Strasbourg, le 8 novembre 2013                                                           CDLR(2013)29

                                                                                      Point E.4 de l'ordre du jour

COMITE EUROPEEN SUR LA DEMOCRATIE LOCALE ET REGIONALE

(CDLR)

RAPPORT SUR LE SEMINAIRE POUR SURMONTER LES OBSTACLES A LA COOPERATION TRANSFRONTALIERE

A GORIZIA / NOVA GORICA

Pour information

Note du Secrétariat

établie par la

Direction de la gouvernance démocratique

Service des institutions et de la gouvernance démocratiques


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Ce document est public. Il ne sera pas distribué en réunion. Prière de vous munir de cet exemplaire.


Introduction

Les 18 et 19 octobre 2013, le séminaire européen intitulé « Outils, méthodes et pratiques de coopération transfrontalière » a eu lieu à Gorizia (IT) et Šempeter – Vrtojba (SLO) respectivement. Ce séminaire était organisé conjointement par le Conseil de l'Europe et l'Institut de sociologie internationale de Gorizia (ISIG).

 

Le séminaire avait pour but de faire l’inventaire des pratiques et solutions qui existent déjà pour faciliter cette coopération. Il a permis un échange des meilleures pratiques et un partage de l’expérience sur la base des informations fournies par les Etats membres du Conseil de l’Europe, les associations et les collectivités locales/régionales, rassemblées en vue de constituer un Manuel sur des solutions concrètes pour surmonter les obstacles à la coopération transfrontalière, conformément au mandat du Comité européen sur la démocratie locale et régionale (CDLR).

De par la localisation géographique du séminaire et au regard de l’expertise particulière d’ISIG, l’expérience de coopération entre les collectivités locales italiennes et slovènes, ainsi que celles de la région du Frioul-Vénétie-Julienne et de ses voisins a été examinée plus amplement.

Il a été particulièrement intéressant de prendre connaissance de l’expérience des facilitateurs ou médiateurs transfrontaliers désignés par certains Etats ou régions d’Europe afin soit de promouvoir la coordination au niveau national, soit de faciliter la coopération et le dialogue transfrontaliers, ou de faire les deux.

APERÇU DU PROGRAMME

A Gorizia, le séminaire a été ouvert par le président de l’ISIG, M.Roberto Collini. Le maire de Gorizia, M. Ettore Romoli, le maire de Šempeter-Vrtojba, M. Milan Turk, le Président de la Province de Gorizia, M. Enrico Gherghetta et le Vice-Président du Comité européen sur la démocratie locale et régionale (CDLR), M. Paul-Henri Philips ont également pris la parole.

SEANCE I – LA CONTRIBUTION DU CONSEIL DE L’EUROPE A UNE EUROPE SANS CLIVAGES

La séance a été présidée par M. Paul-Henri Philips, Vice-Président du CDLR. Les principaux orateurs en ont été Mme Breda Pečan, rapporteur sur la coopération transfrontalière du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux et M. Auke van der Goot, ancien président du Comité d’experts sur la coopération transfrontalière.  Voici quelques enseignements tirés de la discussion :

·         les instruments juridiques sont la clé de la coopération transfrontalière s’ils sont correctement mis en œuvre ; les principaux instruments sont la Convention de Madrid et ses protocoles ;

·         les cadres pour la  coopération intergouvernementale, comme le CDLR, sont très efficaces pour promouvoir le dialogue et l’échange d’informations et deviennent des vecteurs essentiels pour la coopération directe bilatérale et multilatérale ;


·         les  éléments de preuve de la coopération et du dialogue transfrontaliers abondent, mais les différences de structures et de cultures administratives et législatives entre les Etats membres peuvent être un obstacle à une coopération harmonieuse ;

·         les différents instruments juridiques de coopération transfrontalière facilitant la coopération entre institutions locales se sont avérés efficaces. Cependant, le Conseil de l'Europe a encore un rôle important à jouer en tant que facilitateur, étant donné qu’une coopération transfrontalière plus extensive entre les Etats membres conduira à de nouvelles questions de gouvernance et de politiques, qui devront être traitées au niveau européen approprié ;  

·         les gouvernements centraux ont un rôle majeur à jouer pour trouver et mettre en œuvre des solutions pragmatiques aux problèmes multilatéraux et bilatéraux complexes ;

·         la coopération transfrontalière est facilitée par l’autonomisation des collectivités locales et son succès dépend avant tout de la volonté de coopération et d’engagement au niveau local.

