts sont considérés comme justifiés lorsqu’ils servent à restructurer la dette ou à financer des investissements productifs, à condition que leur rendement escompté couvre assez largement leur coût.

Mais au-delà, le recours à l’emprunt pour financer les projets d’investissement est également possible. Cela se justifie aussi pour des raisons d’équité entre les générations (principe de l’utilisateur payeur). La somme des investissements constitue la limite absolue de l’emprunt et cette règle s’applique à tous les niveaux du gouvernement (art. 115 de la Loi fondamentale). Ce principe n’en est naturellement pas moins très difficile à mettre en pratique (pour des raisons de définition et d’évaluation).

A cette fin, comme il a été mentionné plus haut, et pour assurer une gestion des ressources financières conforme aux principes économiques, le budget des collectivités locales doit être divisé en deux parties : le budget de fonctionnement et le budget d’équipement, dit „de capital“. Dans ce dernier, tous les mouvements d’actifs, spécialement les investissements en nature et financiers, sont confrontés aux ressources financières qui leur sont consacrées, comme les subventions d’équipement et les emprunts.

Le second critère, qui est le plus important est le suivant: pour autoriser une commune à se porter demandeuse sur le marché des capitaux, elle doit faire la preuve qu’elle est en mesure de garantir d’une part le financement intégral du service de la dette pendant toute la durée du remboursement et d’autres part les moyens financiers devant venir du budget de fonctionnement. En Thuringe, on multiplie par le coefficient 10 les moyens disponibles au budget de fonctionnement qui peuvent couvrir le service de la dette et la somme résultante sera le maximum d’endettement consenti. Au cours de cette période, chaque commune en Allemagne doit disposer sur son compte courant des ressources nécessaires au remboursement de la dette naturellement en plus des sommes qu’elle doit verser pour les intérêts. Si le compte courant est déficitaire, le ministre de l’Interieur peut contraindre la collectivité locale à mettre en œuvre un programme de consolidation (à réaliser en principe dans les deux années qui suivent) et qu’il contrôlera. Cette procédure est généralement soumise à des règles fixes arrêtées par la législation du Land afin d’éviter toute décision arbitraire.

Il devient de plus en plus difficile de contrôler l’endettement des collectivités locales parce qu’elles ont recours à la possibilité de créer des entreprises de droit public ou privé dont les plans de gestions doivent être traités comme annexes au budget communal.

4.3 Les subventions générales et spécifiques. Le système de péréquation.

Il n’y a, en règle générale, aucune relation financière entre les communes et la Fédération qui ne passe d’abord par le budget des Länder.21Ainsi, il n’y a pas de subventions directes données par la Fédération aux collectivités locales.

Les transferts de paiements sous forme de subventions générales et spécifiques versés par le Land contribuent aux budgets des municipalités à peu près dans les mêmes proportions que les grands impôts locaux que sont la taxe professionnelle et l’impôt foncier, soit plus de 27 % en 1996. La plupart de ces subventions sont versées sous forme d’une dotation globale dont les communes peuvent disposer librement. Seul un pourcentage très faible est attribué au titre de subventions spécifiques affectées à des dépenses déterminées22 ; ces subventions spécifiques portent toutefois atteinte à l’autonomie financière des collectivités locales.

L’importance des subventions spécifiques a considérablement diminué au cours des dernières décennies. Mais la plupart des ministères des gouvernements des Länder disposent de fonds spéciaux pour réaliser des objectifs politiques spécifiques, notamment dans le secteur de la construction, de l’implantation d’entreprises industrielles, etc. Ces fonds sont assimilés de fait à des subventions spécifiques. Les collectivités locales réclament que ces fonds leur soient transférés à elles ou, au moins, qu’une partie soit mise à leur libre disposition. En Rhénanie du Nord-Westphalie, il doit y avoir environ 800 de ces fonds spéciaux. En Bavière, on parle de plus de 240 petits fonds et dans le Bade-Wurtemberg23 d’environ 150 distribués par les ministères du gouvernement. En RNW, les villes demandent leur introduction forfaitaire dans la masse des finances par une somme analogue à la subvention pour les investissements tandis que les petites communes sont plutôt intéressées par l’existence de ce fonds parce qu’elles s'en sentent plutôt comme bénéficiaires.

En ce qui concerne le mécanisme de partage des subventions globales proprement dit et en tant que tel, leur attribution aux collectivités locales par les Länder ne se fait pas au détriment de l’autonomie locale. Les dotations globales n’en constituent pas moins le principal instrument de péréquation. Pour les dotations globales, le premier problème est de déterminer le montant total que le Land distribuera. La Loi fondamentale impose aux Länder qu’ils garantissent aux collectivités locales une part appropriée des recettes fiscales du Land24, lesquelles englobent aussi les subventions perçues au titre de la péréquation fiscale entre les Länder.

Dans la loi de péréquation, qui est dans la plupart des Länder adoptée chaque année, le Land fixe le pourcentage de ses revenus et des revenus des collectivités locales, y compris en principe les dotations reçues dans la péréquation à l’échelle fédérale25 qui est affectée dans une certaine proportion aux collectivités locales. C’est la masse de participation (Anteilsmasse ou Ausgleichsmasse). La marge de manœuvre dépend aussi de la participation des collectivités locales aux impôts spécifiques du Land. Ainsi, elles bénéficient dans quelques Länder, au moins partiellement, de la taxe sur les automobiles et de l'impôt sur les ventes d’immeubles.

Puisque la somme prévue par le Land pour ses collectivités locales et spécialement le fonds de péréquation peut varier d’une année à l’autre, c’est une source d’incertitude. Pour éviter cela, le Land de Thuringe garantit à ses collectivités locales le niveau de ressources de l’année précédente. La même règle s’applique dans ce Land au calcul des recettes et dépenses effectives, c’est-à-dire que si les recettes étaient en fait plus élevées que celle prévue dans le budget, les collectivités pourraient garder le surplus.

La partie majeure de ce fonds prévu pour les collectivités locales est consacrée à des subventions globales (Schlüsselmasse), le reste est donné aux collectivités locales en tant que subventions complémentaires pour les investissements et pour les communes en difficulté. Les règles diffèrent d’un Land à l’autre; elles sont données en règle générale sans aucune affectation26Aussi la tendance est-elle, dans les Länder de l’Est où de très importantes lacunes d’infrastructure doivent être comblées, et surtout en Thuringe27, de donner des subventions d’investissement non affectées. Les subventions globales se répartissent entre les villes et les communes d’une part, les Kreise ruraux d’autre part, selon ce qui est déterminé par la loi. En Bavière, par exemple, la relation est de deux tiers à un tiers, à Thuringe, en Allemagne de l’est, la relation est de un quart à trois quarts.

La part totale des recettes d’un Land consacrée aux collectivités locales varie d’un Land à l’autre, grosso modo de 11% en Bavière à 23 % en Rhénanie du Nord-Westphalie. Mais ces pourcentages ne sont pas tout à fait comparables en raison des diverses définitions statistiques retenues, de sorte qu’on ne peut pas en tirer des conclusions sur le degré de l’autonomie financière. Beaucoup dépend du degré de décentralisation des activités du Land vers les communes (Kommunalisierung) sous forme de compétences déléguées. Cette "Kommunalisierung" dépend à son tour de la taille des communes. Dans tous les Länder, on trouve une tendance à déléguer plus en plus aux collectivités locales des fonctions étatiques et cela concerne avant tout l’adduction d’eaux, le traitement des eaux usées, la santé, la surveillance vétérinaire, le transport de personnes, etc. C’est souvent le Kreis qui prend en charge les fonctions d’Etat. Il existe des solutions variées concernant par exemple le statut des fonctionnaires travaillant dans ces institutions : soit ils ont le statut de fonctionnaire du Land ou du Kreis, soit ils sont placés sous l’autorité d’un fonctionnaire du Land auprès du chef du Kreis, le Landrat qui, en règle générale, reste quand même le seul chef de l’administration. Pour évaluer cette“ communalisation“ il conviendrait de savoir si les collectivités locales ont reçu ou non les moyens financiers correspondants, notamment sous forme de subventions à ajouter aux recettes budgétaires locales (principe de connexité tel que décrit plus haut).

L’impression que le Land de RNW soit beaucoup plus décentralisé que la Bavière est contestée vivement par le Ministère de l’Intérieur bavarois qui indique que le volume de tous les budgets communaux en 1996 a atteint 60,6 Mrd.de DEM en RNW, comparé aux 63 Mrd. de DEM en Bavière. Il semble que la réponse à de telles questions dépend beaucoup de la manière dont sont définies les recettes et dépenses prises en compte dans les statistiques.

Une fois déterminée la part globale destinée à des collectivités locales, l’enveloppe globale des dotations est fixée (elle correspond à la masse de péréquation (Schlüsselmasse)) ainsi que les fonds spéciaux distribués en général selon les critères objectifs fixés par la loi.

La répartition des subventions globales se fonde sur la capacité fiscale de chaque commune, définie en fonction de ses revenus ordinaires par habitant. A partir de là, ces revenus doivent être confrontés aux besoins, qui restent à déterminer conformément aux écarts de la moyenne des revenus propres par habitant. Une différence négative est égalisée partiellement selon des critères fixés par la loi. La première condition à remplir pour recevoir des subventions est, en d’autres termes, que le revenu propre par tête d’une communauté soit (multiplié par un facteur qui augmente avec le nombre d'habitants ) inférieur à la moyenne du Land.
Chaque Land a son propre système, on relève toutefois des caractéristiques communes. Il faut tout d’abord noter que le nombre de critères appliqués est restreint. Partant du critère principal (Hauptansatz), c’est-à-dire du nombre d’habitants, les Länder ont apporté des réponses variables à la question de savoir dans quelle mesure ils veulent prendre en compte la structure de la population, par exemple le nombre d’enfants scolarisés, les boursiers, les personnes âgées ou les chômeurs.

Dans quelques Länder, il y a, outre la population, d’autres facteurs qui tiennent compte de la fonction d’une commune, par exemple, sa fonction centrale ou l’existence de besoins spécifiques d’une commune (autrefois la proximité de la frontière vers les pays communistes ou pour des dépenses au-dessus de la moyenne destinées à l’aide sociale).

L’une des spécificités du système de péréquation allemand est que les habitants des grandes villes sont affectés d’un coefficient de pondération supérieur à 100 %. On part en effet du postulat que le coût par habitant pour un service donné augmente plus que proportionnellement au nombre d’habitants d’une commune. Cette méthode suit la fameuse loi de Popitz concernant la taille d’une collectivité locale et les dépenses qu’elle doit entreprendre. Ainsi, dans le Bade-Wurtemberg, chaque habitant des communes de moins de 3.000 habitants est comptabilisé à 100 %, ce taux augmentant par paliers. Il est de 110 % dans les communes de plus de 10.000 habitants et atteint un maximum de 186 % dans les communes de plus de 600.000 habitants. Ce facteur de pondération appliqué à des habitants suit la loi de Popitz selon laquelle les besoins d’une commune s’accroissent d'une façon progressive à l’échelle du Land par rapport à la somme prévue dans le budget du Land pour le total des subventions (Schlüsselmasse), pour les villes de plus de 500 000 habitants le tout est multiplié par 1,5 et pour chaque 100 000 habitants dépassant les 500 000, le facteur s’accroît encore de 0,1. Ces facteurs augmentent encore virtuellement la population. En Thuringe, l’habitant des communes au-dessus de 3000 habitants compte pour 105 % et l’habitant de Erfurt (au-dessus de 200 000 ) pour 150 %.

Les besoins sont calculés en combinant le critère principal (Hauptansatz) du nombre d’habitants et divers facteurs de correction (Nebenansätze) pour obtenir un indice composite (Gesamtansatz) donnant la mesure globale des besoins d’une commune. Les besoins de l’ensemble des communes sont ensuite confrontés à la somme consacrée par le Land aux subventions de péréquation des charges.

