CPL (10) 6 – Partie II - Partenariats locaux pour la prévention et la lutte contre la violence à l’école - Conclusions de la Conférence de Strasbourg (2-4 décembre 2002) (11/04/03)

Rapporteur : Brith FÄLDT (Suède)

EXPOSE DES MOTIFS

I. INTRODUCTION

1. Contexte de la Conférence

La Commission de la culture et de l’éducation du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe (CPLRE) s'était proposée d'organiser en 2002 une Conférence sur ce thème afin d'échanger les expériences sur le rôle des pouvoirs locaux pour prévenir et lutter contre la violence à l'école en partenariat avec les autres instances concernées.

Par ailleurs, le Comité Directeur de l'Education du Conseil de l'Europe avait inscrit à son programme 2002 une réunion sur ce même thème faisant suite au symposium qui a eu lieu à Bruxelles en novembre 1998 sur "Violences à l'école : sensibilisation, prévention, répression". Il est par ailleurs envisagé d'organiser également une conférence ad hoc des Ministres de l'Education sur cette question.

Pour sa part, la Direction de la Jeunesse a d'ores et déjà organisé plusieurs séminaires sur la lutte contre la violence dans le cadre du programme sur l’éducation aux Droits de l’Homme, en particulier en liaison avec les organisations non gouvernementales de jeunesse au niveau local.

C'est pourquoi ces trois instances ont convenu de mettre leurs moyens en commun et d'organiser une conférence conjointe au cours de l'année 2002.

Outre la capitalisation des résultats des travaux d'ores et déjà mis en œuvre par ces trois secteurs, cette coopération offrira un cadre apte à élargir et décloisonner le dialogue entre les différents types d'acteurs et d'interlocuteurs qui devraient être étroitement associés afin de prévenir au niveau local les différents types de violence à l'école.

Enfin, le Secrétaire général du Conseil de l'Europe a décidé de lancer à partir de janvier 2002 un programme intégré de trois ans sur les réponses à la violence quotidienne dans une société démocratique. La présente conférence rentre dans le cadre de ce projet intégré. Ainsi, elle associera, dans l’esprit du projet intégré, plusieurs directions générales et différentes instances du Conseil de l’Europe, afin d’offrir un cadre élargi qui permettra d'aborder la question de la violence à l'école de façon globale et donnera à ces conclusions une résonance et une visibilité accrues (Programme en annexe).

2. Réflexions liminaires

La violence à l'école est un phénomène complexe impliquant une multitude de facteurs de natures différentes et dont il est parfois difficile de séparer les causes et les effets.

Néanmoins, l'on constate que les écoles dans l'ensemble de l'Europe semblent confrontées avec un problème croissant de violence dans une institution dont on a souvent considéré qu'elle devait au contraire être protégée des influences et des tensions du monde extérieur. La violence à l'école a des effets non seulement sur celle-ci mais aussi sur l'ensemble de la société en général.

Il existe un véritable problème pour comparer les situations entre écoles et entre pays du fait de perceptions différentes entre les interlocuteurs et de manque de cohérence entre les approches visant à quantifier les situations. Il existe tout un continuum entre le climat d’insécurité tel qu’il est perçu par les élèves ou les enseignants, au passage à l’agression proprement dit. Les différents niveaux de ce continuum sont regroupés sous le terme général de violence ce qui bien entendu biaise les comparaisons entre situations. S’ajoutent à cela des différences culturelles qui compliquent encore la comparaison des situations.

Il en découle qu'une définition formelle de la violence, est a priori, un problème insoluble à résoudre dans le cadre de cette conférence, mais elle pourrait néanmoins souligner la nécessité de définir et de mettre en place des indices d'évaluation permettant de prendre objectivement la mesure de l'impact des situations violentes dans le long terme en Europe dans son ensemble.

D’autre part, il semble important de souligner que l’approche du Conseil de l’Europe en matière de lutte contre la violence à l’école doit être abordée sous l’angle de la défense des droits de l’homme et de celui de la promotion des valeurs démocratiques. Outre la cohérence de cette approche avec les objectifs fondamentaux de l’Organisation, elle offre une démarche pragmatique. En effet, alors qu’il paraît illusoire de parvenir à un consensus pour une définition précise de la violence à l’école, il est plus vraisemblablement possible de définir un seuil commun d’action en se basant sur la défense des droits des victimes et les règles nécessaires au respect des valeurs démocratiques.

Il convient de retenir deux premiers messages importants : premièrement, l'école ne peut plus fonctionner comme une entité fermée à son environnement, et deuxièmement, la lutte et la prévention de la violence à l'école supposent nécessairement un engagement de la communauté dans son ensemble.

