Strasbourg, le 8 décembre 2006                                                                                                         

CEPEJ(2006)14

COMMISSION EUROPÉENNE POUR L’EFFICACITÉ DE LA JUSTICE

(CEPEJ)

TASK FORCE SUR LES DÉLAIS DE PROCÉDURE

(CEPEJ-TF-DEL)

LA GESTION DU TEMPS DANS LES SYSTÈMES JUDICIAIRES :

une ÉTUDE SUR L’EUROPE DU NORD

Ce rapport a été adopté par la CEPEJ

à sa 8e réunion plénière (Strasbourg, 6 - 8 décembre 2006)



RÉSUMÉ

Le Rapport “La gestion du temps dans les systèmes judiciaires :une étude sur l’Europe du Nord”  décrit les mesures qui pourraient contribuer à maintenir l’utilisation du temps dans les systèmes judiciaires européens dans les limites du “délai raisonnable”, à savoir la norme énoncée à l’article 6-1 de la Convention européenne des Droits de l'Homme (CEDH). Il se compose de deux études.

La première partie, intitulée “La gestion du temps dans les juridictions des pays nordiques : examen des propositions et des politiques visant à réduire les délais de procédure” analyse l’utilisation et la fixation des délais dans les pays nordiques, et plus particulièrement les délais appliqués aux affaires prioritaires. Après avoir fourni une typologie des dates limites, elle aborde les stratégies de gestion du temps, en privilégiant la conduite de la procédure judiciaire et les recommandations faites au juge d’explorer, d’une part, la mesure dans laquelle les parties sont disposées à accepter une médiation  et, d’autre part, la nécessité de prévoir une réunion préparatoire et de fixer à un stade précoce la date et l’heure de l’audience principale. On présente un projet pilote danois sur l’amélioration de la gestion administrative des affaires civiles, ainsi que des mesures à prendre pour améliorer la coopération entre les différents acteurs de la justice des mineurs. La qualité du travail se mesure notamment à la pertinence juridique de décisions rigoureusement motivées, au respect manifesté aux parties et à un cadre de travail convivial.

La procédure devrait être menée à bien dans un délai optimal, en tenant pleinement compte de la complexité de l’affaire et des intérêts en jeu. Le calendrier devrait être bien expliqué aux parties et respecté par tous les protagonistes. Une méthode danoise consistant à recourir à des consultants en “bonnes pratiques” est présentée. Des mesures de réduction du temps de traitement des dossiers, relatives aux droits d’assignation et de fixation de la date du procès conférés aux procureurs et des  stratégies d’accélération de la procédure sont également étudiées.

La première partie aborde aussi la question des spécialisations, entre juridictions et entre juges d’une même juridiction. Elle décrit les nouvelles technologies, la visioconférence et l’audioconférence, et les différents systèmes informatiques utilisés pour la gestion des dossiers et leur traitement. Cette partie s’achève sur l’analyse de deux modèles utilisés au Danemark et en Norvège pour calculer et comparer l’utilisation du temps et la charge de travail des différentes juridictions. Ces modèles servent à la fois à fixer des délais pour les différentes phases du traitement du dossier et à allouer des ressources aux juridictions.   

La deuxième partie, intitulée “Une justice pénale plus rapide en Norvège : la phase préalable au procès - de la notification de l’infraction jusqu’à l’engagement des poursuites à la diligence de la police”, résume un rapport important sur un vaste projet norvégien d’accélération de la justice pénale. Elle relève que le point de départ de la norme du “délai raisonnable” énoncée dans l’art. 6-1 de la CEDH en matière pénale intervient au moment où une personne est accusée d’une infraction. Une accusation existe lorsqu’un suspect est "substantiellement affecté ” par l’enquête, ce qui se produit souvent longtemps avant que l’affaire ne soit portée devant un tribunal chargé de trancher sur le fond. Si les États entendent éviter les violations en matière pénale, la gestion du temps doit également prendre en considération les phases préalables au procès.   

La chaîne de traitement des affaires pénales est un système à haut débit. Le nombre des dossiers traités par la police est comparable à celui pris en charge par d’autres organismes publics qui traitent un volume de dossiers très important. Un petit nombre seulement de ces dossiers sont transmis aux tribunaux, le processus de sélection ayant donc un impact considérable sur la charge de travail de ces derniers. Tout plan d’action contre les retards qui ne ciblerait pas la police et le parquet ne pourrait qu’être incomplet. Du fait de l’organisation hiérarchique et identique de la police et du parquet, il pourrait être plus facile et plus rapide d’obtenir des résultats en se concentrant sur les dossiers en attente pendant la phase préalable au procès qu’après leur transfert aux tribunaux.

Le rapport a constaté des écarts frappants au niveau du taux de dépistage et du temps de traitement entre les juridictions de poursuite. Ces écarts ne pouvaient pas s’expliquer par des différences de volume ou de complexité des affaires à traiter. Ayant par ailleurs créé des profils d’accumulation des affaires pour certains districts de police, le rapport a révélé des différences importantes que ne pouvaient expliquer les différences de taux de criminalité ou de profil des infractions. Ces constatations permettaient de penser que l’efficacité pouvait encore être grandement améliorée.

Le rapport a divisé le temps de traitement en deux composantes principales – le temps de travail et les temps morts – et les a étudiés d’une manière approfondie. Le temps de travail est le temps pendant lequel quelqu’un s’occupe d’un dossier, le temps mort désignant les moments où rien ne se passe. Le rapport s’est concentré plus particulièrement sur les temps morts.

Les conclusions sont frappantes. Alors que le temps de travail total depuis la notification de l’infraction jusqu’à la décision d’engager des poursuites variait en moyenne entre deux et cinq jours selon le district de police et le type de délinquance, les temps morts s’échelonnaient entre 43 et 309 jours. Le temps de travail ne constituait qu’une faible partie du temps de traitement total, alors que les temps morts en représentaient plus de 90 %.

Même en tenant compte de très fortes marges, le temps de travail moyen était nettement inférieur à 10 jours et ce chiffre bas ne pouvait pas être attribué à une qualité de travail inférieure aux normes. La plupart des dossiers examinés étaient mineurs et traités de façon suffisamment approfondie. L’essentiel du temps de travail était concentré sur le premier mois du temps de traitement. Le rapport a donc demandé si la police et le parquet se préoccupaient avant tout de clore leurs dossiers sans retard. Lorsque l’essentiel du travail était accompli, la police établissait l’ordre de priorité des nouveaux dossiers au lieu de boucler les anciens.  Sur le temps utilisé pour prendre la décision de poursuivre, un jour au maximum, en moyenne, était du temps de travail, et ce jour était naturellement consacré à cela vers la fin du temps de traitement. Lorsque les dossiers arrivaient au parquet, ils étaient placés tout en bas de la pile, où ils attendaient leur tour.

Enfin, la deuxième partie résume les nombreuses propositions de réforme présentées dans le rapport pour réduire l’utilisation du temps, et les classe en deux groupes, à savoir les mesures à caractère général à prendre contre le retard et les mesures visant plus particulièrement à réduire les temps morts. Elle indique en conclusion que bien des solutions proposées pourraient s’appliquer à la gestion du temps dans les tribunaux.   

Le rapport est construit sur des rapports concernant les politiques et des études administratives des dix dernières années recommandés par les membres de la CEPEJ des pays de l'Europe du Nord. Toutes les politiques résumées expliquent comment les 18 lignes d’action du Programme-cadre de la CEPEJ pourraient être mises en oeuvre.

Le rapport ne vise qu’à donner une première idée des politiques de gestion du temps actuellement en vigueur dans les pays nordiques. Les analyses de ces politiques sont succinctes et de caractère général. Tout État membre qu’un certain modèle intéresserait est invité à prendre contact avec le pays nordique en question pour obtenir des informations complémentaires.


TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ....................................................................................................................................... 3

AVANT-PROPOS........................................................................................................................... 7

PREMIÈRE PARTIE : LA GESTION DU TEMPS DANS LES JURIDICTIONS DES PAYS DE L’EUROPE DU NORD : EXAMEN DES PROPOSITIONS ET DES POLITIQUES VISANT À RÉDUIRE LES DÉLAIS DE PROCÉDURE

1      INTRODUCTION..................................................................................................................... 12

1.1  Données et objet du rapport................................................................................................... 12

1.2  Délais.................................................................................................................................... 13

1.3  Affaires prioritaires................................................................................................................. 15

1.4 Typologie des dates limites.................................................................................................... 16

2      STRATÉGIES DE GESTION.................................................................................................... 17

2.1  Conduite de la procédure judiciaire......................................................................................... 18

2.1.1 Projet pilote : une meilleure conduite des affaires civiles.................................................. 19

2.1.2 Amélioration de la coopération entre acteurs de la justice des mineurs ............................ 20

2.2 Qualité du travail..................................................................................................................... 20

2.2.1 Projet Rovaniemi pour la qualité.................................................................................... 21

2.2.2 Consultants en bonnes pratiques................................................................................... 23

2.3 Organisation précoce des tâches et de la prise de décisions dans la chaîne de traitement des affaires            25

       2.3.1 Remise de l’avis de comparution................................................................................... 26

       2.3.2 Procédure accélérée..................................................................................................... 27

3      SPÉCIALISATION DES TRIBUNAUX....................................................................................... 28

3.1  Expériences en matière de spécialisation................................................................................ 29

3.2  Répartition des tâches............................................................................................................ 30

3.3  Spécialisation dans les pays nordiques................................................................................... 31

4      LES NOUVELLES TECHNOLOGIES ET LA GESTION DES RESSOURCES............................... 32

4.1    Visioconférence.................................................................................................................... 33

4.2    Systèmes de données........................................................................................................... 34

4.2.1 Gestion électronique des dossiers en Suède .................................................................. 35

4.2.2 Services en ligne dans les tribunaux finlandais................................................................ 35

4.2.3 Systèmes reposant sur les TI dans les tribunaux danois................................................... 37

4.3    Tidsfördelningsmodell – Un modèle de répartition du temps.................................................... 38

4.4    Belastningsmodel –Système norvégien de pondération des dossiers à traiter.......................... 38

DEUXIÈME PARTIE : UNE JUSTICE PÉNALE PLUS RAPIDE EN NORVÈGE : LA PHASE PRÉALABLE AU PROCÈS - DE LA NOTIFICATION DE L’INFRACTION À L’ENGAGEMENT DES POURSUITES À LA DILIGENCE DE LA POLICE 

1 INTRODUCTION........................................................................................................................ 42

1.1 Le projet norvégien“Une justice pénale plus rapide".................................................................. 42

1.2 Enquête et poursuites en Norvège........................................................................................... 44

2 STATISTIQUES CONCERNANT LES DOSSIERS EN ATTENTE.................................................... 45

2.1 Districts relevant d’un procureur.............................................................................................. 45

2.2 Dossiers en attente et profils d’accumulation des affaires dans les districts de police............... 46

2.3 Étude “approfondie” des facteurs d’accumulation des affaires.................................................. 48

2.4 Temps de travail et temps morts............................................................................................. 49

2.5 Conclusions........................................................................................................................... 49

3 MESURES DE CARACTÈRE GÉNÉRAL À PRENDRE CONTRE LE RETARD............................... 50

4  MESURES VISANT À RÉDUIRE LE TEMPS MORTS.................................................................. 53

DEFINITION DES PRINCIPAUX CONCEPTS.................................................................................. 57

RÉFÉRENCES............................................................................................................................. 58


AVANT-PROPOS

Le Rapport “La gestion du temps dans les systèmes judiciaires : une étude sur l’Europe du Nord”  décrit les mesures qui pourraient contribuer à maintenir l’utilisation du temps dans les systèmes judiciaires européens dans les limites du “délai raisonnable”, à savoir la norme énoncée à l’article 6-1 de la Convention européenne des Droits de l'Homme.    

Il se compose de deux parties. La première partie, intitulée La gestion du temps dans les juridictions des pays nordiques”, est consacrée aux mesures qui s’appliquent aux tribunaux. Elles sont naturellement les cibles principales de l’article 6. Toutefois, au pénal, la norme du délai raisonnable pourrait également s’appliquer à la phase préalable au procès. La Cour européenne des Droits de l'Homme a pris en considération l’enquête de police et la décision d’exercer l’action publique prise par la police. La seconde étude, intitulée “Une justice pénale plus rapide en Norvège” contient donc des mesures destinées à influer sur le traitement des affaires pénales par la police et le parquet. Les enjeux de la gestion efficace du temps ont de nombreux traits en commun, que ce soit devant les tribunaux ou dans les phases du travail de la police ou du parquet. Les méthodes élaborées pour l’un des maillons de la chaîne judiciaire pourraient donc s’avérer également utiles pour les autres.

 

Le rapport se base sur des rapports relatifs aux politiques et des études administratives recommandées par les membres de la Commission européenne pour l’efficacité de la justice (CEPEJ) représentant le Danemark, la Finlande, la Norvège et la Suède. L’Islande n’est pas incluse. Lorsqu’il est fait référence aux "pays nordiques" en l’absence d’une dénomination plus précise, cette omission doit être gardée à l’esprit.

Le projet a été conçu par Jon T. Johnsen, expert de la Task Force sur les délais de procédure de la CEPEJ (CEPEJ-TF-DEL)[1] et approuvé par la CEPEJ-TF-DEL à sa deuxième réunion (Strasbourg, septembre 2005)[2].

La première partie, intitulée “Gestion du temps dans les juridictions des pays nordiques”, a été établie pour la CEPEJ par Mirka Smolej, chercheur à l’Institut national de recherche sur la politique juridique de Finlande et financée par le Ministère finlandais de la justice. Les membres de la CEPEJ représentant les pays nordiques ont apporté une contribution considérable en fournissant des informations pour l’étude et ont en outre participé activement à la supervision du travail.  Il s’agit des membres suivants :

-       Kari Kiesiläinen, Ministère de la justice, Finlande

-       Merethe Baustad Ranum, Administration Judiciaire Nationale, Norvège

-       Klaus Rugaard, Administration Judiciaire Nationale, Danemark

-       Johan Sangborn, Ministère de la justice, Suède

Jon T. Johnsen a supervisé l’étude pour le compte de la CEPEJ-TF-DEL.

La seconde partie, qui consiste en l’examen du rapport sur ’Une justice pénale plus rapide en Norvège”, a été établie par Jon T. Johnsen.

La CEPEJ-TF-DEL a demandé la réalisation du rapport, en a supervisé les différentes phases et a assuré sa finalisation en vue de son adoption par la CEPEJ à sa 8e réunion plénière (décembre 2006) aux fins de sa publication dans la collection "Les Etudes de la CEPEJ". Ont participé à la CEPEJ-TF-DEL, présidée par M. Alan UZELAC (Professeur à la Faculté de droit de l’Université de Zagreb, Croatie), M. Jon Johnson (Professeur de droit, Doyen de la Faculté de droit de l’Université d’Oslo, Norvège), Mme Janny Kranenburg (Vice-Présidente de la Cour d’Appel de s’Hertogenbosch, section de droit civil, Pays-Bas), M. John Stacey (Chef du Service des procédures civiles et familiales, Her Majesty's Courts Service, Londres, Royaume-Uni), M. Gabor Szeplaki-Nagy (Juge, Chef de Cabinet du Président de la Cour suprême, Directeur du Bureau des droits de l'homme de la Cour suprême, Budapest, Hongrie), M. Michael Vrontakis (Vice-Président du Conseil d’Etat, Grèce) et Mme Jana Wurstova (Barreau de la République tchèque, Prague, République tchèque). On également participé à la réunion de la Task Force en qualité d’observateurs M. Klaus Decker, pour la Banque mondiale, et M. Jean-Jacques Kuster, pour l’Union européenne  des greffiers et Rechtspfleger.

Les rapports retenus pour l’étude sur la gestion du temps concernent divers projets et recommandations élaborés par les pays nordiques au cours de la décennie écoulée. Les auteurs ont retenu des propositions et des réformes dont pourraient utilement s’inspirer les autres pays européens.

Les éléments ci-après ont été privilégiés :

En premier lieu, les auteurs ont recherché des mesures oumodèles innovants pour la gestion du temps en donnant la priorité aux quatre éléments suivants :

-           un bref aperçu des problèmes ou des dysfonctionnements qui rendent souhaitables les mesures de réduction des délais,

-           une récapitulation succincte des idées et débats sur lesquels s’appuie la réforme et la manière dont cette réforme a été justifiée,

-           une description de la teneur de la réforme ou du modèle de réforme utilisé et de la méthodologie de  réforme appliquée,

-           un bref aperçu de la mise en oeuvre et des résultats, ainsi que des systèmes de suivi.

