25ème Session du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe

29-31 octobre 2013

Extrémisme politique au niveau local et régional : à Athènes, la mairie répond à la haine par la solidarité.

31.10.2013 - Directement confronté à l’ascension du parti néo-nazi grec Aube dorée, le maire d’Athènes, Yiorgos Kaminis, répond à ses provocations par « le droit et la solidarité ». Participant, le 30 octobre 2013, à un débat organisé par le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe sur l’extrémisme au niveau local et régional, il a présenté les actions menées par sa ville pour contrer l’influence de ce parti.

Si l’extrémisme politique revêt de nombreuses formes, depuis le discours « présentable » jusqu’aux actions clandestines de groupuscules ultra-violents, il se nourrit toujours de peurs identitaires auxquelles les partis traditionnels ont souvent du mal à répondre. Spécialiste des extrémismes et des nationalismes à la Fondation Robert Schuman (France), Magali Balent a dressé un tableau des partis et mouvements nationalistes et protestataires qui se développent dans toute l’Europe, bien au-delà des seuls pays en crise.

Plusieurs d’entre eux, à l’image du Front National français, comptent quelques élus nationaux, mais aussi de nombreux élus locaux et régionaux. Longtemps « diabolisés » par leurs adversaires, la plupart de ces partis, parfois implantés depuis plusieurs décennies, jouent pourtant le jeu de la démocratie. « Cessons de les ostraciser, a estimé Mme Balent, et acceptons de dialoguer avec eux, plutôt que de les laisser seuls  aborder à leur manière des sujets qui préoccupent pourtant les citoyens, comme le rôle et l’élargissement de l’Union européenne, le multiculturalisme ou la place de l’Islam en Europe ».

Loin des partis « respectables »,  Aube dorée, insignifiante il y a trois ans encore, est apparue brutalement sur la scène politique grecque en raflant près de 7% des suffrages aux élections de 2012, et 9% à Athènes. Ici, plus question de discours policé, mais des références caricaturales à l’imagerie et à la violence nazie, violence qui trouve son paroxysme avec l’assassinat, en septembre 2013, du musicien Pavlos Fyssas par des militants de ce parti. Aube dorée est née du choc causé par la crise économique de 2008, mais aussi de l’incapacité des responsables politiques à répondre aux interrogations des citoyens, estime le maire d’Athènes en rappelant que l’Etat a diminué de 60% les dotations financières qu’il versait à la capitale.

Malgré nos difficultés, nous luttons dans le respect du droit et de l’égalité, a poursuivi M. Kaminis, en présentant les initiatives de sa ville pour lutter contre la misère : création d’épiceries sociales, ouverture d’un orphelinat social accueillant 5000 enfants, soutien pour la formation scolaire et professionnelle. « Nous rejetons toute discrimination, et nous monopolisons nos ressources pour répondre à la haine par la solidarité » a-t-il poursuivi. La municipalité s’est en outre opposée à la mise en place de soupes populaires « réservées aux Grecs », et M Kaminis a rappelé qu’il avait lui-même failli être frappé par un député d’Aube dorée.

 

A l’inverse de certains de ses collègues grecs qui tablent sur une disparition d’Aube dorée dès que la reprise économique améliorera la situation du pays, Yiorgos Kaminis redoute que ce parti ne s’y ancre durablement, surtout dans les quartiers défavorisés. S’il estime inutile et inefficace d’interdire un parti politique, il juge indispensable de moderniser la législation sur les propos racistes, mais aussi d’apprendre l’histoire aux jeunes pour qu’ils ne répètent pas les erreurs du passé. Concluant le débat, le président de la chambre des pouvoirs locaux, Jean-Claude Frécon (SOC, France), s’est félicité de la richesse des échanges et d’une discussion « qui fait honneur au Congrès et au Conseil de l’Europe ».