Le message essentiel de la conférence était donc de faire valoir le bien fondé des partenariats afin de s’attaquer durablement et efficacement au phénomène de violence à l’école en démontrant que de telles approches permettent notamment :

- une compréhension plus globale du problème et des mécanismes en jeu ;

- un décloisonnement entre les différentes institutions plus ou moins directement concernées afin de coordonner et optimiser leurs activités en la matière ;

- une définition des objectifs communs et des responsabilités respectives pour un bénéfice mutuel sur le long terme ;

- la garantie de processus démocratiques et du respect des droits de toutes les parties concernées dans la conception et la mise en oeuvre des programmes d’action ;

- une prise en compte du problème par toute la communauté du problème, ce qui constitue de plus un gage pour une lutte plus efficace contre la violence à l’école mais également en dehors de l’école.

3. Objectifs de la Conférence

La Conférence devrait répondre aux besoins urgents de la mise en œuvre de stratégies de prévention de la violence, notamment de:

- favoriser la prise de conscience de la situation objective dans l'ensemble des pays signataires de la Convention culturelle européenne et mettre en lumière la pertinence des partenariats très larges nécessaires pour répondre efficacement à ces situations;

- identifier les différents partenaires extérieurs à l'école, leur rôle et leur responsabilité et souligner l'importance de leur coopération avec l'école et en particulier quant à la mise en œuvre des stratégies;

- définir des stratégies et des méthodes de travail quant aux développements, à la mise en place et au suivi des politiques de prévention et des réponses à des situations d'ores et déjà difficiles.

Les stratégies que la Conférence devrait permettre de définir devraient en particulier concerner :

- le développement d’un climat scolaire favorisant le dialogue ouvert et la médiation sans exclure une répression raisonnée et adéquate ;

- l'insertion à la question de la prévention de la violence dans le curriculum (formel ou informel) ;

- l'insertion de la problématique de la violence dès l'école primaire (beaucoup de programmes prennent effet trop tard) ;

- la mise en place d'indicateurs (« early warning systems ») ;

- la façon de réagir à la violence si elle se concrétise ;

- dans les cas extrêmes concernant notamment des étudiants ayant par exemple été exclus à plusieurs reprises d'écoles, la prise en compte de leurs besoins spécifiques, en particulier pour leur resocialisation et leur réinsertion dans l’école et la société ;

- la participation des jeunes dans le développement des stratégies de prévention ;

- la formation des enseignants et des autres acteurs, notamment de l'éducation non-formelle, à la gestion des situations de conflits ;

- la formation du personnel éducatif dans son ensemble.

4. Résultats et suivi

Un des premiers résultats tangibles fut la publication d'un compendium d'études de cas proposées par les instances locales ou nationales (au total 26 de 16 pays), l'adoption d'une déclaration finale (voir annexe).

Dans un deuxième temps, l’élaboration de propositions d'actions futures du Conseil de l'Europe dans ce domaine, en particulier dans le cadre du Projet intégré sur la violence dans la vie quotidienne sera réalisé en coopération avec les autres partenaires co-organisateurs de la Conférence.

Les conclusions et les propositions issues de la Conférence et les travaux qui en découleront seront diffusés le plus largement possible et soumis selon des modalités à définir aux Conférences ministérielles concernées et aux autres instances politiques au sein du Conseil de l'Europe.

5. Participants

Au total 163 participants de 40 pays représentaient :

- des responsables au niveau des Ministères concernés;

- des preneurs de décisions et des représentants de la société civile au niveau local;

- des représentants d'organisations de jeunesse;

- des enseignants et des jeunes actifs dans ce domaine.

II - LA VIOLENCE A L’ECOLE : UN PROBLEME DE SOCIETE

Les événements tragiques d'Erfurt en Allemagne (26 avril 2002) sont, espérons le, un cas extrême unique mais néanmoins un exemple d’actes récents particulièrement sauvages de violence à l’école, nous plongeant dans la perplexité.

De fait, il semble que partout en Europe, des actes de violence à l'école sont de plus en plus souvent rapportés. Les données fournies par la police dans différents pays européens attestent de cette tendance. Il ne faut pas non plus négliger les événements mineurs ou moins graves mais répétés qui sont régulièrement observés dans les écoles.

Les actes considérés comme violents sont très divers et vont de la violence verbale à l'égard des élèves, des professeurs ou du personnel d'encadrement, au harcèlement, à l'agressivité physique contre des personnes, voire la destruction de matériel ou dégradation des bâtiments, ou encore au racket, à la vente ou l'usage de drogue. On remarque également des formes spécifiques de violence contre les jeunes filles et les femmes.

Hélas, de tels actes apparaissent désormais aussi chez les plus jeunes enfants et les études montrent que, plus les premiers actes de violence sont commis jeunes, plus le nombre d'actes de violence sera important pour ces individus en grandissant.

