15e Session Plénière du Congrés, 27-29 Mai 2008

Mercredi 28 Mai

Discours de M. Mats ODELL, Ministre des pouvoirs locaux et des marchés financiers de la Suède, au nome de la présidence du Comité des Ministres

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les membres du Congrès, Mesdames et Messieurs,

C’est un très grand honneur pour moi de prendre la parole devant le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe au nom de la Présidence du Comité des Ministres.

Je vous félicite, Monsieur le Président, de votre élection par les membres du Congrès. Le vif intérêt que vous prenez au dialogue et à la coopération entre le Congrès et le Comité des Ministres est à la fois important et prometteur. Je puis vous assurer que la Présidence suédoise compte collaborer étroitement avec vous-même comme avec le Congrès. À cette occasion, je voudrais aussi rendre hommage au travail de M. Halvdan Skard, votre si apprécié prédécesseur.

Les médias parlent le plus souvent de ce qui se passe dans les hautes sphères, mais là où l’importance de la démocratie est la plus sensible, c’est à la base, aux niveaux local et régional. Monsieur Dupont ou l’homme de la rue – appelez-le comme vous voulez – sait pertinemment ce dont on doit s’occuper dans son village, sa ville ou sa région. Il peut voir quelle action est conduite et l’apprécier en fonction de ses résultats. De leur côté, un décideur élus localement ou régionalement sent bien ce à quoi aspirent ses mandants et s’ils apprécient ou non ce qui se fait dans sa circonscription. Lorsqu’un membre de la classe politique s’attaque à un problème en essayant d’employer au mieux les ressources disponibles pour parvenir à un résultat et remplir ses promesses électorales, il sait qu’il est proche des personnes qui seront concernées en fin de compte. Cela crée un climat unique pour le dialogue et l’interaction entre individus et décideurs. Tip O’Neill, qui présida des années durant la Chambre des Représentants des États-Unis, disait que toute politique est locale. Cette affirmation me semble un peu exagérée – ce qui est typique du grand démocrate de notre époque – mais cela comporte toutefois un fond de vérité.

En Suède, nous sommes très proches de cet idéal, car nous prenons au sérieux le principe d’autonomie locale. L’autonomie locale, protégée par notre Constitution, est en effet une pierre angulaire de la société suédoise. Elle correspond à une longue tradition historique de notre pays, puisqu’elle remonte à 1862, année de la création des municipalités et des conseils de comté. Dès 1989, la Suède a signé et ratifié la Charte européenne de l’autonomie locale, qui constitue à mon sens un jalon important, car elle contribue à faire respecter vraiment l’autonomie locale.

Il est évident que vous, Mesdames et Messieurs les membres du Congrès, avez un rôle important et difficile à jouer en tant que représentants élus des collectivités locales et régionales. Je me réjouis que le Conseil de l'Europe dispose, avec le Congrès, d’un organe s’occupant exclusivement de ces questions. Je me félicite aussi que le Congrès nouvellement installé satisfasse, dans chaque délégation, à la nouvelle règle des 30% de participation du sexe sous-représenté. C’est un pas important vers l’égalité des sexes.

La démocratie, les droits de l'homme et la primauté du droit sont au cœur des préoccupations du Conseil de l'Europe et de la Présidence suédoise. Au Comité des Ministres, nos objectifs prioritaires pour la période allant de mai à novembre sont clairement fondés sur les décisions que les chefs d’État et de gouvernement ont prises au Sommet de Varsovie en convenant que l’avenir du Conseil de l'Europe résidait dans l’accomplissement de sa tâche prioritaire, qui est – comme vous le savez – de protéger et de promouvoir les droits de l'homme, la démocratie et la primauté du droit. Toutes les activités du Conseil de l'Europe doivent aller dans le sens de cette finalité fondamentale. Le Sommet a identifié trois facteurs – l’égalité des sexes, les droits de l’enfant et la perspective de jeunesse – à intégrer dans toutes les activités du Conseil de l'Europe. Il a également souligné l’importance du niveau local et régional.

La Présidence suédoise a pour principal but de promouvoir la recherche de la finalité fondamentale en question. Au Sommet de 2005, les États membres ont résolu de garantir le plein respect des engagements pris par eux en tant que membres du Conseil de l'Europe. Dans ce sens, l’Organisation a manifestement un rôle à jouer, qui est de donner aux droits une expression concrète. En mettant l’accent sur l’application des normes et en travaillant à la plus large coopération possible entre le Conseil de l'Europe, ses États membres et d’autres acteurs, la Suède espère faciliter la poursuite des progrès.

