Strasbourg, le 27 septembre 2010                                                           CDLR(2010)30

Point 3.6 de l’ordre du jour

                                                                                                                           

COMITE EUROPEEN SUR LA DEMOCRATIE LOCALE ET REGIONALE (CDLR)

FINANCEMENT CENTRAL DES NOUVELLES COMPETENCES

ATTRIBUEES AUX COLLECTIVITES LOCALES

Pour adoption

Note du Secrétariat

établie par la

Direction générale de la démocratie et des affaires politiques

Direction des institutions démocratiques


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Ce document est public. Il ne sera pas distribué en réunion. Prière de vous munir de cet exemplaire.


Introduction

Le Comité LR-FS a examiné le projet de lignes directrices relatives à la compensation financière des compétences transférées aux collectivités locales et régionales, élaboré par l’expert consultant Jørgen Lotz (Danemark), à deux reprises : une première fois à la réunion des 10 et 11 décembre 2009 et une seconde fois à la réunion des 28 et 29 juin 2010. Le LR-FS s’est maintenant entendu sur la présente version de ce texte.

Action requise

Le Comité est invité à approuver les lignes directrices et à décider d’autres actions éventuelles.


Projet de lignes directrices pour le financement des nouvelles compétences des collectivités locales par des autorités de niveau supérieur[1].

Ligne directrice 1 : Compensation pour les nouvelles compétences, principe de responsabilité

i.        Lorsque des autorités de niveau supérieur décident d’imposer de nouvelles obligations et d’attribuer de nouvelles compétences aux collectivités locales ou lorsqu’elles suscitent des attentes générant des charges nettes supplémentaires pour ces dernières, le principe de responsabilité veut qu’une compensation soit accordée aux collectivités locales. Dans le présent document, ces cas de figure sont assimilés à de nouvelles compétences.

ii.       Les collectivités locales doivent être consultées pour estimer dans quelle mesure elles feront usage de ces nouvelles compétences.

iii.     Les nouvelles compétences réclamées par les collectivités locales entraînent un alourdissement de la fiscalité locale. Le partage des charges nettes supplémentaires générées peut toutefois se justifier dans une certaine mesure en vertu du principe de responsabilité.

iv.     Lorsque des décisions du niveau supérieur se traduisent par une baisse des charges nettes supportées par les collectivités locales, le principe de responsabilité justifie également que les économies réalisées au niveau local soient transférées au niveau supérieur. Cette compensation négative se justifie même lorsque la réalisation d’économies suppose que les collectivités locales prennent des initiatives dans ce sens. La mesure dans laquelle les collectivités locales devraient exploiter les nouvelles possibilités d’économies doit faire l’objet de négociations avec elles.

v.       Faire payer aux collectivités locales des services jusque-là gratuits devrait donner lieu à une compensation. Les charges nettes supportées au niveau local doivent également donner lieu à compensation lorsque les autorités de niveau supérieur plafonnent les redevances perçues par les collectivités locales ou lorsqu’elles en exemptent certaines catégories de population.

Ligne directrice 2 : Règlement en cas de sous-estimation ou de surestimation des charges

Des contrôles postérieurs peuvent faire apparaître des différences entre les charges nettes effectives et les estimations initiales. Toutefois, pour des raisons administratives, il faut prévoir des règles limitant (en types et en quantité) les cas dans lesquelles des discussions sur la compensation peuvent être rouvertes.

Ligne directrice 3 : Compensation pour transfert de fonctions

i.     Les conséquences économiques du transfert d’une compétence d’un niveau supérieur aux collectivités locales ne visant pas à changer le niveau de service rendu à l’usager devraient donner lieu à compensation. Cette compensation doit se baser sur des estimations de la charge nette attendue de l’exercice de la nouvelle compétence concernée. Le coût du transfert de personnel, comprenant une estimation des salaires et avantages salariaux, doit être inclus. Le coût des obligations découlant des droits à pension acquis du personnel transféré doit également être inclus dans la compensation.

ii.  La propriété des bâtiments, terrains et autres biens nécessaires à la poursuive du service devrait être transférée. Les dettes liées à ces biens devraient également être transférées, dans la mesure où elles découlent du coût (raisonnable) de leur achat et/ou de leur amélioration, tandis que le service de la dette devrait donner lieu à compensation. S’il est jugé (après consultation) que des améliorations sont nécessaires pour respecter les normes en vigueur, les collectivités locales devraient recevoir une compensation pour le coût raisonnable de ces améliorations (voir 3), indépendamment du fait que celles-ci sont financées par leurs réserves de liquidités ou par le recours à l’emprunt.