Les établissements scolaires ne sont plus considérés comme des lieux sûrs pour nos enfants. L'image même de l'école souffre terriblement. Pour réhabiliter l’école, il nous faut développer des mesures qui protègent les victimes mais aussi prévoient des réactions adéquates pour resocialiser et réinsérer dans l’école et la société les auteurs d’actes de violence.

Les écoles ont aussi besoin de systèmes d'alerte précoce et de méthodes appropriées pour prévenir la déviance sous toutes ses formes. Les comportements déviants comme l'absentéisme peuvent être un signe avant-coureur dont il faut tenir compte; si tel n'est pas le cas, on peut arriver à une exclusion totale et éventuellement à un problème pour la société dans son ensemble.

Les autorités locales peuvent-elles agir dans ce domaine ? Doivent-elles s'impliquer dans cette lutte contre la violence à l'école ?

A la Commission de la culture et de l'éducation du Congrès, nous avons estimé que oui les autorités locales doivent s'impliquer activement et s'engager dans des partenariats locaux avec tous les autres acteurs concernés.

Si nous n'agissons pas, c'est tout le système scolaire qui risque de perdre sa capacité à accomplir ses tâches éducatives ; de plus en plus d'enfants risquent de se trouver en échec scolaire car le climat de peur et de violence n'est pas du tout propice à l'écoute et à l'apprentissage. Le coût de cette violence scolaire pour la Société dans son ensemble risque donc d'être très élevé, car elle compromet l'avenir de nos enfants et des générations futures.

Face aux chiffres illustrant la montée de la violence dans les écoles, les études et programmes mis en place pour répondre à cette situation sont hélas encore trop peu nombreux ou insuffisants.

Manuel Eisner (Institut de criminologie de l'Université de Cambridge, Royaume-Uni) souligne qu'il n'existe :

- que peu d'études systématiques sur l'efficacité des programmes mis en place et peu d'évaluations globale des programmes,

- qu'une coopération limitée entre la recherche et les programmes mis en place,

une forte demande pour des programmes avec de bons rapports coûts/efficacité.

Selon M. Eisner, différents facteurs de risques sont à prendre en considération :

- la personnalité des individus,

- la famille,

- l'école,

- le style de vie et les relations avec les camarades,

- le milieu social et environnant.

Les autorités locales sont plus ou moins impliquées dans la vie des établissements scolaires selon les pays européens, mais elles sont en tout cas toutes concernées par les jeunes de leurs communes, les bâtiments et les transports scolaires.

Il n’y a pas de recette miracle à proposer et nous n’avons nullement l’intention de nous substituer aux nombreux professionnels qui font un travail de qualité et sont les plus directement concernés par les programmes de lutte et de prévention de la violence scolaire. Mais les autorités locales peuvent offrir une contribution importante pour que ces programmes soient plus globaux et efficaces.

La raison principale de cette nécessité d'implication des autorités locales est probablement le fait que les individus au comportement agressif ne le sont pas uniquement en milieu scolaire, mais également en dehors. Les pouvoirs locaux qui sont donc au plus haut point intéressés par les questions de sécurité urbaine doivent donc également inclure dans leur politique dans ce domaine la dimension scolaire.

Les autorités locales sont également responsables d'une bonne gestion de l'argent du contribuable, et toute dégradation du système d'éducation publique doit les interpeller.

Si nous croyons aux valeurs et mérites d'un système d'éducation publique, nous devons agir pour que ce système se maintienne à un haut niveau de qualité afin d'être en mesure d'assurer les tâches que nous lui confions.

Outre ses fonctions éducatives / transmissions des savoirs, les écoles jouent également un rôle primordial de socialisation et d'apprentissage de la vie en groupe. Les micro-sociétés que constituent les écoles sont donc des lieux d'apprentissage de comportements qui conditionneront la vie des jeunes devenus adultes. Si la violence et les conflits envahissent les écoles, on peut donc s'inquiéter de l'impact pour les sociétés futures.

La prévention et la lutte contre la violence à l'école représentent donc un enjeu majeur qui nécessite une réponse coordonnée de tous les acteurs de la société qui peuvent apporter une contribution afin de mettre en place des programmes plus globaux et plus efficaces.

III. DES PARTENARIATS LOCAUX POUR FAIRE FACE A CETTE VIOLENCE

Le message principal de cette Conférence a donc été de mettre en lumière la nécessité de partenariats locaux impliquant un éventail aussi large que possible d'acteurs, créant des synergies, des renforcements mutuels, des méthodes novatrices pour aborder ces questions. Il était particulièrement important d'arriver à ce consensus clair alors que les participants à la Conférence incluaient des élus locaux, des professeurs, directeurs d'écoles, inspecteurs d'éducation, travailleurs sociaux, chercheurs, représentants de la police, représentants de parents d'élèves, etc. Les seuls acteurs principaux non représentés étaient les jeunes eux-mêmes, mais dans la pratique, il est primordial de les associer très activement à toute politique et programme en la matière.