En second lieu, les auteurs ont cherché à décrire des outils d’analyse à mettre au service d’une bonne gestion du temps. Il peut s’agir de statistiques, de la systématisation des connaissances pratiques, de projets de recherche et de méthodes élaborés spécifiquement pour la gestion du temps dans les tribunaux, comme, par exemple, le modèle norvégien concernant la charge de travail des tribunaux (Belastningsmodellen, voir première partie, pp. 31 à 33).

Toutefois, les documents disponibles n’offrent pas tous le degré de précision qui convient au propos. La plupart d’entre eux sont relativement exhaustifs en ce qui concerne les modèles de réforme, tandis que les études sur les résultats ne sont pas aussi détaillées.

Par ailleurs, les documents rassemblés montrent que plusieurs des modèles ont été étudiés ou utilisés dans plusieurs pays nordiques. A donc été privilégiée la description la plus claire en se contentant d’en mentionner l’application dans les autres pays.

L’étude sur ’“Une justice pénale plus rapide” recense également les mesures et les outils d’analyse aux fins de la gestion du temps au sein de la police et du parquet conformément aux principes décrits plus haut. À la différence de l’étude sur les tribunaux, elle ne résume que l’un des quatre rapports détaillés sur un projet exhaustif concernant la réduction du temps utilisé dans toutes les parties principales du système de justice pénale norvégien. Le rapport a été retenu en raison de la richesse des modèles, méthodes et outils d’analyse qu’il présente pour réduire les délais de procédure et de la manière dont il s’efforce de combiner des méthodes et des outils différents en mettant en oeuvre une stratégie concertée de réduction du temps utilisé.

L’étude divise le temps de traitement en deux composantes principales : le temps de travail et les temps morts. Le temps de travail est le temps pendant lequel quelqu’un s’occupe d’un dossier, le temps mort – ou “temps d’attente” – désignant les moments où rien ne se passe. Le rapport s’est concentré plus particulièrement sur les temps morts. Il montre que les temps morts représentent le plus clair du temps utilisé par la police et le parquet et que les mesures à prendre pour réduire les temps morts sont à la fois différentes des mesures de réduction du temps de travail et moins onéreuses à appliquer.

La conduite de recherches indépendantes sur la diffusion et les résultats des modèles décrits n’a pu être entreprise dans le cadre du temps et des ressources alloués à cette étude. Si les résultats de réformes prometteuses ne peuvent que susciter l’intérêt des autres systèmes judiciaires qui envisagent de les appliquer, il ne faut pas s’imaginer que les succès ou les échecs enregistrés dans l’un d’entre eux ne peuvent que se répéter dans un autre. De fait, les systèmes judiciaires européens présentent des différences très notables, au point que les modèles élaborés dans un pays doivent généralement être adaptés avant de pouvoir fonctionner correctement dans un autre. Il appartient aux autorités judiciaires de chaque État membre de faire leur choix parmi les modèles présentés et de les ajuster à leur situation.

La lecture du rapport de la CEPEJ sur les systèmes judiciaires européens[3] nous indique que les pays nordiques obtiennent de très bons résultats en ce qui concerne tous les indicateurs utilisés. Dans le cadre européen, leurs systèmes semblent bien développés. Pourtant, le présent rapport fait état dans tous les pays considérés d’un processus de réforme approfondi et permanent. De plus, les systèmes judiciaires relativement bien développés montrent des carences importantes auxquelles il convient de remédier. Et on ne peut pas non plus penser que le volume des ressources consacrées à ces systèmes – pas plus que la question de savoir s’ils sont rapides ou lents – soit déterminant pour la pertinence des politiques et systèmes de gestion du temps analysés dans notre rapport. La gestion efficace du temps consiste en un éventail de mesures reliées d’une façon systématique. La plupart d’entre elles ne sont pas onéreuses et un grand nombre d’entre elles font simplement appel à un mode de pensée différent.   

Le présent rapport vise surtout à donner une première idée des réformes de la gestion du temps actuellement engagées dans les pays nordiques. Les auteurs s’en sont volontairement tenus à des descriptions succinctes et générales. Tout Etat membre qu’un certain modèle intéresserait est invité à prendre contact avec le pays nordique en question pour obtenir des informations complémentaires en fonction de ses intérêts particuliers. Il est à espérer que ce rapport donnera lieu à une intensification des échanges d’idées de réformes et poussera d’autres pays à apporter leur contribution à la réduction des délais de procédure en Europe.

La CEPEJ remercie vivement le Ministère finlandais de la justice pour l’appui indispensable qu’il a fourni à la présente étude et l’Institut national de recherche sur la politique juridique de Finlande et les autorités danoises, norvégiennes et suédoises, qui ont participé au travail de recherche, ainsi que les experts scientifiques.



PREMIÈRE PARTIE

LA GESTION DU TEMPS DANS LES JURIDICTIONS DES PAYS NORDIQUES : EXAMEN DES PROPOSITIONS  ET DES POLITIQUES VISANT À RÉDUIRE LES DÉLAIS DE PROCÉDURE

Mirka Smolej

Institut national de recherche sur la politique juridique, Finlande


1.         INTRODUCTION

L’étude intitulée "La gestion du temps dans les juridictions des pays nordiques" présente et synthétise les actions lancées et menées à bien ces dernières années dans les pays nordiques (Danemark, Finlande, Norvège, Suède). Elle met l’accent sur les stratégies et les propositions qui pourraient concerner un grand nombre ou la plupart des États membres du Conseil de l'Europe. Par ailleurs, il est souhaitable que le présent rapport débouche sur un échange d’idées et de pratiques entre les pays cibles eux-mêmes.

Marco Fabri et Philip Langbroek (CEPEJ (2003) 20 Rev) ont attiré l’attention sur un certain nombre de questions importantes en ce qui concerne la gestion du temps et l’utilisation du temps dans les systèmes judiciaires :

§  attachement de l’appareil judiciaire à la gestion du temps;

§  conduite des débats et dispositifs de responsabilisation aux fins de l’avancement du traitement des dossiers;

§  participation des différentes parties à la planification du temps;

§  surveillance par les tribunaux de l’état d’avancement des dossiers;

§  définitions des objectifs et des normes concernant l’utilisation du temps;

§  suivi informatique des dossiers;

§  une approche axée sur la gestion des dossiers;

§  politique de réaction contre la prolongation injustifiable de la procédure et système d’affectation individuelle.

La CEPEJ-TF-DEL a été chargée de transformer les 18 "lignes d’action" contenues dans le Programme-cadre de la CEPEJ[4] en mesures concrètes. Les questions mentionnées par Marco Fabri et Philip Langbroek (ibid.) pourraient être considérées comme le fondement des 8 lignes d’action du Programme-cadre. Dans les débats qu’elle a tenus jusqu’ici, la Task Force a souligné l’importance des questions suivantes : améliorer la prévisibilité de l’utilisation du temps (ligne d’action 3), définir et suivre les normes concernant un délai optimal pour chaque catégorie de dossiers (ligne d’action 4), améliorer les outils statistiques et élaborer des stratégies de communication (ligne d’action 5), mesures visant à limiter l’ensemble des dossiers traités par les tribunaux en garantissant une utilisation appropriée des instances de recours et à éviter toute utilisation abusive en éliminant les dossiers manifestement mal fondés (ligne d’action 8), respect effectif des règles de procédure (ligne d’action 9), définition des priorités dans la gestion des dossiers (ligne d’action 10), mesures visant à réduire le temps d’attente – en particulier pour les victimes et les témoins – en élaborant des méthodes d’organisation des procès (ligne d’action 11) et améliorer la formation à la gestion du temps des juges, procureurs, avocats et autres professionnels des systèmes judiciaires (ligne d’action 15). Ces lignes d’action ont joué un rôle important dans la sélection des mesures et propositions présentées dans cette étude.

