22ème Session du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe

Table ronde sur les évolutions récentes de la régionalisation : Progrès et limites  de la démocratie régionale en Europe

Strasbourg, 20.03.2012 -Si la régionalisation de l’Europe progresse d’année en année, son rythme n’en reste pas moins très irrégulier : tel était le thème d’une table ronde sur les évolutions récentes de la régionalisation organisée le 21 mars par la Chambre des Régions du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe. Les participants ont examiné la situation de la régionalisation dans trois Etats membres – Belgique, Slovénie et Russie - mais aussi au Maroc, pays qui a choisi  de régionaliser son territoire tout en dotant ses régions des moyens pour leur permettre de fonctionner  plus efficacement.

Ouvrant la table ronde, Urs Wüthrich-Pelloli, vice président suisse  de l’Assemblée des Régions européennes (ARE) a regretté  que les politiques de rigueur menées dans certains pays, comme l’Irlande  entravent  les processus de régionalisation. Soulignant que les régions n’ont pas à payer le prix de situations dont elles ne sont pas responsables, il a rappelé que, dans des temps difficiles, les régions constituent au  contraire des valeurs ajoutées,  répondant aux besoins réels des citoyens. Il a cité, par ailleurs, la situation en Hongrie où certaines compétences, comme la santé, ont été récemment « recentralisées », alors que d’autres, dont les questions de développement, ont été confiées aux régions.

Présentant ensuite la situation de la Belgique, Karl-Heinz Lambertz, ministre président de la communauté germanophone de Belgique,  a rappelé combien ce pays était, dès l’origine, le fruit d’un équilibre entre ses régions, qui en constituent le vrai pouvoir : c’est pour cela aussi qu’elle a pu fonctionner pendant 500 jours sans gouvernement central jusqu’en octobre 2011. Après avoir connu 5 réformes structurelles depuis 1970, le pays s’apprête à vivre un nouveau renforcement du pouvoir des régions, dont les budgets et les compétences seront prochainement élargies, y compris en matière d’autonomie fiscale. « Je pense que grâce à nos compromis, et grâce au fédéralisme, la Belgique existera encore dans 20 ans », a –t-il conclu en rappelant l’importance des régions pour prévenir  les frictions entre les communautés.

Mais si la régionalisation progresse dans certains pays, elle régresse dans d’autres : Stane Vlaj, professeur à la Faculté de droit et d’études européennes de Ljubljana (Slovénie) a dressé un tableau sévère de la centralisation dans son pays, encore renforcée selon lui par le nouveau gouvernement : « nous sommes le pays le plus centralisé d’Europe et rien ne change », a-t-il regretté, en estimant que le Congrès, lors de ses  visites de monitoring, n’avait pas été assez critique face au « non fonctionnement de l’autonomie locale ».

Svetlana Orlova, vice présidente du Congrès et vice présidente du Conseil de la Fédération de l’Assemblée Fédérale russe, a rappelé ensuite les évolutions récentes survenues dans son pays en matière de régionalisation. Grâce à de nouvelles lois, il sera plus simple de se présenter aux élections locales et régionales, les procédures ayant été considérablement libéralisées. De même, il est prévu que les gouverneurs des régions seront désormais élus au suffrage direct, en même temps que les sénateurs. Selon Mme Orlova, « la subsidiarité se développe en Russie et dispose de moyens », un point de vue souligné aussi par le Président de la Chambre des régions, Herwig van Staa pour qui  « la Russie a fait beaucoup de progrès pour la démocratie locale et régionale ».

Enfin, la Chambre a invité Abdelkébir Berkia, ancien président du Conseil régional de Rabat-Salé-Zemmour-Zaer (Maroc) à faire un point sur les progrès de la régionalisation dans ce pays. Comme il l’a rappelé, le Maroc dispose certes depuis 1960 de 7 régions économiques, mais celles-ci n’ont pas été dotées d’attributions suffisantes. Désormais, il est prévu que le projet en cours de discussion au Parlement les dotera de compétences et de moyens, dans le cadre d’une régionalisation qui s’effectuera « dans le respect de l’Etat », et concernera l’ensemble du territoire, y compris  le sud et le Sahara. Au-delà des progrès de la régionalisation pour le pays lui-même, cette réforme permettra aussi au Maroc de renforcer sa coopération avec les autres structures régionales des institutions européennes, a-t-il conclu.