Il a été également largement souligné que de tels partenariats locaux ne doivent pas entraîner la création de structures lourdes, complexes ou trop administratives, mais devraient au contraire rester souples et basées sur le dialogue et la coopération mutuelle. Ces partenariats seront d'autant plus efficaces que se créera progressivement un climat de confiance propice à la coopération et à la solidarité entre acteurs. A partir du moment où une volonté commune de prise en charge du problème émerge, les différents partenaires savent pouvoir compter les uns sur les autres et sont prêts à agir chacun dans la limite de ses compétences et ses possibilités. C'est en fait toute la communauté locale qui accepte d'agir collectivement. Les autorités locales peuvent largement contribuer à cette prise de conscience collective en prenant elle-même une position en ce sens et en réunissant les différents acteurs concernés pour des débats publics à ce sujet, comme ceci est fait, par exemple, dans certaines villes comme cela nous a été présenté durant la Conférence. Les autorités locales sont dans une position clé pour favoriser ce dialogue et cette coopération entre les différents acteurs concernés.

Dans ma commune à Pitea (Suède), en pratiquant une telle approche, nous avons réussi à faire baisser de façon significative la violence à l'école et à créer un climat de solidarité et de responsabilité collective de l'ensemble des acteurs de la société impliqués. De nombreuses années de travail persévérant nous permettent de croire que pratiquement tous les citoyens de la commune se sentent désormais prêts à apporter leur contribution pour lutter contre cette violence et créer un climat local positif.

La déclaration finale de la Conférence est très complète et présente en détail les différents aspects des partenariats locaux.

Je voudrais ici en souligner uniquement quelques points particulièrement importants pour les autorités locales :

1. Reconnaissance du problème et mobilisation des partenaires

Les autorités locales, en reconnaissant l'existence du problème posé par la violence à l'école et en déclarant qu'elles souhaitent apporter leur soutien en mobilisant tous les services locaux dont elles ont la responsabilité, contribuent à créer un climat général de prise en charge globale et solidaire de cette question. C'est un préalable nécessaire pour la mise en place de partenariats locaux et de programmes efficaces de lutte et de prévention de cette violence à l'école.

Réponses adaptées

Il est important de réagir de façon adéquate à tout acte de violence, même les moins graves et de trouver les stratégies et les méthodes face à toues les formes de violence. Il est nécessaire d'adapter la sévérité de la réaction au degré de gravité des actes. De même plus les actes sont graves, plus ils doivent être portés à la connaissance des partenaires extérieurs en une série progressive. Les cas les moins graves peuvent être réglés entre les élèves et le professeur, à des degrés supérieurs la hiérarchie de l'établissement doit intervenir en coopération avec les parents et ensuite, éventuellement, les partenaires extérieurs à l'école, tels que travailleurs sociaux, voire la police.

3. Formation à la résolution de conflit

Il apparaît nécessaire, et cela se pratique apparemment encore trop peu, hélas, de former les maîtres aux techniques de résolution pacifique de différends ou conflits et au dialogue pour désamorcer les situations risquant de dégénérer. Cette formation doit faire partie de la formation initiale des maîtres, mais devrait faire régulièrement l'objet de formation continue.

A leur tour, les enseignants doivent avoir une démarche préventive et apprendre aux jeunes à réagir face à l'agressivité ou dans des situations de violence avérée. Les jeunes eux-mêmes devraient pouvoir agir entre leurs pairs. Une méthode qui est parfois plus efficace que l'intervention d'adultes. C'est ainsi que dans certaines écoles belges notamment, des jeunes sont formés à devenir des médiateurs.

Cette formation à la résolution pacifique de conflit, cette habileté à mieux dialoguer avec ses pairs sera un atout capital pour toute la vie adulte et pas seulement à l'école. Un temps et des moyens suffisants devraient donc y être consacrés, et ceci dès la prime enfance.

III. CONCLUSIONS

Cette Conférence a été une expérience très enrichissante pour tous les participants venus d'horizons professionnels et de pays très différents. Les cinq ateliers ont permis des échanges internes de réflexion et d'expériences, et le recueil d'étude de cas illustre une remarquable diversité d'approche et de partenariats locaux pour prévenir et lutter contre la violence à l'école.

Nous sommes encore sûrement aux balbutiements de la formulation de politiques et la mise en place de programmes qui doivent être efficaces sur le long terme. Maintenant, nous devons pourtant déjà nous mobiliser et je vous invite tous en tant qu'élus locaux à réfléchir dans vos communes aux initiatives que vous pourriez prendre dans l'esprit de la déclaration finale de cette Conférence. Vous êtes certainement en mesure de prendre des initiatives novatrices dans votre commune à ce sujet en vous inspirant de nos travaux. La première étape est certainement celle de connaître la priorité à accorder à cette question.

