Strasbourg, le 5 octobre 1998.

CG/BUR (5) 61

Rapport d'observation des élections locales partielles anticipées en Albanie - 21 juin 1998 et 27 juin 1998 (2ème tour)

Rapporteurs : Owen MASTERS (Royaume-Uni), L , Karl-Christian ZAHN (Allemagne), L

Rapport approuvé par le Bureau du Congrès
le 29 septembre 1998

I – INTRODUCTION

Les dernières élections locales en Albanie avaient eu lieu les 20 et 27 octobre 1996. Elles avaient été observées par le Congrès et fait l'objet d'un rapport CG/BUR (3) 52 rev et de la Recommandation 28 (1997).

Au cours de la grave crise traversée par l'Albanie au printemps 1997 suite à l'effondrement des schémas pyramidaux, certains maires ou présidents de communes avaient démissionné ou quitté leurs fonctions. De plus, plusieurs autres étaient décédés ou avaient démissionné pour d'autres raisons.

La loi sur les élections des organes de pouvoirs locaux (n° 7573) de 1992 prévoit que, dans de tels cas, de nouvelles élections doivent être organisées dans un délai de 6 mois. Toutefois, la situation a pris davantage de temps à se stabiliser et c'est seulement à la date du 22 avril 1998 que le Gouvernement a fixé la date pour des élections partielles anticipées dans 9 communes et 7 municipalités sur, respectivement, les 309 communes et 65 municipalités que compte le pays.

Les élections locales partielles se sont déroulées dans différentes parties du pays (voir liste complète en annexe). Le CPLRE a été invité à observer ces élections lors de la visite de M. Haegi, Président du Congrès (Suisse), M. Martini (Italie) et M. Paour (France) à Tirana du 6 au 8 mai 1998, invitation confirmée par la suite par lettre de M. Fino, Vice Premier Ministre et Ministre des Pouvoirs Locaux, en date du 28 mai 1998.

La création d'un Ministère des Pouvoirs Locaux courant mai 1998 en remplacement du précédent Secrétariat d'Etat des Pouvoirs Locaux pouvait être considéré comme un signe positif indiquant la volonté du Gouvernement albanais de renforcer l'autonomie locale. De plus, l'Albanie a signé la Charte européenne de l'autonomie locale le 27 mai 1998 à Strasbourg, à l'occasion de la 5e Session plénière du Congrès, à laquelle participait, pour la première fois, une délégation d'élus locaux et régionaux d'Albanie, alors que l'Albanie était devenue membre du Conseil de l'Europe en juillet 1995. Tous ces éléments constituaient un contexte favorable pour l'organisation de ces élections partielles.

La délégation du Congrès pour l'observation de ces élections partielles était composée de 7 membres (M. Corghi, Italie, ayant été empêché à la dernière minute). Elle était accompagnée de M. Bohner et de Mme L'Hyver-Yésou, du Secrétariat du Congrès, et de M. Müller du Bureau du Conseil de l'Europe à Tirana (au total, 6 équipes).

M. Guégan (France) a été désigné Président de la délégation, et MM. Masters (Royaume-Uni) et Zahn (Allemagne) Rapporteurs.

L'OSCE et des membres des ambassades sur place ont également observé ces élections. Il faut souligner que la délégation du CPLRE a pu, sur place, bénéficier largement de l'importante aide logistique de l'OSCE et du soutien efficace du Bureau du Conseil de l'Europe à Tirana qui en sont ici vivement remerciés. Des remerciements vont également au Ministère des Pouvoirs Locaux et à la Commission électorale centrale pour leur soutien et leur coopération.

Au total, 29 équipes d'observateurs internationaux ont observé ces élections au 1er tour (pour le 2e tour : une équipe du CPLRE composée de MM. Masters et Lloyd (Royaume-Uni)).

Il faut également souligner la présence d'observateurs albanais (de la Société pour la Culture Démocratique) qui ont été représentés au debriefing final et sont parvenus à des observations tout à fait concordantes avec celles du CPLRE et de l'OSCE.

De plus, ECMM (European Commission Monitoring Mission) avait déployé des observateurs dans deux communes éloignées dans le nord/est du pays.