Ligne directrice 4 : Pas de compensation en cas de réglementation générale

i.     Aucune compensation n’est due lorsque le niveau administratif supérieur diminue les subventions, plafonne le taux des impôts locaux ou la part des recettes fiscales redistribuées dans le but de réduire les dépenses des collectivités locales pour des raisons de politique macroéconomique. Dans ce cas, le but, à savoir la réduction des dépenses locales, doit être annoncé clairement par le niveau administratif supérieur.

ii.  Aucune compensation n’est due en cas de changement des charges nettes locales découlant de modifications de la fiscalité générale (ou de la législation du travail) dont les effets sont identiques pour le secteur privé et pour les collectivités locales, à moins que leurs conséquences pour les collectivités locales soient disproportionnées.

ii.     Des changements dans la répartition des subventions à des collectivités locales données ne doivent pas donner lieu à compensation lorsque l’enveloppe globale distribuée reste inchangée.

Ligne directrice 5 : Formalisation du cadre des compensations

Le cadre juridique des règles de compensation pour les collectivités locales doit être conçu de manière à garantir que le niveau supérieur soit tenu de compenser intégralement et selon les modalités prescrites les charges nettes supportées par les collectivités locales en raison des nouvelles compétences qui leur sont attribuées. Il est préférable que cette obligation soit prévue par la loi.

Ligne directrice 6 : Modes de compensation

i.      La compensation peut prendre la forme de changements portant sur d’autres compétences et ayant un effet opposé neutralisant l’impact sur les charges nettes supportées par les collectivités locales.

ii.     La compensation n’est pas nécessaire pour les services normalement financés par des redevances perçues auprès des usagers.

iii.    Dans tous les cas concernant des services financés par la fiscalité, la compensation doit se faire sous forme de subventions.

iv.   La compensation consistant à autoriser les collectivités locales à lever de nouveaux impôts locaux est à éviter car elle brouille et affaiblit la responsabilité.


Ligne directrice 7 : Privilégier la compensation sous forme de subventions générales

i.    Il est préférable d’accorder d’emblée les compensations sous forme de subventions générales.

ii.   En règle générale, les subventions affectées ne doivent pas être utilisées en compensation car elles tendent à empêcher les collectivités locales d’agir de la manière la plus rentable. Il convient de recourir à des subventions affectées (proportionnelles) uniquement

a) lorsque la nouvelle compétence attribuée aux collectivités locales est relativement coûteuse,

b) lorsque les charges nettes se répartissent très inégalement entre les différentes collectivités locales et

c) lorsqu’il n’existe aucun indicateur objectif permettant d’établir de manière satisfaisante la répartition des charges.

iii. Le recours à des subventions affectées doit être assujetti à la condition explicite qu’elles seront remplacées par des subventions générales au terme d’une période donnée de quelques années.

Ligne directrice 8 : Meilleure responsabilité au niveau administratif supérieur

i)    Le principe de responsabilité pourrait être élargi pour s’appliquer à l’administration centrale. Tout ministère de niveau supérieur à l’origine de l’attribution de nouvelles compétences aux collectivités locales entraînant une hausse des charges nettes pour ces dernières devrait les compenser sur son propre budget ; de même, lorsqu’un ministère est à l’origine de modifications des compétences des collectivités locales qui se traduisent par des économies nettes pour ces dernières, il devrait en être récompensé par un transfert de ces économies sur son budget.

ii)Les charges nettes découlant de nouvelles compétences attribuées aux collectivités locales par le Parlement doivent être compensées par le ministère le plus directement concerné.