Nous devrions être capables d'améliorer progressivement nos approches en ce domaine en échangeant plus régulièrement nos expériences aux niveaux local, national, international. Cette démarche vaut pour la lutte contre la violence à l'école, mais également pour la lutte contre l'insécurité urbaine de façon plus générale.

L'enjeu de notre engagement c'est le présent et l'avenir de nos enfants, de nos jeunes. Nous leur devons notre soutien.

ANNEXE 1 - IP2 (2002) 27 def - Partenariats locaux pour la prévention et la lutte contre la violence à l'école (Strasbourg, 4 décembre 2002)

Conférence organisée par

Déclaration finale adoptée à l'issue de la Conférence

Cette conférence a été organisée dans le cadre du Projet intégré du Conseil de l'Europe "Réponses à la violence quotidienne dans une société démocratique"

1. La Conférence "Partenariats locaux pour la prévention et la lutte contre la violence à l'école" s'est tenue au siège du Conseil de l'Europe du 2 au 4 décembre 2002. Elle a été organisée par le Congrès des Pouvoirs Locaux et Régionaux de l'Europe, la Direction de l'Education et la Direction de la Jeunesse et du Sport. Elle s'inscrivait dans le cadre du Projet intégré (2002-2004) lancé à l'initiative du Secrétaire Général du Conseil de l'Europe sur le thème "Réponses à la violence quotidienne dans une société démocratique".

2. Environ 150 participants ont contribué au débat. Ils représentaient les Ministères de l'Education et de la Jeunesse au niveau national et local, des représentants des Pouvoirs locaux et régionaux, de mouvements de jeunesse, d'Organisations non gouvernementales issues de la société civile, différents services locaux d'autres Ministères nationaux (Ministères de l'Intérieur, de la Justice...).

3. Les discussions ont été basées sur une série de réflexions générales, une analyse de la situation dans différents pays ou régions de l'Europe et enfin une trentaine d'études de cas.

4. A l'issue des débats, les participants ont adopté la présente Déclaration finale portant sur la conclusion de leurs débats et un certain nombre de recommandations aux différents acteurs présents.

La violence à l'école

5. Les opinions publiques en général et tous les acteurs concernés ont été particulièrement sensibilisés au cours de ces dernières années au phénomène de la violence à l'école en particulier à l'occasion d'événements particulièrement tragiques dont les médias se sont faits largement l'écho.

6. Ces événements tragiques, dont le nombre reste heureusement limité, sont en réalité l'expression particulièrement visible de violences plus limitées dans leur gravité mais plus fréquentes, dont l'occurrence est difficile à quantifier mais dont la croissance est bien réelle.

7. L'accroissement des phénomènes de violence marque l'ensemble des sociétés européennes et la communauté scolaire n'y échappe pas. Cette tendance est diverse et ne touche pas tous les groupes sociaux de la même façon. Néanmoins la violence fragilise la démocratie dans son ensemble.

8. A cet égard, s'il convient de répondre de façon adéquate, il faut toutefois être particulièrement mesuré afin de ne pas en exagérer l'importance relative dans l'ensemble de la vie scolaire au sein des Etats membres du Conseil de l'Europe.

9. La violence au sein de l'école n'est pas un phénomène nouveau mais il semble bien que sa nature ait fortement évolué au court des dernières années du fait notamment de la perméabilité croissante du monde scolaire par rapport aux tensions et aux difficultés de toutes natures qui caractérisent la société en général et la communauté locale dans laquelle s'insère l'école en particulier.

10. La violence à l'école recouvre des faits de natures très différentes allant d'incidents mineurs à des cas très graves qui tous demandent à être pris en compte. Une attention particulière devrait être apportée aux aspects liés aux relations entre les sexes.

11. La diversité des situations parmi les Etats membres est très grande au regard des types de violences scolaires et de leur contexte et de leurs causes. Néanmoins, il s'est dégagé un consensus très large sur la nécessité de la mise en oeuvre de partenariats locaux dont les modalités doivent bien sûr être adaptées aux situations particulières.

