Vérification à l’écoute / Embargo jusqu’au prononcé 

24ème Session du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe (19-21 mars 2013)

Intervention d’ Henry Féral (PPE-CCE/local), Chef de délégation et rapporteur du Congrès, Maire de Puycelsi (France)

Observation des élections locales partielles en Arménie (9 et 23 septembre 2012)

Monsieur Le Président,

Chers collègues élus en vos grades et qualités, bonjour

Permettez moi de me présenter très rapidement : je suis maire d’une commune rurale dont le bourg centre appartient à l’association des Plus Beaux Villages de France, j’appartiens au Comite Directeur des maires de France à Paris et je suis ancien haut fonctionnaire.

Je voudrais tout d’abord remercier le Bureau de m’avoir désigné pour conduire la délégation du Congres afin d’observer les élections locales en Arménie qui se sont déroulées en deux phases, les 9 et 23 septembre dernier. A la délégation du Congrès s’est jointe une délégation du Comité des Régions emmenée par Brian Meaney, qui s’est révélé être un observateur avisé et qui nous a fait bénéficier de son expérience et c’est avec plaisir que je le retrouve sur nos rangs en ce jour, poursuivant ainsi la bonne coopération instaurée entre nos deux institutions.

C’est d’ailleurs en raison de cette double composition que j’ai participé le 10 février, à l’invitation du CIVEX (Commission de la citoyenneté, de la gouvernance, des affaires institutionnelles et extérieures) du Comité des Régions, afin de fournir tout comme Brian Meaney, un compte rendu de ces missions. D’ailleurs le même jour en Andorre, au Bureau du Congres avait lieu un compte rendu de ces deux missions.

Ces deux missions d’observation se sont déroulées dans un contexte politique et social calme, mais dans le cadre d’agenda électoral particulièrement chargé avec quatre élections locales partielles entre février et septembre 2012 (qui ont même été prolongées jusqu’en octobre), avec, dans l’intervalle, des élections législatives, le 6 mai 2012, puis des élections présidentielles le 18 février dernier, et prochainement le 5 mai 2013 une élection locale à Erevan.

Cette prochaine élection se déroulera trois mois après une élection présidentielle plus mouvementée contrastant ainsi avec les élections municipales. Par ailleurs, la consultation électorale repose sur le Code électoral de 2011 qui prévoit des dispositions particulières pour la capitale avec une élection d’abord du Conseil municipal, qui dans un deuxième temps désignera son maire. Il semblerait après cette dernière élection qu’une période de calme de 3 ans s’ouvre permettant au nouveau gouvernement, nous l’espérons, de conduire des réformes et des améliorations en matière électorale.

A partir de nos observations, notamment sur le terrain, de nos rencontres et nos échanges avec les politiques, gouvernementaux et de l’opposition, les représentants du monde diplomatique, des ONG, les Organisations syndicales, la Presse écrite et parlée, nous avons fait un ensemble de constats.

    1) Dans l’ensemble, nous avons constaté que l’organisation matérielle du scrutin était satisfaisante et le fonctionnement des bureaux de vote normal sous la présidence d’hommes et de femmes avec cependant quelques défaillances. A noter que les isoloirs assuraient assez bien une confidentialité requise.

     2) Il nous est apparu que la totalité des bureaux de vote, et par là de l’environnement bâti en général, était inaccessible aux personnes handicapées. Nous avons dans nos visites (bien que nous n’ayons pas visité tous les bureaux de vote) trouvé un seul bureau de vote à Atarack, dans une école réhabilitée récemment respectant les normes d’accessibilité.

     3) En outre bon nombre de personnes âgées avaient parfois besoin d’une  assistance un peu trop prononcée, nous semble t il pour remplir les bulletins de vote.

      4) Si les femmes étaient très bien représentées au sein des commissions électorales locales, certaines même faisant preuve d’une grande maîtrise, elles restaient peu nombreuses à se porter candidates aux élections de conseiller et à plus forte raison de maire. Lors de ces deux scrutin deux femmes ont été élues maires de petites communes (soit 1,6%).