 

Ligne directrice 9 : Effets de précédent

Il peut arriver que l’estimation initiale de la charge nette entraînée par l’attribution d’une nouvelle compétence ne corresponde plus à la réalité en raison de décisions rendues par des tribunaux, des commissions de recours ou d’autres organes indépendants lorsque ces décisions ont valeur de précédent. Dans ce cas, les charges supplémentaires doivent donner lieu à compensation de la part de l’autorité de niveau supérieur.

Ligne directrice 10 : Responsabilité découlant de la réglementation de l’Union européenne

Dans les Etats membres de l’Union européenne et de l’Espace économique européen, les charges nettes supplémentaires liées à l’introduction de nouvelles compétences au niveau local en application de règles édictées par l’Union doivent être compensées par le niveau supérieur comme s’il était lui-même à l’origine de ces nouvelles compétences.


Ligne directrice 11 : Consultation des collectivités locales

i.  Des consultations avec les collectivités locales doivent avoir lieu pour toutes les questions relatives à l’attribution et au montant des compensations relatives à de nouvelles compétences.

ii. Ces consultations doivent avoir lieu le plus tôt possible lors de la phase d’élaboration de textes relatifs à de nouvelles compétences et les représentants locaux doivent disposer d’un délai raisonnable pour évaluer pleinement les charges nettes probables.

Ligne directrice 12 : Organisation des consultations

i.  Les consultations avec le niveau local doivent de préférence avoir lieu à des périodes déterminées de l’année, dans le cadre d’une structure permanente à laquelle participent des représentants des deux niveaux administratifs.

ii. Les consultations peuvent être entamées entre le ministère concerné et la partie locale, mais il est souhaitable que l’autorité locale puisse saisir le ministère compétent pour l’ensemble des questions économiques et de responsabilité s’il n’est pas possible de parvenir à un accord sans son intervention.

iii. Toute proposition d’attribution de nouvelles compétences aux collectivités locales soumise au Parlement doit s’accompagner d’informations précisant si un accord de compensation a été conclu avec les collectivités locales.

iv. Il est recommandé de fixer un seuil minimal de compensation pour les nouvelles compétences.

Commentaires

Remarques générales


Commentaire du paragraphe 1 : Compensation pour les nouvelles compétences, principe de responsabilité

Alinéa i) Les décisions prises par les niveaux administratifs supérieurs peuvent avoir des conséquences pour les collectivités locales et leur imposer des charges nettes supplémentaires. Pour éviter qu’il en résulte une pression indésirable sur les finances locales, l’application du principe de responsabilité – qui veut que celui qui prend les décisions en assume la charge financière – est généralement acceptée. Avec ce principe, il est difficile pour le niveau administratif supérieur de prendre des décisions populaires prévoyant de nouvelles dépenses publiques en laissant l’échelon local payer l’addition ; ce principe permet donc de réduire la pression sur la fiscalité locale. C’est le principal argument en faveur du dédommagement des collectivités locales pour les charges nettes générées par les nouvelles compétences qui leur sont attribuées ou pour la baisse des recettes locales due à des décisions d’autorités de niveau supérieur.

Les nouvelles compétences qui doivent faire l’objet d’une compensation comprennent les missions attribuées aux collectivités locales sur décision du niveau administratif supérieur car lorsque celui-ci donne de nouvelles attributions aux collectivités locales, il entend généralement qu’elles soient exercées, les collectivités locales se trouvant ainsi soumises à des pressions pour s’exécuter. De même, lorsque le gouvernement central crée des attentes en faisant miroiter la création de nouveaux services locaux ou l’amélioration des services existant, il doit y avoir compensation. Enfin, les collectivités locales peuvent également avoir à supporter une charge supplémentaire en raison d’une diminution de leurs recettes due à des changements de circonstances.

Alinéa ii) En cas de nouvelles attributions ou de nouvelles attentes à l’égard des collectivités locales, le montant des charges nettes qui doit donner lieu à compensation devra se baser sur des estimations. Ces estimations devraient faire l’objet de consultations avec l’échelon local.