12. Des orientations de base paraissent devoir être soulignées à savoir :

- concevoir la prévention de la violence comme une dimension centrale de l'éducation à la citoyenneté démocratique (tolérance et relations interculturelles, égalité entre les sexes, Droits de l'Homme, gestion pacifique des conflits, valorisation de la personne, non-violence) ;

- considérer les jeunes comme des acteurs et des partenaires clefs de toute action dans ce domaine ;

- se donner les moyens d'agir avant même que ne se déclenchent des phénomènes de violence par une sensibilisation de tous les acteurs concernés et par la prévention précoce ;

- prévoir des modalités de réaction rapides et mesurées lorsque de tels phénomènes sont effectivement apparus ;

- susciter une prise de conscience de la nécessité d'agir par tous les acteurs et le renforcement de la mobilisation de ceux-ci ;

- promouvoir le développement d'échanges, de dialogues à tous les niveaux au sein des communautés mais aussi entre-elles notamment à l'échelle européenne ;

- donner la priorité à la protection et à la prise en charge des victimes ;

- soutenir les familles dans l’exercice de leur rôle éducatif.

Pourquoi des partenariats ?

13. Puisque les causes profondes de la violence à l'école relèvent en partie de phénomènes extérieurs, toute action, en particulier de prévention, devrait associer non seulement les différentes composantes du système éducatif mais aussi l'ensemble des acteurs de la communauté locale.

14. Le développement des partenariats est dès lors une condition de l'efficacité à court, moyen et long terme de la prévention et il constitue une valeur ajoutée évidente par rapport à toute action aussi méritoire qu'elle soit pouvant être mise en oeuvre séparément par chacun des acteurs.

15. La violence a un énorme coût social qui exige des actions de prévention conduisant à une réduction tangible de tels actes.

16. Le principe de partenariat, sans nécessairement remettre en cause les compétences et les règles particulières à chacun des acteurs, implique néanmoins le décloisonnement et l'établissement de liens transversaux entre les acteurs ou les services concernés.

17. De façon générale, le concept de partenariat dans la prévention de la violence est également le point central de toute action dans ce sens dans un contexte démocratique et dans le respect des valeurs fondamentales qui unissent les Etats membres du Conseil de l'Europe. En ce sens, le développement de partenariats est une contribution au fonctionnement harmonieux des institutions démocratiques.
Qui sont les partenaires ?

18. Il convient bien sûr d'être conscient de la diversité très grande des situations nationales, régionales ou locales mais l'on peut néanmoins considérer qu'il conviendrait de prendre en compte les partenaires suivants selon des modalités et des degrés divers :

- la communauté scolaire dans toutes ses composantes et notamment les enseignants et leurs représentants, les organes administratifs et de gestion, les services sociaux et médicaux et l'ensemble du personnel non enseignant. Une attention toute particulière devrait être donnée au rôle des élèves, même très jeunes, ainsi que des parents et de leurs représentants;

- les autorités locales et régionales et leurs différents services spécialisés concernant notamment la prévention de la violence en général, les services sociaux, les services de polices, les services d'aménagement du territoire et d'actions culturelles... ;

- l'ensemble des mouvements de jeunesse, formels ou informels ;

- les représentants de la société civile, notamment les organisations non gouvernementales concernées par l'action culturelle, l'éducation non-formelle et la prévention de la violence concernant certains publics ou lieux particuliers, et aussi les communautés religieuses ;

- le monde social, économique et politique en général ;

- les médias, notamment les médias locaux et régionaux ;

- des représentants du monde de la recherche sociale issus du monde académique ou de structures particulières ;

- les autorités nationales concernées par les politiques éducatives, de jeunesse, culturelles, sociales, économiques, de santé, de justice et de maintien de l'ordre, de l'aménagement du territoire et des politiques urbaines et plus particulièrement de leurs services déconcentrés à l'échelle locale.

Eléments à prendre en compte dans l'élaboration de stratégies locales de sensibilisation, de prévention et de réactions adéquates

19. S'il ressort des observations que très souvent l'initiative de mise en place de stratégies est une réaction à l'apparition de phénomènes visibles de violence, il conviendrait à l'avenir de mettre en place des initiatives de prévention avant que ne se produisent des faits graves ou plus ténus mais répétés.

20. Il faut souligner que toute stratégie en la matière consiste d'abord à initier un processus appelé à se développer plutôt qu'à mettre en place des structures formelles même si celles-ci sont évidemment nécessaires. Il est important à cet égard d’inscrire ces stratégies dans le long terme.

21. L'évaluation du climat scolaire et du climat de la communauté dans son ensemble est à cet égard essentielle. Une analyse associant l'ensemble des partenaires devrait être réalisée afin de déterminer de façon pragmatique mais globale les phénomènes en cours dans la communauté locale pouvant conduire au développement de violences.

22. Il conviendrait de mettre en place un système d'indicateurs permettant de relever dès leur apparition des phénomènes potentiellement générateurs de violence (early warning systems).

23. Des lieux ou des forums d'information réciproques, de sensibilisation, de définition d'objectifs communs, d'évaluation et de suivi de la situation devraient être mis en place. Il est néanmoins nécessaire de garder une grande flexibilité afin de pouvoir s'adapter rapidement aux évolutions du contexte de la communauté locale ou des problèmes mis en lumière.