On détermine alors le montant de base (Grundbetrag) par unité de besoin avant de procéder au calcul de la dotation globale que chaque commune recevra. La somme de base est alors multipliée pour chaque commune par le nombre d'habitants, le cas échéant corrigé par des facteurs spécifiques. Il en résulte la „Ausgangsmeßzahl“ ("le chiffre de base initial"). La somme que l'on reçoit en multipliant le montant de base par l’indice composite est nommée Gesamtansatz, établi pour chaque commune et qui reflète ses besoins.

Ensuite, ce chiffre est confronté avec la capacité fiscale comprenant tous les rendements d’impôts dont dispose la communauté mais standardisé en ce qui concerne les impôts communaux où les taux prélevés diffèrent d’une commune à l’autre. Si les besoins reflétés par la „Ausgangsmeßzahl“ dépassent la capacité fiscale, la différence est partiellement égalisée par les subventions. En Bavière, cela représentait 55 % en 1998. Pour l’année 1999, il est prévu le même taux concernant toutes les communes et un abaissement de 55 à 5o % pour les Kreise en raison des résultats irrationnels qu'entraînait la règle précédente. Si la capacité fiscale est égale ou supérieure au chiffre reflétant les besoins (la Ausgangsmeßzahl), la commune ne reçoit pas de subvention globale du tout.

Comme nous l’avons déjà mentionné, une autre péréquation est opérée entre les communes par le biais de la répartition des impôts partagés. Des règles complexes sont également nécessaires pour déterminer le produit de la taxe professionnelle et de l’impôt foncier revenant à une commune.28

Il y a des Länder où vraisemblablement la péréquation se fait seulement par des flux monétaires verticaux du Land aux collectivités locales. Dans les Länder qui pratiquent une péréquation horizontale comme dans le Bade-Wurtemberg, toutes les collectivités locales contribuent à un fonds de péréquation à un taux fixe de leur pouvoir fiscal et sous la forme juridique d’une contribution spéciale (Umlage). Les subventions globales émanant de ce fonds de péréquation, dépendent de la différence entre les besoins financiers et la capacité fiscale. Le taux de cette contribution à titre de péréquation variait en 1998 de 20,45 à 27,95 %.29

Dans la mesure où ce système instaure une certaine égalité des communes pour l’exécution et la conception d’activités d’intérêt vraiment local, les Länder exercent indirectement une grande influence sur les pouvoirs locaux. Etant donné que les intérêts des collectivités locales et les impératifs de la péréquation s’opposent généralement, il est crucial de parvenir à un compromis entre ces deux objectifs. Il a par ailleurs été reconnu que toute politique de péréquation, à quel niveau que ce soit, consiste essentiellement en un flux vertical de revenus, non seulement sous forme de subventions mais aussi d’une répartition des impôts communs sur la base du nombre d’habitants ou de salariés – à titre d’exemple – plutôt qu’en fonction du volume des recettes fiscales collectées localement.

Les collectivités locales des nouveaux Länder sont inévitablement confrontées à des problèmes particuliers. Ceux-ci sont dus à la faiblesse de l’assiette fiscale, au manque d’infrastructures, aux besoins particuliers induits par la prise en charge de nombreux services auparavant gérés par des entreprises d’Etat (tels que le logement, les services culturels, les services médicaux, et d’autres fonctions publiques), au nombre élevé de chômeurs et, comme nous l’avons indiqué plus haut, aux difficultés d’évaluation du patrimoine et à l’absence de toute administration fiscale. Comme il était constaté en Thuringe, les collectivités locales dans les Länder de l’Est sont dotées à hauteur de la moyenne financière de la République fédérale toute entière. Etant donné que les revenus propres restent encore très faibles, ces communes seront donc, pour longtemps encore, beaucoup plus largement tributaires des subventions que les communes de l’Ouest. Par contre, elles seront, le cas échéant, beaucoup moins touchées par les réformes de la fiscalité locale dont on débat actuellement.

5. Participation des collectivités locales au processus décisionnel

Les associations regroupant les collectivités locales allemandes - telles que le Deutscher Städtetag, qui représente normalement les grandes villes, le Städte- und Gemeindebund, qui regroupe les petites villes, et le Deutscher Landkreistag, représentant les Kreise - jugent différemment leur pouvoir d’influence sur la législation les concernant. Presque toutes les collectivités locales adhèrent à ces associations dont la participation est volontaire. L’opinion des grandes villes est que « nous avons la possibilité d’exprimer nos opinions, mais on ne nous écoute pas ». Les Kreise ont pour leur part une vision un peu meilleure de la situation. En Allemagne de l’Est, il n’y a qu’une association au niveau des villes et communes qui représente 99 % de ces collectivités locales. Ainsi, il faut trouver des compromis entre petites et grandes communes à l’intérieur de l’association. En revanche il existe aussi l’association des Kreise (Landkreistag).

Au niveau fédéral, les règlements intérieurs des deux chambres du Parlement prévoient en principe déjà la consultation des associations. Le gouvernement prévoit la participation des associations à l’élaboration des nouvelles lois les concernant. Ceci devrait constituer une garantie pour la participation des collectivités locales mais la mise en œuvre est jugée insuffisante. Ce point est très important car environ 80 % des lois fédérales doivent être appliquées par les collectivités locales.

Les Länder possèdent leurs propres règles. Pas seulement du point de vue juridique mais aussi de fait celles-ci varient d’un Land à l’autre. Certains Länder, comme la Basse-Saxe, étaient instamment invités à une collaboration meilleure par la Cour d’Etat. Il y a des Länder qui ont inscrit la participation de ces associations dans leur constitution comme le Land Bade-Wurtemberg et avant tout en Thuringe où est exigée une consultation obligatoire. Le paragraphe 127 de la loi sur les collectivités locales (Thüringische Gemeindeordnung ) oblige le Land à discuter tous les actes juridiques qui touchent d’une façon ou d'une autre les intérêts communaux avec les associations des collectivités locales avant qu’ils ne soient adoptés. D’autres garantissent le droit à la participation par voie législative ou ont choisi de créer des organes consultatifs spécifiques (comme en Rhénanie-Palatinat).

Si la consultation paraît effectivement assez efficace au niveau des Länder, elle est jugée insuffisante au niveau fédéral.

6. Conclusion

Durant l’année 1998, la situation des communes s’est améliorée, notamment pour les communes avec une base industrielle. C’est la taxe professionnelle, mais aussi l’impôt sur le revenu qui a donné un rendement imprévu (à Munich il y a eu une augmentation de presque 1 milliard de DEM). Cela tient principalement á l’amélioration de la conjoncture et à la réduction des abattements à la base de l’impôt sur le revenu. Les grandes villes assurent que l’augmentation des revenus en 1998 n'est due avant tout qu'à des effets spécifiques et uniques et surtout à des virements complémentaires. En fait, les dépenses pour les investissements se réduisent progressivement et beaucoup de communes étaient contraintes à vendre leurs actifs dans les années 90. Les communes ont dû réduire les dotations destinées à leur budget d’équipement en 1998 et 1999 de façon importante. Depuis des années, les possibilités d'investissement dans l’infrastructure communale ont diminué presque partout d’une façon inquiétante. Une ville relativement bien pourvue comme Karlsruhe s’attend à une baisse de ses moyens d'investissements de 130 Mio. de DEM en 1993 à 65 Mio. de DEM en 2001.

Etant donné que les communes de l’Est ont en général une base industrielle et commerciale plus faible, le rendement de l’impôt professionnel s’accroît plus modestement et aussi la partie de l’impôt sur le revenu a augmenté plus faiblement. En somme, les collectivités locales dans les nouveaux Länder profitent de cette amélioration de la conjoncture d’une façon beaucoup plus réduite comparativement à celles de l’Ouest. Leurs revenus provenant des impôts n’ont pas encore atteint la moitié du niveau des Länder de l’Ouest.

Néanmoins, il ne fait aucun doute que la situation financière des collectivités locales allemandes devient critique et qu’il est nécessaire de donner à ces collectivités une marge de manœuvre financière suffisante pour qu’elles puissent répondre localement aux besoins publics. Ceux qui contestent ce jugement comparent souvent l’ampleur des déficits de la Fédération (12 %) et des Länder (entre 7 % et 8 %) avec celui des collectivités locales (2 % à 3 %), ce qui est absurde car les collectivités locales ne peuvent recourir que marginalement à l’endettement pour financer leur déficit et seulement avec l’accord du Land. De plus, elles sont contraintes de rembourser leurs engagements financiers dans les deux années suivantes, ce qui limite considérablement les possibilités d’endettement.

En RNW il y a beaucoup de communes en déficit, financé par des crédits à court terme. La situation paraît meilleure en Bavière et dans le Bade-Wurtemberg, où seulement 5 à 6 communes sont sérieusement en difficulté. Aussi, dans les Länder de l’Est, au moins en Thuringe, peu de communes ne peuvent pas équilibrer leurs budgets. Mais si cela arrive, le Land les aide moyennant un fonds spécial (le "Ausgleichsstock") qui est financé par les restes budgétaires qui sont accumulée à la fin de l’année budgétaire.

Il paraît vraisemblable que les collectivités locales puissent être touchées gravement par la réforme d’impôts qui se prépare en Allemagne. Il est à craindre qu’elles ne soient pas compensées des pertes qu'elles devront subir notamment pour l’impôt sur le revenu.

Au-delà des problèmes nationaux, l’association des petites villes et communes s’inquiète des évolutions futures au sein de l’Union européenne. Ces communes s’alarment de ce qu’aucune garantie de l’autonomie locale n’ait été intégrée au Traité d’Amsterdam et que le principe de la subsidiarité n’y soit pas affirmé assez nettement.

Partie III - Conclusions politiques du Rapporteur

L’exposé des motifs a permis de mettre en lumière des tendances et une détérioration de la situation des finances locales. Le Rapporteur rappelle que cette situation s’est aggravée ces dernières années sous l'effet conjugué du coût exponentiel des charges sociales (notamment généralisation des crèches et accueil des réfugiés), de la baisse des recettes fiscales due à la mauvaise conjoncture, de l'effort de solidarité considérable réalisé pour aider financièrement les cinq nouveaux Länder, de la réforme de la taxe professionnelle et de l'existence d’autres problèmes spécifiques ou structurels dans certains Länder. La préparation de ce rapport de suivi – le premier préparé par le Congrès concernant un Etat fédéral - a souligné d’une part la diversité de l’organisation des collectivités locales qui relève des Länder, d’autre part la complexité des mécanismes de péréquation (horizontale et verticale) mis en place au niveau de la Fédération et des Länder.

Le projet de recommandation contient de nombreuses propositions visant à améliorer la situation des finances locales et l’autonomie financière des collectivités locales. Le Rapporteur souhaite ici mettre l’accent sur quatre axes de travail possibles :

1. La création d’une Commission Institutionnelle au niveau fédéral

Considérant les problèmes identifiés dans la partie II du présent exposé des motifs, le Rapporteur préconise la création d’une Commission Institutionnelle, qui permettrait de prendre pleinement en compte les intérêts des collectivités locales au niveau fédéral, et d’associer les représentants des associations de pouvoirs locaux aux décisions prises par la Fédération, mais qui ont toutefois une incidence directe sur les collectivités locales qui assument la mise en œuvre de 80% des lois fédérales. L’existence de cette Commission Institutionnelle garantirait au niveau fédéral la consultation systématique des collectivités locales dans des domaines affectant directement leurs compétences propres ou relevant des compétences déléguées. Elle permettrait également d’évaluer, de manière régulière, l’évolution de la situation des finances locales et encouragerait la réflexion sur les mesures à prendre pour améliorer la situation financière des collectivités locales.

Il est intéressant d’ailleurs de noter que la création d’une telle commission institutionnelle vient d’être évoquée, au niveau régional, par le Président de la Cour Constitutionnelle du Bade-Württemberg30. Cette commission pourrait regrouper les représentants des principales associations de pouvoirs locaux, de la cour des comptes régionale, des organes de contrôle des collectivités locales et des membres du Parlement régional pour encourager une réflexion commune et proposer des recommandations pour les règles de péréquation financière.