Alinéa iii) Lorsque les nouvelles compétences ont été réclamées par les collectivités locales, le principe de responsabilité peut justifier des consultations sur le partage des charges nettes entre les collectivités locales et le ministère concerné au premier chef, ce qui peut permettre d’alourdir la fiscalité locale.


Alinéa iv) En cas de modifications des règles entraînant une baisse des dépenses obligatoires au niveau local ou de nouvelles possibilités d’économies inexistantes auparavant, la compensation devrait se faire dans le sens inverse, du niveau local au niveau supérieur. C’est également le cas lorsque des économies peuvent être réalisées à la condition qu’une initiative en ce sens soit prise par les collectivités locales ; les charges nettes soumises à compensation doivent alors faire l’objet de consultations entre les deux niveaux.

Alinéa v) Lorsque les collectivités locales doivent payer des services auparavant gratuits, il en résulte pour elles une charge nette, comme dans le cas d’une nouvelle compétence, charge qui devrait donner lieu à compensation. Il en est de même pour les charges nettes supportées au niveau local lorsque les autorités de niveau supérieur plafonnent les redevances que les collectivités locales peuvent percevoir ou lorsqu’elles en exemptent certaines catégories de population.

Commentaire du paragraphe 2 : Règlement en cas de sous-estimation ou de surestimation des charges

Des contrôles postérieurs peuvent faire apparaître des différences entre les charges nettes effectives et les estimations initiales. Dans ce cas, la question se pose de savoir si les autorités de niveau supérieur doivent compenser les pertes au niveau local résultant d’une sous-estimation et si elles peuvent récupérer les bénéfices dus à une surestimation. Pour éviter que le système de compensation ne soit surchargé et vu que le nombre annuel de nouvelles compensations peut être conséquent, il convient, pour des raisons administratives, de limiter la réglementation ultérieure et de ne l’autoriser, par exemple, que dans les cas où des montants substantiels sont en jeu et dans les cas où elle a été explicitement prévue. Dans ces derniers cas, l’incertitude doit être clairement délimitée (en clair, est-elle liée au nombre d’usagers ou au coût unitaire) lors de la fixation de la compensation initiale.

Commentaire du paragraphe 3 : Compensation pour transfert de fonctions

i)     L’impact sur les charges nettes de transferts de compétences d’un niveau administratif à l’autre doit être compensé. Le calcul du montant des charges nettes pose des problèmes particuliers. S’agissant du personnel transféré à une nouvelle autorité, la compensation devrait comprendre les salaires à verser par cette nouvelle autorité, toute convention relative aux futures conditions de travail et les coûts découlant des droits à pension acquis.

ii)  La propriété des bâtiments, terrains et autres biens nécessaires à la poursuive du service devrait être transférée. Les dettes liées à ces biens devraient également être transférées, dans la mesure où elles découlent du coût (raisonnable) de leur achat et/ou de leur amélioration, tandis que le service de la dette devrait donner lieu à compensation. S’il est jugé (après consultation) que des améliorations sont nécessaires pour respecter les normes en vigueur, les collectivités locales devraient recevoir une compensation pour le coût raisonnable de ces améliorations (voir 3), indépendamment du fait que celles-ci sont financées par leurs réserves de liquidités ou par le recours à l’emprunt.


Commentaire du paragraphe 4 : Pas de compensation en cas de réglementation générale

i)     Les changements apportés aux dotations générales le sont, dans certains cas, pour des raisons de contrôle macroéconomique et ont pour but d’amener les collectivités locales à réduire leurs dépenses. Dans ce cas, il n’y a pas lieu de compenser cette baisse mais le niveau supérieur doit indiquer clairement que l’objectif de cette baisse est de réduire les dépenses locales, de manière à ce qu’il soit clair que le principe de responsabilité n’entre pas en ligne de compte.

ii)   Il en est de même pour les changements apportés à la fiscalité générale qui ont les mêmes effets sur le secteur privé et sur les collectivités locales (comme la hausse des charges sociales) ou pour les modifications du droit du travail (concernant par exemple le salaire minium). Ces situations ne doivent donner lieu à compensation que lorsqu’elles ont un effet disproportionné sur les collectivités locales.

iii)  Un changement du montant des subventions accordées à des collectivités locales données sans modification du montant global des subventions, comme cela peut se produire en cas de réforme des systèmes de péréquation, ne justifie pas l’octroi de compensations.

