28ème Session du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe

Discours de Isabelle Weykmans, Vice-Ministre-Présidente, Ministre de la Culture, de l’Emploi et du Tourisme de la Communauté germanophone belge, au nom de la Présidence belge du Comité des Ministres

Vérification à l’écoute

24 mars 2015

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les membres du Congrès, Mesdames, Messieurs,

C’est un grand plaisir et un grand honneur pour moi de m’adresser à vous aujourd’hui au nom de la Présidence belge du Comité des Ministres. Les Régions de Belgique ont du reste déjà eu le plaisir d’accueillir une réunion du Bureau du Congrès en décembre dernier.

Permettez-moi tout d’abord de rappeler les trois priorités de la Présidence belge intéressant plus particulièrement le Congrès. La première concerne le soutien de mon pays au développement de la représentation démocratique et de la gouvernance locale. Vu sa nature fédérale et sa décentralisation poussée, nul besoin de convaincre la Belgique de l’importance de la gouvernance locale et régionale. Le choix de cette priorité allait-il de soi pour la Présidence de notre pays.

A cet égard, la Charte européenne de l’autonomie locale, ratifiée à présent par tous les Etats membres, est un traité d’importance majeure. En établissant des rapports nationaux sur la situation de la démocratie locale et régionale dans les Etats membres et sur la mise en œuvre des principes de la Charte, le Congrès accomplit un travail très utile. C’est pourquoi nous avons accueilli l’année dernière avec un intérêt tout particulier le rapport –largement positif – sur la démocratie locale et régionale en Belgique, qui a suscité une vive attention dans le pays. Les autorités belges continueront à prêter toute l’attention requise aux recommandations qu’il énonce.

La promotion de la démocratie locale étant l’une de nos priorités, la Région-Bruxelles organise la semaine prochaine un atelier sur « les outils électroniques de la démocratie locale ». Cette manifestation offrira, je l’espère, l’occasion d’un débat stimulant et innovant. Et j’espère aussi que le Congrès y prendra une part active.

La Belgique attache la plus haute importance au respect des valeurs que défend le Conseil de l'Europe. La Présidence s’est fixée par conséquent pour deuxième objectif d’apporter sa contribution au renforcement de la protection des droits de l'homme. A la suite des conférences d’Interlaken (2010), d’Izmir (2011) et de Brighton (2012), se tiendra sous notre Présidence, cette semaine, à Bruxelles, une conférence à haut niveau intitulée « La mise en œuvre de la Convention européenne, notre responsabilité partagée ». L’objectif est d’adopter une déclaration politique donnant un nouvel élan au processus de réforme engagé en 2010, en soulignant la responsabilité partagée de la mise en œuvre de la Convention et la nécessité d’une exécution pleine et effective des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme.

Nous savons tous que les collectivités locales et régionales jouent un rôle primordial pour garantir le respect des droits de l'homme à toutes les personnes présentes sur nos territoires. Dans le cadre de cette priorité, la Belgique a décidé de se préoccuper plus spécialement des groupes défavorisés et des individus les plus vulnérables, en particulier des enfants, des personnes handicapées, des jeunes Roms et des femmes victimes de violence, y compris de violence domestique. Les collectivités locales et régionales ont une responsabilité particulière à cet égard, puisque c’est souvent à elles que l’on demande de trouver des solutions pour venir en aide à ces personnes.

Nous avons organisé un certain nombre de manifestations et d’activités sur ces questions. Une Conférence européenne sur « L’intérêt supérieur de l’enfant » s’est tenue à Bruxelles en décembre dernier. Elle entendait,  entre autres, recenser, auprès des décideurs, les facteurs qui font obstacle ou qui incitent à une prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant. Elle se proposait aussi d’indiquer quelques solutions. La conférence s’est employée par ailleurs à promouvoir des normes éthiques, procédurales et pratiques qui puissent aider les professionnels et les responsables politiques dans leur prise en considération de l’intérêt supérieur de l’enfant.

Dans le même ordre d’idées, je mentionnerai la tenue, fin 2014, d’une Conférence sur « L’inclusion des personnes handicapées dans la préparation et la réaction aux catastrophes » dans le cadre d’un programme « Conception pour tous, gestion de crise pour tous » et l’organisation d’un séminaire sur l’inclusion des jeunes Roms dans la vie politique. La Belgique a également exprimé son soutien tout particulier à la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul) entrée en vigueur le 1er août  2014. Ce texte constitue une avancée notable pour le bien de toutes les femmes ; tous les gouvernements devraient faire le maximum pour ratifier cet instrument majeur et assurer sa mise en œuvre.