 

SEANCE II – LE ROLE DES AGENCES ET INSTITUTIONS NATIONALES S’AGISSANT DE FACILITER LA COOPERATION TRANSFRONTALIERE

La session a été présidée par Mme Vesna Tomsič, Conseiller de la Province de Gorizia. Le rôle des pouvoirs publics en tant qu’acteurs/promoteurs de la coopération transfrontalière,  l’expérience des agences nationales et la contribution d’organisations multilatérales ont fait l’objet des débats. Les intervenants furent M. Franco Iacop (Italie), Président du Conseil régional du Frioul-Vénétie-Julienne, M. Joël Meyer (France), Consul général de France à Milan, Nóra Ivády (Hongrie), chef du Service de coopération transfrontalière pour l’administration territoriale publique, M. Stefan Kupers (Pays-Bas), conseiller international auprès du Commissaire du Roi de la province de Limburg, Mme Anna-Karina Kolb (Suisse), Service des affaires régionales, de l’économie et de la santé, République et Canton de Genève, M. Edwin Lefebre (Belgique), Directeur adjoint, Gouvernement flamand, ministère chargé des Affaires intérieures, M. Alain de Muyser, Secrétaire général adjoint de l'Union du BENELUX, M. Gyula Ocskay, Secrétaire général du CESCI.

La séance a montré les expériences de coopération transfrontalière dans différents domaines, en fournissant exemples, bonnes pratiques et possibilités de développement.

Les principaux sujets abordés peuvent être résumés comme suit :

·         Small Project Fund, mode de financement de coopération territoriale disponible sur 2007-2013. Des activités au niveau transfrontalier ont été financées dans la région du Frioul-Vénétie-Julienne, comme la maintenance /le déblaiement de sites archéologiques à Aquilée – collaboration fonctionnelle d’étudiants des régions du Frioul-Vénétie-Julienne, de Venise et de Carinthie ;


·         le rôle des ambassadeurs chargés des politiques de voisinage et des questions transfrontalières. L’ambassadeur sert d'intermédiaire entre l'Etat central et les collectivités territoriales afin de faciliter leur coopération avec leurs homologues de l’autre côté de la frontière ;

·         en s’inspirant de l’exemple et de la pratique de la Mission opérationnelle transfrontalière française – qui prodigue des conseils et un soutien aux collectivités locales françaises en élaborant des projets de coopération transfrontalière adaptés aux subventions de l’UE – le CESCI a été créé en vue de servir de plate-forme aux Etats d’Europe centrale et à leurs collectivités locales dans l’élaboration de projets de coopération ;

·         l’observation des tendances démographiques, commerciales, de la richesse et des déplacements au-delà des frontières est essentielle pour identifier les besoins et les solutions les plus adaptées pour les collectivités territoriales.

L’expérience de la province de Limburg, située entre le sud des Pays-Bas et la Rhénanie du Nord-Westphalie (Allemagne), a été discutée. La province et le Land ont des compétences législatives et exécutives différentes ; cependant, les activités visant à accroître la coopération dans différents domaines sont activement encouragées par les deux régions, avec le soutien de l’État central. L’innovation et les technologies de l’information sont les principaux aspects de cette collaboration (coopération entre universités). Le canton de Genève développe une forte coopération avec les territoires français voisins et les autorités françaises dans le domaine des transports locaux, des services publics et des déplacements au-delà des frontières.

L’Union du BENELUX fournit un cadre flexible et efficace pour faciliter la coopération transfrontalière entre la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg dans un certain nombre de domaines, notamment la sécurité policière, la gestion de la crise, la gestion de l’immigration et la lutte contre la fraude fiscale ; elle s’est avérée être une inspiration pour l’Union européenne et les pays du monde entier lorsqu’il s’agit d’établir des mécanismes visant à faciliter la coopération transfrontalière.   