2. Une réforme du système fiscal des collectivités locales

Une réforme de la fiscalité prévoyant le rétablissement d’une forte fiscalité locale, et la révision des dispositions de transferts des ressources pour les dépenses obligatoires des pouvoirs locaux liés à la mise en œuvre des lois fédérales et des Länder, contribuerait à améliorer l’autonomie financière des collectivités locales. Ceci pourrait se traduire notamment par

- Une plus grande autonomie des collectivités locales de fixer les taux de leurs propres impôts
- La possibilité pour les Kreise de l’ensemble des Länder de lever des impôts locaux
- La possibilité pour les collectivités locales de lever des impôts locaux mineurs, dits « impôts bagatelles », également dans les Länder où cette possibilité a été réduite
- L’assouplissement du plafonnement des limites d’emprunt des collectivités locales
- Eventuellement, la création d’une surtaxe au profit des communes de l’impôt sur le revenu, comme cela est prévu dans la Constitution et proposé par l’associations des villes, avec notamment la possibilité pour les communes, dans une certaine mesure, d’en fixer le taux

Ces mesures contribueraient à aider les collectivités locales à équilibrer leurs budgets, à garantir une meilleure couverture des dépenses facultatives et à stimuler les investissements. Cette recommandation est fondamentale pour les cinq nouveaux Länder qui doivent assurer la remise à niveau, notamment de leurs infrastructures (et leur fonctionnement).

3. Le principe de connexité

La partie II de l’exposé des motifs a permis de mettre en lumière l‘intérêt d’inscrire le «principe de connexité » dans les constitutions des Länder. Le Rapporteur estime essentiel le respect de ce principe qui permet de mieux assurer la couverture financière des coûts induits par la délégation de compétences de la Fédération ou du Land aux communes. Il recommande l’inscription de ce principe dans les textes constitutionnels pour en assurer sa justiciabilité au niveau régional et fédéral et son plein respect.

Même si la portée de ce principe peut faire l’objet d’interprétations, son inscription dans la Constitution du Land rend le législateur régional attentif aux intérêts des collectivités locales. Au niveau fédéral, la création d’un mécanisme de consultation des collectivités locales s’avère tout aussi nécessaire, soit à travers la jurisprudence de la Cour Constitutionnelle Fédérale, soit à travers la révision de la Loi Fondamentale qui permettrait d’inscrire le principe de connexité dans la Constitution fédérale au profit des collectivités locales.

Il faut noter que l’inscription du principe de connexité dans la Constitution du Land constitue un moyen effectif de recours pour les collectivités locales qui s’estiment lésées par le dispositif de péréquation financière. Ainsi, dans le Bade-Württemberg, les Kreise d’Ortenau et de Schwabisch Hall ont démontré avec succès que les coûts croissants liés à l’aide sociale, l’aide aux jeunes, et l’accueil des réfugiés les ont conduit à la ruine. La Cour Constitutionnelle du Land a, dans son verdict du 11 mai 1999, condamné la manière dont le Land distribue, via le système de péréquation financière entre les communes, des sommes toujours plus faibles aux communes et au Kreise, afin de maintenir l’équilibre du budget régional. La Cour a ainsi estimé que la garantie financière des communes et des Kreise n’a pas été respectée. Même si ce verdict n’a pas de portée rétroactive et ne reconnaît pas la violation du paragraphe 71 de la Constitution du Land de Bade-Württemberg contenant le principe de connexité, il suscite un grand espoir auprès des associations de collectivités locales de ce Land pour voir leurs intérêts mieux défendus à l’avenir.

4. Le système de péréquation

De l’avis de certains Länder et villes ainsi que de l’OCDE, le système très poussé de la péréquation appliqué en Allemagne à tous les niveaux et sous différentes formes - jusqu’à s ‘appliquer à 99 % au niveau fédéral et à 90-80 % dans plusieurs Länder - devrait être assoupli. En effet, une péréquation aussi poussée risque de décourager aussi bien les Länder et les communes prospères que celles qui sont bénéficiaires de ce système, à épuiser leur capacité fiscale. Bien entendu, cette réforme devrait tenir compte des besoins spécifiques à l’effet de solidarité pour l’unité allemande, effort au demeurant très important et qui mérite une reconnaissance particulière.

Le Rapporteur tient à souligner que, s’il faut inciter à davantage de péréquation dans de nombreux pays, la situation de l’Allemagne, au contraire, attire l’attention sur le fait qu’il ne faut pas aller trop loin.

* * * * *

D’une manière générale, il est apparu opportun de présenter un projet de recommandation faisant apparaître, paragraphe par paragraphe, les problèmes majeurs que l’application de l’article 9 de la Charte européenne de l’Autonomie Locale (CEAL) rencontrés en Allemagne ou dans un certain nombre de Länder, et de demander selon le cas aux autorités fédérales ou à celles des Länder de résoudre ces difficultés et d’appliquer les différents paragraphes de la CEAL de manière effective. La délégation allemande à la Chambre des Pouvoirs Locaux et à la Chambre des Régions (c’est-à-dire les représentants des Länder) sont invités à tenir le Congrès informé des suites qui seront données à ces recommandations. Les pouvoirs locaux, au niveau fédéral et des Länder, pourraient se référer aux éventuels manquements à la CEAL dans les recours administratifs ou juridictionnels introduits auprès des organes judiciaires pour veiller à assurer un meilleur respect de la Charte Européenne de l’Autonomie Locale, et en particulier celui de son article 9.

Addendum - RAPPORTS DES MISSIONS

Rapport de la mission à Bonn, Düsseldorf et Cologne, 11-13 novembre 1998

I. Rencontre avec l’Association allemande des villes

M. Dieckmann, Directeur général, nous donne cinq rapports successifs sur l’état des finances locales en Allemagne, édités par son Association ainsi que des graphiques statistiques récents sur les recettes et les dépenses communales en 1998.

Il est d’avis que l’article 9 de la CEAL est relativement bien appliqué au plan formel en Allemagne; toutefois sur le plan des réalités, la situation est différente. Les relations avec les Länder sont difficiles. Par rapport au paragraphe 9.1 de la CEAL, il indique que la taxe professionnelle représente 35% des impôts locaux, pour un total de 33 milliards de DM. Ce chiffre correspond à 55% du produit de l’impôt ; les autres 45% devant être reversés aux Länder. Ces pourcentages sont fixés par voie de négociation au plan fédéral et, ces derniers temps, la part reversée aux Länder s’est considérablement accrue à cause de la politique de solidarité avec les nouveaux Länder.

Il y a 30 ans, les pouvoirs locaux recevaient la totalité de la taxe professionnelle mais ce reversement des Länder a été décidé en contrepartie de ce que les communes reçoivent 15% de l’impôt sur les revenus. Ceci pour encourager les communes à développer l’industrie et à mettre à disposition des espaces libres pour bâtir des logements.

Il se plaint que cette solidarité est-ouest ne se fait qu’au niveau des Länder alors qu’elle aurait pu se faire au niveau des communes.

Le paragraphe 9.2 de la CEAL pose actuellement des problèmes en Allemagne étant donné l’accroissement des charges sociales qui pèsent sur les collectivités locales dues:

- à l’accroissement du chômage ;

- aux coupures sociales effectuées par le Gouvernement fédéral qui fait que plus de personnes en détresse tombent sous l’aide sociale des communes ;

- à l’accroissement d’aides aux demandeurs d’asile, la République d’Allemagne ayant plus de réfugiés que l‘ensemble des pays membres de l’Union européenne;

La République d’Allemagne remplit assez bien les exigences du paragraphe 9.3 de la CEAL. Ainsi, les communes peuvent fixer le taux de la taxe professionnelle, de l’impôt sur la propriété, de l’impôt sur les spectacles et de l’impôt sur les chiens.

Quant au paragraphe 4 de l’article 9 de la CEAL, on peut dire que les ressources des pouvoirs locaux sont assez variées et par conséquent flexibles par rapport à la conjoncture.

Quant à l’article 9.5, la République d’Allemagne est un pays qui applique des systèmes très sophistiqués en matière de péréquation. L’article 108; paragraphe 8 de la Constitution fédérale prévoit des compensations que les Länder doivent verser pour les coûts occasionnés par les équipements installés dans une commune, mais cela n’est appliqué que très rarement.

La péréquation au niveau communal est réalisée à travers l‘obligation qui est faite aux Länder de créer un pot commun du produit fiscal. Prenons l’exemple de la taxe de circulation : dans chaque Land, le taux versé dans le pot commun varie : il est de 23% (RNW31) et 11% en Bavière. Les Länder de l’Est versent moins. Ce pot permet de réaliser un équilibre horizontal entre les Länder et, par voie de dotation versée aux communes, également entre les communes. Toutefois, en général, ces versements favorisent les régions rurales, sauf en RNW où, grâce à l’action des Verts, les problèmes et les charges des villes sont mieux pris en compte.

Le paragraphe 6 de l’article 9 de la CEAL est relativement mis en œuvre en République d’Allemagne. En général, les communes sont entendues mais pas nécessairement écoutées. Cela varie d’un Land à l’autre : en RNW, les communes ne sont pas tellement écoutées.

Il y a, à côté de la dotation générale importante, toujours trop de subventions spécifiques liées à des dépenses spécifiques pour lesquelles les villes n’ont pas nécessairement un intérêt particulier.

En ce qui concerne le paragraphe 8 de l’article 9 de la CEAL, les communes sont soumises à un plafond de l‘endettement qui se base sur la capacité financière de la commune mesurée par le taux de revenu par habitant. Ce critère est très critiqué car il correspond au principe qu’on ne prête qu’aux riches.

Auparavant, la taxe professionnelle se basait sur le chiffre d’affaires de l’entreprise et sur le capital de l’entreprise. Dernièrement, cette deuxième base a été supprimée et remplacée par 2,2% de la TVA qui sont répartis en fonction des salaires versés dans la commune. Cela fait que certaines villes ont perdu au change. De plus, les communes sont victimes de réformes fiscales qui ont exempté du paiement de l’impôt sur le revenu toute entreprise ou profession libérale ayant investi dans les nouveaux Länder, ce qui a causé une diminution importante du produit de l’impôt sur le revenu. Par exemple, le produit de l’impôt sur les professions libérales est tombé de 57 à 5 milliards en 5 ans.

Parallèlement, les dépenses sociales obligatoires des communes se sont envolées. La ville de Francfort a même attaqué l’Etat fédéral devant la Cour fédérale constitutionnelle mais l’Association l’a découragée car c’est plutôt le Land qu’il conviendrait d’attaquer. Les communes ont la possibilité d’attaquer une loi fédérale dans la mesure où elle leur cause des problèmes d’autonomie financière. Ainsi, une loi fédérale a prévu que chaque enfant a droit a une place dans une crèche. L’Association. s’apprêtait à introduire une plainte devant la Cour de Karlsruhe. Mais elle en a été dissuadée par des promesses qui ensuite n’ont pas été tenues. Malheureusement le délai d’un an pour le dépôt de recours était expiré.

II. Rencontre avec les représentants du Ministère fédéral de l’Intérieur, M. Budrat et le représentant du Ministère des Finances, M. Thies

M. Budrat explique qu’il y a une coresponsabilité de la Fédération pour l’autonomie communale en vertu de l’article 28 de la Constitution. La Fédération est en quelque sorte le garant de cette autonomie et le ministère de l‘Intérieur en est le responsable. Les communes ont tendance à se plaindre des lois fédérales qui leur causent de nouvelles charges. En fait, le système allemand prévoit que 80% des mesures, qui mettent en œuvre les lois fédérales, reviennent aux pouvoirs locaux.

M. Thies : les communes se plaignent des dotations financières insuffisantes des Länder. Les Länder se plaignent auprès de la Fédération. La Fédération estime que cela ne doit pas lui être imputé mais résulte de la structure des relations financières entre les Länder et leurs communes. D’après la loi de finance constitutionnelle, les communes font partie des Länder, il n’existe pas de relation directe entre le Bund et les communes.

