Karl-Heinz Lambertz : « Le Congrès prépare un état des lieux de la régionalisation en Europe »

Passant en revue les grands dossiers qui mobiliseront le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe dans les mois à venir, le Président de la Commission de la gouvernance, Karl-Heinz Lambertz (Belgique, SOC), insiste sur la nécessité de relancer les travaux sur la régionalisation, tant du point de vue de la réflexion que sur le plan pratique.

Interview – 20.08.2012

La Commission de la gouvernance a été mise en place dans le cadre de la récente réforme du Congrès. Quels ont été vos principaux  domaines d’action?

Karl-Heinz Lambertz : Il nous a fallu trouver la place de la commission dans cette nouvelle architecture, mais nous avons déjà travaillé sur de nombreux sujets, en particulier la question de la levée des réserves des Etats membres à la Charte européenne de l’autonomie locale, le suivi de la conférence de Kyiv ainsi que les sujets prospectifs tels que les médiateurs régionaux et locaux ou encore la participation des citoyens. Plusieurs rapports issus de nos travaux seront présentés lors de la session d’octobre 2012, dont l’un sur les macro-régions et un autre sur les deuxièmes niveaux des pouvoirs locaux. Car, en effet, l’application ou non de la Charte dépend selon qu’un niveau de gouvernement est défini comme local ou régional. En outre, nous travaillons sur la gouvernance multiniveaux, un thème d’autant plus complexe que le Conseil de l’Europe et l’Union européenne ne lui donnent pas la même signification.

Vous présenterez en octobre un rapport global sur les priorités du Congrès : quelles en sont les grandes lignes ?

Karl-Heinz Lambertz : Le Congrès reste chargé, avant tout, de suivre et de renforcer l’autonomie locale et régionale en Europe, en mouvement permanent aux quatre coins du continent. Plusieurs pays ont entrepris d’importantes réformes de leurs collectivités territoriales.  C’est à nous d’étudier la manière dont ces évolutions les renforcent ou les affaiblissent, grâce à nos visites de suivi et à l’examen de la situation de la démocratie territoriale en Europe. Nous poursuivons également nos travaux sur le financement des pouvoirs locaux et les rapports avec les tutelles. Actuellement, ces problèmes sont d’autant plus brûlants que certains Etats tentent de se décharger de leurs difficultés financières sur d’autres échelons, en particulier dans les pays  les plus touchés par la crise. Pourtant, la crise montre que la confiance des citoyens dans les institutions se conquiert d’abord au niveau local et régional, niveaux qui doivent être préservés.  La question des tutelles inclut aussi la consultation des échelons locaux par les instances nationales. Le Congrès plaide pour une meilleure concertation de tous les échelons avant la prise de décisions d’importance nationale.

Le Congrès présentera en 2013 un rapport sur l’état de la régionalisation en Europe. Ce document annonce-t-il de nouvelles initiatives dans ce domaine ?

Karl-Heinz Lambertz : Depuis deux ans, nous disposons du « Cadre de référence du Conseil de l’Europe pour la démocratie régionale ». Il est temps de réexaminer la situation des régions en Europe, d’autant que le niveau régional s’y renforce partout, même si les situations sont encore très variables. Ce rapport sera lié à un autre texte qui aborde la coopération interrégionale, y compris entre des régions qui ne sont pas directement voisines. Développer cette coopération leur permettra de travailler ensemble sur des problématiques communes, par exemple l’efficience énergétique, l’innovation technologique ou la modernisation administrative.

En outre, nous dresserons un nouvel aperçu de l’évolution de la coopération transfrontalière, en particulier entre les régions séparées par des frontières non ouvertes,  c'est-à-dire hors de l’espace Schengen et hors de l’Union européenne. Des pays comme la Russie et l’Ukraine, ou les pays des Balkans, ont eux aussi de vrais besoins en matière de coopération transfrontalière.  Le Congrès pourrait d’ailleurs, prochainement, organiser un « Sommet de la coopération transfrontalière » qui réunirait tous les acteurs concernés, y compris les ONG et les instituts de recherche, autour de ces sujets.