24. Lorsqu'un phénomène potentiellement générateur de violence ou lorsque des phénomènes de violence sont avérés, il convient d'avoir une réaction rapide en particulier :

- le soutien aux victimes potentielles ou avérées en les encourageant notamment à s'exprimer et en assurant le retour à l'équilibre personnel ;

- le rappel clair à la règle pour les responsables d'actes violents, la répression mesurée et adéquate portant en particulier sur la réparation, la prise de conscience de l'acte et l'application de mesures à finalité éducative ;

- l'action sur les causes profondes des phénomènes ayant conduits à l'apparition de violence visible. Sur cette question le rôle de la communauté dans son ensemble est particulièrement important.

25. Il convient dans la mise en oeuvre de toute stratégie de prévention d'avoir une action claire visant à définir le rôle et la responsabilité de chacun et du rôle et de la responsabilité de la communauté dans son ensemble. A cet égard, toute stratégie de prévention devrait être menée dans un contexte de dialogue démocratique respectant la diversité culturelle, économique, sociologique des acteurs. Une coordination claire de ces actions est nécessaire pour éviter les phénomènes de bureaucratisation et de conflits d'intérêts. La formation des acteurs devrait être incluse dans ces processus.

26. Le développement de mesures de médiation est au centre des stratégies de prévention. Tous les acteurs concernés peuvent à un certain moment assurer le rôle de médiateurs, néanmoins il serait souvent utile qu'une structure ou des personnes particulières, y compris des jeunes eux-mêmes, soient désignées pour jouer un rôle d'écoute et d'intervention dans le sens de la médiation.

EN CONCLUSIONS DES DEBATS, LES PARTICIPANTS ONT SOUHAITE FAIRE LES RECOMMANDATIONS SUIVANTES :

Aux Etats membres du Conseil de l'Europe et de la Convention culturelle européenne :

- prendre toute mesure à l'échelle nationale susceptible de favoriser et d'encourager le développement de partenariats locaux pour la prévention de et la lutte contre la violence à l'école, notamment par l'adoption d'un cadre législatif créant des conditions favorables et la reconnaissance de l'importance donnée à leur développement ;

- apporter une attention particulière à la création d'un contexte favorable au développement des actions de prévention dans la durée ;

- prendre les mesures budgétaires nécessaires à la mise en oeuvre et au fonctionnement des partenariats locaux en tout ou partie ;

- encourager les différents Ministères et services concernés au niveau national, régional ou local à participer de façon constructive aux partenariats locaux ;

- mettre en place des organes nationaux de suivi de la situation au plan national et d'assistance ou de soutien aux partenariats locaux ;

- inclure, dans un cadre interdisciplinaire, la prévention de la violence scolaire dans la formation initiale et continue du personnel éducatif ;

- apporter une attention particulière à l’influence des médias sur les phénomènes de violence chez les jeunes ;

- promouvoir l'échange d'expériences et d’informations et la diffusion de bonnes pratiques.

Aux autorités locales et régionales :

- intégrer la prévention de la violence à l'école dans leur action générale de prévention de la violence dans la vie quotidienne ;

- encourager leurs différents services à contribuer à la mise en place des stratégies de la violence scolaire ;

- soutenir le développement des stratégies de prévention notamment au plan matériel et financier si possible sur une base contractuelle pluriannuelle ;

- mettre en oeuvre des politiques de jeunesse incluant la consultation et la participation des jeunes à la vie démocratique locale et régionale ;

- promouvoir les échanges d’expériences et d’informations ainsi que la diffusion de bonnes pratiques.

Aux établissements scolaires :

- jouer pleinement leur rôle d'initiative même et surtout avant l'apparition de phénomènes de violence en incluant notamment la prévention de la violence dans le curriculum sous des formes appropriées;

- agir tout particulièrement au développement d'un climat scolaire favorable par l'encouragement au décloisonnement des rôles et des fonctions des différents acteurs internes à la vie scolaire ;

- encourager l'ouverture de l'école sur la vie de la communauté dans laquelle elle s'insère ;

- garantir un fonctionnement démocratique de l'école qui reconnaît notamment aux élèves et à leurs parents la place qui leur revient.

Aux organisations de jeunesse :

- associer leur expérience et leur pratique aux actions de prévention ;

- promouvoir des actions de formation ou de sensibilisation à la prévention en liaison avec les autres partenaires locaux ;

- oeuvrer pour le développement de politiques de jeunesse au niveau local incluant également les plus jeunes.

