Marko Forss : « Les abus sexuels par Internet sont un phénomène mondial auquel il faut répondre localement »

Présente et visible depuis trois ans et demi sur les principaux réseaux sociaux finlandais, la police d’Helsinki peut y être facilement alertée par les jeunes victimes d’abus sexuels ou d’intimidation, et mène des enquêtes pour traquer les auteurs de ces actes. Responsable de ce service, le Sergent Marko Forss est venu le présenter lors du séminaire du Congrès sur la lutte contre l’exploitation sexuelle aux niveaux local et régional organisé dans le cadre de la campagne du Conseil de l’’Europe « UN sur CINQ ».

09.02.2012

Plutôt que de travailler discrètement dans un bureau, vous affichez votre « profil » sur tous les réseaux sociaux du pays, Facebook en tête, et vous pouvez être joint personnellement sur des forums et via un « Messenger ». Cette stratégie est-elle efficace face aux abus sexuels sur Internet ?

Marko Forss : Grâce à cette présence, je peux être contacté à tout instant, en ligne, par des jeunes qui veulent signaler des messages ou des propositions sexuelles dont ils font l’objet, mais aussi par des victimes d’abus « dans la vie réelle » : il est parfois plus facile d’en parler en ligne qu’en se rendant au commissariat. De plus, le fait d’être présent et visible sur les réseaux sociaux rappelle à tous les utilisateurs que l’Internet n’est pas un endroit sans contrôle. Enfin, nous pouvons nouer de nombreux contacts avec des jeunes sur Internet, et parler librement avec eux, alors qu’ils seraient certainement intimidés si cela se passait dans nos services.

Mais nous ne passons pas nos journées derrière un écran et nous allons bien sûr sur le terrain, à la rencontre des jeunes, et pour rechercher les coupables d’infractions. Si la cybercriminalité est un phénomène mondial, il faut la traiter sur place, au niveau local. Nous travaillons pour cela étroitement avec les services sociaux et éducatifs à travers tout le pays.

Ce séminaire s’adresse principalement aux élus locaux et régionaux désireux de renforcer leurs actions contre l’exploitation sexuelle : comment pouvez-vous les aider à mener de telles actions ?

Marko Forss : Je suis frappé de voir que les responsables politiques, nationaux ou locaux, ne sont pas assez conscients de l’ampleur des phénomènes de délinquance sexuelle dont sont victimes les enfants sur Internet : il faut les sensibiliser beaucoup plus à ces réalités, de même qu’à d’autres types d’agressions virtuelles, comme les menaces et le « cyberbulling ».  Il importe aussi de rappeler, tant aux élus qu’aux adultes en général, à quel point les avances sexuelles et les cybermenaces peuvent être destructrices pour les enfants et, à terme, modifier totalement leur caractère. Ils ignorent comment y répondre, ils ne savent pas dire non, ils peuvent sombrer dans la dépression après avoir subi de telles épreuves. 

Au-delà de la sensibilisation des politiques, quels sont les conseils pratiques que vous souhaitez donner aux familles et aux jeunes?

Marko Forss : Déjà, bien sûr ne pas hésiter à venir nous voir en ligne. Et dans la vie quotidienne, je pense que les parents devraient parler plus souvent d’Internet avec leurs enfants, cela doit devenir aussi naturel que de leur demander « comment ça s’est passé à l’école aujourd’hui ? ». Les parents ne doivent pas lire les correspondances de leurs enfants pour des raisons de confiance, mais devraient surveiller leurs listes d’amis sur Internet et savoir non pas ce qu’ils disent, mais avec qui ils parlent. C’est d’ailleurs aussi en étudiant les listes de personnes inscrites ou en ligne que nous repérons les profils douteux !