Il est vrai que la Constitution prévoit que les instances compétentes d’une tâche doivent les financer. Il admet que la charge financière et les ressources d’une instance compétente ne concordent pas toujours. Les associations de pouvoirs locaux ont en particulier évoqué des exemples dans le domaine social : les crèches, l’aide sociale, les demandeurs d’asile, etc. Ici interviennent les mécanismes de péréquation financière. Le Bundestag (le Parlement) décide de la législation avec l’accord du Bundesrat, même lorsque les intérêts des communes sont afffectés. Cependant, selon les associations de pouvoirs locaux le Bundesrat ne s’érige pas toujours en défenseur des intérêts des communes.

Il existe au niveau des communes tout comme au niveau du Bund et des Länder des goulots d’étranglement par exemple pour ce qui est des investissements des communes. Néanmoins, les communes lorsqu’elles touchent 10% de plus de recettes, auront tendance à tout dépenser plutôt que de les mettre en réserve.

Les communes disposent de sources de revenus propres qu’elles définissent et gèrent elles-mêmes. L’alignement unilatéral du système fiscal communal sur la taxe professionnelle a entrainé dans le passé de vrais déséquilibres entre la ville et la campagne. C’est pourquoi, depuis 1970, on a rajouté le reversement de, actuellement, 15% de l’impôt sur le revenu qui sont distribués sur la base des revenus locaux mais avec des plafonds pour éviter des déséquilibres excessifs. Les communes ont vu ainsi leur base fiscale diversifiée et renforcée. Depuis 1998, 2,2% du revenu de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sont reversée aux communes pour suppléer la partie de la taxe professionnelle supprimée en 1998.

Bien sûr, les communes se plaignent de la péréquation financière communale dans les différents Länder. La péréquation financière communale entre les Länder et leurs communes est, pour ce qui concerne le volume et la méthode de partage, définie d’une manière différente de Land à Land. La péréquation financière communale et la péréquation financière des Länder permettent de remplir une obligation de la Constitution fédérale, en l’espèce la création de conditions de vie pour tous les citoyens indépendamment de leur lieu de résidence. En réponse à une question, il admet que la péréquation actuellement réalisée entre les Länder, en raison de son intensité forte d’égalisation, ne constitue guère une incitation pour les Länder à mener une politique volontariste. Les Länder pauvres sont moins incités à faire des économies et les Länder riches sont moins incités à augmenter leurs efforts productifs. En plus, de cette péréquation horizontale, il y a une péréquation verticale entre la Fédération et les Länder (y compris les communes) qui vise également à rééquilibrer le niveau économique des nouveaux Länder.

Il informe la délégation de l’annonce faite par le nouveau gouvernement dans son programme : “ nous voulons renforcer le pouvoir financier des communes”. On ne sait pas comment cela sera réalisé.

Quant aux critères de Maastricht, il faut préciser qu’en 1998 la fédération avait un déficit de 12%, les Länder de 7 à 8% et les communes de 2 à 3%. Les villes et communes doivent, conformément au droit budgétaire communal, établir une couverture budgétaire pour couvrir leur déficit dans les deux ans. Les déficits sont financés par des crédits de caisse ou des crédits à plus long terme ou en ayant recours aux réserves avant d’être couverts par les recettes ordinaires. A la question si le manque de lien direct au plan financier entre la fédération et les communes constituerait une entorse à l’article 9 de la CEAL, M. Budrat répond que cela n’est pas le cas. En tout cas, il estime que la seule possibilité pour une commune d’attaquer la fédération est de se fonder sur l’article 28, dans la mesure où une loi fédérale remettrait en cause l’autonomie locale. Pour l’instant, le Städtetag n’a pas trouvé une seule ville qui serait prête à le faire. Quant à se baser sur la Charte, cela ne serait pas possible, car d’après M. Budrat, la Charte n‘aurait qu’une valeur égale à une loi normale, ce qui fait que la Cour constitutionnelle fédérale ne saurait la considérer en cas de plainte. Il s‘agit là d’une question importante à soulever au niveau juridique (M. Engel et M. Weiss).

III. Rencontre avec le Landkreistag ( Association allemande des Kreise)

M. Von Hausen nous explique que les Kreise tirent leur autonomie de l’article 28 § 1 de la Constitution fédérale qui les définit comme des entités locales ayant des compétences fixées par la loi des Länder.

En fait, les compétences des Kreise portent surtout sur des tâches de niveau supracommunal comme les transports interurbains pour lesquels ils disposent d’un droit d’initiative. Pour le reste, il s’agit de compétences, que la loi leur reconnaît, en général les Länder, mais quelquefois aussi la loi fédérale.

Les villes importantes, en règle générale de 100.000 habitants et plus, sont indépendantes des Kreise et remplissent donc aussi bien les compétences communales que celles des Kreise.

Les Kreise d’Allemagne de l’Est, malgré une réforme territoriale intervenue en 1994-1995, restent des Kreise de taille plus réduite que ceux de l’ancienne RFA.

Les compétences peuvent être décrites en :

- compétences obligatoires pour lesquelles les Kreise conservent le droit de choisir comment les mettre en œuvre ;

- compétences propres (droit d’initiative) ;

- compétences déléguées (par exemple, police du bâtiment, contrôle des étrangers, etc.) ;

- compétences obligatoires propres comme l’aide sociale, l’aide aux jeunes, les hôpitaux, la protection de l’environnement, la vignette auto, etc.

En général, les lois fédérales doivent laisser la liberté aux Länder de définir les méthodes de mise en œuvre. Il y a toutefois des exceptions, pour l’aide sociale, par exemple.

- Les compétences facultatives : il s’agit surtout des compétences supracommunales complémentaires à l’action des communes faibles ou petites. Cette action peut être directe ou prendre la forme de subventions pour des équipements supracommunaux. Le Landkreis agit à géométrie variable. En ce faisant, le Land agit pour mettre en œuvre le principe constitutionnel de l’égalité de traitement des citoyens et assurer une péréquation entre les communes.

Parmi les compétences obligatoires du Kreis, il y a également le traitement des déchets. On doit préciser que les Kreise ne disposent pas de compétences générales (comme les communes).

Sur le plan du recours juridictionnel, les Kreise, tout comme les communes, peuvent attaquer les lois des Länder qui ne respectent pas leur autonomie. De même, les communes peuvent attaquer les Kreise pour les mêmes allégations.

Les communes peuvent demander aux Kreise de prendre en charge une tâche qui leur incombe et qu’elles ne peuvent pas assumer, encore faut-il que cette tâche ait une dimension supracommunale.

C’est pour ce genre de réalisations que le Kreis réalise une péréquation intercommunale que l’on peut aussi qualifier de péréquation fonctionnelle, c’est-à-dire liée à un équipement précis.

C’est ainsi qu’il y a une forte tendance en Allemagne à ce que les Kreise remplacent les syndicats intercommunaux à vocation spécifique qui n’offrent pas les mêmes garanties de légitimité démocratique. On avait constaté qu’à un certain moment, ces syndicats consommaient l’essentiel du budget communal alors que le conseil communal n’avait pratiquement rien à dire sur l’utilisation de ses ressources.

Les Kreise assument également le contrôle de la légalité et de la gestion financière des communes qui leur appartiennent.

M. Von Hausen nous fait la liste des impôts locaux en général, à savoir, la taxe professionnelle, la part d’impôt sur la TVA et les 15% de l’impôt sur le revenu distribué, celui-ci avec un écrêtement afin de réaliser un minimum de péréquation. En fait, on aurait pu accorder aux communes la possibilité d’un taux additionnel sur l’impôt sur le revenu. Mais les Länder s’y sont opposés.

L’article 106 § 5 de la Constitution dit que les Länder peuvent décider d’un taux additionnel pour les communes. On peut alors dire que l’autonomie financière constitutionnelle n’a pas été réalisée.

Les recettes locales sont en moyenne composées de 41% de ressources propres, de 30% de transferts des Länder (RNW seulement 15%) et le reste étant des dotations d’investissement et d’autres recettes.

La péréquation financière est réalisée à travers la dotation générale qui tient compte de la capacité financière de la commune et qui représente 85% des transferts aux communes. La dotation d’investissements, qui tient compte du nombre d’habitants et de la surface, varie entre 8 et 10%. Le tout est complété par 5 à 7% de subventions spécifiques (en RNW, on tend à les diminuer).

Pendant l’entretien, on nous apprend qu’il existe en Allemagne d’autres ressources représentées par des caisses spéciales dont disposent chaque ministère, voire chaque direction de ministère et qui se situent en dehors du système général décrit. Ainsi, en RNW, il y aurait 800 caisses spéciales qui permettent à des services de financement d’encourager les communes à mettre en œuvre des politiques par l’octroi de subventions liées à un projet spécifique, subventions pouvant proter entre 20 et 80% du projet.

En RNW, cela peut représenter un accroissement de 30 à 40% des recettes communales selon les années. Cela pose certainement un problème d’autonomie locale car ces subventions portent sur des tâches qui seraient facultatives mais qui, par le biais des subventions, deviennent « quasi-obligatoires ». En fait, les subventions spécifiques sont donc de l’ordre de 35 à 85% si on tient compte de ces caisses spéciales. L’attribution de ces subventions se fait de gré à gré. Des considérations politiques pouvant également intervenir, on parle de subventions à la corruption.

On ne doit pas s’attendre à une diminution de ces caisses spéciales car cela soutient l’action des services de Länder qui consiste souvent à gérer ces caisses. La suppression de ces caisses provoquerait une baisse de 30% du personnel des Länder. Quant à la position des Kreise dans ce tableau, ils ne disposent que de recettes propres négligeables (surtout impôts sur la chasse : 0,14% des recettes). Les Kreise reçoivent leur financement des communes selon des clefs fixées par le conseil des Kreise et tenant compte de la capacité financière des communes et de la dotation générale que la commune reçoit. Le financement par les communes représente 40% en moyenne en Allemagne mais davantage en Allemagne de l’Est (50 à 55%). En RNW, cela est inférieur car il existe au dessus des Landkreise des « Landschaftsverbände ». De ce fait, l’autre ressource du Kreis, la dotation générale des Länder, est plus faible en RNW (12%) que par rapport à la moyenne allemande (25%). Pour donner un exemple, le prélèvement forfaitaire sur les communes ne suffit même pas à financer les dépenses générales des Landkreise et ceux-ci savent très bien qu’ils ne peuvent augmenter ce prélèvement sans mettre les communes en grave difficulté.

Le reste des recettes des Kreise est composé de redevances et autres droits (de circulation, 10 à 15%, de remboursement de l’aide sociale par les ayants droit selon les lois fédérales, de revenus du Kreis, d’intérêts perçus, de bénéfices d’entreprises énergétiques, de bénéfices qui sont en général utilisés pour financer les transports interurbains). En définitive, les Kreise sont donc moins autonomes que les communes sur le plan financier. Le problème actuel se situe dans la croissance de la charge sociale qui représente 30% à 40% des recettes, même s’il faut souligner qu’il s’agit souvent de subventions aux communes qui gèrent en direct cette aide. A côté de ces charges, il y a les coûts de la protection de l’environnement.

Les Kreise gèrent également un budget en capital qui représente en moyenne 8 à 10% de l’ensemble du budget. Comme pour les communes, les Kreise voient les investissements en capital chuter car l’augmentation des dépenses courantes ne laissent plus guère de marge de manœuvre.

Lors de la ratification de la Charte par la République d’Allemagne, les Länder ont fait inscrire une réserve par rapport à l’article 9 précisément en ce qui concerne le financement des Kreise, dans la mesure où ceux-ci ne disposent pratiquement pas de ressources propres.

Dans la Constitution, il y a une contradiction entre l’article 28 § 2(qui assure l’autonomie locale des Kreise) et l’article 106 (qui ne se réfère qu’à l’autonomie financière des communes). Ainsi, dans le paragraphe 7 de l’article 106 est prévue la dotation générale de transfert du Land. Par contre, le paragraphe 6 de l’article 206 ne prévoyait l’octroi d’impôts partagés qu’aux communes ou selon la décision des Länder aux groupements de communes. En fait, les Länder n’ont jamais voulu mettre en œuvre cette partie de la Constitution d’où leur réserve à l’article 9 de la Charte.