Comment allons-nous nous procéder ? Nous prenons plusieurs initiatives, dont j’évoquerai quelques-unes :

Dans le domaine des droits de l'homme, la Suède organisera quatre conférences. Trois d’entre elles porteront sur la mise en œuvre de certaines normes adoptées : la première aura trait à la Convention européenne des droits de l'homme, la deuxième aux instruments concernant les droits et la situation des enfants, et la troisième aux droits des personnes handicapées. Dans ce contexte, je voudrais souligner l’importance que mon pays attache à la ratification du Protocole n° 14 par tous les États membres. Cela, je l’espère vivement, devrait se faire dès que possible.

La quatrième conférence portera sur un travail systématique en faveur de l’application des normes relatives aux droits de l'homme, y compris les plans d’action nationaux en la matière. Elle aura pour objet un échange d’enseignements sur le travail systématique concernant les droits de l'homme au niveau national, et l’on pourra y donner des exemples concrets de méthodes présidant à la mise en œuvre des droits de l'homme. Mais si l’on y regarde de plus près, il devient évident que les autorités locales et régionales doivent souvent se tenir en première ligne s’agissant de donner une expression concrète au travail en faveur des droits de l'homme. Il faut se souvenir de ces derniers et les mettre en œuvre longtemps après que des discours comme le mien ont été oubliés. Ils peuvent et doivent être mise en œuvre dans des domaines tels que le logement, la santé et l’éducation, pour ne mentionner que quelques domaines qui me sont familiers. Mais les pouvoirs locaux ont aussi un rôle à jouer dans la sauvegarde des libertés fondamentales, telles que la liberté de réunion.

Je me réjouis que le Congrès, M. Thomas Hammarberg, Commissaire aux Droits de l’Homme, et l’Association suédoise des pouvoirs locaux et des régions coopèrent dans le cadre d’un séminaire portant sur le respect des droits de l'homme aux niveaux local et régional. J’espère qu’il leur viendra de bonnes idées en vue de la conférence internationale que la Suède organisera en novembre.

En ce qui concerne la démocratie, la Suède rappelle que le Sommet de Varsovie a demandé à tous les États membres d’intensifier leur action au sein du Conseil de l'Europe afin de promouvoir la démocratie à tous les niveaux. Un élément indispensable de la démocratie est la tenue d’élections libres et équitables. D’autres éléments essentiels en sont une culture démocratique amenant les individus à prendre part aux affaires publiques et l’existence d’une société civile vaste et libre. La Suède a pour but d’encourager une utilisation cohérente des excellents outils offerts par le Conseil de l'Europe, à savoir les compétences spécialisées de la Commission de Venise, les instruments juridiques, le soutien apporté à la société civile et les possibilités de dialogue, pour n’en mentionner que quelques-uns.

Le Forum pour l’avenir de la démocratie est devenu un élément permanent de l’activité du Conseil de l'Europe. Je voudrais souligner particulièrement ici l’excellente contribution que le Congrès a apportée à la session organisée l’an dernier en Suède et qu’il continue d’apporter à ce processus.

Il importe que nous soulignions tous la nécessité de satisfaire aux engagements et obligations découlant de l’appartenance au Conseil de l'Europe. Il est nécessaire de suivre l’évolution des choses pour favoriser la poursuite des progrès, et je me félicite des activités du Conseil de l'Europe dans ce domaine, y compris le suivi des élections.

En ce qui concerne la primauté du droit, la Présidence a pour but de veiller à ce que soit pleinement utilisé le potentiel du Conseil de l'Europe en la matière, car le respect de ce principe est indispensable au respect des droits de l'homme et de la démocratie. Au cours de notre présidence, il sera organisé une conférence sur les réformes judiciaires dans le Caucase du Sud.

Il est essentiel de renforcer les relations avec l’Union européenne et d’autres organisations internationales, en particulier les Nations unies et l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe. La coopération doit être axée sur des résultats et fondée sur la complémentarité. La Présidence compte bien resserrer encore ces relations.

Le document relatif aux objectifs prioritaires de la Présidence met l’accent également sur les activités conduites dans d’autres domaines et contribuant à l’accomplissement de la mission essentielle du Conseil de l’Europe. Je tiens à rappeler aussi la nécessité de poursuivre les réformes visant à assurer la transparence et l’efficacité de l’Organisation.

La Suède a l’intention de mener une présidence active sur la base des valeurs partagées et des intérêts communs, en faveur de la mission essentielle de l’Organisation. Nous comptons avoir à cet égard un dialogue constructif avec le Congrès.

La Session ministérielle du 7 mai, présidée par les Ministres des Affaires étrangères de Slovaquie et de Suède, a été un événement positif de par l’accroissement de la participation au niveau ministériel qu’on y a remarqué.