L'ensemble de la mission d'observation s'est déroulé dans un excellent climat de coopération avec les représentants de l'OSCE sur place et notamment l'Ambassadeur Daan Everts qui a également observé le déroulement des élections à Vlorë.

A l'issue de l'observation, le lundi 22 juin, les observateurs déployés par l'OSCE ont tenu une séance de "debriefing" à laquelle M. Masters, M. Borghi, M. Bohner et Mme L'Hyver-Yésou ont participé et pu faire part des conclusions de l'ensemble de la délégation du CPLRE. Un communiqué final a été préparé conjointement avec l'OSCE et une conférence de presse finale commune a été organisée à l'Hôtel Rogner à Tirana le 23 juin 1998.

II – DEROULEMENT DE LA MISSION

Vendredi 19 juin 1998

Arrivée des membres de la délégation.

16h30-18h00 Briefing au Bureau du Conseil de l'Europe à Tirana avec notamment

des représentants de l'OSCE

18h30-19h30 Rencontre avec la Commission électorale centrale, Tirana

Samedi 20 juin 1998

Déploiement sur les lieux d'observation (6 équipes pour le Congrès)

Rencontres avec les Commissions électorales locales

Vérification de la préparation des bureaux de vote

Dimanche 21 juin 1998

Observation des élections (bureaux ouverts de 7h00 à 18h00

Lundi 22 juin 1998

Retour des équipes à Tirana

11h00 Debriefing des observateurs du CPLRE

17h00 Debriefing des observateurs de l'OSCE et autres observateurs

20h00 Préparation d'un communiqué de presse conjoint avec l'OSCE

Mardi 23 juin 1998

11h00 Conférence de presse conjointe avec l'OSCE (Hotel Rogner, Tirana)

Dimanche 28 juin 1998

Observation du 2e tour des élections (une seule équipe pour le CPLRE)

DEPLOIEMENT DES EQUIPES DU CPLRE

M. Karl-Christian ZAHN (Allemagne) Vorë

et M. Uwe MULLER (District de Tirana)

Mme Luisa LAURELLI (Italie), M. Michel GUEGAN (France) Shijak et Kavajé

et Mme Marie-Aude L'HYVER-YESOU (District de Kavajé)

M. Enrico BORGHI (Italie) Vlorë

et M. Ulrich BOHNER (District de Vlorë)

M. Ioannis SHOTIRIOU (Grèce) Gjergjan

(District d'Elbasan)

MM. Owen MASTERS (Royaume-Uni) et M. Tomas JIRSA Patos

(District de Fier)

2e TOUR

MM. Owen MASTERS et Alan LLOYD (Royaume-Uni) Shijak et Vorë

III - PREPARATION DES ELECTIONS

Le CPLRE n'avait pas d'observateur présent en Albanie durant la campagne électorale, mais les informations disponibles dans les médias, par le Bureau du Conseil de l'Europe et surtout par l'OSCE permettent de se faire une idée du déroulement de la campagne électorale avant ces élections.

L'OSCE a suivi pour sa part de très près la période pré-électorale et ce à plusieurs reprises joué un rôle de médiateur entre les forces politiques). Le parti d'opposition au niveau gouvernemental (mais majoritaire aux niveaux local et régional), le Parti Démocratique (PD), dont le leader est M. Berisha, ainsi que le Parti pour l'Union pour la Démocratie ont à plusieurs reprises dénoncé des actes du Parti Socialiste et de l'Alliance pour la coalition de l'Etat. Selon l'OSCE, les plaintes se sont très souvent avérées peu justifiées, mais pas toujours.

Toutefois, la plainte la plus sérieuse a concerné la diffusion d'un documentaire sur la chaîne d'Etat célébrant le 7e anniversaire du Parti socialiste la semaine précédant les élections qui en réalité, a donné un temps supplémentaire d'antenne à ce parti. Un compromis a été accepté consistant à offrir un temps d'antenne compensatoire au PD ce qui a évité leur boycott au sein de la Commission Electorale Centrale.

Le Gouvernement avait désigné une nouvelle Commission électorale centrale (CEC) alors qu'une Commission électorale permanente pour les élections nationales avait été nommée pour 7 ans en 1997. Le PD a dans un premier temps refusé de reconnaître cette nouvelle CEC et l'OSCE ici aussi a pu jouer un rôle de médiateur pour débloquer la situation.