1.1        Données et objet du rapport

Les ministères de la justice et les administrations judiciaires des quatre pays ont aidé à recenser les études et rapports pertinents relevant de leur juridiction. Ils ont établi des listes initiales et des synthèses des études existantes à la demande de l’Institut national de recherche sur la politique juridique de Finlande et ont transmis ces études au chercheur. Les données présentées comprennent des rapports de groupe de travail, des propositions et des memoranda internes des ministères de la justice et des administrations judiciaires nationales des pays cibles. Certains rapports contiennent des descriptions d’études empiriques, telles que des questionnaires adressés à différentes autorités judiciaires et des entretiens auxquels elles ont participé.

Kaijus Ervasti et Hertta Kallioinen (2003, Finlande) ont noté que la recherche empirique dans le domaine judiciaire se heurte notamment au grave problème de l’absence d’une solide tradition de recherche en sociologie judiciaire ou sociologie juridique en Finlande. Le fait de ne pas disposer de données empiriques systématiques sur les pratiques judiciaires rend difficile toute évaluation du développement et des problèmes qui peuvent se poser. La présente étude montre que c’est également un problème majeur dans les autres pays nordiques, car il n’y existe pas d’études théoriques plus approfondies sur la gestion du temps dans les tribunaux.

Le présent rapport fait porter l’examen sur les affaires civiles, pénales et administratives. Les appareils judiciaires norvégien et danois n’ont pas de tribunaux administratifs distincts, mais ce type de tribunal existe en Suède et en Finlande. Comme l’on noté Fabri & Langbroek (2003), la notion de "retard judiciaire" est difficile à définir, car elle ne concerne pas seulement les problèmes liés aux règles de procédure, mais aussi les méthodes de travail des tribunaux. Au pénal, elle concerne l’interaction entre l’organisation des tribunaux, le parquet et la police; au civil, l’interaction entre le tribunal et les avocats, y compris leurs cabinets, et l’interaction entre les parties, le tribunal et, parfois, les huissiers; dans les affaires administratives, l’interaction entre les organes administratifs, les commissions de préparation du procès et les tribunaux administratifs. Il convient également de signaler l’interaction entre les tribunaux de première instance, les cours d’appel et les cours suprêmes. Dans l’ensemble, la complexité des situations impliquant des retards judiciaires est hautement différenciée. Dans l’optique du présent projet, il est extrêmement difficile de présenter des mesures et des systèmes généraux de gestion du temps qui pourraient s’appliquer à tous les types de procédures (pénales, civiles et administratives) et à tous les systèmes et pratiques judiciaires des quatre pays considérés.

Le rapport n’analyse pas de nouvelles données de base, mais fait la synthèse d’études, de rapports et de propositions de réforme déjà produits. De plus, il ne s’est pas agi de présenter des données statistiques sur les dossiers traités dans chaque pays cible ni d’établir des comparaisons statistiques entre les stocks d’affaires ou les temps de traitement. Il n’a pas non plus été question de brosser un tableau détaillé des politiques et opinions concernant la gestion du temps dans les pays nordiques. L’objectif de la présente étude a plutôt été de dresser un inventaire des mesures susceptibles d’accélérer la procédure et de donner un aperçu des stratégies et interventions visant à réduire les durées des procédures judiciaires. Le principal objectif est descriptif, mais les résultats constituent un tour d’horizon général des outils d’intervention permettant d’améliorer les stratégies de gestion du temps dans les tribunaux.

1.2        Délais

La confiance que les citoyens peuvent avoir dans le système judiciaire est tributaire de l’idée qu’ils se font de la rapidité avec laquelle les dossiers sont traités par le système judiciaire et de la mesure dans laquelle la procédure est conduite d’une façon qui garantisse la protection juridique de l’individu. Naturellement, les temps de traitement des dossiers judiciaires sont directement liés au nombre de nouvelles affaires et au nombre de celles qui font l’objet d’un jugement.

Les lenteurs des procédures judiciaires ont plusieurs incidences négatives. Il arrive souvent que les dossiers judiciaires portent sur des problèmes ayant un lien très étroit avec la vie quotidienne des gens, tels que ceux qui concernent les enfants, la famille, le revenu, les conditions de vie, le travail, la propriété et la sécurité. La procédure judiciaire est souvent une expérience sans équivalent dans la vie d’un individu, qui peut l’absorber et l’amener à y consacrer de l’énergie et des ressources prélevées sur d’autres domaines de la vie. Ne serait-ce que par esprit humanitaire, il est indispensable que les procédures soient conduites sans retard abusif (Lainkäytön laadun mittaaminen tuomioistuimessa 2005, 45, Finlande).

L’accroissement des temps de traitement survenu ces dernières années dans plusieurs États européens (y compris les pays nordiques[5]) est peut-être dû en partie à l’insuffisance des effectifs des tribunaux. Si ces effectifs n’augmentent pas, il est probable que les temps de traitement continueront de s’accroître, en raison, notamment, du retard accumulé au cours des années précédentes, de l’augmentation prévue des stocks d’affaires et de la complexité croissante des dossiers. En particulier, les procédures civiles absorbent plusieurs jours de temps de travail du fait de leur complexité (God og effektiv rettspleie 2003, 4-7, Norvège). Toutefois, les problèmes rencontrés ne peuvent pas s’expliquer uniquement par la pénurie de personnel : les facteurs de retard sont plus complexes. Le nombre d’affaires tranchées dépend des ressources du tribunal, mais aussi de son efficacité et de son organisation. Le fait que les valeurs et les objectifs des règlements ne soient pas tous respectés dans la pratique est également une source de problèmes. Outre le fait que les justiciables doivent avoir le sentiment que les décisions de justice sont justes, il importe que les procédures soient sûres, efficaces, rapides et d’un coût raisonnable. Afin d’améliorer les procédures judiciaires, une commission finlandaise chargée d’examiner l’évolution du système judiciaire a indiqué que la "qualité du travail" revêt une importance toute particulière. Ces dernières années, l’expression, qui désigne les innovations et les modifications apportées aux méthodes de travail des juges, avocats et procureurs, s’est largement imposée et traduite dans la pratique des pays nordiques (Tuomioistuinlaitoksen kehittämiskomitean mietintö 2003, 162-163, Finlande).

En principe, aucun délai ou date limite n’est fixé par la loi des pays nordiques pour les différentes catégories d’affaires. L’absence de délais normalisés en fonction du type d’affaires est due en partie aux problèmes qu’ils ne manqueraient sans doute pas de créer. Si l’on promettait au public une certaine vitesse de déroulement de la procédure, celui-ci risquerait souvent d’être déçu et de perdre confiance dans le système, car des délais normalisés sont difficiles à respecter. Cela étant, les gouvernements de tous les pays nordiques ont publié des recommandations concernant les durées des procédures judiciaires.

L’Administration Judiciaire Nationale de la Suède élabore des statistiques de la durée moyenne actuelle des différentes affaires et des affaires vieilles de plus de six mois et de plus d’un an. Par ailleurs, elle appuie les tribunaux en concevant des outils d’aide à leurs opérations de planification et de suivi. Les tribunaux procèdent de leur côté à un suivi statistique et la plupart d’entre eux signalent les affaires en attente sur une période donnée, en indiquant les raisons du retard. À l’heure actuelle, plusieurs projets sont mis en œuvre à titre expérimental au niveau local en Suède, qui visent à réduire la durée des procédures judiciaires (Mémorandum du 9.3.2005, Suède).

Au début des années 90, le gouvernement a publié des recommandations concernant les normes applicables au temps de traitement des dossiers judiciaires. Pour les tribunaux de première instance, les délais de procédure sont de six mois pour les affaires civiles ordinaires, de trois mois pour les affaires pénales ordinaires et d’un mois pour les affaires pénales simplifiées (Hagedal 2004, 228-229, Norvège). Le Parlement norvégien a également formulé des recommandations concernant les dates limites, qui ne sont que très légèrement différentes des dates limites fixées par le gouvernement (God og effektiv rettspleie 2003, 11, Norvège).