SEANCE III – LA COOPERATION TRANSFRONTALIERE EN EUROPE : PERSPECTIVES

Cette session a été présidée par M. Alfonso Zardi, Chef du Service des institutions et de la gouvernance démocratiques du Conseil de l’Europe. Les orateurs en furent d’une part M. Daniele Del Bianco, directeur de l’ISIG, et Monsieur le professeur Alberto Gasparini, qui sont intervenus sur le projet de manuel en vue de surmonter les obstacles à la coopération transfrontalière, les différents rapports  SWOT et l’Aperçu produit au fil des ans par l’ ISIG et le Conseil de l’Europe, et, d’autre part, Mme Milena Grion, de l’institut de formation FORSER sur la formation de l’administration publique pour la coopération transfrontalière, et M. Dejan Valentinčič, de l’école des hautes études sociales de Nova Gorica, qui ont parlé de la création de liens entre les groupes minoritaires de la frontière italo-slovène.

 


La discussion a permis de tirer les enseignements suivants : 

·         Afin d’élaborer un manuel utile, il convient de développer une méthodologie adéquate. L’importance  des indicateurs SMART est soulignée comme moyen d’identifier la bonne question de recherche à poser afin de surmonter un obstacle.

·         Le manuel est un outil utile mais statique, et il faut envisager de le développer en une plate-forme virtuelle « vivante » pour un partage d’expériences. 

·         La manière la plus efficace de faciliter la coopération est la méthodologie de l’atelier, afin de donner aux gens la possibilité de pratiquer ce qu’ils ont appris de leurs expériences. Les visites sont également importantes, tout comme les critères visant à établir une comparaison entre les territoires. Une approche multi-niveaux est essentielle en la matière, en particulier pour la définition des objectifs de coopération.

·         L’analyse SWOT se fonde sur 53 variables qui portent sur des facteurs internes (forces et faiblesses) et externes (opportunités et menaces) à la coopération transfrontalière. Ces variables sont appliquées à 53 frontières à travers l’Europe (de la Norvège – Russie à la Bulgarie – Turquie) et aboutissent à des résultats indiquant quelle est la meilleure stratégie à adopter pour surmonter les obstacles en s’appuyant sur les points forts.

·         Il existe trois niveaux d’Eurorégions : transfrontalière, réseaux fonctionnels et macro-infrastructures, qui peuvent coexister et ne s’excluent pas mutuellement. En Europe, la région de type macro-infrastructures est celle qui est la plus utilisée, car il existe un vaste réseau de transports.

·         Les fonctionnaires de l’administration publique ont besoin d’être formés pour envisager la coopération transfrontalière comme une pratique et une méthode types apportant des résultats concrets aux citoyens. 

Il importe aussi de mettre l'accent sur la société parce que la coopération part de la base. Par exemple, ces dernières années, de nouvelles initiatives ont été développées au niveau local en Slovénie, où l’italien est enseigné comme langue seconde au jardin d’enfants de Nova Gorica dans le but non seulement d’enseigner la langue du voisin, mais aussi d’attirer l’attention des enfants italiens pour les encourager à venir à l’école de l’autre côté de la frontière.

SEANCE  IV – L’EXPERIENCE DE L’ITALIE ET DE LA SLOVENIE EN MATIERE DE COOPERATION TRANSFRONTALIERE

Cette séance a été présidée par Mme Laura Comelli, Autorité de management, Programme opérationnel Italie-Slovénie. Elle a porté sur des exemples pratiques de coopération transfrontalière dans le domaine du tourisme (Mme Alice Venaruzzo, coordinatrice du projet Turismo FVG et M. Gorzad Skrt, directeur de Spirit Slovenia en Italie), ainsi que sur les modalités pratiques du fonctionnement et de l’action sur le terrain du GECT-GO en matière de santé, culture et aménagement du territoire (Mme Sandra Sodini, directrice GETC-GO, M. Bernardo Spazzapan, coordinateur de la commission de la santé, M. Boris Nemec, coordinateur de la commission de la culture). Parmi les orateurs figuraient également Mme Vesna Tomsič et M. Enrico Gherghetta (Province de Gorizia), Mme Mateja Zoratti (Nova Gorica) et Mme Anita Manfreda (Šempeter-Vrtojba).


Quelques idées qui ressortent du groupe :

·         Une initiative innovante de coopération transfrontalière entre les agences de tourisme régionales sur la frontière Italie – Slovénie  (Turismo FVG – Spirit Slovenia) – afin de promouvoir une exploration transfrontalière de cette zone, dans le cadre des célébrations du centenaire de la Première Guerre mondiale.