       5) Bien que nous n’en fûmes pas témoins, il nous a été relaté d’éventuels achats de voix. La situation économique étant particulièrement difficile, la vulnérabilité de certains électeurs peut expliquer cela.

       6) Trop de monde dans les bureaux de vote : il ne faut pas oublier qu’en milieu rural le vote c’est aussi l’occasion d’un moment de convivialité : on se retrouve, et on bavarde.

       7) Malgré une mobilisation avec un taux proche des 50 %, pour les deux périodes électorales, la campagne fut peu dynamique, en raison d’un internet peu évident. Aussi avons-nous cherché à comprendre, et différentes raisons semblent apporter des explications :

-        Rien ne semble changer, nous a-t-on fait comprendre pouvant entraîner une certaine frustration et par là peut être une explication de la hausse de l’immigration.

-        Manque de confiance.

-        Période de travaux agricoles intenses.

-        Calendrier électoral parfois curieux avec des élections seules du conseil municipal, celles du maire étant reportée à la fin de son mandat ; ou bien inversement, ce qui augmente le nombre d’élections. Si mes chiffres sont exacts, 81 élections de maires sans avoir à reélire un CM, ce qui signifie qu’à la fin de son mandat, on reélira un maire qui  risque d’être en décalage avec son CM, décalage dans le temps, décalage politique. Décalage entre le poids électoral du milieu non urbain par rapport à Erevan, (40% de la population) : le déséquilibre est très important et pèse politiquement.

-        Responsabilité de la presse. Cette dernière ne promeut pas les élections. Sa couverture du milieu rural est très faible contrairement aux grandes villes.

-        Faible engagement des partis politiques, notamment en raison de la faiblesse des moyens financiers de la plupart d’entre eux, certains n’hésitant pas à dire qu’ils se réservent pour les élections présidentielles.

- Sur 24 partis susceptibles de fournir des candidats, 10 n’ont pas fourni de candidats, 10 autres ont présenté moins de 10 candidats (chiffres publié par la Commission électorale centrale).

-        Faiblesse financière des communes, grande dépendance vis-à-vis des dotations gouvernementales.

Nota :

Ce manque d’intérêt est parfois battu en brèche. En effet surprise de découvrir que dans un village de « montagne », la municipalité avait organisé un ramassage de ses électeurs installés dans la plaine (ce bourg avait été déménagé à une certaine époque vers la plaine).

Suite à ces observations, nous avons formulé les recommandations suivantes aux autorités arméniennes afin de poursuivre l’amélioration du processus électoral :

Enfin, nous estimons qu’un certain nombre de pratiques, qui perdurent parfois sous le couvert de la tradition, doivent être éradiquées, telles que la distribution de fonds à l’intérieur des bureaux de vote.

Au-delà du processus électoral lui-même et de ses aspects administratifs et techniques, il nous apparaît essentiel que les autorités arméniennes, conformément au principe de la démocratie locale applicable à tous les Etats membres du Conseil de l’Europe, créent, les conditions d’un réel pluralisme politique par l’émergence d’une force d’opposition et renforcent l’autonomie locale. Le Congrès s’appliquera à suivre comment le nouveau gouvernement issu des élections présidentielles du 18 février se saisira de ces questions.

Après l’intervention de notre collègue Brian Meaney je vous proposera d’adopter, chers collègues, ce projet de résolution et de recommandation.

En conclusion, je pense pouvoir m’exprimer au nom de l’ensemble des deux délégations pour dire que cet exercice conjoint avec le Comité des Régions a été très fructueux pour nos deux institutions. J’espère que nous poursuivrons nos échanges et nos rencontres sur ces questions d’intérêt commun.

Je vous remercie Monsieur Le Président, chers collègues de votre attention, et je me tiens à votre disposition pour répondre éventuellement à vos questions.