Le Landkreistag est une Association faîtière qui se base sur les associations régionales de Kreise. Bien que l’adhésion soit volontaire, tous les Kreise d’Allemagne (au nombre de 323) y adhèrent (cela correspond à 96% de la surface et 62% de la population. Les Kreise paient une cotisation à l’association régionale qui en reverse une petite partie à celle fédérale.

A la question si on peut arriver à des ressources propres des Kreise, on répond que cela remettrait en cause tout le système de péréquation et que le Landkreistag entrerait en compétition avec les deux autres associations.

Quant à la mise en œuvre du principe de consultation des Kreise, cela fonctionne bien dans plusieurs Länder, pour ce qui est du travail législatif. En RNW, on a même créé un conseil cantonal avec une voix consultative. La consultation au niveau fédéral marche moins bien même si dans le Règlement interne du gouvernement fédéral il est prévu que les trois grandes associations doivent être consultées en temps utile sur les projets de loi touchant à leur ressources financières. Il en va de même dans le Règlement du Parlement fédéral qui fait obligation à celui-ci de procéder à cette consultation. En fait, les ministères n’observent pas les règles sans que cela ne soit sanctionné. Ce qu’il faudrait, ce serait d’ancrer ce droit de consultation dans la Constitution. Ce qui permettrait d’attaquer les lois qui n’auraient pas pris en compte l’avis des communes alors que 80% des lois doivent être mises en œuvre par les communes.

IV. Visite à l’Association allemande des Villes et Municipalités

Il s’agit d’une Association également faîtière d’associations de Länder. Elle rassemble 14.000 villes et communes sur les 15.000 que compte l’Allemagne. L’existence de villes indépendantes des Kreise est une tradition historique, ce qui fait que l’on trouve des villes de plus de 100.000 habitants soumises aux Kreise, comme des villes de 25.000 habitants indépendantes des Kreise. Les vues de l’Association des Villes et Municipalités ne sont pas toujours identiques à celles de l’Association des Villes. Ainsi, par exemple, l’Association des Villes préfère l’utilisation de critères de financement par le nombre de citoyens et l’Association des Villes et Municipalités préfère le financement d’après la surface. Le rôle de l’Association au niveau fédéral est un rôle de lobby auprès des Institutions fédérales et européennes. Par contre, les associations régionales font aussi de l’assistance technique et juridique de leurs membres.

L’Association a publié une liste de revendications adressées au nouveau gouvernement où apparaissent les positions de la nouvelle coalition par rapport aux demandes de l’Association des Villes et Municipalités. Le problème principal vient de l’augmentation des tâches et des aides sociales (50 milliards de DM par rapport à 3 milliards il y a 15 ans). Les Länder et l’Etat fédéral ne veulent pas reconnaître cet état de fait. C’est donc une nécessité d’introduire dans la Constitution le principe de Konnexitätsprinzip (proportionnalité) ainsi que le principe de la consultation des pouvoirs locaux dans la mesure où les communes mettent en œuvre 80% des lois.

En fait, l’Association se plaint que même s’il y a consultation à un certain moment, la plupart des lois sont décidées dans les commissions de conciliation entre le Bundesrat et le Bundestag. Et à ce niveau, les communes ne sont pas consultées.

L’Association rappelle également au gouvernement que s’il veut créer des postes de travail, il doit renforcer la capacité d’investissement des communes qui assument 70% des investissements publics, capacité qui a subi une chute dramatique ces dernières années.

L’Association souhaiterait aussi que l’on dégraisse la bureaucratie fédérale ainsi que celle des Länder pour des tâches que les communes peuvent assumer (ceci est lié à l’affaire des caisses spéciales). Elle souhaiterait également que, dans le traité de Maastricht, l’autonomie locale soit nommément reconnue pour que la Commission de Bruxelles tienne compte de cette autonomie. Elle souhaiterait que les communes puissent participer au pacte de stabilité pour l’Euro car les communes ont été beaucoup limitées dans leur capacité d’emprunt.

Les communes devraient pouvoir développer une politique active de l’Europe, par exemple dans le domaine de la protection de l’environnement de manière en fait à diminuer le nombre de personnes qui vivent de l’aide sociale.

Les communes devraient également pouvoir participer à un plan de développement des zones rurales par des activités qui ne seraient pas limitées à la protection de l’environnement. Il y a actuellement un danger également à Bruxelles que l’aide régionale s’adresse davantage aux zones urbaines au dépens des zones rurales.

La nouvelle politique de réforme énergétique va également défavoriser les communes dans la mesure où les entreprises productrices d’énergie municipale ne feront plus autant de bénéfices et ne pourront plus aider à financer les transports urbains. D’après eux, le système allemand est meilleur que celui préconisé par Bruxelles. Enfin, les communes se plaignent que les directives fédérales et européennes en matière de protection de l’environnement coûtent trop chères aux communes. Il faudrait laisser davantage d’autonomie aux communes en cette matière.

M. Zimmermann va jusqu’à dire qu’il faudrait un jour organiser une manifestation à Bruxelles, voire des grèves des services des communes pour se faire entendre.

V. Bezirksregierung - Bezirkspräsident

La délégation a été reçue par le Président lui-même, M. Antwerpes et ses collaborateurs. Il y a 32 Bezirke en Allemagne, qui peuvent être comparés à des préfectures régionales françaises. Les compétences de ces Bezirke sont différentes de Land à Land. Pourtant, ils assument la tutelle des communes, la police des bâtiments, la planification du traitement des déchets et du traitement des eaux. Dans certains Länder, il y a en plus la tutelle sur les écoles, les constructions de certaines routes, ce qui en RNW est assuré par les Landschaftsverbände.

Par ailleurs, il rentre dans leurs compétences, la coordination des actions des différents ministères. M. Antwerpes pense d’ailleurs que les ministères devraient laisser davantage de liberté au Regierungspräsident.

Des projets en ce sens sont d’ailleurs à l’étude. Il souligne combien la RNW est plus décentralisée que d’autres Länder. Ainsi, par exemple, en Bavière, le contrôle du service de santé est étatique, alors qu’en RNW il est communal. A son avis, on devrait davantage décentraliser et laisser à l’Etat les tâches de coordination et de planification. Il souligne également son rôle de neutralité par rapport aux partis politiques. Son Bezirk compte 4,5 millions d’habitants (plus grand que certains petits Länder) ; il compte également 99 communes et 8 Kreise. Il exerce la tutelle sur les villes indépendantes de Kreise et sur les Kreise (car ceux-ci exercent leur tutelle sur leurs communes). Il doit également contrôler les communes qui se sont mises en déficit. Il s’agit là d’un problème important de perte d’autonomie locale de ces communes. Cela est également un problème dans certains Länder qui n’ont pas de Bezirke (8 sur 16, y compris les villes-Länder) Dans ce cas, la tutelle est exercée par des offices administratifs de Land. En Bavière, le contrôle est très strict. Il y a un représentant de l’Etat dans chaque ville. Il n’existe pas de partage net des compétences entre le représentant et le maire. M. Antwerpes explique toute une série de différences au niveau des élus (maires) et du contrôle dans les différents Länder par la culture administrative amenée par les puissances d’occupation au lendemain de la guerre.

Quant à la situation des finances communales, il confirme qu’elle s’est dramatiquement détériorée ces dernières années à cause des transferts de solidarité vers l’Est du pays. Rien que la ville de Cologne perd de ce fait 1 million de recettes sur les 6,5 millions de son Budget chaque année. Les dépenses facultatives en pâtissent. Malgré les critiques des autorités fédérales sur les plaintes des communes au sujet de l’aide sociale, il pense plutôt que les communes ont raison. Les communes souffrent d’après lui de :

- la croissance exponentielle des aides sociales ;

- des transferts vers l’Est du pays ;

- de l’augmentation des demandeurs d’asile ;

- de la baisse de la conjoncture ;

- de la diminution du produit de l’impôt sur le revenu due à des abattements sur l’impôt sur le revenu que toute personne ou entreprise peut faire si elle investit à l’Est quel que soit le niveau de son revenu (même s’il s’agit d’une personne millionnaire).

De ce fait, la plupart des communes n’arrivent pas à équilibrer leurs comptes et doivent vendre leurs biens, propriétés, parts de participation dans les entreprises, etc. Seulement 16 communes sur 99 du Bezirk peuvent équilibrer leur budget. Les autres vendent leurs avoirs ou recouvrent leurs crédits de trésorerie.

Il dément l’affirmation du représentant du ministère fédéral des Finances selon laquelle les communes peuvent rééquilibrer leur budget en deux ans (il leur faut 10 à 30 ans) ou mettre au chômage le personnel ou arrêter les services. Ainsi, la ville de Cologne a vendu pour 400 millions de parts de son patrimoine. Même Leverkusen, qui était la ville la plus riche du fait du complexe chimique Bayer, n’arrive plus à équilibrer ses comptes en raison également de la délocalisation pratiquée par Bayer (effets de la globalisation). En définitive, la situation est critique. Ainsi, dans son Bezirk ; 16 communes sont en équilibre, 58 compensent avec la vente de leur patrimoine et 41 sont carrément en déficit. La situation des Kreise est comparable.

Quant à la distribution des dotations générales des communes, les montants sont les suivants : 14 milliards (dotation générale), 900 millions (subventions spécifiques surtout pour les écoles). Il évoque également les 800 caisses spéciales qui ne transitent pas par le Regierungsbezirk. Il se demande si cela a bien un sens ou s’il ne faudrait pas supprimer des services, voire des ministères. Mais il s’agit de la méthode qui consiste à « faire de la politique ».

Quant à l’endettement par tête d’habitant, il est de 12.000 DM en ce qui concerne la dette fédérale, de 5.000 pour la dette du Land et de 2.000 pour la dette locale.

VI. Rencontre avec le ministère de l’Intérieur et de la Justice du Land de Rhénanie du Nord-Westphalie

La délégation a été reçue par M. Held, Chef de la direction compétente dans les collectivités locales. Ont également assisté à la réunion, Mme Koczy, membre du Landtag et du CPLRE, M. Zahn, Président de la délégation locale allemande et maire d’une ville proche de Cologne.

M. Held nous dit que sa tâche est de veiller au bon fonctionnement du système des collectivités locales et notamment des ressources mises à leur disposition ainsi que de leur capacité et efficacité. Le RNW est atypique en Allemagne car il ne compte que 396 communes pour une population de 18 millions d’habitants, la plus petite commune ayant 8.000 habitants.

La structure d’une grande commune est en principe performante. A son avis, le problème n’est pas que les communes disposent aujourd’hui de moins d’argent qu’auparavant mais qu’elles ne reçoivent pas plus qu’avant alors que leurs charges augmentent. Les recettes fiscales totales du Land n’ont ni baissé ni augmenté depuis 1995. Mais les exigences des citoyens, par contre, augmentent. Il y a obligation de transfert de solidarité vers l’Allemagne de l’Est. Ainsi, pour le RNW, cela se monte à 5 milliards de DM par an dont 2,1 milliards à la charge des communes.

En dehors de leurs ressources propres, les communes reçoivent des dotations de péréquation selon les critères de péréquation pour un total de 14,5 milliards (RNW) dont 1,2 milliards en subventions spécifiques et le reste en dotation générale. En plus, les communes reçoivent encore 11,5 milliards de subventions diverses pour un total de 26 milliards de transfert comprenant les subventions d’investissement et les caisses spéciales.

Sur la question des caisses spéciales, M. Held répond que dans tous les pays, les gouvernements ne renoncent pas à influer sur le développement, par exemple, en matière de nouvelles technologies. Or, il s’agit d’activités qui ne peuvent pas être encouragées dans toutes les communes, mais elles doivent être concentrées dans les communes-centres. Les caisses répondent donc à des besoins spécifiques dans certaines villes.

Il rappelle que néanmoins la dotation générale est supérieure à la dotation spécifique (M. Antwerpes avait toutefois parlé de 8 milliards distribués par des caisses spéciales).

M. Zahn rappelle qu’il y a des plaintes déposées par les communes mais on fait peu usage de cette faculté et les communes perdent leurs procès la plupart des fois.