Commentaire du paragraphe 5 : Formalisation du cadre des compensations

Il y a plusieurs moyens d’officialiser les procédures de compensation : obligations constitutionnelles ou juridiques, accords de coopération, règlements gouvernementaux et/ou parlementaires ou engagements fondés sur des bonnes pratiques. Le critère déterminant pour le choix de la méthode est sa capacité à dissuader le niveau supérieur de modifier les charges nettes supportées par les collectivités locales sans compensation. À cet effet, plusieurs méthodes sont valables, quoique chacune à sa manière et à sa mesure. L’une de ces méthodes est de faire avaliser les estimations des charges nettes supportées au niveau local par le plus haut responsable du ministère concerné. La publication des règles est un autre moyen de prévenir les écarts. Pour le niveau supérieur, le moyen le plus simple d’être tenu à pratiquer la compensation en faveur des collectivités locales est d’en ancrer les principes dans la loi ou la constitution.

Commentaire du paragraphe 6. Modes de compensation.

i)     La compensation peut se faire par d’autres changements dans les compétences locales qui ont un effet opposé neutralisant la hausse des charges nettes.

ii)   Pour les services financés par les redevances perçues auprès des usagers, la question de la compensation ne se pose pas.

iii)  Dans les autres cas, la compensation devrait se faire sous forme de subventions. Il a été montré que le financement par voie de subventions est la méthode de compensation habituelle dans les pays membres (CDLR, 2008).

iv) La perception de la responsabilité ultime des changements introduits serait brouillée et la responsabilité elle-même serait affaiblie si la compensation prenait la forme d’une autorisation donnée aux collectivités locales de lever de nouveaux impôts.


Commentaire du paragraphe 7 : Privilégier la compensation sous forme de subventions générales

Lorsque la compensation est à verser sous forme de subventions, il faut décider du type de subvention à utiliser.

i)    En principe, lorsque la compensation se fait par voie de subvention, elle devrait prendre la forme d’ajustement des dotations globales. L’expérience de plusieurs pays membres montre que, sur le long terme, les collectivités locales perdantes dans un cas de compensation seront probablement gagnantes dans un autre.

ii)   La compensation au moyen de subventions affectées est à éviter car le recours à ce type de subventions ne serait pas conforme aux dispositions de la Charte européenne de l’autonomie locale[2] (hormis pour les subventions d’équipement).

iii)   Néanmoins, le rapport 2008 du CDLR semble indiquer que la plupart des pays utilisent des subventions affectées jumelées car elles constituent le meilleur moyen de compenser les charges nettes supplémentaires supportées par les collectivités locales pour l’exercice de nouvelles compétences dans les cas où ces charges supplémentaires sont les plus élevées[3]. L’utilisation des subventions générales est souvent inopérante car il est difficile de trouver des indicateurs objectifs permettant d’accorder la subvention aux collectivités qui supportent les charges nettes supplémentaires. Il peut donc être difficile d’éviter totalement le recours aux subventions affectées pour procéder à la compensation, mais leur utilisation devrait être limitée au cas où les trois conditions suivantes sont réunies : la nouvelle compétence attribuée au niveau local est relativement coûteuse, les charges nettes sont inégalement réparties entre les collectivités locales et il n’existe pas d’indicateur objectif permettant de répartir les charges de manière satisfaisante au moyen de subventions générales.

iv)  L’utilisation de ces subventions affectées devrait être limitée à une période à préciser dès le départ, après quoi elles devront être remplacées par ajustement des subventions générales.