Dans les différentes localités, les posters des différents candidats étaient largement affichés. De plus, contrairement aux dernières élections parlementaires, le PD a, apparemment, pu faire campagne cette fois dans toutes les localités sans incidents majeurs ni violence.

Le principal problème relevé durant la campagne a été celui de la confection des listes électorales, tout particulièrement à Vlorë, où 8000 personnes environ manquaient sur les listes par rapport aux dernières élections (avant les événements du printemps 1997). Toutefois, suite à une plainte du PD, près de 4000 personnes ont pu être rajoutées sur les listes par la Commission Electorale municipale soutenue par l'OSCE. A Kavaje, au moins 97 personnes avaient été omises des listes et n'ont pas pu voter car les corrections n'ont pu être faites dans les délais prévus par la loi. On ne peut, par ailleurs, exclure l'hypothèse que la grave crise de 1997 a pu donner lieu à des migrations, temporaires ou permanentes.

L'OSCE avait lancé un projet pilote de préparation des listes électorales centrales informatisées dans 7 communes, mais malheureusement, ce projet n'avait pas pu être mené à terme pour ces élections partielles.

En Albanie, les listes électorales sont préparées séparément pour chaque nouvelle élection par les commissions électorales communales. Elles sont rédigées à la main et ne sont pas présentées par ordre alphabétique, mais les électeurs sont classés par quartier ce qui pose problème le jour du scrutin. Les listes sont ensuite affichées pour vérification par les électeurs (17 jours avant les élections) qui peuvent les faire rectifier jusqu'à 48 heures avant le scrutin. Toutefois, nous avons pu constater le jour du scrutin que plusieurs personnes tentaient de venir voter sans avoir vérifié par avance si elles étaient bien inscrites. Les listes avaient dans certains cas été affichées dans des lieux publics mais déchirées par des personnes malveillantes (à Kavajé par exemple).

A Shijak (District de Tirana), la Commission Electorale communale avait fait distribuer à chaque électeur un billet indiquant le Bureau de vote spécifique où il était inscrit, et un bureau de vote avait une liste additionnelle de 200 personnes environ qui avaient été rajoutées conformément aux procédures prévues. La situation était donc très différente selon les localités, certaines semblant mieux organisées que d'autres dans cet exercice important.

Enfin, il n'est pas certain que les électeurs connaissent bien la procédure pour vérifier leur inscription et procéder aux corrections si nécessaire. Une amélioration de l'éducation des électeurs par des spots d'information à la télévision ou des articles dans les journaux permettrait de résoudre ce problème.

IV - RENCONTRE DE LA DELEGATION AVEC LA COMMISSION

ELECTORALE CENTRALE

Le vendredi 19 juin, l'ensemble de la délégation a rencontré les membres de la Commission électorale centrale (CEC) et au cours d'un dialogue de près d'une heure ont pu échanger des informations sur la préparation des élections.

Le Président de la CEC a d'emblée exprimé le souhait que la présence d'observateurs contribue au déroulement des élections dans un climat calme et serein et a demandé que les observateurs renforcent particulièrement leur présence dans les localités les plus "à risque". Sous la responsabilité du Ministère des Pouvoirs Locaux, il nous a informé que tout le matériel de vote avait été distribué y compris des exemplaires de la loi sur l'organisation des élections.

Toutefois, le Président et le vice-Président gardaient quelque inquiétude sur la distribution effective du matériel dans quelques localités reculées car ils n'avaient pas obtenu confirmation de tous les destinataires. Le vice-Président a également soulevé le problème de la préparation des listes électorales et des citoyens inscrits alors qu'éventuellement ils ne résident plus en Albanie.

A ce stade, la CEC n'avait plus reçu de plaintes nouvelles restées sans réponse pour modifier ou compléter les listes mais elle restait inquiète sur leur fiabilité. La CEC a également indiqué qu'elle avait donné des ordres très clairs pour que les résultats soient affichés dans chaque bureau de vote à l'issue du scrutin (ceci n'avait pas été respecté lors des élections d'octobre 1996).

Le vice-Président a dénoncé le fait que la loi n'avait pas été strictement respectée puisque plusieurs bureaux de vote comptaient plus de 1000 électeurs suite à un regroupement de petits bureaux très éloignés des centres. Ceci a été contesté par le Secrétaire de la Commission Electorale centrale qui e relevé qu'aucune plainte n'avait été adressée à la CEC à ce sujet.

De fait, le jour du scrutin, les observateurs ont pu constater que quelques bureaux de vote avaient plus de 1000 électeurs inscrits. Cependant cela ne semblait pas poser de problèmes car il n'y avait pour ces élections partielles qu'un seul scrutin pour l'élection du Maire et la charge de travail pour ces bureaux de vote ne semblait pas excessive.

V - PREPARATION DU VOTE LA VEILLE DU SCRUTIN

Dans la grande majorité des localités, les équipes d'observateurs ont été satisfaites de la préparation des bureaux la veille du scrutin. Les Commissions électorales communales avaient bien reçu tout le matériel et l'avaient transmis aux Présidents, vice-Présidents et Secrétaires de chaque bureau de vote, même si, à Vorë et Kavajé, l'installation s'est faite parfois très tardivement. Un bureau à Kavajé par exemple a été ouvert avec du retard le jour du scrutin principalement parce qu'il n'avait pas été correctement préparé la veille. Ceci constituait un cas apparemment isolé.

Tous les observateurs ont été frappés du peu de moyens et de l'état vétuste de certains locaux publics où étaient situés les bureaux de vote, dans des écoles, des polycliniques, etc. Les urnes et les isoloirs sont confectionnés pour chaque élection avec les moyens du bord. Ils sont très rudimentaires et les urnes sont parfois scellées de façon plutôt symbolique . Très souvent, les membres des commissions électorales n'avaient que des tables et des chaises en mauvais état, certains bureaux étaient dans des locaux très sombres ou avec des vitres manquantes. De plus, les rues en ville étaient souvent très sales et les routes très détériorées. Ces remarques ont amené plusieurs membres à recommander que le Congrès incite les collectivités locales et régionales des autres pays européens à aider l'Albanie par des actions concrètes de jumelages, partenariats, etc.

Ce constat amène également les Rapporteurs à penser qu'une décentralisation accrue pourrait permettre d'améliorer la situation dans la mesure où les collectivités locales deviendraient compétentes et auraient les moyens de remédier à ces situations.

Par contraste avec les élections locales précédentes (octobre 1996), il faut saluer le fait que très peu de bureaux de vote ont cette fois-ci été installés dans des locaux privés ; dans ces cas-là, les propriétaires n'étaient en tous cas pas autorisés à rester dans les lieux pendant toute la durée du scrutin.

VI - DEROULEMENT DU SCRUTIN

Pour l'ensemble, la délégation du Congrès a estimé que le scrutin s'est déroulé de façon satisfaisante, qu'un bon climat de coopération régnait entre les membres des commissions électorales, que les conditions de sécurité étaient bonnes (fait remarquable vu la situation que le pays avait connu un an auparavant) et que les électeurs ont pu librement exprimer leur choix. Sauf une exception notable à Vlorë, où le vote a dû être annulé dans le bureau concerné, les quelques fautes de procédure observées de façon répétées tenaient davantage à un manque d'expérience ou une connaissance insuffisante de la loi qu'à une tentative délibérée de fraude ou de manipulation des résultats. Dans la très grande majorité des bureaux, la commission électorale était complète et des observateurs des partis politiques présentant des candidats étaient présents. Les bureaux ont ouvert et fermé à l'heure (à l'exception d'une observation) et le scrutin s'est déroulé sans incident grave.

Dans quelques cas des difficultés provenaient au moment de l'identification des électeurs qui n'avaient pas toujours leurs papiers et des désaccords pouvaient survenir entre les membres de la commission pour laisser ou non ces personnes voter. Les passeports des électeurs sont en principe tamponnés pour signaler qu'ils ont voté, mais si les électeurs n'ont pas de passeport ou un passeport permettant de voyager à l'étranger, les autres documents d'identité présentés ne sont pas tamponnés (carte d'identité, livret militaire, certificat muni d'une photo). Afin d'éviter des fraudes, il serait évidemment préférable que chaque citoyen en droit de vote reçoive une carte d'électeur ou tout au moins un passeport qui devrait être tamponné systématiquement.