À la Cour Administrative Suprême de Finlande, le temps de traitement moyen est fixé à 10 mois. En outre, elle s’est fixée pour but de traiter 25 % des dossiers en moins de quatre semaines et 35 % des dossiers en une durée comprise entre six et neuf mois. L’objectif fixé pour 2006 est d’accorder une attention particulière aux temps de traitement globaux à la Cour Administrative Suprême de Finlande et dans les juridictions ordinaires finlandaises et, surtout, d’accélérer le traitement des dossiers en attente depuis un an (Hallintotuomioistuinten tulostavoitteet vuonna 2006; Yleisten tuomioistuinten ja työtuomioistuimen tulostavoitteet vuonna 2006, Finlande). En ce qui concerne les cours d’appel, l’objectif consiste à réduire les écarts de temps de traitement observés entre les différentes cours. On se propose de ramener l’écart entre les temps de traitement le plus long et le plus court dans les cours d’appel, qui était de plus de six mois en 2005, à 5,5 mois en 2006 (Yleisten tuomioistuinten ja työtuomioistuimen tulostavoitteet vuonna 2006, Finlande). Dans les tribunaux d’instance finlandais, le délai de traitement des affaires pénales est de 3,1 mois et il est de 7,9 mois pour les affaires ayant donné lieu à une prorogation de la date de comparution. La quasi-totalité des tribunaux d’instance doivent traiter 50 % de leurs dossiers dans un délai maximal de deux mois. La procédure ne doit pas durer plus de neuf mois pour plus de 10 % des dossiers. Les tribunaux d’instance doivent par ailleurs s’employer à répertorier et traiter dans les meilleurs délais possibles les dossiers pénaux en attente (Yleisten tuomioistuinten ja työtuomioistuimen tulostavoitteet vuonna 2006, Finlande).

1.3        Affaires prioritaires

Certaines affaires – notamment pénales – sont généralement considérées comme prioritaires dans les pays nordiques. En Suède, par exemple, les affaires concernant une personne placée en détention provisoire ainsi qu’un certain nombre d’affaires concernant une personne âgée de moins de 18 ans sont des affaires au sujet desquelles la législation dispose que le dossier doit être traité dans un délai maximal spécifié. Par ailleurs, la priorité est normalement accordée aux affaires dites familiales, c’est-à-dire à celles qui concernent la garde d’un enfant, le droit d’accès ou le lieu de résidence de l’enfant (Mémorandum du 9.3.2005, Suède).

L’exigence générale consistant à accélérer le déroulement des procédures pénales impliquant des mineurs, qui s’adressait naguère à la police et au parquet, a été complétée par une réforme des dates limites à appliquer au traitement de certaines affaires en Suède. L’enquête préalable au procès sur les personnes âgées de moins de 18 ans et sur des infractions punissables d’une peine d’emprisonnement d’une durée pouvant dépasser six mois sera considérée comme prioritaire.

De plus, l’enquête préalable doit être menée à bien dans les meilleurs délais possibles et la mise en examen intervenir dans les six semaines qui suivent l’achèvement de l’enquête préalable. L’audience principale doit se tenir dans les deux semaines qui suivent la date de la mise en examen dans les affaires où la personne inculpée est âgée de moins de 18 ans et où l’infraction en question peut lui valoir une condamnation à plus de six mois d’emprisonnement (Mémorandum du 27.5.2005, Suède).

En Norvège, l’audience de première instance doit se tenir dans les six semaines qui suivent la date à laquelle le tribunal d’instance a été saisi de l’affaire si le défendeur se trouve toujours en détention ou est mineur. Les audiences d’appel doivent se tenir dans les huit semaines suivant la date à laquelle l’appel a été déclaré recevable. Une priorité en matière de délais de procédure est généralement accordée pour certaines affaires civiles, comme les affaires de garde d’enfant et de conflit du travail (Hagedal 2004, 228-229, Norvège).

En Norvège, l’audience pénale doit se tenir dans les six semaines qui suivent la date à laquelle le tribunal d’instance a été saisi de l’affaire et dans les huit semaines suivant la date à laquelle l’appel a été déclaré recevable par la cour d’appel. Parallèlement, une priorité en matière de délais de procédure est généralement accordée pour certaines affaires civiles, comme les affaires de garde d’enfant et de conflit du travail (Hagedal 2004, 228-229, Norvège).

Au Danemark, le Parlement et le Gouvernement ont décidé qu’il fallait accorder une priorité particulière aux affaires d’agression et de viol. Les tribunaux d’instance ont donc été avisés d’avoir à traiter ces types de dossiers dans un délai de 37 jours à compter de leur saisine.  L’Administration judiciaire danoise rend compte chaque année des résultats obtenus dans la réalisation de ces objectifs. Elle adresse son rapport à une commission du Parlement danois, le Folketinget. En ce qui concerne les affaires d’agression, elle formule des recommandations sur la manière la plus rapide de traiter ces dossiers. De plus, elle analyse les raisons des retards constatés.

1.4        Typologie des dates limites

Les tribunaux des pays nordiques utilisent rarement des dates limites impératives, mais mettent en oeuvre des délais moins contraignants de diverses sortes : dates limites maximales, dates limites ordinaires ou moyennes, dates limites optimales (“aussi rapide que possible”). Ils utilisent aussi des dates limites spéciales, par exemple en ce qui concerne la garde d’un enfant, la délinquance juvénile et les affaires pénales où le suspect est placé en détention, afin que les tribunaux procèdent à de fréquents examens de la rapidité de l’enquête et de prise de la décision de mise en examen, ce qui incite par ailleurs la police et le parquet à traiter en priorité les affaires de garde d’enfant et celles où la personne est placée en détention.

Les tribunaux, usant des pouvoirs qui leur sont conférés par la loi, peuvent fixer les dates limites de leur choix. Ces dates limites affectent généralement les parties, qui peuvent être en droit de se plaindre si elles ne sont par respectées. Les tribunaux peuvent fixer des dates limites à usage interne qu’ils peuvent contrôler et autoriser, mais sans droits pour les parties. Le Parlement et l’Administration judiciaire ou le ministère de la Justice peuvent également fixer de telles dates limites dans le cadre des affectations de crédits budgétaires ou au titre d’autres directives administratives générales.

La place plus grande accordée à la gestion des tribunaux a fait apparaître un nouveau type de dates limites. On pourrait les appeler "dates limites de pourcentage" : un certain pourcentage d’un stock défini d’affaires doit être traité dans un certain délai, tandis que les autres dossiers peuvent être traités dans un délai moins contraignant. Les tribunaux ont toute latitude pour choisir les dossiers devant entrer dans la limite de pourcentage.

 

Le tableau 1 récapitule certains exemples de délais utilisés par les juridictions des pays nordiques.

Tableau 1.   Récapitulation de certains délais judiciaires en usage dans les pays nordiques

NORVÈGE : Recommandations concernant les normes de temps de traitement des affaires par les tribunaux

Type de juridiction

Affaires

Type de procédure

Délai

Tribunaux de 1re instance

Civiles

Ordinaire

6 mois

Pénales

Ordinaire

3 mois

Simplifiée

1 mois

 

FINLANDE : Objectifs concernant les affaires administratives

Type de juridiction

Affaires

Type de procédure

Délai

Cour administrative suprême

Administratives

Toutes

10 mois en moyenne

25% des dossiers < 4 semaines

35% < 6 à 9 mois

Cours d’appel

Appel

Toutes

Ramener l’écart de temps de traitement de 6 à 5,5 mois (max. à min.)

FINLANDE : Objectifs concernant les affaires pénales

Type de juridiction  

Affaires

Type de procédure

Délai

District

Pénales

Toutes

3,1 mois
(première instance)

50% dans les 2 mois

90% dans les 9 mois

District

Affaires ayant donné lieu à une prorogation de la date de comparution

Toutes

7,1 mois
(première instance)

SUÈDE : Objectifs concernant les affaires pénales impliquant des mineurs

Type de juridiction

Affaires

Type de procédure

Délai

Tribunaux de 1re instance

Pénales

Enquête sur les personnes âgées de moins de 18 ans

Peine de prison dont la durée peut dépasser 6 mois

La mise en examen doit être décidée dans les 6 semaines qui suivent l’achèvement de l’enquête préalable

L’audience principale  doit se tenir dans les 2 semaines qui suivent la date de mise en examen

NORVÈGE : Objectifs concernant les affaires pénales impliquant des personnes placées en détention ou des mineurs

Type de juridiction

Affaires

Type de procédure

Délai

Tribunaux de 1re instance

Pénales

- Inculpé en détention

- Mineur (moins de 18 ans)

L’audience doit se tenir dans les 6 semaines suivant la date de la saisine du tribunal d’instance

Cours d’appel

Pénales

- Inculpé en détention

- Mineur (moins de 18 ans)

L’audience doit se tenir dans les 8 semaines suivant la date à laquelle la Cour d’appel a déclaré l’appel recevable

DANEMARK : Objectifs concernant certains dossiers prioritaires

Type de juridiction

Affaires

Type de procédure

Objectif

Tribunal de 1re instance

Pénales

Affaires d’agression et de viol

Le dossier doit être traité dans un délai de 37 jours à compter de la saisine du tribunal.