Commentaire du paragraphe 8 : Meilleure responsabilité au niveau administratif supérieur

L’introduction d’un système de compensation pour les nouvelles compétences tel que décrit au paragraphe 1 améliorera la responsabilité des collectivités locales, qui ne pourront plus reprocher au niveau supérieur de chercher à mettre en place des niveaux d’imposition excessifs. Mais une amélioration de la discipline interne pourrait aussi améliorer la responsabilité du niveau supérieur.

i)     Pour renforcer cette discipline interne au niveau supérieur, les pays membres pourraient adopter des règles budgétaires contraignant le ministère responsable à financer sur son propre budget la compensation charges que ses décisions entraînent pour les collectivités locales. Inversement, lorsqu’un ministère prend des décisions qui se traduisent par des économies nettes pour les collectivités locales, ces décisions devraient être récompensées par une augmentation correspondante de son budget. Plusieurs pays membres ont déjà introduit des règles de ce type, même si leur fonctionnement et leur faisabilité dépendent du système budgétaire utilisé au niveau supérieur.

ii)    Bien que les considérations de responsabilité ne l’imposent pas directement, les charges nettes découlant des nouvelles compétences attribuées au niveau local à l’initiative du Parlement devraient, lorsque c’est possible, donner lieu à une compensation par le ministère le plus directement concerné. En l’absence de compensation, la fiscalité locale se trouverait soumise, du fait de ces cas, à des pressions non voulues.

Commentaire du paragraphe 9 : Effets de précédent

Les décisions de justice qui constituent un précédent, comme les arrêts des cours constitutionnelles, peuvent être considérées comme un éclaircissement des obligations des collectivités locales. On peut y voir une clarification de règles existantes que le niveau supérieur ignorait jusqu’alors et n’avait pas prises en compte pour le calcul de la compensation initiale. Cette correction doit faire l’objet d’une compensation comme s’il s’agissait d’une nouvelle compétence locale. Il peut aussi arriver que le niveau supérieur ait institué des organes indépendants dont les décisions constituent des précédents. Les décisions de ces organes, émanations du niveau supérieur, doivent également donner lieu à compensation.

Commentaire du paragraphe 10 : Responsabilité découlant de la réglementation de l’Union européenne

Une grande partie de la législation et de la réglementation des Etats membres qui font aussi partie de l’Union européenne et de l’Espace économique européen découle de l’application de règlements et directives de l’Union qui peuvent entraîner une hausse des charges locales. Dans ce cas, il est difficile de recourir aux arguments de responsabilité pour décider s’il convient d’accorder une compensation. Si le niveau supérieur n’a peut-être eu qu’une influence limitée sur les règles communautaires, les collectivités locales en ont eu encore moins. L’Union européenne n’est tenue par aucune obligation de compenser les charges générées au niveau national par la mise en œuvre de décisions communautaires. La réglementation européenne soulève des questions de responsabilité pour lesquelles il n’y a pas de réponse claire. Toutefois, ces nouvelles compétences étant susceptibles d’entrainer un alourdissement de la fiscalité locale, une compensation par le niveau supérieur s’impose aussi dans ce cas.

Commentaire du paragraphe 11 : Consultation des collectivités locales

Le calcul des charges nettes supplémentaires générées par un changement des compétences locales ne découle pas toujours directement de la formulation des nouvelles compétences concernées. Des clarifications sont souvent nécessaires. L’encadré qui suit donne quelques exemples nécessitant une clarification et des estimations.


Exemples de cas dans lesquels une clarification des nouvelles compétences est nécessaire.

·         Il arrive que les niveaux supérieurs déclarent que le niveau des services locaux n’est pas acceptable. Bien qu’elles ne soient pas contraignantes, ces déclarations retiennent l’attention des médias. Il peut en résulter une pression sur la fiscalité locale à laquelle les collectivités locales peuvent difficilement résister. Les charges locales découlant directement de ce type d’incitation à engager des dépenses devraient faire l’objet d’une compensation, ce qui pourrait dissuader les ministres du niveau supérieur de se livrer à ce genre de déclarations. D’un autre côté, le droit des instances politiques du niveau supérieur à engager un débat politique doit être accepté sans qu’il faille envisager une compensation. La nécessité d’une compensation dépend de l’interprétation faite en l’espèce (paragraphe 1.i).

·         La mesure dans laquelle il sera fait usage des nouvelles compétences doit être estimée (paragraphe 1. ii).