A Kavajé, toutefois, nous avons observé dans certains bureaux des fraudes évidentes dans la mesure où, à plusieurs reprises, une même personne avec plusieurs passeports était autorisée à voter plusieurs fois sans qu'aucun des membres de la commission électorale ne conteste cette enfreinte à la loi. Au moment du dépouillement dans ce bureau de vote 24 fois plusieurs bulletins de vote avaient été pliés et mis ensemble dans l'urne. La pratique du vote multiple (par un électeur ou plusieurs personnes votant ensemble dans l'isoloir) n'était donc pas négligeable dans ce bureau. A Kavajé toujours, dans un autre bureau, des personnes non inscrites étaient cependant autorisées à voter jusqu'à ce que des représentants de la CEC interviennent pour rappeler la loi.

Dans quelques cas, des tentatives d'intimidation ont été notées de la part de certains militants mais elles n'ont pas été l'apanage d'un parti politique particulier. Conformément à la loi, des policiers étaient présents à l'extérieur des bureaux et dans quelques cas ils ont contribué à calmer l'atmosphère lorsque le ton montait.

Assez fréquemment dans un grand nombre de localités plusieurs personnes entraient ensemble dans l'isoloir, parfois des personnes âgées accompagnées, parfois des couples ou des pères et leurs filles. Même si une question de "culture" entre en ligne de compte, il faudrait veiller à ce que progressivement les mentalités évoluent pour garantir que chaque électeur ait effectivement droit individuellement à un vote secret.

Les observateurs ont également été frappés dans plusieurs localités par le grand nombre de bulletins jugés invalides car les signes autorisés par la loi sur le bulletin n'avaient pas été strictement respectés, même si dans la majorité des cas le choix de l'électeur était clair. A titre d'exemple, à Vlorë dans le bureau de vote près de 20 % des bulletins dépouillés ont été classés invalides. La présentation du bulletin de vote devrait être simplifiée et l'éducation des électeurs renforcée afin d'éviter ceci. De plus, il serait utile de réviser la loi sur l'organisation des élections de façon à permettre une interprétation plus souple de l'article n° 63, dans la mesure où le choix de l'électeur est clairement exprimé de l'avis de tous les membres de la Commission.

L'ensemble des observateurs ont constaté la faible participation au vote notamment chez les jeunes et, dans certaines localités, une très faible proportion de femmes. Les personnes interrogées sur ce fait dans la rue ont répondu qu'elles étaient lassées des nombreuses élections qui se sont succédé en Albanie, qu'elles ne faisaient plus confiance à aucun parti ou que les maires étaient toujours absents lorsqu'on souhaitait les rencontrer.

Ce désintéressement pour les élections locales et ce manque de confiance dans la vie politique sont préoccupants pour le développement de la démocratie en Albanie. Il est vraisemblable qu'une décentralisation accrue en permettant une meilleure autonomie et transparence de la gestion des affaires locales pourront aider à contrecarrer cette tendance.

La composition des commissions électorales des bureaux de vote avec un Président du parti gouvernemental et un vice-Président du parti principal d'opposition, un secrétaire nommé par la Préfecture et des membres représentant les différents candidats permet un certain équilibre des forces politiques dans les bureaux de vote. Il est donc très positif de noter que dans la quasi-totalité des bureaux observés l'atmosphère de coopération était excellente (exception faite de quelques bureaux où la très forte personnalité des Présidents ou vice-Présidents n'était pas propice à un climat serein de coopération entre les membres des commissions).

Même s'il ne s'agissait que d'élections locales partielles dans 16 localités au total, le fait que les élections se soient déroulées sans incident ni violence est un signe clair de progrès par rapport à la situation récente en Albanie.

Comme pour les élections précédentes, la loi prévoit que tous les bulletins de vote soient tous tamponnés et signés avant l'ouverture du bureau par le Président, le vice-Président et le Secrétaire du bureau de vote. Ceci n'est pas possible dans l'heure prévue pour la préparation du bureau et cette disposition de la loi n'était respectée nulle part. Il serait donc préférable de modifier la loi en prévoyant toutefois que les bulletins soient validés (signés et tamponnés) au fur et à mesure des besoins et leur distribution strictement contrôlée.

