28ème Session du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe – 24-26 mars 2015

Les cimetières juifs: le Congrès appelle les autorités locales à assumer leurs responsabilités

Strasbourg, 25 mars 2015 - Le Congrès a décidé, dans une Résolution adoptée à l’issue d’un débat sur la responsabilité des autorités locales concernant les cimetières juifs, que “ces cimetières doivent être considérés comme faisant partie intégrante du patrimoine culturel européen commun, et les autorités locales et régionales ont un rôle à jouer dans leur protection, préservation, valorisation, gestion et entretien car ils font partie de l’histoire locale, qu’il y ait ou non des populations juives vivant à proximité aujourd’hui”.

La Résolution encourage les collectivités locales à promouvoir la protection et la préservation des lieux sacrés d’enterrement juifs s’inspirant de la Convention-cadre du Conseil de l'Europe sur la valeur du patrimoine culturel pour la société (« Convention de Faro »), à engager le dialogue avec les représentants des communautés juives, et à encourager leurs autorités nationales à adhérer à l’accord partiel élargi du Conseil de l’Europe sur les itinéraires culturels, notamment à travers la possibilité de participer à l’itinéraire européen du Patrimoine Juif. Le Congrès considère également que ces dispositions s’appliquent dans les mêmes termes aux cimetières de toutes les autres communautés religieuses.

Le rapporteur du Congrès, John Warmisham (Royaume-Uni, SOC) indique dans son rapport que selon les règles halachiques, le cimetière, ou tout lieu d’enterrement juif, jouit d’un statut de sainteté plus élevé que celui même de la synagogue. Et dans l’esprit de ce culte, “même si les pierres tombales ont été enlevées, le site garde sa sainteté et son inviolabilité”.

Abraham Ginsberg, Directeur exécutif du Comité pour la préservation des cimetières juifs en Europe (CPJCE) rappelle la nécessité d’avoir un dialogue direct avec les autorités locales, régionales et nationales afin de trouver des solutions selon les lois et traditions juives.

Selon Yossi Beilin, ancien Ministre israélien de la Justice, il existait, avant la Seconde Guerre mondiale, environ 20 000 cimetières juifs en Europe de l’Est.  La moitié de ces cimetières ont disparu pendant la Guerre, et c’est seulement depuis une vingtaine d’années que des efforts sont faits pour sauver ceux qui restent.

En Europe de l’Ouest, en particulier en France, au Royaume-Uni ou en Allemagne, les dégradations de cimetières juifs relèvent surtout du vandalisme, qu’il soit idéologique ou non. Les groupes néo-nazi ou satanistes, opérant notamment la nuit des solstices ou du 20 avril (date de naissance d’Adolf Hitler), sont tenus pour responsables d’environ un tiers des attaques, le reste étant non identifié.

En Europe centrale et orientale, les cimetières juifs font face aujourd’hui à une double menace: le vandalisme et l’abandon. Les communautés juives de cette partie du continent a disparu suite à la Seconde Guerre mondiale, et les derniers survivant ont émigré après la disparition du Mur de Berlin. Par conséquent ces cimetières ne représentent, la plupart du temps, plus d’intérêt pour nombre d’autorités civiles. En l’absence des populations juives, les lieux sacrés juifs n’ont pu être maintenus, menacés par l’urbanisme sauvage, le vandalisme ou tout simplement l’érosion due au temps. Sans protection et d’entretien, les sépultures sont la proie de dégradations diverses, comme à Bucarest où, en 2008, le plus vieux cimetière juif de la ville fut transformé en dépotoir.

L’antisémitisme est également l’une des raisons des profanations de cimetières juifs. Le 15 mars dernier, près de 300 tombes ont été profanées, des stèles renversées et des pierres tombales brisées au cimetière juif de Sarre-Union en Alsace. Selon Roland Ries, le Maire de Strasbourg, ce qui était visé c’était aussi bien “la liberté” que “la civilisation même, car ce qui nous distingue de l’animal dont le cadavre constitue une proie pour d’autres animaux, c’est bien la sépulture ainsi que tous les rituels qui entourent la mort”.

Mendel Samama, Rabbin de Strasbourg, a rappelé que le caractère antisémite de la profanation a été établi par le procureur de la République. Il a en revanche attiré l’attention sur les raisons qui ont pu pousser “ces mineurs qui n’ont pas d’éducation à l’antisémitisme, qui ne manifestent pas quotidiennement un comportement de haine” à profaner 300 tombes. Selon le Rabbin, “le mal dont souffre notre société aujourd’hui n’est pas uniquement l’antisémitisme haineux, mais aussi l’indifférence, un mal silencieux qui détruit sans faire de bruit le tissu de conscience de notre société”.

Rapport CPL/2015(28)2PROV

Dossier « 28ème Session du Congrès »