·         Le GECT- GO implique les municipalités de Gorizia, Nova Gorica et Sempeter-Vrtojba. Il est géré par une instance de 14 membres, un président et un directeur, qui ont été désignés pour développer des infrastructures pour  75 000 habitants.

·         Le GECT- GO travaille à un plan stratégique sur les points suivants : a) la mobilité urbaine ; b) les infrastructures de santé ; c) le rapprochement des  habitants pour créer des connexions dans le système urbain.

·         Il faut améliorer les systèmes éducatifs de façon à promouvoir depuis la base une « culture transfrontalière ». La région de la frontière entre l’Italie et la Slovénie est une porte ouverte sur l’Est de l’Europe. 

·         Il est aussi essentiel de créer des possibilités d’étudier ensemble et d’échanger leurs expériences pour des étudiants qui viennent d’Autriche, d’Allemagne et d’Europe de l’Est afin de développer un nouveau centre de recherche, voire de mutualiser les ressources pour faire face à la crise économique.  

·         Plusieurs projets qui sont actuellement mis en œuvre au niveau transfrontalier par les municipalités impliquées dans le GETC- GO (énergie, paix, éducation, transports, santé, etc.) montrent que le potentiel est très élevé. 

·         L’importance du capital social est soulignée. Ce capital pourrait être utilisé pour générer et promouvoir une coopération informelle entre les divers acteurs de la coopération transfrontalière, mettant ainsi en application une approche de la coopération transfrontalière de la base vers le sommet

SEANCE V – COMMENT ETABLIR UNE VERITABLE GOUVERNANCE MULTINIVEAUX A L’ECHELON TRANSFRONTALIER ?

Cette dernière séance a lieu à Šempeter/Vrtojba et a été présidée par M. Paul-Henri Philips, Vice- Président du CDLR.

Quelques points forts :

 

·         Les initiatives qui représentent de bonnes pratiques pour le dialogue de la coopération transfrontalière sont l’école de langues étrangères de Rovigno, choisie par l’Union européenne comme un exemple de dialogue, Kepas, un programme d’échanges culturels dans l’Adriatique qui vise à créer un système éducatif plus inclusif, et la promotion de l’entreprenariat féminin entre la région d’Istrie et celle du Frioul-Vénétie Julienne.


·         De nombreuses initiatives sont nées de la bonne volonté et de la détermination politique ; cependant, à un moment donné, elles doivent disposer d’un cadre juridique approprié pour se consolider dans la durée. La clé de la réussite est que les collectivités locales et l’État central s’approprient ce processus.

·         Les instruments juridiques en vigueur au niveau européen semblent être suffisants et appropriés, cependant, il est important que les conventions (Protocole n° 3 à la Convention-cadre de Madrid) soient ratifiées et puissent être utilisées par les collectivités locales (« ouvrir la porte coulissante en verre pour que les livres se trouvant sur l’étagère puissent être mis à la disposition des lecteurs »).

·         Le rôle central du lobbying pour mettre les citoyens (organes privés) en relation avec les institutions est souligné. Dans ce sens, le gouvernement n’est pas un partenaire de la coopération transfrontalière mais agit plutôt comme un facilitateur. 

·         Il n’y a pas de préférence entre les approches de la base vers le sommet et inversement pour la définition des politiques de coopération transfrontalière.

·         Les différentes phases et différents objectifs nécessitent des méthodologies différentes qui peuvent être combinées afin de trouver des solutions optimales.

Conclusions

Le nombre de participants était environ 220 (le 1er jour) et environ 100 (le 2e jour), dont les intervenants,  les membres du CDLR, les collectivités territoriales italiennes et slovènes, les représentants des organes de coopération transfrontalière, les étudiants et la presse.  

Les informations rassemblées lors du séminaire ont été utilisées par l’ISIG pour mettre à jour le manuel sur la manière de surmonter les obstacles, dont la version finale est soumise au  CDLR pour examen et approbation (voir document CDLR(2013)30).

L’événement en soi était une contribution concrète à la mise en œuvre des activités de coopération transfrontalière et à la consolidation de l’esprit et de la pratique de la coopération entre les collectivités territoriales au-delà des frontières en Italie, Slovénie et Croatie.

Action requise

Le CDLR est invité à prendre note des informations ci-dessus concernant le séminaire et à les porter à l’attention du Comité des Ministres en tant que résultats concrets de ses travaux sur la coopération transfrontalière, en plus de l’élaboration du manuel.