2.         STRATÉGIES DE GESTION

Les stratégies de gestion sont importantes pour le fonctionnement du tribunal et peuvent fortement accélérer l’ensemble de la procédure. Le présent chapitre examine successivement trois thèmes liés à la gestion des tribunaux : la conduite des débats, la qualité du travail et la pratique consistant à confier des tâches et la prise de certaines décisions à des protagonistes intervenant plus tôt dans la chaîne de traitement des dossiers. Il peut paraître artificiel de traiter séparément ces trois thèmes dans la mesure où ils se recoupent partiellement, mais il est indispensable d’introduire un certain classement des mesures et des thèmes pour présenter les informations essentielles en rapport avec les objectifs du présent rapport.

2.1        Conduite de la procédure judiciaire

Le juge est responsable du pilotage actif de l’audience principale. Cela suppose, par exemple, qu’il la conduise d’une manière bien ciblée et sans faire perdre de temps au tribunal ni aux parties en présence. Selon une proposition formulée en Norvège (LOK-rapport 8, 2004/2005, Norvège), le juge devrait, au début de la procédure, examiner le calendrier avec les parties en présence et apporter tous éclaircissements nécessaires quant à la raison d’agir, les moyens de preuve, etc. De plus, il a été proposé que les tribunaux organisent des rencontres avec des représentants des barreaux locaux afin de concevoir les moyens susceptibles de renforcer et d’améliorer le traitement des affaires civiles. Il a également été suggéré que les directives concernant la mise en état et la conduite des audiences principales au civil devraient être planifiées et élaborées en concertation avec les avocats. Il est souhaitable qu’un représentant du tribunal participe aux réunions des membres du barreau local chaque fois que de nouvelles directives sont adoptées ou que d’autres changements sont apportés aux usages judiciaires. Il importe d’associer les avocats aux efforts de collaboration engagés entre les différentes juridictions, collaboration préconisée pour formuler les directives devant déboucher sur les meilleures pratiques possibles (ibid.)

Les tribunaux doivent veiller à ce que les juges se prononcent en toute indépendance. Or, cela peut imposer certaines limites à la gestion des personnels des tribunaux. À cet égard, il importe de préciser la ligne de démarcation entre le jugement et le travail administratif. Jusqu’à présent, la gestion des tribunaux a été axée sur le rôle des juges, l’activité des tribunaux se caractérisant alors par la production d’un jugement dans les affaires dont ils étaient saisis. Toutefois, une évolution qui se dessine depuis peu en Norvège montre que la gestion d’un tribunal doit aller plus loin : il importe de se concentrer sur l’impulsion à donner à toutes les initiatives relevant des tribunaux et les incidences du rôle des responsables de la gestion des tribunaux devraient devenir univoques. Des juges univoques et motivés ne manqueront pas de contribuer à renforcer les tribunaux en tant qu’organisations et à rendre plus efficace l’utilisation des ressources. Il en va de même lorsque l’on s’emploie à réunir toutes les conditions d’une procédure efficace sans se préoccuper de rendre le milieu de travail stimulant (rapport LOK 12, 2004/2005, Norvège).

Le problème ne vient pas de ce que les responsables de l’administration des tribunaux disposent de pouvoirs trop limités sur leurs collègues, mais que beaucoup de ces responsables se sont toujours abstenus d’user activement de ces pouvoirs. Si chaque responsable se concentre davantage sur la nécessité d’une bonne direction de la procédure, les personnels des tribunaux deviendront un vecteur plus important de l’amélioration de l’allocation des ressources au sein des tribunaux. Il semble nécessaire de faire mieux comprendre à ces personnels l’importance des mécanismes permettant d’améliorer la qualité de la direction de l’action des tribunaux, mais également d’instituer ces mécanismes par le biais de l’activité même de traitement des affaires judiciaires (rapport LOK 12, 2004/2005, Norvège).

Le juge responsable de la mise en état doit garantir une procédure rapide et économique au moyen d’un travail de pilotage actif et systématique (tableau 3). Dès que la réponse de l’inculpé à l’accusation dirigée contre lui est reçue, le juge doit déterminer si les possibilités de médiation ont été présentées aux parties en présence. Les informations sur la médiation judiciaire doivent être fournies dans toutes les affaires pour lesquelles elle est possible. Même dans les affaires où les parties ont passé outre à une offre de médiation, le juge doit déterminer s’il importe de prendre contact avec les parties pour leur donner de plus amples renseignements sur la procédure et renouveler l’offre de médiation. Tel devrait être le cas, en particulier, pour les affaires dans lesquelles les déclarations des parties divergent.  L’audience principale doit se tenir dans les six mois suivant la date de l’assignation et le juge a la responsabilité indépendante d’évaluer la longueur du délai devant s’écouler avant la tenue de l’audience principale.

Tableau 2.   Ce que le juge doit faire pour améliorer le travail de pilotage (rapport LOK 9 2004/2005, 3-6, Norvège)

1. Étudier les possibilités de médiation.

2. Déterminer si certains textes réglementaires s’appliquent à l’affaire.

3. Déterminer la nécessité de tenir une réunion concernant la mise en état de l’affaire.

4. Arrêter la date et l’heure de l’audience principale.

Avant l’audience principale, le juge doit demander aux parties de formuler une proposition concernant le programme de l’audience principale. Le plan doit inclure une évaluation du temps nécessaire aux différentes phases, par exemple le temps nécessaire à la présentation des éléments de preuve. Le juge doit examiner le calendrier proposé et, au besoin, modifier le plan avec les parties. Ce plan fixe un cadre contraignant à l’audience principale (rapport LOK 9 2004/2005, 3-6, Norvège).

Il existe sans doute d’importantes différences entre les pays nordiques et entre les tribunaux eux-mêmes en ce qui concerne le travail de pilotage. On se heurte notamment au problème de l’absence apparente d’informations d’origine locale sur les actions et les méthodes effectivement mises en oeuvre. Il est également vraisemblable que les différences de régimes adoptés par les tribunaux sont dues en partie à la personnalité des juges. Dans certains tribunaux, le juge peut s’évertuer à respecter les délais administratifs, tandis que dans d’autres, il peut se concentrer sur d’autres questions. Le problème tient au fait que les informations concernant le type de facteurs qui influent sur le fonctionnement des tribunaux ne peuvent pas être obtenues par l’étude statistique des temps de traitement des dossiers. La seule méthode applicable consisterait à effectuer des enquêtes empiriques au niveau des tribunaux, notamment en interrogeant les juges et le personnel judiciaire.

2.1.1     Projet pilote : une meilleure conduite des affaires civiles

La longueur des temps de traitement des affaires civiles est considérée comme l’un des problèmes les plus graves qui se posent aux tribunaux du Danemark. On y a longuement étudié les mesures prises aux plans tant administratif que législatif pour que les justiciables puissent bénéficier d’une procédure efficace. Un projet pilote danois (Pilotprojekt om oget processtyring i civile sager 2002, Danemark) concernant ces questions a été exécuté dans six tribunaux entre 2000 et 2002. Il s’agissait de réduire la durée de la phase de mise en état tant du côté du juge, chargé de rendre plus rigoureux le pilotage de la procédure, que de celui des avocats, qui devaient s’en tenir au calendrier fixé.

Selon le modèle principal du projet, il convenait de tenir une réunion préparatoire peu de temps après la remise de l’assignation. De plus, il devenait permis d’organiser cette réunion par téléphone et l’expérience a montré que les tribunaux concernés par le projet pilote se sont largement prévalus de cette possibilité. Le projet présentait l’avantage d’impliquer un grand nombre de représentants et de protagonistes des différentes sections des organisations chargées de la mise en état, et il a également été largement appuyé par les juges et les avocats. La phase de la procédure civile qui prend le plus de temps est celle de la mise en état, au cours de laquelle les parties présentent les éléments du dossier. Si l’on veut sensiblement réduire les temps globaux de traitement, il convient de le faire en particulier en diminuant le temps consacré à la mise en état. L’aptitude du tribunal à le faire est largement tributaire de la façon dont il pilote la procédure (Pilotprojekt om oget processtyring i civile sager 2002, Danemark).