A Vlorë, un bureau de vote a dû être fermé le jour du scrutin en cours de journée par décision de la commission électorale municipale pour différentes raisons. Toutefois, ceci ne remet pas en cause le résultat de l'ensemble du scrutin de cette municipalité.

Les résultats du 1er tour figurent en annexe. Deux ballotages ont eu lieu à Shijak et Vorë et le 2ème tour des élections dans ces deux localités a été observé par MM. Masters et Lloyd (Royaume-Uni) et d'autres observateurs de l'OSCE. L'ensemble du scrutin du 2ème tour s'est déroulé dans une très bonne atmosphère et aucune remarque supplémentaire n'est à rajouter aux observations concernant le 1er tour.

CONCLUSIONS

La communication rédigée conjointement avec l'OSCE à l'issue de l'observation du 1er tour des élections constitue une synthèse des observations et recommandations à adresser au Gouvernement albanais qui reste tout à fait valide à la suite de l'observation du 2ème tour dans deux des localités.

Ces élections partielles anticipées si elles ne concernaient que 16 localités revêtaient néanmoins une grande importance en ce qu'elles constituent une avancée indéniable vers le retour à la normalisation de la situation en Albanie après les événements du printemps 1997. Le fait qu'elles se soient déroulées dans un climat calme, sans affrontement est très positif. Tous les observateurs ont considéré qu'elles ont véritablement permis aux électeurs d'exprimer librement leur choix. Toutefois, le faible taux de participation ne doit pas être minimisé car il constitue un signal d'alerte quant au risque de démobilisation de la population dans l'exercice de la démocratie et le manque de confiance en la capacité des politiques locales à influencer significativement leurs conditions de vie. De l'avis des Rapporteurs, il devient donc extrêmement important que la signature de la Charte européenne de l'autonomie locale se traduise prochainement dans les faits par une réforme des pouvoirs locaux en Albanie de façon à véritablement leur attribuer les compétences et les moyens aptes à résoudre une bonne part des affaires municipales.

A l'issue de cette observation, les Rapporteurs de la délégation souhaitent en particulier faire les recommandations suivantes au Gouvernement albanais :

améliorer la préparation des listes électorales et leur présentation ; ils espèrent vivement que le projet pilote de l'OSCE pourra être poursuivi et étendu à toute l'Albanie de façon à ce que le référendum sur la Constitution prévu à l'automne puisse bénéficier de ces nouvelles listes informatisées ;

- renforcer l'éducation des électeurs sur la procédure pour faire corriger, si nécessaire, les listes électorales ;

octroyer dès que possible à chaque citoyen albanais une carte d'électeur ou un passeport individuel qui devraient être tamponnés de façon systématique en cas de vote ;

améliorer la présentation des bulletins de vote et l'éducation des citoyens sur la procédure de vote afin de minimiser les bulletins invalides ;

réviser la loi pour la rendre plus souple afin d'éviter que des bulletins de vote soient déclarés invalides lorsque le choix des électeurs est clair ;

intensifier la formation des membres des commissions électorales de façon à limiter les imprécisions ou erreurs par méconnaissance ou mauvaise interprétation de la loi ;

Le Congrès, pour sa part, comme il l'avait été déjà été annoncé à l'issue de la visite du Président Haegi en mai 1998, réitère son offre au Gouvernement albanais de mettre à disposition son expertise et ses compétences ainsi que par le biais du Programme LODE pour :

revoir la législation concernant l'organisation des pouvoirs locaux, leurs compétences et ressources financières et, conformément à la Charte européenne de l'autonomie locale, entreprendre une décentralisation substantielle ;

revoir la législation concernant l'organisation des élections locales de façon à clarifier certaines dispositions à la lumière de l'observation des élections locales de 1996 (voir Recommandation 28 (1997)) mais aussi des dernières élections locales partielles ; il serait d'ailleurs souhaitable d'adopter une loi électorale générale pour tous les types d'élections comme déjà mentionné dans la Recommandation citée plus haut.