M. Held reconnaît que la hausse des charges locales des communes, qui est obligatoire, avec des recettes qui stagnent, ne laisse guère de marge de manœuvre pour le reste des tâches communales

Confronté à la carte sur l’endettement des communes, fournie par M. Antwerpes, il reconnaît, en principe, le problème mais fait remarquer que la loi en RNW prévoit que les communes doivent équilibrer leur budget et constate que cette loi n’est pas respectée. Dans les autres Länder, le devoir d’équilibre est moins strict. Il objecte toutefois que parler « d’entamer des réserves communales » n’est pas toujours approprié. Ainsi, par exemple, Cologne possède une centaine de sociétés commerciales dont certaines pendant les « vaches grasses » ont investi dans la participation des entreprises et quand leurs participations ont été vendues, le produit de la vente n’a pas été réinvesti dans le budget communal mais utilisé pour la création de fondations. Il admet toutefois que la tendance générale à l’endettement demeure.

Il nous fait part d’une plainte déposée par 150 communes auprès de la Cour constitutionnelle de RNW, ces communes estimant ne pas avoir assez de ressources et précisant que les critères de péréquation ne sont pas bons. Le jugement du Tribunal a été que le Land n’a pas transgressé la Constitution. En réponse à une question, il précise que la péréquation en RNW est réalisée selon les critères suivants :

- nombre d’habitants par commune ;
- rôle joué par les communes comme les communes-centres ;
- nombre de chômeurs ;
- durée du chômage.

Ce sont ces critères que les communes ont attaqués car elles voudraient qu’on s’en tienne au nombre d’habitants. Le Tribunal a estimé qu’il fallait tenir compte également du besoin des habitants.

Le rôle de la péréquation fédérale est de compenser l’écart entre les recettes et les besoins de dépenses jusqu’en 1995.

Les communes qui ont des bénéfices peuvent garder leurs bénéfices.

Il prend l’exemple de Düsseldorf qui, bien qu’ayant des recettes, n’est pas capable d’équilibrer son budget.

La question est de savoir qui mesure les problèmes des citoyens.

Il rappelle enfin que les communes jouissent d’une grande autonomie en RNW sauf lorsqu’elles sont en situation de déficit. Il souligne la difficulté de rendre justiciable le principe de subsidiarité. Finalement, le Landtag est composé d’élus qui décident en la matière. Mais la situation est difficile quand il y a globalement plus de tâches à remplir à recettes égales.

En répondant à une question sur la péréquation qui, en général, en Allemagne, est poussée très loin jusqu’à 99% entre les Länder, il admet qu’elle engendre un découragement à développer une politique autonome locale et régionale.

S’agissant de péréquation communale en RNW, le taux de péréquation est de 95, on veut le ramener à 90.

Il admet qu’il y a un cercle vicieux dans la situation où le chômage augmente les charges sociales qui obligent les communes à baisser les investissements, ce qui finit par augmenter le chômage, et ainsi de suite. Encore faudrait-il que les communes aient une politique sérieuse d’investissements et ne commettent pas de graves erreurs dans ce domaine.

A la fin, il fournit l’évolution des ressources financières des communes du Kreis de Steinfurt et nous fournira par la suite l’éclatement de ses ressources entre impôts et dotations.

Il suggère à la délégation de faire un tour du côté de la Basse Saxe où la situation de l’autonomie locale est très défavorable.

Rapport de la mission à Munich, 18-19 janvier 1999

1. Rencontre avec le directeur de la Städtekammerei (directeur du service financier de la ville de Munich), M. Michael Jobst et M. Ziegler (représentant de l'administration du Kreis de Munich)

La discussion s'engage d'abord sur l'administration de la ville, notamment du Kreis qui, à Munich, est jointe à celle de la ville. Une description nous est donnée des compétences propres et déléguées, l'ensemble de ces activités étant placé sous le contrôle du maire de Munich et du budget de la ville.

Tout d'abord, comme lors de la visite précédente, nos interlocuteurs confirment les problèmes à propos de ce qui est appelé le principe de connexité qui, d'après les estimations effectuées par la ville de Munich, se pose dans les termes suivants: seulement 40% du coût effectif de la mise en œuvre des tâches déléguées par l'Etat à la Ville sont couverts par les subventions versées par celui-ci. Ceci a fait qu'une plainte a été déposée par la ville de Munich à la Cour constitutionnelle de Bavière, recours, qui, toutefois, n'a pas été accueilli pour les mêmes arguments utilisés par la Cour constitutionnelle de RNW, à savoir, l'utilisation de critères de péréquation.

M. Ziegler donne quelques exemples de tâches déléguées portant par exemple sur le paiement du personnel des écoles primaires que les communes voudraient pouvoir couvrir par des subventions à hauteur de 80%. Or, il se plaint que les communes ne sont pas consultées, comme c'est le cas en Autriche, sur la répartition de ces subventions.

La police communale a été étatisée mais il est question de constituer une police de contrôle de la circulation urbaine sans que l'on sache qui paierait les coûts.

A Munich comme ailleurs, la raison principale des difficultés vient de l'augmentation des dépenses sociales obligatoires de 390 millions de DM en 1981 à 669 millions en 1991, alors que les recettes sont restées stables. Toutefois, fin 1998 on a observé une certaine amélioration que l'on espère voir se prolonger dans les années à venir. D'autres problèmes financiers se posent, à savoir la suppression des impôts "bagatelles" supprimés suite à une décision du parlement bavarois. Parmi ces impôts, il y en avait d'assez importants, comme l'impôt sur les résidences secondaires.

Par contre, à Munich on estime que les changements intervenus sur l'impôt professionnel n'ont pas provoqué de pertes pour la ville.

Le problème se situe dans les contributions de solidarité pour l'unité allemande. Ainsi, rien que sur l'impôt professionnel, Munich paie 300 millions de DM aux 5 Länder de l'Est. De même, sur la péréquation qui est pratiquée dans la distribution de la part d'impôt sur le revenu que reçoivent les communes, une péréquation est pratiquée pour les mêmes raisons.

Tout ceci fait que l'endettement de la ville de Munich est passé de 2,7 milliards en 1993 à 4,6 milliards en 1996. A partir de 1998, la ville a pratiqué une politique de réduction du personnel afin de diminuer le budget de fonctionnement et la dette.

A Munich, comme pour les communes de NRW, les investissements communaux stagnent. Les villes ont proposé que les montant actuellement distribués par des caisses spéciales des ministères soient remplacés par une dotation globale d'investissement à la disposition des communes. Cela aurait pour résultat de diminuer la bureaucratie et de renforcer l'autonomie locale.

2. Rencontre avec les représentants de l'Association des communes de Bavière

La délégation est reçue par M. Dietl, Directeur, et M. Keller, chargé des finances. Nos hôtes font tout d'abord une petite description des recettes propres des communes bavaroises. Il apparaît ainsi qu'en Bavière, les redevances, notamment sous forme de contribution des usagers ou des riverains, couvrent en général 90% des coûts de certains investissements, comme par exemple les routes et les réseaux.

Par ailleurs, les impôts locaux comportent au total 55% des recettes dont 12,8% provenant de l'impôt foncier, notamment sur les terrains à bâtir et la taxe professionnelle qui constitue 41,7 % des ressources et qui ne porte plus que sur les bénéfices des entreprises (problème : les politiques de délocalisation des entreprises). Manque, par ailleurs, les petits impôts: à part la taxe sur les chiens, tous les autres ont été supprimés (sur les résidences secondaires, sur les boissons, les spectacles, la chasse, etc.). Par ailleurs, les communes reçoivent des impôts partagés, 15% d'impôts sur le revenu et 2,2% du produit de la TVA.

Nos interlocuteurs insistent sur la perte d’autonomie que représente pour les communes l'abolition des petits impôts.

S'agissant des subventions, les communes reçoivent 11,54% du produit fédéral des impôts, distribués selon les capacités fiscales des communes. Cette subvention concerne 1800 communes, les autres communes en étant exclues en raison du bon état de leurs finances. Par ailleurs, des subventions proviennent également des taxes de circulation de l'ordre de 1,7 milliard pour l'ensemble des communes bavaroises. En définitive, les communes bavaroises disposent de 13 milliards de recettes propres, dont 6 milliards de l'impôt partagé sur le revenu par rapport à 10 milliards de dotation générale de péréquation.

Le problème du principe de connexité a également été soulevé. D'après les estimations de l'association, les subventions de l'Etat ne couvriraient que 50% des coûts effectifs des tâches déléguées. Ce problème se pose donc en Bavière comme apparemment dans l'ensemble des anciens Länder. Nos interlocuteurs nous parlent également de la plainte introduite à cet effet et de ce que les gouvernements bavarois et la Cour constitutionnelle estiment que les communes peuvent y faire face vu leur situation globale plutôt favorable. En fait, cela se traduit par des économies pratiquées par les communes sur les dépenses non obligatoires qui permettent au Land de Bavière de réduire son déficit sur une période de dix ans: en effet, en Bavière, les communes se sont arrangées pour rester en équilibre et ont réduit leur marge de manœuvre au strict minimum. L'Association des communes voudrait ancrer le principe de connexité dans la Constitution bavaroise. Les partis majoritaires s’y étaient toutefois jusque-là opposés, même si le SPD a récemment exprimé un avis positif pour cet ancrage.

Nos interlocuteurs insistent beaucoup sur le problème posé aux communes par la suppression des impôts bagatelles. Une discussion s'engage sur les dispositions de la Constitution fédérale de l'article 106, alinéa 6 qui prévoit que les impôts sur la consommation et sur le train de vie doivent revenir aux communes selon la législation des Länder. Or, la loi bavaroise a résolu le problème constitutionnel en indiquant que ces impôts sont possibles a l’exception de ceux figurant sur une liste de taxes interdites qui, de fait, énumère pratiquement tous les impôts qui existent dans les Länder, sauf la taxe sur les chiens32. C'est donc une manière d'éviter une contradiction avec la Constitution allemande, qui, toutefois, n'est pas respectée, dans son esprit, à notre avis.

Les communes bavaroises participent à raison de 37% à la contribution bavaroise pour l'unité allemande, ce qui correspond pour les communes à 8% des impôts et des dotations et pour les Kreise à 45% de ces impôts et dotations.

Il nous est précisé, par ailleurs, que le niveau d'autonomie appelé "Bezirke" qui est particulier à la Bavière, est financé par les Kreise et les villes hors Kreise à concurrence de 22%.

Si l'on considère toutes les contributions que les communes paient pour l'unité allemande, pour les Kreise et pour les Bezirke, et pour des syndicats intercommunaux, on calcule que des ressources et des transferts fiscaux versés aux communes, seulement 47% restent à la disposition de celles-ci.

3. Rencontre avec les représentants du ministère bavarois de l'Intérieur, M. Puhr, Conseiller Ministériel, et Dr Hasl, Conseiller gouvernemental, collaborateur dans le domaine des finances locales

Le système de l'autonomie locale bavaroise souffre d'une certaine tendance centralisatrice due, selon nos interlocuteurs, à la tradition napoléonienne de la Bavière. En Bavière, on dénombre 2031 communes, 25 villes hors Kreise, et 71 Lankreise ainsi que 7 Bezirke. L'administration de l'Etat est déconcentrée aux niveaux du Landkreis et des villes Kreise. Le Landrat ou le maire des villes Kreise cumule par conséquent deux fonctions: celle d'élu local et celle de représentant de l'Etat. Toutefois, dans les villes hors Kreise, il n'y a pas de fonctionnaires de l'Etat qui, par contre, sont présents dans les Landkreise.

L'Etat est également présent au niveau du Bezirk qui dispose d'un président de Bezirk élu et d'un "Bezirksregierung" qui représente l'Etat.

En ce qui concerne la répartition des tâches, les communes jouissent d'une compétence générale pour toutes les affaires locales, pour autant que la loi ne les attribue pas à d'autres niveaux.

