Strasbourg, le 1 février 2005                                                                                  CCJE (2005)4

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CONSEIL CONSULTATIF DE JUGES EUROPEENS

(CCJE)

QUESTIONNAIRE RELATIF AU THEME

« JUSTICE ET SOCIETE »

Réponse de la

délégation de la France


1 justice et public

L’information du public sur le fonctionnement du système judiciaire est assurée de plusieurs manières, notamment :

– par des indications sur le rôle de la justice et sur son organisation qui peuvent être données dans le cadre des programmes éducatifs du système scolaire et qui s’accompagnent de visites des juridictions organisées pour les élèves ou de conférences  au sein des établissements scolaires avec des professionnels de la justice.

– par des brochures ou guides pratiques à la disposition du public dans divers lieux publics et les renseignements que peuvent procurer les Maisons de justice et du droit créées en application d’une loi sur l’aide juridique ou directement par les tribunaux et organisations professionnelles judiciaires ( par exemple les ordres d’avocats ).

– par les bureaux d’accueil qui peuvent parfois exister dans les tribunaux pour orienter et informer le public, par les permanences organisées  par les barreaux d’avocats et diverses associations.

– par les journées “portes ouvertes” parfois organisées par les juridictions pour faire connaître au public leurs activités.

– par les cours sur l’organisation judiciaire dispensés par les universités de droit.

– par les sites internet du ministère de la justice et de diverses juridictions ou autres organismes professionnels en rapport avec la justice, qui présentent l’ensemble des services fournis au public par la justice, donnent des indications sur la manière de saisir les tribunaux et la durée des procédures.

– par les sites internet, ou autres moyens de diffusion des informations, proposés par divers organismes, notamment ceux qui tendent à promouvoir les modes alternatifs de règlement des litiges.

Le public peut avoir connaissance de l’ensemble des textes applicables à la justice et des décisions judiciaires rendues par les plus hautes juridictions par un site internet d’accès gratuit:

Légifrance.

Des efforts importants doivent encore être accomplis pour simplifier le langage des actes juridiques et pour développer la clarté des décisions judiciaires, encore trop souvent peu compréhensibles pour les justiciables.

Une commission de réflexion sur l’éthique dans la magistrature a préconisé le renforcement de l’enseignement dispensé aux jeunes magistrats sur les questions de déontologie, qui incluent nécessairement l’amélioration des relations avec les justiciables, et a manifesté de l’intérêt pour la désignation, dans chaque tribunal, d’un chargé de communication ayant pour rôle de dispenser des informations sur le fonctionnement de l’institution judiciaire, étant précisé qu’un juge ne peut pas personnellement s’exprimer publiquement sur une affaire dont il a la charge.

Les citoyens amenés à participer à l’activité judiciaire ( par exemple les jurés des cours d’assises compétentes pour le jugement des crimes ) reçoivent une information particulière destinée à les familiariser avec la mission qui leur est temporairement confiée.

2 Justice et médias

Sauf cas particuliers, la justice est rendue publiquement, de sorte que toute personne peut en principe assister aux audiences et que les journalistes peuvent rendre compte du déroulement des débats judiciaires, à condition que leur compte-rendu soit “fidèle ( et ) de bonne foi” ( article 41 de la loi du 29 juillet 1881 ).

En principe, est interdit tout enregistrement sonore ou visuel dans les salles d’audiences.

Mais une loi du 11 juillet 1985 autorise ce type d’enregistrement pour la constitution d’archives historiques de la justice, avec des restrictions importantes quant au choix des affaires en faisant l’objet ( actuellement, quelques procès relatifs à des crimes commis pendant la dernière guerre mondiale ) et aux modalités de diffusion.

En principe, les médias sont libres d’informer le public sur les affaires judiciaires.

Ce droit subit néanmoins diverses restrictions, strictement contrôlées sous l’influence croissante de la Convention européenne des droits de l’homme et de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.

Les médias doivent notamment respecter la vie privée des personnes, ou la présomption d’innocence dont elles bénéficient jusqu’au jugement lorsqu’elles sont impliquées dans une affaire pénale.

Il est interdit à la presse de publier diverses informations ( par exemple les actes de la procédure pénale avant leur lecture en audience publique ) ou images, par exemple celle de personnes entravées par des menottes.

Il est interdit de publier l’identité de mineurs en cause dans une affaire, ou l’identité et l’image de victimes de certaines infractions (agression et atteinte sexuelle ).

La diffamation publique ou les injures publiques constituent des délits passibles de poursuites devant le tribunal correctionnel, les peines encourues étant aggravées en cas de diffamation ou injure raciale et pour le délit de provocation à la haine ou à la violence raciale.

Toute personne mise en cause par la presse écrite ou audiovisuelle peut exercer un droit de réponse que l’organe de presse est tenu d’insérer ou de diffuser, sous peine d’y être contraint par un juge.

Toute atteinte aux droits de la personne, notamment celle  susceptible de l’atteindre dans sa vie privée ou sa réputation ou encore de porter atteinte à la présomption d’innocence dont elle bénéficie en cas de poursuite pénale, peut justifier l’allocation par un tribunal de dommages-intérêts dont le montant, généralement peu élevé, sera fonction du préjudice justifié par la victime.

Le système des dommages-intérêts punitifs n’existe pas en droit français.

Il est parfois possible d’envisager la saisine d’un juge en urgence pour empêcher la publication d’une information portant atteinte aux droits de la personne ou pour limiter la diffusion déjà entreprise.

Les juges apprécient néanmoins très strictement le pouvoir dont ils disposent à ce sujet, afin de ne pas encourir le reproche de censure et de violation des dispositions de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme.