27ème Session du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe

Débat à la Chambre des régions: « La corruption, c’est la corrosion de la démocratie »

Organisé le 14 octobre 2014 par la Chambre des Régions du Congrès, un débat sur la promotion de l’éthique publique et la prévention de la corruption au niveau régional a passé en revue  plusieurs expériences concrètes menées par des villes et des régions européennes telles que la création d’office anti-fraude, l’adoption de règles strictes ou encore le renforcement de la transparence grâce aux données sur internet. Les participants ont également examiné les moyens de renforcer l’arsenal législatif et politique pour contrer ces phénomènes.

Le Président sortant du Congrès, Herwig van Staa (PPE/CCE, Autriche), mène depuis des années un combat sans relâche contre la corruption au niveau local et régional, et voit dans celle-ci une « corrosion qui ronge l’état de droit». Ouvrant le débat, il a souligné que les trois quarts des citoyens de l’Union européenne pensent que la corruption s’est aggravée ces dernières années, malgré la multiplication des outils destinés à la prévenir. Dès 1999, le Congrès a adopté  un « code de conduite » pour l’intégrité des élus locaux et régionaux, et de nombreuses institutions internationales ou nationales, mais aussi locales et régionales, ont pris des mesures pour lutter contre la corruption… qui pourtant semble ne pas reculer.

Présidente de la Conférence européenne des Assemblées législatives régionales (CALRE) et du parlement galicien, Pilar Rojo Noguera (Espagne) a présenté quelques expériences menées dans son pays pour prévenir la corruption, et a insisté sur l’importance de la démocratie électronique pour favoriser la transparence de la vie politique, mais aussi et surtout pour rapprocher les citoyens et le monde politique. Les parlements membres de la CALRE se sont tous engagés sur un programme de promotion de la transparence, basé notamment sur le recours à l’e-démocratie, et certains, comme en Galice, ont déjà promulgué des règles régionales sur la transparence des décisions politiques et des attributions d’emplois publics.

Un office régional de lutte contre la fraude

Le Parlement régional de Catalogne (Espagne) s’est doté, il y a quatre ans, d’un office anti-fraude habilité à se saisir de toutes les affaires de corruption dans le secteur public de la région. Décrivant son fonctionnement, Bruno Gonzalez Valdelievre a précisé que les activités de cet office permettent, au-delà des affaires traitées, d’améliorer la prévention et de « réduire les espaces d’impunité tout en professionnalisant la gestion publique ».

De nombreuses villes européennes se sont dotées de règles précises pour lutter contre la corruption. Tracey Simpson-Laing (Royaume-Uni), rapporteuse du Congrès sur le rapport sur « les conditions de travail des élus locaux et régionaux », a présenté les instruments dont disposes les villes et les régions britanniques pour lutter contre la corruption, qui seront d’ailleurs renforcées à partir de 2016.  A York, ville où elle est élue, les conseillers municipaux n’ont pas le droit de prendre part à une délibération s’ils sont personnellement concernés par ses enjeux, par exemple en matière d’emploi ou de logement. Ils doivent aussi déclarer tous les intérêts financiers, de même que les cadeaux ou les invitations reçus dans le cadre de leur mandat. Tracey Simpson-Laing estime, de plus, qu’il faut renforcer la transparence dans les réseaux sociaux, tant en matière de contenus que d’utilisation : « certains politiciens prennent des pseudonymes pour lancer des attaques anonymes contre leurs adversaires, ce n’est pas acceptable, personne n’a le droit de se placer au-dessus des autres », a-t-elle souligné.

La transparence des dossiers grâce aux données en ligne

Le recours à l’Internet est globalement, l’un des meilleurs moyens de favoriser la transparence, a montré Sabine Stuppat (Allemagne, SOC), en présentant les initiatives de Hambourg, sa ville-région, qui a mis en ligne une grande quantité d’informations et de données publiques. « Nous sommes pionniers en Europe dans ce domaine, et les citoyens peuvent ainsi suivre et contrôler toute la vie publique, la seule limite étant la protection de la vie privée des élus », a-t-elle expliqué lors du débat.

Concluant les échanges, Herwig van Staa a souhaité une meilleure évaluation de l’efficacité des outils non contraignants, comme les chartes et les codes de conduite, mais aussi des structures ad hoc de lutte contre la corruption, telles que les offices anti fraudes ou les organes de contrôle des finances publiques régionales. « Si l’on doit se demander si toutes ces mesures sont suffisantes, a-t-il souligné, il faut aussi s’assurer de la volonté réelle des autorités nationales et régionales de doter les autorités territoriales de meilleures armes contre la corruption ». Il a invité le Congrès à élaborer une stratégie d’ensemble pour promouvoir l’éthique et prévenir la corruption aux niveaux local et régional, ainsi qu’à mettre en œuvre un partenariat avec tous les acteurs concernés au sein du Conseil de l’Europe et au-delà.