23e SESSION

CG(23)7
4 octobre 2012

Avis sur le rapport sur les changements en cours dans les pays arabes – une chance pour la démocratie locale et régionale

Commission de la gouvernance

Rapporteure[1] : Jon HERMANS-VLOEDBELD, Pays-Bas (L, GILD)

Conclusion de la commission. 2

Expose des motifs. 2

Propositions d’amendements au projet de résolution. 4

Propositions d’amendements au projet de recommandation. 5

Résumé

La commission propose une série d’amendements au rapport préparé par la Commission des questions d’actualité, notamment en ce qui concerne les récentes activités de coopération avec le Maroc et la Tunisie et la contribution que le Congrès pourrait apporter au processus de réforme démocratique dans ces pays.


CONCLUSION DE LA COMMISSION[2]

La commission note que dans les pays évoqués dans ce rapport, à savoir la Tunisie et le Maroc, les institutions et le cadre juridique de la démocratie locale et régionale font actuellement l’objet d’une révision approfondie. Ces deux pays sont à un stade déterminant du processus de démocratisation. Il convient de veiller à ce que les structures et le cadre juridique mis en place soient les meilleurs possibles, à ce que les nouvelles structures soient conformes aux normes internationales et à ce qu’elles soient durables. Le Conseil de l’Europe peut jouer un rôle très utile à cet égard, en mettant à la disposition des nouveaux gouvernements son expérience en matière de normes, de réforme démocratique et de décentralisation. Le Congrès devrait intensifier ses efforts pour partager son expertise avec les autorités de ces deux pays. Il devrait également continuer de suivre la transition démocratique dans d’autres pays de la région, notamment les pays producteurs de gaz et de pétrole - la Libye, marquée par des incertitudes politiques, et  l’Algérie ; et aussi l’Egypte, un état-clé dans le monde arabe, par raison de sa dimension démographique et son influence politique, culturelle et religieuse, qui doit faire face aux rapports difficiles entre le pouvoir militaire et les islamistes.

EXPOSE DES MOTIFS

1. Le Congrès a établi de longue date une coopération avec les pays du bassin méditerranéen. Toutefois, le Printemps arabe a fait naître un élan politique, une nouvelle dynamique et une volonté de changement parmi les peuples, trois éléments nouveaux dont l’action combinée offre une chance historique qu’il convient de ne pas laisser passer. La nouvelle politique de voisinage du Conseil de l’Europe offre au Congrès un cadre pour coordonner ses activités de coopération avec d’autres secteurs de l’Organisation.

2. Bien que ces événements répondent à un vaste désir de changement démocratique de la part des peuples, la création de structures nationales et l’adoption d’une nouvelle législation sont d’une importance cruciale pour garantir ce changement. Dans le même temps, si l’on veut que les besoins des citoyens soient pris en compte du mieux possible, il faut mettre en place une coopération privilégiant l’initiative venue de la base et l’échange entre pairs, la sensibilisation et le renforcement des capacités entre élus locaux.

3. Les programmes de renforcement des capacités et les activités sur la diplomatie des villes, telles qu’elles sont proposées par le Congrès dans sa Résolution 251 (2008), ont un rôle important à jouer dans cette coopération. Le Congrès devrait encourager les villes européennes et leurs associations à concevoir des projets de renforcement des capacités bien définis et soigneusement ciblés avec les communes du monde arabe et leurs associations, afin de parvenir à des résultats tangibles correspondant aux besoins et aux priorités des collectivités locales et de la société. Il est important, à cet égard, que les communes et les associations européennes coordonnent leurs activités, afin d’éviter tout chevauchement et toute duplication des activités.


4. La situation du Maroc évolue rapidement. Les élections législatives du 25 novembre 2011 ont porté au pouvoir le Parti de la justice et du développement (PJD) et le nouveau gouvernement a été promulgué au début 2012. Pour la première fois, le pays est ainsi dirigé par un parti islamiste. S’il est encore trop tôt pour savoir si le nouveau pouvoir parviendra à modifier en profondeur le gouvernement du pays, il est du moins déterminé à assainir la vie politique, réduire la corruption et renforcer la transparence. Des élections locales, provinciales et régionales devaient ce tenir en 2012. Toutefois, la loi sur la régionalisation avancée devrait être adoptée et mise en œuvre avant que des élections puissent avoir lieu. Lors de la réunion du 26 avril 2012 entre des représentants du Congrès et les membres de la délégation marocaine auprès de l’Assemblée parlementaire, les autorités marocaines ont salué la proposition faite par le Congrès d’organiser des échanges de vues sur cette loi entre les membres du Congrès et experts et la commission en charge de ces questions au sein du Parlement marocain. Les représentants du Parlement marocain ont confirmé l’intention des autorités marocaines d’inviter le Congrès à observer les élections locales, provinciales et régionales, qui sont maintenant prévues pour fin 2012.