La troisième priorité que je mentionnerai est liée à la deuxième et concerne les droits sociaux. A la fin de l’année dernière, il s’est tenu à Turin, comme vous le savez, une Conférence à haut niveau sur la Charte sociale européenne au cours de laquelle a été lancé le « Processus de Turin ». A titre de suivi, la Belgique a organisé en février un colloque sur « L’avenir des droits sociaux fondamentaux en Europe » lors duquel l’accent a été mis tout particulièrement sur la signature et la ratification de la Charte sociale révisée, sur l’adhésion des Etats membres du Conseil de l'Europe au Protocole relatif aux réclamations collectives et sur les enjeux de l’adhésion à ces instruments. Les résultats des Conférences de Turin et de Bruxelles seront examinés par le Comité des Ministres dans les mois à venir. Il est clair que la réalisation de l’objectif fixé, à savoir le renforcement et la protection des droits sociaux en Europe, exigera impérativement la mobilisation de tous les niveaux de gouvernement. Je ne doute pas que le Comité des Ministres pourra compter sur le soutien du Congrès à cet égard.

Je voudrais enfin aborder deux priorités qui revêtent une importance majeure pour le Comité des Ministres et pour l’Organisation dans le contexte politique actuel.

La première est la lutte contre l’extrémisme et la radicalisation conduisant au terrorisme.

C’est un problème très grave qui concerne toute l’Europe, comme l’ont malheureusement montré les événements tragiques de ces derniers mois à Copenhague et à Paris, et de l’an dernier à Bruxelles. Ces événements nous rappellent que le respect de nos valeurs ne va pas de soi. Le Conseil de l’Europe, gardien des droits de l’homme en Europe, a ici un rôle de premier plan à jouer, et le Comité des Ministres a décidé de renforcer son action dans ce domaine. Nous devons nous assurer de disposer d’instruments efficaces pour combattre l’extrémisme et la radicalisation conduisant au terrorisme. Plusieurs activités immédiates ont d’ores et déjà été décidées, telles que la rédaction d’un protocole à la Convention pour la prévention du terrorisme, énonçant des mesures juridiquement contraignantes pour faire face à la menace que représentent les combattants terroristes étrangers. Mais nous devons également inscrire la lutte contre la radicalisation dans une perspective à long terme, dans l’éducation, dans les prisons, sur internet et au niveau des collectivités locales. Cette question sera au cœur de la session ministérielle qui se tiendra en mai à Bruxelles, et au cours de laquelle nous espérons adopter un plan d’action en la matière.

Dans cette perspective, le Comité des Ministres a tenu la semaine dernière un débat thématique sur la question, auquel a participé M. Leen Verbeek, Vice-Président de votre Congrès. Le succès de l’action du Conseil de l’Europe dépendra étroitement de la contribution de différents acteurs tels que les enseignants, les travailleurs sociaux, les représentants des secteurs de la jeunesse et du sport, les responsables religieux ou encore les administrations pénitentiaires. Elle nécessitera aussi une participation active des collectivités locales si l’on veut atteindre les meilleurs résultats et la plus grande efficacité possibles. Le Comité des Ministres suivra donc avec attention le débat d’urgence « Réponses à la radicalisation dans les villes et régions d’Europe : combattre le terrorisme, l’antisémitisme, l’islamophobie et le discours de haine » qui doit avoir lieu demain. Nous sommes heureux que M. Hans Bonte, maire de Vilvoorde, ait été invité à prendre une part active à ce débat. Les décisions que vous prendrez en termes de suivi seront très importantes : pour accomplir des progrès réels et effectifs dans ce domaine, il est essentiel que les principaux organes de l’Organisation travaillent en synergie et de manière complémentaire.

La deuxième priorité politique est la situation en Ukraine, qui continue de figurer à un niveau élevé sur l’ordre du jour du Comité des Ministres. Une étape importante a été franchie avec le lancement du plan d’action du Conseil de l’Europe pour l’Ukraine 2015-2017, la semaine dernière à Kiev. Comme vous le savez, un chapitre du plan d’action porte sur la décentralisation et la réforme de l’autonomie locale, aspect pour lequel la contribution du Congrès sera particulièrement précieuse. Je sais que la Chambre des régions tiendra demain un débat thématique sur la dimension régionale du processus de décentralisation en Ukraine, ce qui donnera lieu, j’en suis sûr, à des échanges fructueux.

Mesdames et messieurs,

La Belgique est à la tête du Comité des Ministres depuis plusieurs mois maintenant. Présider aux travaux de l’Organisation dans le contexte politique et économique actuel est une lourde responsabilité et un défi. La présidence se réjouit des contributions importantes que chaque instance de l’Organisation, y compris le Congrès, apporte à la poursuite de nos objectifs communs. C’est en travaillant ensemble que nous pourrons relever les multiples défis, graves pour certains, auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui, que ce soit pour défendre les droits sociaux dans un contexte d’austérité, pour protéger les plus vulnérables, ou encore pour combattre la radicalisation et le terrorisme. Le Comité des Ministres compte sur la coopération du Congrès.

Je vous remercie de votre attention et vous souhaite une session fructueuse.