Les Landkreise, par contre, disposent de tâches spécifiques comme les hôpitaux, les routes, l'action sociale et ne remplissent pas de rôle supracommunal comme en NRW. Les Bezirke disposent de compétences spécifiques, notamment dans le domaine social (90% des dépenses sociales) ainsi que dans les domaines de l'aménagement des rivières, la pêche, la chasse, les monuments et sites et la culture régionale. Les compétences des Bezirke bavarois sont assumées, par exemple, en NRW, par les Landschaftsverbände.

Les discussions portent aussi sur la question de savoir s'il y a lieu de remplacer les Bezirke et les Landkreise par une nouvelle instance intermédiaire entre les deux mais aucun projet sérieux de réforme n'est en vue. Le contrôle, en principe, sur la légalité est exercé sur les communes par les Kreise, sur les Kreise et les grandes villes par les Regierungsbezirke et sur les Regierungsbezirke par le Land.

Le contrôle financier est exécuté d'abord par un contrôle institué par les parlements communaux mais ensuite et surtout par l'Association des contrôleurs municipaux de Bavière.

A la question posée par notre délégation de savoir pourquoi les budgets communaux bavarois paraissent plus réduits par rapport aux budgets communaux d'autres Länder, nos interlocuteurs répondent que cette différence n'est pas très importante en moyenne et tient peut-être à ce que les communes bavaroises sont plus petites et à ce qu'elles reçoivent moins de compétences déléguées par le Land. De plus, on indique que les communes bavaroises sont plus économes des deniers publics et que les contrôles exercés par la Cour des comptes sont très méticuleux.

Quant à la question sur les raisons qui ont amené le Parlement à supprimer les impôts bagatelles, les interlocuteurs expliquent que cela visait la diminution de la bureaucratie nécessaire à la récolte d'impôts dont le produit était finalement limité. D'autres Länder ont également supprimé ces impôts au moment où les principaux impôts donnaient un produit très intéressant, mais ils les ont réintroduits au moment de la crise. Les représentants des associations font observer qu'avec ces mesures, l'on a encore réduit l'autonomie des communes dans la fixation des taux d'impôts communaux.

Une discussion s'engage sur le problème du principe de connexité et la plainte des communes. Les représentants du ministère se disent être les interprètes des intérêts municipaux au sein du gouvernement mais la loi bavaroise est vague puisqu'elle indique uniquement que les communes doivent disposer des ressources nécessaires pour les tâches déléguées. Or, il est très difficile d'interpréter le mot "nécessaire" et les autorités du Land contestent les chiffres avancés par l'Association des communes et par la ville de Munich. Le Land estime que le personnel qu'il fournit aux Landkreise est également une sorte de compensation. S'agissant de la ville de Munich, il estime que celle-ci exécute de manière trop large les tâches déléguées. Peut-être qu'une variation objective des coûts réels des tâches déléguées serait possible à travers l'Association des contrôleurs municipaux.

4. Rencontre avec le ministère des Finances du Land

Nos interlocuteurs sont M. Waldmann et Priller.

Nos interlocuteurs nous présentent une publication qui s'appelle "commune forte, Bavière forte" et dont l'objectif est de démontrer que les communes bavaroises ont une politique meilleure et plus économique que les communes des autres Länder. Les dépenses des communes sont de l'ordre de 60 milliards de DM alors que les subventions du Land sont de l'ordre de 13,479 milliards dont 2,7 milliards de subventions spécifiques et 10,7 milliards de dotation globale. Il admet que la Bavière a supprimé les petits impôts et notamment l'impôt sur les résidences secondaires, les raisons avancées étant les mêmes que celles données par le ministère de l'Intérieur: impôts trop onéreux à récolter. Ils admettent, toutefois, que cela a porté atteinte à l'autonomie financière des communes.

Nos interlocuteurs évoquent l'excessive péréquation pratiquée à leurs yeux suite aux charges de l'unité allemande et le recours introduit par les Länder de l'Allemagne du Sud (les grands payeurs) auprès de la Cour constitutionnelle fédérale de Karlruhe.

Quant au principe de connexité, ils contestent les chiffres donnés par l'Association des communes et estiment que s'il l'on tient compte de la mise à disposition du personnel aux Landkreise, les subventions versées par l'Etat couvrent en fait les coûts effectifs des tâches déléguées. Ils font allusion au système en vigueur dans le Bade Wurtemberg où le principe de connexité a été inscrit dans la Constitution. Cela revient très cher au Land et, de plus, cela favorise les villes riches par rapport aux communes pauvres. Ils indiquent aussi que le calcul des coûts effectifs est particulièrement difficile. Ainsi, par exemple, quand on délègue des services de santé au Landkreis, il arrive au Land de fournir aux communes les bâtiments nécessaires. Comment évaluer cette prestation?

Il est également question des subventions versées aux communes frontalières avec des pays d'Europe de l'Est qui ont été réduites: alors qu'elles se montaient à 10% avant la chute du mur de Berlin, elles sont descendues à 6% en 1998, à 4% en 1999 et devront disparaître en l'an 2001. D'autres aides sont versées aux communes dont l'indice, calculé sur le nombre de chômeurs et le potentiel financier de la commune, les désigne comme communes pauvres.

La discussion porte également sur les caisses spéciales des ministères qui auraient été estimées au nombre de 240. Les fonctionnaires des ministères sont contre la proposition de l'Association des communes de les remplacer par une dotation générale d'investissement car les villes en bénéficieraient mais pas les petites communes.

Quant aux critères pratiqués pour la péréquation financière, ils nous expliquent que des critères objectifs existent, certains fixés par la loi fédérale, d'autres propres à la Bavière. En général, le taux de compensation se situe à 55% pour les communes et à 50% pour le Kreis. En fait, plus une commune a d'habitants, plus l'indice de péréquation est élevé: la fourchette va de 600 DM par habitant pour les plus petites communes à 1600 DM par habitant pour les plus grandes villes.

Ils confirment l'existence de discussions sur le maintien des Bezirke qui sont financés aussi bien par les Kreise et les villes que par l'Etat. C'est un problème qui devrait un jour être résolu.

Rapport de la mission à Karlsruhe, 02 mars 1999

Délégation du CPLRE : M. Frécon, Rapporteur, M. Hedtkamp, expert
M. Locatelli, Chef du Secrétariat et Mlle Affholder, Secrétariat

L'objet de la visite au Bade Würtemberg33 était, en dehors de connaître la situation dans un autre Land, de vérifier le fonctionnement du principe inséré dans la Constitution de ce Land reconnaissant le droit des pouvoirs locaux à recevoir les ressources financières proportionnées aux tâches déléguées par le Land (Principe de connexité).

1. Rencontre à la ville de Karlsruhe avec Mme Mergen, responsable du service des Finances, M. Merx, responsable du service juridique et M. Klotz, Secrétaire général de l'Union des villes du Land de B.W.

La ville de Karlsruhe compte 276 000 habitants et est indépendante des Landkreise. Il s'agit d'une ville assez florissante et Mme Mergen nous dit d'emblée que le budget est en équilibre, l'amortissement de la dette satisfaisant et la marge de manœuvre pour les tâches facultatives correcte. Toutefois, des difficultés viennent de la diminution des produits des impôts et de la diminution des transferts particulièrement à cause du "Aufschwung Ost" (développement de l'Allemagne de l'Est).

M. Klotz nous parle de la situation générale des villes dans le Land et de l'application du principe de connexité. Si des tâches étatiques sont déléguées par le Land aux communes, l'article 71 de la Constitution du Land doit s'appliquer. Toutefois, comment définir avec précision les tâches étatiques et les nouvelles tâches ? L'article 104 de la Constitution fédérale oblige les Länder à prendre en compte l'intérêt des communes dans les transferts qu'ils reçoivent de la Fédération, mais le lien direct commune/fédération n'est pas établit par la Constitution fédérale, il n'y a pas possibilité de recours34. L'union des villes se bat donc pour l'inscription de ce principe dans la Constitution fédérale. Le Congrès des juristes allemands s'est d'ailleurs prononcé pour l'inscription de ce principe en 1996. En dehors du principe de connexité qui ne porte que sur les tâches déléguées, il y a des discussions difficiles entre le Land et les communes sur l'application du système de péréquation intercommunale à l'intérieur du Land.

Sur la base de l'article 71 de la Constitution du Land de B.W., on peut présenter un recours à la Cour Constitutionnelle et des recours ont été présentés (deux cas de recours sont portés à notre connaissance). Toutefois, des difficultés d'interprétation se posent au sujet des notions de "tâches étatiques", "nouvelles tâches" et "seuil significatif".

Mme Mergen indique que le B. W. est un grand payeur pour l'unité allemande et que la part des communes est conséquente : 400 000 000 DM. Elle donne aussi un bon exemple d'application du principe de connexité au B.W. : il s'agissait d'une loi récente par laquelle le Land déléguait aux communes de nouvelles tâches dans le domaine vétérinaire. Le coût supplémentaire a été estimé en commun et le transfert des ressources a eu lieu.

Par contre, le mauvais exemple est l'application de la loi fédérale sur les réfugiés et demandeurs d'asile et sur les crèches qui ont occasionné de fortes augmentations pour les pouvoirs locaux et n'ont pas donné lieu à un transfert de ressources équivalent. L'union des Villes a demandé que les pouvoirs locaux soient écoutés lors de l'établissement des lois fédérales: ceci est prévu dans le règlement intérieur des deux Chambres fédérales, mais cette consultation ne fonctionne pas. Par contre, elle fonctionne mieux au Landtag du B.W.

On nous signale l'existence au B.W. de deux "Landeswohlfartsverbände" chargés de questions sociales qui sont financés par les Landkreise.

S'agissant de la marge de manœuvre de la ville de Karlsruhe pour les tâches facultatives, elle était de 130 000 000 de DM avant les nouvelles lois sociales fédérales (sur les crèches et demandeurs d'asile) et elle est maintenant réduite à 65 000 000 de DM. Du produit de la taxe professionnelle (principal impôt local propre) ne reste à la commune membre d'un Kreis que 25%. Ceci tient au fait que le produit de l'impôt s'est réduit à cause des diminutions d'impôt accordées aux entreprises qui ont investi dans les Länder de l'Est.

La part des petits impôts locaux (impôts bagatelles) est semble-t-il faible. Ainsi à Karlsruhe sur les 580 000 000 DM de ressources propres, seulement 2.4 millions proviennent de l'impôt sur les spectacles et 1.3 millions de l'impôt sur les chiens, alors que l'essentiel vient de l'impôt sur la taxe professionnelle : 300 millions, la part de l'impôt sur le revenu : 180 millions, l'impôt foncier : 67 millions. On a discuté de l'opportunité d'introduire un impôt sur l'emballage, mais finalement on y a renoncé.

Il est également apparu qu'au B.W., il n'y a pas beaucoup de "caisses spécifiques", de subventions spécifiques: la règle générale est la dotation globale.

Quant à l'endettement des villes, d'après M. Klotz, sur les 186 villes que compte le B.W., seulement 5/6 sont en déficit et se financent sur des crédits de caisse.

Au B.W. n'existe pas, comme en Bavière, un représentant de l'Etat dans les villes libres du Kreis. Par contre, dans les Landkreise, un fonctionnaire d'Etat est nommé en tant qu'adjoint du Landrat qui lui est élu.

2. Rencontre avec la Présidente du "Regierungspräsidium" de Karlsruhe, Mme Hämmerle35

Il nous est confirmé que le principe de connexité fait l'objet de discussions difficiles, même à propos de décisions qui pourraient être prises en Europe à propos de la mise en œuvre du Traité de Maastricht.

Les communes ont trois types de compétences:

- compétences obligatoires déléguées,
- compétences à exécuter sous certaines conditions,
- compétences facultatives propres.

Un article de la revue de l'Union des Communes du B.W. demande une réforme financière équitable: selon cet article, le principe de connexité, bien que prévu dans la Constitution, n'est pas toujours appliqué.

Ainsi, par exemple, l'accueil des réfugiés revenait auparavant à l'Etat, à travers le "Regierungspresidium". Depuis avril 1998, cette tâche a été transférée aux villes et aux Lankreise. Il y a eu négociation et on s'est mis d'accord sur une somme de transfert et on s'est donné rendez-vous dans deux ans pour faire le point des coûts réels.

Cela prouve qu'il n'est pas facile de calculer la juste compensation et de faire la preuve qu'une compensation ne suffit pas.

La majorité des subventions aux pouvoirs locaux sont demandées sous forme de dotation générale.

Au B.W., il y a quelques 150 caisses spéciales qui toutefois concernent peu les communes. Au B.W. se pratique ainsi le système des contributions des citoyens et entreprises qui profitent d'investissements communaux.

On estime que 70% à 80% des tâches rendues obligatoires par les lois fédérales sont de la compétence des communes, mais l'article 28 de la Constitution fédérale ne crée pas de liens directs entre la Fédération et les pouvoirs locaux (cela se perd dans le système de péréquation entre Fédération, Länder et entre ceux-ci et les communes).

Le calcul des coûts nouveaux créés par des tâches nouvelles sont difficiles à calculer à cause de compensations comme la mise à disposition de personnel: il faut en plus prouver qu'il s'agit vraiment de nouvelles tâches.

Néanmoins au B.W. ce principe est justiciable en effet, des estimations variant entre 40% et 110% doivent pouvoir être rapprochées de la réalité.

Le Regierungspresidium assure la tutelle des villes libres et des Kreise, notamment des budgets. En cas de déficit, on établit un concept de rééquilibrage adapté à chaque cas d'espèce. Cela ne créé pas beaucoup de problèmes.

Il est précisé que l'adjoint du Landrat, est un fonctionnaire du Land qui est nommé en accord avec le Landrat pour une période de 5 ans.

Le système pour l'élection du "Landrat" est le suivant : il y a une Commission spéciale du Kreistag qui fait une première sélection des meilleurs candidats et la transmet au Ministère de l'Intérieur du Land. Celui-ci vérifie que les candidats répondent aux conditions légales et transmet ensuite les candidats reconnus comme légalement confirmés au Kreistag qui procède à l'élection.

Les "Landeswohlfahrtverbände" comportent trois offices: l'office de la jeunesse, l'office social et l'office de l'assistance sociale.

3. Rencontre avec M. Trumpp, Secrétaire Général de l'Association des Landkreise du B.W.

Il est précisé qu'au B.W., les Landkreise ne disposent que d'un seul impôt propre: l'impôt sur la chasse (très faible).

Les ressources des Landkreise sont:

- 9% Subventions du Land

- 80% Prélèvement sur le budget des communes, fixé par l'Assemblée du Kreis

- 10-11% Impôt partagé: taxe sur la plus-value financière (2% au Landkreis et 1% au Land)

Les charges sociales se sont développées énormément et constituaient:

- en 1978 37% du budget - en 1983 67% du budget - en 1998 84% du budget

Il ne reste que très peu pour les tâches facultatives des Landkreise.

Cette hausse des coûts sociaux s'explique par l'augmentation

- des personnes âgées; - des familles monoparentales; - des demandeurs d'asile; - des dépenses pour handicapés (plus de moyens techniques)

Le Land doit exécuter ces lois sociales de la Fédération et du Land avec l'absence du principe de connexité entre Fédération et communes.

Au plan du B.W. par contre, les Landkreise peuvent présenter des recours: exemple pour les coûts créés par une loi sur les biotopes. Le Land a cédé avant que le jugement soit prononcé, ayant vu qu'il allait perdre (sur la base de l'article 71, alinéa 3 de la Constitution du B.W.).

Par contre, on rapporte une plainte introduite par le Landkreis de Constance qui n'a pas été suivie d'effet, la Cour constitutionnelle estimant que le Landkreis pourrait augmenter le prélèvement sur les communes (il s'agissait des charges sociales créées par les lois fédérales).

L'augmentation décidée par le Landkreis de Constance du prélèvement sur les communes a mis celles-ci en difficulté au point que celles-ci se sont refusées à voter leur contribution, de sorte que le Regierungspresident a dû intervenir et nommer un commissaire du Land qui a exigé le vote des contributions.

Actuellement sont en cours au B.W. deux autres recours de Landkreise.

Il y a une autre source de conflits entre communes et Landkreise: les communes disposent d'un pouvoir résiduel et les Landkreise ne peuvent intervenir que si les communes n'ont pas la capacité d'assurer elles-mêmes les tâches. Dans certains Länder, il y a des plaintes des communes contre les Landkreise à ce sujet. Cela n'est pas le cas au B.W. car la loi l'autorise à assurer les tâches que les communes n'assument pas.

En fait, ces problèmes au B.W. sont discutés au sein du Conseil des Landkreise, qui est composé de plusieurs maires. Le contrôle du Landkreis par les communes se fait donc à l'intérieur du Lankreistag. C'est dans les länder où les maires ne peuvent pas en être membres, que les conflits surgissent.

Aujourd'hui, le taux de prélèvement du Landkreis sur les communes est de 30.8% (du budget de la commune), alors qu'il était de 22.5% il y a 10 ans. La raison en est la hausse des dépenses sociales.

Au niveau fédéral, il faudrait d'après M. Trumpp, introduire le principe de connexité. De plus, certaines lois fédérales laissent une certaine marge formelle, mais pas réelle, aux communes pour la mise en oeuvre dans le but d'échapper au principe de connexité.

Les Landkreise au B.W. sont au nombre de 35 (contre 71 en Bavière) auxquels s'ajoutent 9 villes libres de Landkreise. Les Regierungsbezirke au B.W. sont au nombre de 4 (Karlsruhe, Fribourg, Mannheim, Stuttgart).

Quant à la consultation au Bade Würtemberg, elle fonctionne avec les Ministères du Land, grâce à une attitude favorable de M. Teufel, le Chef du Gouvernement. Malgré un bon climat, il y a des plaintes: le problème est que la situation financière du Land est aussi très mauvaise et quand il perd ses recours, il doit s'endetter davantage pour les exécuter.

S'agissant enfin des petits impôts locaux, il y a au B.W. l'impôt sur les résidences secondaires, important dans les zones touristiques, et celui sur les spectacles, peu significatif.

Les communes peuvent créer des impôts locaux, mais les Landkreise ne disposent que de l'impôt sur la chasse.

 

1 L’article 9 paragraphe 3 stipule qu’”Une partie au moins des ressources financières des collectivités locales doit provenir de redevances et d'impôts locaux dont elles ont le pouvoir de fixer le taux, dans les limites de la loi.”

2 Les onze Länder composant la République Fédérale d’Allemagne comptaient jusqu’en 1989 8513 communes pour environ 60 millions d’habitants.

3 Etude statistique au 31.12.1994. Source : Statistisches Jahrbuch für die Bundesrepublik Deutschland, 1996.

4 Il y a quelques exceptions, comme la ville de Paderborn, qui compte environ 150.000 habitants et fait partie d’un Kreis.

5 Ci-dessous RNW

6 La Rhénanie -Nord-Westphalie, qui est le plus gros Land d’Allemagne avec plus de 17 millions d’habitants, compte 396 communes et 31 Kreise. La population moyenne des communes est de 42.000 habitants.

7 En Rhénanie-Palatinat, les Verbandsgemeinden s’occupent aussi des tâches déléguées de l’Etat. Les membres de cette institution sont élus.

8 Il y a aussi des coopérations communales au-delà de la frontière, par exemple entre des villes du Bade-Wurtemberg et celles d’Alsace. Cela concerne, par exemple, le traitement des eaux usées.

9 Il s'agit d'une confirmation que les candidats disposent des capacités requises par la loi.

10 Dans certains Länder, le président est un représentant politique élu, dans d’autres, il s’agit d’un fonctionnaire.

11 La dette communale est de 2000 DEM par tête.

12 En Bade-Wurtemberg, c’était d'abord le gouvernement du Land qui répartissait les réfugiés et maintenant c’est le Regierungspräsident qui se charge de cette fonction. Les collectivités locales recevaient en général une indemnité calculée par tête de pipe.

13 On recense environ 160.000 personnes pour lesquelles les indemnités de chômages sont complétées ou remplacées par des mécanismes d’aide sociale.

14 En Bavière, les autorités locales contribuent à hauteur de 37 % aux versements du Land au fonds de solidarité sous la forme d’une contribution (Umlage) de 7,99 % du pouvoir fiscal (Umlagekraft) c’est-à-dire des revenus d’impôts et dotations de la commune.

15 Ce principe donne lieu à diverses interprétations. Dans le cadre de la jurisprudence constitutionnelle, il semble être appliqué uniquement pour conforter l’obligation d’une administration à financer les dépenses liées à une tâche dont l’exécution lui incombe.

16 À Erfurt, le taux de l’impôt foncier A était en 1998 de 200%; pour l’impôt foncier B de 35o % et pour la taxe professionnelle de 400 %.

17 Sur les 550 Millions de DEM des revenus d’impôts à Karlsruhe, la taxe sur les chiens représentait 1,3 et la taxe sur les spectacles 2,4.

18 Dans certains Länder, il y a eu, par le passé, des restrictions sous forme de plafonnement, de même qu’une corrélation légale entre les taux d’imposition appliqués à la taxe professionnelle et à l’impôt foncier afin d’éviter des abus.

19 La Bavière reçoit ainsi 12 % pour ses communes.

20 Le contrôle s’applique aux collectivités locales de son Kreis et porte, par exemple en RNW, sur l’urbanisme, la collecte des ordures ménagères, le traitement des eaux usées, la construction des routes. Dans d’autres Länder, les écoles sont également soumises à ce contrôle.

21 Font exception à cette règle certaines subventions destinées aux garnisons.

22 Dans le Land de Rhénanie du Nord-Westphalie, les subventions globales se montent à 14,5 milliards de DEM et les subventions spécifiques à 1,2 milliard.

23 Ces fonds sont, dans le Bade-Wurtemberg, énumérés dans une annexe au budget (annexe A plan 13).

24 Cette règle constitutionnelle n’est pas aussi flexible qu’elle peut le paraître, car les collectivités locales ont la possibilité d’en appeler aux tribunaux constitutionnels si les Länder tentent de réduire de manière importante la part des recettes fiscales qui leur revient.

25 La Bavière donne aux collectivités locales 2/3 du rendement de l’impôt sur la circulation qui est distribué grosso modo selon les charges résultant de la circulation et 8/21 d'impôt sur les ventes d’immeubles qui est de 3,5 % selon le rendement local.

26 Dans le Bade-Wurtemberg, la proportion est de 77,7% / 22,23 %.

27 De 19 Mrd. de DEM prévus pour les investissement, 5,8 Mrd. vont aux communes.

28 Il peut, par exemple, arriver qu’une entreprise dont le siège est situé dans une commune donnée possède des sites de production dans plusieurs communes. Le même problème se pose si les salariés ne résident pas dans la commune où ils travaillent. Dans ces cas-là, le système de péréquation prévoit une redistribution des recettes fiscales entre les communes concernées.

29 La somme des contributions de péréquation entre dans la masse prévue pour les collectivités locales. La masse de ces moyens financiers est alimentée en plus par 23 % des recettes du Land venant de l’impôt sur le revenu, de l’impôt sur les profits des entreprises (Körperschaftsteuer), une partie de la TVA et de cette partie de la taxe professionnelle qui est à verser par les communes comme contribution au Land. Cette masse fiscale est répartie dans une proportion de 77,7 % à 22,23 % entre subventions globales et subventions à des investissements.

30 Voir la Stuttgarter Zeitung du 12 mai 1999

31 RNW: Rhénanie du Nord-Westphalie (le nom du Land apparaîtra toujours sous cette abréviation dans le rapport.)

32 Selon nos interlocuteurs, le législateur avait invoqué le risque d’abus et d’excès que ces impôts pourraient engendrer dans les communes.

33 On utilisera ensuite l'abréviation B.W.

34 Le Professeur Steinberger de l'Université d'Heidelberg et membre de la Commission de Venise estime que les pouvoirs locaux pourraient saisir la Cour Constitutionnelle Fédérale pour la non application de l'Article 104

35 Participent également à la rencontre: MM. Scheurer, Ganninger et Pfetzer