Discours de Yavuz Mildon,
Président de la Chambre des régions
du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux
lors de la conférence « Tchernobyl, 20 ans après »
(Slavutich, 2 mars 2006)

Monsieur le Président,
Excellences,
Mesdames et messieurs,

Il y a vingt ans, la terrible tragédie survenue à la centrale nucléaire de Tchernobyl a ébranlé le monde, et surtout l’Europe. Nous avons à l’époque suivi avec admiration les efforts héroïques de ceux qui risquaient leur vie pour confiner le réacteur, bravant les effets radiologiques de la catastrophe pour sauver d’autres vies.

L’accident qui s’est produit à Tchernobyl en 1986 a été le plus grave de l’histoire de l’industrie nucléaire mondiale et un accident radiologique majeur. Alors que vingt ans se sont écoulés, les régions d’Ukraine, du Bélarus et de Russie touchées par la catastrophe en subissent aujourd’hui encore les conséquences : radioactivité, dommages sanitaires et difficultés socioéconomiques, sans compter les graves problèmes psychologiques dont souffrent la population et les personnels d’intervention d’urgence.

Avant l’accident, les travailleurs de Tchernobyl et leurs familles vivaient dans la ville de Pripyat, à proximité de la centrale. Evacués en 1986, ils habitent aujourd’hui ici à Slavutich, une ville de construction récente où la moyenne d’âge est la plus basse d’Ukraine. Au nom du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe, que je représente en ma qualité de président de sa Chambre des régions, et en mon nom personnel, je remercie chaleureusement le maire de Slavutich, M. Volodymyr Udovychenko, d’avoir proposé de réfléchir ensemble, à l’occasion de ce 20e anniversaire, au rôle des pouvoirs locaux et régionaux dans la lutte contre les catastrophes et la gestion des risques.

Mesdames et messieurs,

Le mot « Tchernobyl » fait surgir des images de catastrophes environnementales et de dommages graves et durables pour la santé humaine, entraînant de lourdes conséquences socioéconomiques tant pour les gouvernements nationaux que pour les collectivités régionales et locales des pays concernés. Tchernobyl nous a rappelé à tous que les catastrophes, qu’elles soient naturelles ou technologiques, ne connaissent pas de frontières et peuvent frapper de nombreux pays outre celui où elles se produisent. Tchernobyl nous a aussi remis en mémoire que, si l’industrie nucléaire relève de la responsabilité des gouvernements centraux, il importe que les collectivités territoriales soient aussi pleinement informées sur les sites à risque, car ce sont elles qui sont le plus directement frappées par ces catastrophes, qui doivent réagir rapidement pour évacuer les populations, apporter l’assistance médicale, organiser les hébergements et assurer la sécurité publique. L’accident de Tchernobyl s’est produit il y a vingt ans, mais je n’ai pas besoin de vous rappeler ce qui s’est passé pas plus tard que l’an dernier à la Nouvelle-Orléans.

L’accident de Tchernobyl a également suscité controverses et divergences entre les scientifiques qui ont évalué ses conséquences sanitaires et environnementales et les responsables politiques soucieux avant tout de gagner la sympathie de la communauté internationale et d’attirer l’aide humanitaire – sans oublier, bien sûr, que la catastrophe s’est produite dans un contexte politique et idéologique bien différent de celui d’aujourd’hui.

En 2003, l’Agence internationale de l’énergie atomique, avec huit autres organismes des Nations Unies et de trois pays touchés, a pris l’initiative de créer un Forum Tchernobyl pour répondre aux questions restées sans réponse après presque vingt ans et trouver un consensus scientifique sur l’impact de l’accident.

Aujourd’hui, vingt ans après, nous espérons avoir une meilleure connaissance et prendre la vraie mesure des répercussions de Tchernobyl, et je voudrais remercier le représentant de l’AIEA, M. Berkovsky, qui présentera les principales conclusions des études du Forum Tchernobyl. Il s’agit du rapport le plus complet et le plus étoffé sur cet accident, puisqu’il traite des questions relatives à la radioactivité de l’environnement, des effets sur la santé humaine et des conséquences socioéconomiques. Plus de cent experts reconnus, originaires de pays très divers, y compris le Bélarus, la Russie et l’Ukraine, y ont contribué. Ce rapport est le fruit d’un consensus, tous les partenaires du Forum Tchernobyl s’exprimant d’une seule voix. Il tient compte des résultats scientifiques les plus récents concernant les conséquences de l’accident et nous a paru un point de départ intéressant pour nos travaux et nos débats.

Mesdames et messieurs,

A l’issue de ces deux journées, je ne le sais que trop, la contamination n’aura pas miraculeusement disparu, le traumatisme et l’inquiétude de la population quant aux effets de la radioactivité ne s’effaceront que lentement, même si l’on donne des informations sérieuses et que l’on explique les risques, et l’économie ne réagira pas immédiatement à de nouvelles mesures et initiatives. Cependant, nous souhaitons mieux comprendre les difficultés auxquelles doivent réellement faire face tous les niveaux de gouvernement, y compris les pouvoirs locaux et régionaux. Ces deux journées de débat, j’en suis convaincu, nous aideront à avoir une image plus claire de la situation et je forme le vœu que cette conférence soit des plus fructueuses.

Je vous remercie.