Carlos Pinto : « La nouvelle Charte urbaine devra préfigurer la ville de demain »

Le Congrès prépare actuellement une révision de la Charte urbaine européenne, qu’il avait rédigée et adoptée en 1992. Carlos Pinto, maire de Covilha (Portugal), présente les progrès et les enjeux de cette « Charte urbaine II » : à la fois plus participative et plus intégrée que l’ancienne, elle devra aussi faire l’objet d’une diffusion plus large que la première version.

Interview, 13.03.2008

Question : Quinze ans après son adoption, la Charte urbaine va faire peau neuve : pourquoi était-il temps de la réviser, et quelles en sont les nouveautés ?

Carlos Pinto : 15 ans, c’est très long, car le monde a énormément changé au cours de cette période, de même bien sûr que les villes. La mondialisation et l’évolution des échanges économiques, la construction européenne et le développement de la démocratie locale ont bouleversé le fonctionnement des villes. Leur rôle politique s’est accru, mais elles sont parfois en compétition entre elles, et doivent gagner en attractivité. Des questions comme les migrations ou la place des jeunes dans la cité ne se posent plus de la même manière qu’autrefois. En outre, les citoyens veulent participer à la vie de leur ville, et expriment de nouvelles exigences, écologiques ou culturelles par exemple. La nouvelle charte devra répondre à ces attentes, tout en préfigurant la ville de demain, bien gouvernée, participative et intégrée dans son environnement économique, social et naturel.

Question : En 1992, la Charte urbaine cherchait déjà à préparer l’avenir des villes, mais ce texte a-t-il eu suffisamment de poids pour atteindre  les objectifs qu’il se fixait ?

Carlos Pinto : Il est vrai que la première charte était un travail d’experts et qu’elle n’a pas connu la diffusion qu’elle méritait. Cette fois, nous allons intégrer les associations de municipalités et d’élus à sa rédaction, afin d’obtenir un texte plus concret, mais aussi plus simple à lire. Nous souhaitons que la charte urbaine puisse servir aux habitants eux-mêmes, car ce sont eux les vrais protagonistes des villes. Nous voulons une charte proche des gens, et non pas un document « stratosphérique ». Je souhaite aussi que la charte soit diffusée à tous les responsables de l’aménagement des villes, tels que les architectes et les urbanistes. Et il faut rappeler que si la Charte concerne les villes, elle est tout aussi importante pour le milieu rural, étroitement imbriqué avec elles.

Question : Peut-on imaginer que la Charte entre un jour, sous une forme ou une autre, dans le droit des pays qui la signeront ?

Carlos Pinto : Il est important de sensibiliser les autorités nationales au travail des pouvoirs locaux, et de leur rappeler combien celui-ci se mesure tous les jours dans l’évolution positive du milieu urbain. Pourtant, les politiques nationales omettent encore trop souvent le rôle et l’importance des autorités locales en matière de développement urbain, ou négligent leurs points de vue. Il faut donc mieux faire connaître la charte aux gouvernements nationaux, afin qu’elle se concrétise dans leurs politiques. Dans l’immédiat, la charte révisée sera présentée en juin à la session plénière du Congrès, puis transmise aux ministres européens.