Aux médias locaux et régionaux

- assurer une couverture et un compte rendu mesuré non seulement des phénomènes de violence mais considérer également que toute initiative positive de prévention et de sensibilisation mérite aussi d'être portée à la connaissance de l'opinion publique ;

- contribuer à la formation des élèves, des enseignants, des parents et de toute la communauté éducative en matière de médias et d’éthique ;

Au Conseil de l'Europe :

Poursuivre les travaux entamés à l'occasion de cette Conférence notamment par :

- la publication et la large diffusion du rapport de la Conférence et de la présente déclaration finale ;

- la réalisation rapide d'un manuel concernant la mise en oeuvre des stratégies de prévention de la violence à l'école sur la base des conclusions figurant ci-dessus et incluant un certain nombre d'exemples concrets de bonnes pratiques ;

- la mise au point des modules de formation des acteurs notamment des enseignants, des animateurs de jeunesse, des parents et des différents acteurs locaux ;

- l'élaboration d'un projet de Recommandation du Comité des Ministres sur les partenariats pour la prévention de la violence scolaire associant les trois instances organisatrices de cette Conférence ;

- l'inclusion des aspects spécifiques de la prévention de la violence à l'école dans les conclusions générales qui seront adoptées à l'issue du Projet intégré sur les "Réponses à la violence quotidienne dans une société démocratique" notamment en ce qui concerne la mise en oeuvre de politiques générales de prévention ;

- la prise en compte de la dimension scolaire dans le développement des réseaux d'observatoires de la violence quotidienne dans le cadre du Projet intégré ;

- la poursuite des travaux engagés concernant les médias et la violence notamment en ce qui concerne les contenus adressés aux jeunes (éducation aux médias, codes d’éthique, impact des médias sur les comportements...) ;

- l’organisation d’activités spécifiques dans ce domaines prenant en compte les spécificités de certains pays ou régions de l’Europe (notamment l’Europe du sud-est) ;

- le renforcement des relations de travail avec les autres organisations internationales (e.g. l’UNESCO et l’UNICEF) afin de développer les synergies en particulier pour la diffusion d’expériences de bonnes pratiques et pour l’analyse des causes de la violence scolaire

ANNEXE 2 - Programme de la Conférence

Lundi 2 décembre

09 h 00 Ouverture officielle de la Conférence
(Président : Baron Berend Jan VAN VOORST TOT VOORST)

M. Walter SCHWIMMER, Secrétaire Général du Conseil de l'Europe
M. Jean-Marc NOLLET, Ministre de l'Enfance, chargé de l'Enseignement fondamental, de l'Accueil et des Missions confiées à l'O.N.E. de la Communauté francophone de Belgique
Baron Berend Jan VAN VOORST TOT VOORST, Président de la Commission de la culture et de l’éducation du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe
M. César BIRZEA, membre du Comité directeur de l'Education
M. Guillaume LEGAULT, Président du Comité mixte de la Jeunesse

10 h 00 Pause café

10 h 30 Les contextes de la violence à l'école

Le Projet intégré "Réponses à la violence quotidienne dans une société démocratique" par M. Jean-Pierre TITZ, Directeur du Projet

Introduction générale par M. Manuel EISNER (Institut de criminologie de l’Université de Cambridge et Institut de technologie de Zurich)

Présentations de la situation dans plusieurs pays ou ensemble de pays

Mme Anica MIKUS KOS (Slovénie)
M. Jerzy SARNECKI (Suède) (Professeur à l'Université de Stockholm)
M. Chris GITTINS (Directeur de "The National Behaviour Training Programme) (Royaume Uni)
M. Valery CHINKOV du Ministère de l'Education de la Fédération de Russie

Panel entre les intervenants et discussion générale en plénière

12 h 30 Déjeuner

14 h 30 En groupes de travail - thèmes communs aux cinq groupes :

Pourquoi des partenariats dans la lutte contre la violence à l'école ?

Quelle est leur valeur ajoutée par rapport à d'autres stratégies ?

Qui sont les partenaires, quels sont leurs rôles et leurs atouts?

(la session sera précédée par la présentation de deux études de cas
dans chacun des groupes de travail)

18 h 00 Fin des travaux

18 h 30 Réception

Mardi 3 décembre

09 h 30 Poursuite des discussions en groupes de travail (Présentation de deux
autres études de cas dans chaque groupe)

10 h 30 Pause café

12 h 30 Déjeuner

14 h 30 En groupes de travail - thèmes : Les conditions de succès des
partenariats, initiatives, structures et méthodes de travail,
coordination, formation des acteurs, suivi et évaluation.

17 h 00 Panel de synthèse avec les Rapporteurs et les Représentants des
instances organisatrices

Mercredi 4 décembre

09 h 30 Présentation du rapport final par le Rapporteur général
(M. Eric DEBARBIEUX, Observatoire européen de la violence à l'école, Bordeaux, France)

10 h 30 Pause Café

11 h 00 Discussion et adoption de la déclaration finale

12 h 00 Clôture de la Conférence