·        « Il convient d’envisager la possibilité de compenser les charges entraînées par les travaux nécessaires pour améliorer l’état des bâtiments. » Il convient ici d’interpréter ce qui est considéré comme « nécessaire » (paragraphe 3, ii).

·         Il convient en outre de trancher si de nouvelles décisions (d’un tribunal, par exemple) ne font que préciser des compétences existantes qui donnent déjà lieu à compensation ou si elles constituent des nouvelles compétences entraînant des charges supplémentaires pour les collectivités locales et donnant droit à une compensation supplémentaire (paragraphe 9).

Lorsque le montant des charges nettes générées pour les collectivités locales doit être précisé (estimé), la compensation devrait être calculée en consultation avec le niveau local.

La consultation entre les différents niveaux administratifs présente des avantages même dans les cas laissant peu de marge aux précisions et aux estimations. Les décisions sont mieux comprises et mieux acceptées lorsque les instances locales sont entendues ; les consultations peuvent améliorer la mise en œuvre au niveau local. Les consultations sur l’ampleur et l’attribution de la compensation peuvent aussi entraîner une amélioration de la législation car le niveau supérieur en retire une meilleure connaissance de la situation concrète. Il est donc recommander de procéder à des consultations dans tous les cas donnant lieu à compensation.

Les consultations doivent avoir lieu le plus tôt possible lors de l’élaboration des textes, tout en tenant aussi compte de la confidentialité parfois nécessaire aux négociations lors du processus parlementaire d’élaboration de nouveaux textes législatifs ou réglementaires.


Commentaire du paragraphe 12 : Organisation des consultations

i)     Les modalités de consultation entre les autorités centrales et les collectivités locales varient considérablement d’un pays à l’autre (CDLR, 2008). Elles reposent toutefois généralement sur un organe politique permanent représentant les deux parties, souvent assisté d’une commission technique paritaire chargée de préparer les dossiers.

ii)    L’organisation des consultations devrait prévoir une instance de médiation pour les cas où il est difficile de parvenir à un accord. Il est recommandé que les consultations soient ouvertes à l’initiative du ministère responsable, le ministère en charge de la politique globale de dépenses devant toutefois pouvoir être saisi. En tout état de cause, la responsabilité ultime devrait toujours revenir au Parlement.

iii)   Toute proposition de législation soumise au Parlement devrait comporter des informations indiquant si un accord a été trouvé avec les collectivités locales sur le montant et la répartition de la compensation, de manière à permettre aux députés de s’informer plus en détail avant de prendre une décision sur cette proposition.

iv)  Les décisions relatives à la meilleure organisation possible des consultations doivent prendre en compte le coût administratif des différentes solutions. De plus, pour des raisons administratives, il est recommandé de fixer un seuil minimal pour la compensation de nouvelles compétences.

Références :

-          CCRE/CEMR. « Procédures de consultation dans les Etats européens » (non daté).

-          Conseil de l’Europe (1985) : Charte européenne de l’autonomie locale. STE no 122 – Autonomie locale. Strasbourg, 15.10.1985.

-          Conseil de l’Europe (2004) : Recommandation Rec(2004)1 du Comité des Ministres aux Etats membres sur la gestion financière et budgétaire aux niveaux local et régional.

-          Conseil de l’Europe (2005) : Recommandation Rec(2005)1 du Comité des Ministres aux Etats membres relative aux ressources financières des collectivités locales et régionales.

-          Rapport de pratique européenne du CDLR sur les pratiques des Etats membres en matière de financement des nouvelles compétences des collectivités locales. CDLR(2008)48



[1] Dans le présent document, le terme « collectivités locales » désigne l’ensemble des collectivités territoriales, quel que soit leur niveau, de la commune à la région.

[2] L’article 9 paragraphe 7 dispose que « Dans la mesure du possible, les subventions accordées aux collectivités locales ne doivent pas être destinées au financement de projets spécifiques. L'octroi de subventions ne doit pas porter atteinte à la liberté fondamentale de la politique des collectivités locales dans leur propre domaine de compétence. »

[3] CDLR (2008)48, p. 6.