Les entretiens menés au sein de groupes de discussion dans certains des tribunaux concernés par le projet ont bien montré les changements apportés. Le pilotage de la procédure par les juges est devenu plus actif et l’application de dates limites à la préparation des actes exposant les faits est devenue plus courante. Par ailleurs, les demandes de prorogation de délai devaient être dûment motivées. Les tribunaux avaient joué un rôle plus actif pendant la phase pilote en ce qui concerne la mise en état des affaires civiles et l’expérience a montré que le renforcement du pilotage de la procédure pouvait réduire sensiblement le temps de traitement. Trois des six tribunaux concernés avaient nettement réduit leurs temps de traitement au cours de six premiers mois du projet.

Le projet pilote se proposait également d’élaborer des modes combinant les modes écrit et oral de mise en état. Les tribunaux ont panaché le mode écrit avec des dialogues et contacts directs avec les parties. L’application des nouvelles mesures de pilotage n’a pas été limitée à un seul mode de mise en état : ces mesures pouvaient être appliquées aux deux modes (Pilotprojekt om oget processtyring i civile sager, 2002, 4-5, Danemark).

Tous les participants au projet ont jugé positif le fait d’avoir rendu plus actif le pilotage de la procédure. La rigueur de la planification préalable permet d’obtenir des améliorations importantes pour les protagonistes. Il est d’autant plus utile de fixer les dates des audiences et d’appliquer activement des délais que l’on s’attend à ce que la procédure dure longtemps, par exemple parce qu’il faut coordonner un grand nombre de calendriers. Il importe que les tribunaux définissent des lignes d’action stables et, c’est là une règle essentielle, n’autorisent pas de prorogations dans les cas où les délais n’ont pas été respectés. Les juges et les avocats ont estimé que les audioconférences se prêtaient tout particulièrement bien à la mise en état de la plupart des affaires civiles générales (Pilotprojekt om oget processtyring i civile sager 2002, Danemark).

2.1.2     Amélioration de la coopération entre acteurs de la justice des mineurs

En Finlande, la longueur de la procédure pénale pour mineurs a été considérée comme étant l’un des principaux problèmes de cette procédure. À la fin des années 90, une condamnation n’intervenait qu’entre trois et cinq mois après la commission de l’infraction. Par ailleurs, la coopération entre les différentes responsables laissait à désirer. L’Association de probation et de suivi a la responsabilité principale de l’établissement du rapport d’enquête individuel pendant l’enquête de police. Toutefois, il est nécessaire d’instituer des mesures supplémentaires d’appui et de soutien psychologique (Rikollisuustilanne 2000, Finlande).

C’est ainsi que le Ministère finlandais de la justice a mis sur pied en 2000 un projet pilote qui a permis de réduire la durée de la procédure pénale à environ la moitié du temps qui lui était consacré avant l’exécution du projet, en rendant plus efficace la coopération des différents responsables du traitement des jeunes délinquants. Selon Matti Marttunen (2002, Finlande), l’expérience a permis de raccourcir la durée de la procédure dans toutes ses phases et a influé sur l’enquête de police, les poursuites, le procès et l’application de la peine. De plus, des mesures de soutien de divers types ont été mieux combinés que par le passé avec la procédure pénale. Dans la pratique, la police, le parquet, le juge, l’Association de probation et d’assistance aux libérés et les responsables de la protection sociale ont coopéré dès le début de l’enquête judiciaire.

2.2        Qualité du travail

Les administrations judiciaires nationales des pays nordiques et les tribunaux eux-mêmes procèdent actuellement à d’importants investissements en vue d’améliorer la répartition du temps consacré aux diverses catégories d’affaires judiciaires et de réduire les durées des procédures judiciaires. Ils le font, par exemple, en modifiant les méthodes de travail et en mettant en oeuvre des modalités spécifiques d’allocation des ressources au sein des tribunaux. En ce qui concerne la phase de mise en état, les tribunaux disposent d’une plus grande marge d’appréciation pour arrêter eux-mêmes les modalités de leur fonctionnement interne. En vertu de l’un des principes fondamentaux nouvellement appliqués, le juge s’occupe pour l’essentiel de trancher une affaire et les autres membres du personnel judiciaire s’occupent de la plupart des tâches de mise en état de l’affaire considérée.

En Suède, un manuel sur la qualité du travail et les dispositions à prendre par chaque tribunal a été élaboré par un "groupe qualité" composé de représentants des juridictions de droit commun, des tribunaux administratifs ordinaires et des tribunaux régionaux des loyers et des baux. Ce groupe de travail a défini la notion de "qualité au sein des tribunaux" (tableau 4) et formulé une proposition concernant la pérennisation d’un travail de qualité dans l’appareil judiciaire suédois et proposé des méthodes et des stratégies à mettre en oeuvre à cette fin.

Tableau 3.   Les principaux éléments de la "qualité au sein des tribunaux" (Att arbeta med kvalitet i domstolsväsendet 2005, Suède)

1. Décisions judicieuses et présentation bien rédigée des motivations.

2. Décisions et assignations rédigées de façon intelligible.

3. Traitement respectueux des parties lorsqu’elles s’adressent à la cour.

4. Cadre et atmosphère de travail conviviaux.

En Suède, il a été proposé que chaque tribunal prenne des dispositions de nature à renforcer le dialogue entre les parties, par exemple en organisant des discussions en groupe. En ce qui concerne les opinions et les expériences des personnes physiques, on a recommandé de procéder à des enquêtes quantitatives. Les résultats de ces enquêtes devraient être rassemblés et communiqués à tous les personnels judiciaires. Les lignes d’action et mesures supplémentaires devraient être arrêtées en commun et les mesures prises et leurs effets devraient être communiqués dans le cadre de réunions périodiques du personnel. De plus, les mesures planifiées, les mesures en cours d’adoption et les mesures déjà mises en pratique doivent être communiquées dans les rapports annuels des tribunaux et les informations correspondantes doivent être transmises à l’Administration Judiciaire Nationale (Att arbeta med kvalitet i domstolsväsendet 2005, Suède).

Au niveau de l’administration centrale, il a été proposé que l’Administration Judiciaire Nationale fournisse aux tribunaux un appui et une assistance pour leur faire accomplir un travail de qualité. Il conviendrait de constituer des groupes chargés de la qualité dont les membres pourraient faire office de personnes de contact pour des projets relatifs à la qualité et proposer de tels projets. Ces groupes de référence pourraient également contribuer à l’élaboration de nouvelles méthodes à mettre en oeuvre par les tribunaux. Il a été proposé que l’Administration Judiciaire Nationale se charge de mettre sur pied et de gérer une base de données sur les normes de qualité à utiliser par les tribunaux et de fournir des modèles aux fins de la réalisation d’enquêtes.

2.2.1     Projet Rovaniemi pour la qualité du travail[6]

En 1999, la juridiction d’appel la plus septentrionale de la Finlande a mis sur pied un projet concernant la qualité de l’administration de la justice. Tous les tribunaux relevant de la juridiction de la cour d’appel de Rovaniemi, soit neuf tribunaux d’instance et la cour d’appel elle-même, ont participé au projet. Celui-ci avait pour objectif d’améliorer le fonctionnement des tribunaux de sorte que les procédures satisfassent aux critères d’équité les plus stricts, que les décisions soient dûment motivées et que les services fournis par les tribunaux soient financièrement abordables pour les justiciables. Les principales méthodes de travail ont consisté en discussions systématiques entre juges et entre juges et partenaires impliqués. Ces discussions ont eu pour but d’améliorer la qualité des décisions (Rapport de synthèse du projet pour un travail de qualité 2005, Finlande).

           

Le projet concernant la qualité consiste à impliquer activement tous les juges du tribunal de première instance et certains juges de la cour d’appel de Rovaniemi. Les représentants des tribunaux d’instance sont répartis en groupes de travail composés des représentants des divers tribunaux d’instance et d’un représentant de la cour d’appel. Chaque groupe de travail se voit assigner chaque année un thème spécifique en rapport avec la qualité choisi par l’organe directeur. Les groupes de travail étudient, dans l’optique de leur thème relatif à la qualité, les procédures engagées devant divers tribunaux d’instance, formulent des recommandations concernant des procédures ou des interprétations de qualité et généralement acceptables et présentent une proposition d’harmonisation de différentes procédures. Le séminaire annuel sur la qualité examine les travaux des équipes chargées de la qualité et, après en avoir débattu, les juges rédigent leur propre avis sur les objectifs à fixer pour l’année suivante (Laatu ja asiakaspalveluhankkeet tuomioistuimissa 2005, Finlande).