Au cours de cette session, les ministres ont traité de diverses questions : la consolidation du système de protection des droits de l'homme du Conseil de l'Europe, les relations avec l’Union européenne et le suivi des autres activités prioritaires résultant du Sommet de Varsovie. Le 21 mai, les Délégués des Ministres ont décidé de donner un suivi concret aux décisions prises et orientations définies par la Session ministérielle. La Suède attend beaucoup de ces travaux.

Monsieur le Président,

Ayant ainsi mis en lumière les objectifs prioritaires de la Présidence suédoise pour les six mois à venir, ainsi que les résultats de la Session ministérielle, je voudrais parler à présent d’une façon plus précise des récentes actions du Comité des Ministres que je crois particulièrement intéressantes pour le Congrès.

Je mentionnerai quelques-unes des dernières initiatives visant à renforcer le développement local et régional. En particulier, j’attirera l’attention sur l’élan politique imprimé en la matière par la 15e Conférence des Ministres européens responsables des collectivités locales et régionales qui s’est tenue à Valence (Espagne) les 15 et 16 octobre de l’an dernier.

À leur conférence de Valence, les ministres ont convenu d’entreprendre l’élaboration d’un protocole additionnel à la Charte européenne de l’autonomie locale et régionale relatif à la participation démocratique au niveau local. Cela souligne le fait que la participation démocratique est un élément essentiel de l’autonomie locale, et la Présidence suédoise applaudit particulièrement à cette initiative.

Je sais que le Congrès a également préconisé l’adoption d’un protocole additionnel à la Charte en vue de renforcer l’autonomie locale. Le Comité des Ministres a demandé au Comité européen sur la démocratie locale et régionale (CDLR) son avis à ce sujet. La Suède estime qu’une analyse plus approfondie s’impose sur la nécessité d’un tel protocole et les questions qu’il devrait couvrir.

De même, en ce qui concerne l’ouverture de la Charte européenne de l’autonomie locale à l’adhésion de la Communauté européenne et d’États non-membres du Conseil de l'Europe, le Comité des Ministres a demandé au CDLR d’étudier l’opportunité et la possibilité d’élaborer un protocole apportant audit instrument un amendement dans ce sens. Cela devrait être fait d’ici la fin de l’année.

J’attire aussi votre attention sur l’initiative prise à Valence de confier à ma collègue finlandaise, Mme Mari Kiviniemi, la tâche d’établir à titre personnel un rapport sur les moyens d’intensifier les travaux du Conseil de l'Europe relatifs à la démocratie locale et régionale. Ce rapport traitera notamment des relations du Conseil de l'Europe avec d’autres structures et organisations internationales, en particulier l’Union européenne. Je suis heureux de noter que Mme Kiviniemi discutera demain avec vous de ces questions.

Le Comité des Ministres a adopté la Stratégie pour l’innovation et la bonne gouvernance au niveau local, et il a créé une plate-forme de parties prenantes chargée de suivre l’application de la Stratégie ainsi que de donner des orientations en la matière. Je me félicite que la Bulgarie, la Norvège, l’Espagne et la Région wallonne de Belgique aient déjà commencé d’appliquer cette stratégie. Le Congrès a été invité, lui aussi, à nommer deux représentants au sein de la plate-forme. Tous les États membres ont été priés de chercher à atteindre les résultats définis par la Stratégie en matière de bonne gouvernance.

Enfin, je voudrais attirer l’attention du Congrès sur le deuxième rapport annuel sur les activités du Centre d’expertise sur la réforme de l’administration locale, qui a été soumis au Comité des Ministres au début du mois. Le Comité des Ministres est convenu que le Centre a répondu aux attentes ayant justifié sa création en 2005, et il a souligné la nécessité de poursuivre la coopération avec tous les partenaires concernés, en particulier le Congrès et le CDLR.

Le Comité des Ministres attache un grand prix à son partenariat avec le Congrès. Mais bien que ce partenariat se soit avéré solide, nous devons veiller à l’entretenir et à intensifier la dynamique entre nos deux organes. Je suis certain que des progrès peuvent être accomplis dans les États membres sur diverses questions prioritaires relevant du Conseil de l'Europe, et je pense que le moyen le plus rapide d’y contribuer est d’accroître l’interaction et le dialogue constructif entre le Comité des Ministres et le Congrès, ainsi que les efforts accomplis en commun par l’un et l’autre.

Je forme les meilleurs souhaits pour l’avenir des travaux que vous conduisez dans vos circonscriptions respectives, de même qu’au sein de ce forum international.

Je vous remercie de votre attention.