29ème Session du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe (Strasbourg, 20-22 octobre 2015)

Débat sur la démocratie locale au Luxembourg – 21 octobre 2015

Discours de Dorin Chirtoacă (République de Moldova, PPE/CCE), co-rapporteur du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux

Monsieur le Ministre,

Chers collègues,

Suite à la présentation de Marianne HOLLINGER, j’aimerais moi aussi souligner le fait que le niveau de la démocratie locale est globalement très élevé au Luxembourg et nous avons là un rapport tout à fait positif dans son ensemble – et cela mérite un coup de chapeau en particulier dans un contexte devenu particulièrement difficile pour beaucoup de nos pays. Mais malgré tous les points positifs soulevés il y a quelques instants  par ma collègue (et ils sont nombreux !),  nous savons tous très bien qu’il est impossible d’être parfait et qu’il n’existe pas encore de paradis de la démocratie locale en Europe. Puisqu’il en est ainsi permettez-moi - comme dans tous bons films - de mettre mon chapeau noir un instant pour jouer le  « bad guy » de notre délégation de monitoring - parce que malgré tous ces points positifs, ils restent quelques éléments qui méritent à nos yeux une amélioration.

Comme dans un certain nombre de nos pays, la question de la libre disposition de ressources propres suffisantes ne constitue pas une évidence au Luxembourg aussi. En effet, depuis le dernier monitoring, les autorités locales du Luxembourg restent dans l’attente d’une réforme des finances communales, promise par les autorités nationales. Il en résulte que les mécanismes de financement des communes sont restés quasi inchangés depuis lors. Ainsi le secteur communal est de plus en plus insatisfait d’un système de financement qui ne tient pas compte de l’évolution des missions des communes ni des inégalités de revenus entre les commune. Les recettes ordinaires de l’Etat connaissent depuis des années une progression supérieure aux recettes courantes des communes, écart qui ne cesse de se creuser. La formule de  péréquation et les critères qui sont à la base de cette formule, mériteraient d’être revus de même que les valeurs unitaires de l’impôt foncier qui n’ont pas été révisées depuis 1941. Cela fait 74 années  de manque à gagner pour les collectivités locales qui fonctionnent sur la base d’une assiette de l’impôt totalement désuète.

C’est pourquoi, nous sommes arrivés à la conclusion que les paragraphes 1 à 5 de l’article 9 ne sont pas pleinement respectés par le Luxembourg.

Néanmoins, je voudrais immédiatement tempérer nos conclusions sur ce point puisque notre délégation a eu une assurance de la part du Gouvernement que ces dispositions faisaient l’objet actuellement d’une attention particulière des autorités. C’est par conséquent, une question que nous suivrons de près, et sur laquelle, peut-être, Monsieur le Ministre pourra déjà nous apporter des éléments supplémentaires.

Nous avons également pu constater pendant notre visite que des améliorations semblent toujours possibles en ce qui concerne le principe de consultation des communes sur toutes les questions qui les concernent directement. Même si la procédure de consultation effectuée par le Gouvernement envers les autorités locales existe en pratique, il serait judicieux de formaliser ce mécanisme de consultation et de le rendre plus régulier.

En ce qui concerne la tutelle administrative pour le niveau communal. je voudrais en particulier souligner la question de la création de postes et la nomination de fonctionnaires qui sont soumises à l’approbation préalable du Ministre de l’Intérieur. Nous avons considéré que le contrôle administratif des actes des collectivités locales est parfois excessif et mériterait d’être allégé.

Nos recommandations sont donc les suivantes :

D’améliorer le dialogue de l’Etat avec les communes et le SYVICOL sur toutes les questions intéressant les communes en formalisant ce dialogue. Cette consultation devrait s’effectuer sous la coordination du Gouvernement, afin de pérenniser et garantir cette pratique dans l’avenir.

D’assurer aux communes des ressources propres suffisantes dans l’exercice de leurs compétences. Il serait souhaitable de garantir des finances propres aux compétences en tenant compte de l’évolution des missions des communes et des inégalités de revenus entre les communes. Nous recommandons également à revoir les valeurs unitaires de l’impôt foncier en considération des prix réels de l’immobilier afin de permettre de restaurer les revenus des communes.

Et pour finir nous recommandons d’alléger la tutelle administrative des actes des communes en vue de limiter la tutelle à un contrôle pour des motifs de stricte légalité. En particulier, nous demandons au gouvernement luxembourgeois de réviser la  tutelle relative aux personnes, à savoir l’embauche des fonctionnaires communaux, la révocation des bourgmestres ou échevins et la dissolution du conseil communal.

Voilà Monsieur le Ministre, chers collègues, pour nos recommandations.

Je voudrais encore une fois souligner qu’il s’agit là de conclusions globalement positives et qui méritent que l’on salue l’état de la démocratie locale au Luxembourg.

Enfin, je voudrais vous remercier Monsieur le Ministre pour votre coopération et l’excellente réunion que nous avons eue avec vous lors de notre visite de monitoring.

Votre présence ici atteste de votre engagement et de la bonne coopération avec le Congrès, je voudrais vous en remercier au nom de notre délégation et à titre personnel.