5. En Tunisie, l’Assemblée constituante a été élue en octobre 2011 pour rédiger une nouvelle constitution nationale et nommer un gouvernement provisoire. Le nouveau gouvernement a pris ses fonctions le 24 décembre 2011, sous l’autorité du Premier ministre Hamadi Jebali, membre du parti islamiste modéré Ennahda. Les trois partis de la coalition gouvernementale qui détiennent actuellement une majorité des sièges de l’Assemblée constituante ont décidé d’organiser de nouvelles élections législatives le 20 mars 2013 ou avant.  Les élections locales n’auront lieu qu’après cette date.

6. Dans l’immédiat, ce qui importe en Tunisie, c’est de veiller à ce que la démocratie locale soit fermement et convenablement définie dans la nouvelle constitution. Une délégation du Congrès – dont faisait partie le Président Keith Whitmore – s’est rendue à Tunis en mars 2012 pour y rencontrer le Président de la commission de l’Assemblée nationale constituante de Tunisie en charge de l’autonomie locale. Celui-ci s’est félicité de l’idée d’un échange de vues avec les membres et experts du Congrès sur la décentralisation en général et a insisté sur l’importance, pour cette commission, d’enrichir ses travaux en dialoguant avec les organisations et les experts disposés à partager leur expérience. Il s’est également déclaré favorable à ce que la Commission de Venise soit invitée à soumettre son avis sur le projet de constitution de la Tunisie.

7. Une meilleure participation de la population, en particulier des femmes et des jeunes, sera un outil inestimable pour garantir le bon déroulement de la transition démocratique. Dans les villes du Maroc et de la Tunisie, l’effervescence politique et le regain d’intérêt public engendrés par le Printemps arabe doivent maintenant se traduire par des formes de participation publique répondant directement aux exigences accrues de la population, et par exemple par des panels de citoyens et de jeunes et des partenariats avec la société civile. Les communes européennes pourraient communiquer leurs approches en la matière et les partager avec leurs homologues arabes.

8. Les changements en cours dans ces pays sont une chance de renouveler la coopération transfrontalière. L’année 2012 verra probablement la réouverture de la frontière terrestre entre le Maroc et l’Algérie, fermée depuis 1994, en tant que mesure de confiance destinée à amorcer un réchauffement des relations et à améliorer la coopération intrarégionale.  Les collectivités locales des zones frontalières qui devraient être le plus profondément touchées par cette mesure devront bénéficier de l’expérience européenne en la matière. La coopération transfrontalière européenne au niveau local a montré qu’elle pouvait être extrêmement bénéfique pour les collectivités frontalières, à la condition d’être convenablement gérée. La frontière entre la Tunisie et la Libye a connu une forte activité depuis le soulèvement libyen qui a conduit à la chute du régime de Kadhafi. Toutefois, du fait de l’instabilité politique actuelle de la Libye, il est encore difficile d’envisager une coopération transfrontalière entre les collectivités locales.

9. La corruption et le manque de transparence et de responsabilité restent dans les deux pays des problèmes nuisant gravement à la bonne gouvernance au niveau local. Le Code de conduite européen du Congrès relatif à l’intégrité politique des élus locaux et régionaux est à ce sujet particulièrement pertinent. Le Conseil de l’Europe prévoit déjà, dans le cadre de ses programmes de coopération 2012-2014 avec la Tunisie et le Maroc, d’associer les deux pays aux activités du GRECO et de MONEYVAL. La rapporteure estime que cette coopération devrait accorder une attention particulière au problème de la corruption aux niveaux local et régional. 

10. La rapporteure considère qu’une participation et une responsabilisation plus grandes des femmes dans le processus politique seront cruciales pour le développement démocratique des deux pays.

PROPOSITIONS D’AMENDEMENTS AU projet DE RESOLUTION

Amendement 1

Au paragraphe 6.b, remplacer « la participation des citoyens (y compris en particulier les femmes et les jeunes) » par « la participation et la responsabilisation des femmes dans l’accès aux fonctions électives et la participation des citoyens, notamment des femmes et des jeunes »

Amendement 2

Dans le paragraphe 6.c, remplacer « élections locales et régionales au Maroc » par « élections locales, provinciales et régionales au Maroc »

Amendement 3

Après le paragraphe 6.c, insérer un nouvel alinéa ainsi libellé :

« proposer, en coopération avec la Commission de Venise, son savoir-faire et son expérience pour la préparation et l’organisation des élections, afin de permettre que les prochaines élections locales et régionales dans les deux pays se déroulent dans les meilleures conditions possibles ; ».

Amendement 4

Dans le paragraphe 6.f, remplacer « en leur offrant un statut spécial auprès du Congrès » par « en offrant un statut spécial auprès du Congrès à une délégation d’élus locaux et régionaux de chacun de ces pays »

Amendement 5

Dans le paragraphe 6.j, après « le Forum des villes euro-arabes », insérer « le COPPEM, l’Organisation des villes arabes (ATO) »

Amendement 6

Dans le paragraphe 6.h, remplacer « de programmes de développement des capacités » par « de programmes de développement des capacités et d’activités sur la diplomatie des villes »

Amendement 7

A la fin du paragraphe 6, insérer un nouvel alinéa ainsi libellé :

« partager leur expérience de la coopération transfrontalière avec les collectivités locales et régionales des régions frontalières de la Tunisie et du Maroc, afin d’aider ces collectivités à tirer parti d’une telle coopération ; »

Amendement 8

A la fin du paragraphe 6, insérer un nouvel alinéa ainsi libellé :

« proposer l’expérience et le savoir-faire du Congrès pour la finalisation par le Parlement marocain du projet de loi sur la régionalisation avancée, avant son adoption ; »

Amendement 9

A la fin du paragraphe 6, insérer un nouvel alinéa ainsi libellé :

« apporter l’expérience et le savoir-faire du Congrès à la commission de l’Assemblée nationale constituante de Tunisie en charge de l’autonomie locale afin de veiller à ce que la démocratie locale soit convenablement définie dans la nouvelle constitution ; »


Propositions d’amendements au projet de recommandation

Amendement 1

A la fin du paragraphe 5, insérer un nouvel alinéa ainsi libellé :

« veiller, dans le cadre de ses programmes de coopération 2012-2014 avec le Maroc et la Tunisie, à ce que les activités relatives à la lutte contre la corruption et le blanchiment d’argent accordent une attention particulière à la dimension locale et régionale de ces problèmes »



[1] L : Chambre des pouvoirs locaux / R : Chambre des régions

GILD : Groupe Indépendant et Libéral Démocratique du Congrès

PPE/DC : Groupe Parti Populaire Européen - Démocrates Chrétiens du Congrès

SOC : Groupe Socialiste du Congrès

ECR : Groupe des Conservateurs et Réformistes européens

NI : Membre n’appartenant à aucun groupe politique du Congrès

PAP : Pas d’affiliation politique

[2] Avant-projet d’avis approuvé par la Commission de la gouvernance le 31 mai 2012.

Membres de la commission :

K.-H. Lambertz (Président), B.-M. Lövgren (1ère Vice-Présidente), E. Özkarsli (2ème Vice-Président), I. Henttonen (3ème Vice‑présidente), R. Aliyev, M. Aygun, D. Barisic, N. Berlu, B. Biscoe, W. Borsus, M. Chernishev (remplaçant: V. Novikov), D. Chirtoaca, L. Ciriani, G. Cobzac, M. Cohen (remplaçante: A. Vassallo), I. De La Serna Hernaiz, B. Degani, S. Dickson, C. Martins Do Vale Cesar, K. Dubin, A. Ü. Erzen, H. Feral, P. Filippou, A. Fusco Perrella, G. Gerega, G. Berit Gjerde, V. Golenko, O. Goncharenko, A. Gravells, M. Hegarty, I. Henttonen, K. Hilber, L. Iliescu, V. Kadokhov, P. Karleskind, I. Khalilov, O. Kidik, V. Kress, A. Langner, S. Lazic, E. Lindal, O. Luk’ianchenko, C. Mayar, M. Mahmutovic, J. Manninger, C. Marini, M. Mazur, C. Mauch, J. McCabe, A. Mediratta, J. Mend, B. Mennel, M.-M. Mialot-Muller, A. Mimenov, E. Mohr, M. Mugosa, G. Neff, A. Nemcikova, V. Nersisyan C. Nicolescu, R. Nwelati, N. Obrycki, F. Pellegrini, J. Pulido Valente, G. Roger, S. Röhl, B. Rope, T. Rossini (remplaçant: V. Broccoli), M. Sabban, C. L. Schroeter, P. Sedlacek, T. Simpson-Laing, A. Stark, N. Stepanovs, A. Stoilov, D. Suica, L. Swietalski, R. Tirle, S. Tobreluts, A. Traag, S. Ugrekhelidze, P. Vargas Maestre, E. Verrengia, P. Wies, M. Yurevich.

N.B. : Les noms des membres qui ont pris part au vote sont imprimés en italique.

Secrétariat de la commission : T. Lisney et N. Howson.