Le choix des thèmes, qui s’appuie sur l’importance du problème traité, est finalisé pendant la Conférence sur la qualité, qui se tient chaque automne. Habituellement, chaque groupe de travail doit se concentrer sur l’un des thèmes de développement. Les groupes de travail recensent les problèmes en rapport avec leurs thèmes respectifs, examinent les méthodes adoptées par les différents tribunaux d’instance, arrêtent une procédure mutuellement acceptable et formulent une proposition d’harmonisation des usages judiciaires. Les mesures de suivi sont élaborées lorsque les objectifs sont fixés.

Les objectifs de qualité en matière civile concernent notamment la précision de la demande d’assignation (l’action en justice) et de la réponse, la gestion du dossier au fond par le juge, la gestion des preuves, la gestion technique du dossier et la rédaction des motifs des conclusions du tribunal en ce qui concerne les preuves. Les discussions ont également porté sur le comportement du juge à l’audience en tant qu’élément des procédures de recours, ainsi que la mise en état d’une affaire civile par les parties elles-mêmes.  Les rapports de suivi surveillent les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs. Le projet pour un travail de qualité est complété par une formation, dispensée pendant six à huit jours par an (Rapport de synthèse du projet pour un travail de qualité 2005, Finlande).

Le comité de développement du projet finlandais pour un travail de qualité a également rédigé une proposition concernant un ensemble de normes de qualité, qui a été évaluée au début de 2006. Le projet de rapport y relatif (Lainkäytön laadun mittaaminen tuomioistuimessa 2005, Finlande) propose six domaines distincts à évaluer, qui regroupent 40 normes de qualité différentes. L’un des domaines à évaluer est la rapidité de la procédure judiciaire. Ce domaine comprend quatre normes de qualité particulières (tableau 5).

Tableau 4.   Normes de qualité concernant la rapidité de la procédure (Lainkäytön laadun

mittaaminen tuomioistuimessa 2005, 46-49, Finlande)

1. Procédure organisée dans un délai optimal.

2. Calendrier de la procédure établi en fonction de ses incidences sur les parties.

3. Les parties ont le sentiment que la procédure a été organisée dans un souci de rapidité.

4. Les délais arrêtés en commun doivent être respectés.

1. Procédure organisée dans un délai optimal

Dans ce contexte, le "délai optimal" correspond à la période pendant laquelle la procédure peut être conduite dans le respect des dispositions applicables aux procédures judiciaires. Cette notion de "délais optimaux" n’inclut donc pas les facteurs tels que l’importance et la complexité d’une affaire ou les ressources à la disposition du tribunal. Le respect du délai de procédure optimal suppose que la procédure ne comporte aucune période pendant laquelle rien n’est fait. Les délais optimaux sont fixés séparément pour les procédures pénales et les procédures civiles (ibid. p. 46-47).

2. Calendrier de la procédure établi en fonction de ses incidences sur les parties

La deuxième norme de qualité exige que les affaires soient traitées, et le calendrier établi, en fonction de leurs conséquences et de leur importance pour les parties. La pratique traditionnelle veut que les affaires soient traitées selon l’ordre d’arrivée. Or, cette conception ne correspond que rarement aux conditions de la vie réelle. Les diverses dispositions applicables aux audiences amènent déjà à faire passer les affaires par différentes ‘filières’. La charge de travail de chaque juge a également un impact considérable sur les temps de traitement.

3. Les parties ont le sentiment que la procédure a été organisée dans un souci de rapidité

L’affaire peut avoir été traitée rapidement du point de vue du tribunal, sans toutefois que les parties partagent ce sentiment. Les différences d’appréciation entre le tribunal et les parties peuvent être réduites si l’on explique à ces dernières les différentes phases que recouvre le délai global et la raison de l’existence de ces phases.

4. Les délais arrêtés en commun doivent être respectés

Pendant la procédure judiciaire, le tribunal fixe plusieurs délais pour les différentes phases de la procédure. Le juge et les parties peuvent s’entendre sur tel ou tel acte de procédure à mener à bien dans un délai fixé. Cette quatrième norme dispose que tant le tribunal que les parties doivent respecter les délais fixés.

2.2.2     Consultants en "bonnes pratiques"

On compte à l’heure actuelle 82 tribunaux d’instance[7] au Danemark. On considère que les innovations théoriques et pratiques dans le domaine administratif sont très importantes pour garantir l’efficacité et la coopération au sein de l’appareil judiciaire. Cet échange d’idées et de données d’expérience au service de l’amélioration du système est mis en oeuvre depuis quelques années dans le cadre de différents types d’initiatives, telles que les cours de formation internes à l’intention des personnels judiciaires, et de rencontres régionales aux fins d’un tel échange. 

En 2002, l’Administration Judiciaire Nationale du Danemark a décidé de lancer un projet sur les "bonnes pratiques".  Ce projet s’inscrivait dans le cadre des écarts importants de taux de productivité constatés entre tribunaux d’instance. Par ailleurs, il était indiqué dans les budgets des tribunaux qu’il importait de réduire le personnel de plusieurs tribunaux d’instance. Il s’agissait donc de se demander comment les tribunaux d’instance pourraient faire face au volume de dossiers du moment avec des effectifs diminués.

Le projet a commencé par procéder à une analyse générale des méthodes de travail de certains des tribunaux de district parmi les plus productifs. Cette analyse a abouti à la production d’un manuel sur les "bonnes pratiques" qui donnait des exemples concrets des méthodes de travail efficaces mises en oeuvre dans les tribunaux d’instance. De plus, on a formulé une proposition sur la manière dont on pourrait rendre plus efficaces les fonctions d’appui administratif. Le manuel a été adressé à tous les tribunaux d’instance en novembre 2002 (Notat om Bedste Praksis-projektet ved Danmarks Domstole 27.2.2006, Danemark).

L’élément le plus important du projet sur les bonnes pratiques a été qu’en 2003, quatre  consultants en procédure ont été affectés pour poursuivre le travail d’élaboration, d’expansion et de développement d’idées permettant d’améliorer l’efficacité des tribunaux. Ces consultants font partie du personnel "interne", deux d’entre eux étant des juges suppléants et les deux autres des agents administratifs. Ces personnes continuent de s’acquitter de leurs tâches normales tout en assumant les fonctions de consultant en procédure. Ils consacrent environ la moitié de leur temps au travail relatif aux bonnes pratiques et l’autre moitié à l’accomplissement de leurs tâches habituelles.

Le recours à des consultants internes plutôt qu’externes présente certains avantages. Tout d’abord, les consultants internes ont une connaissance concrète du travail effectué dans les tribunaux d’instance. Ensuite, ils peuvent, dans une certaine mesure, faire office de consultants légitimes, une partie du personnel pouvant se montrer sceptique au sujet des consultants externes. Enfin, les coûts afférents aux consultants internes sont nettement moins élevés.

Lors de la phase préliminaire, les consultants reçoivent une formation afin d'obtenir le statut de consultant en procédure. Par la suite, ils peuvent se mettre à la disposition des tribunaux pour examiner leurs méthodes de travail et les aider à parvenir au meilleur niveau d’efficacité possible. Il importe également de noter que la participation au projet relatif aux bonnes pratiques est entièrement facultative pour les tribunaux. Cela étant, un grand nombre d’entre eux s’intéressent au projet car ils veulent se donner les moyens d’obtenir les meilleurs résultats possibles en matière d’utilisation des ressources et de réduire les temps de traitement des dossiers. La procédure de recours à ces consultants comprend généralement quatre stades (tableau 6).

Tableau 5.   La procédure de recours aux consultants en bonnes pratiques (Notat om Bedste Praksis-projektet ved Danmarks Domstole 27.2.2006, Danemark)

1. Réunion de planification à Planification de mesures et d’actions concrètes et prise de décision à leur sujet

2. Séminaire d’une journée à Evaluation critique des méthodes de travail actuelles

3. Réunions avec le tribunal à Elaboration et application des mesures

4. Séminaire d’évaluation  à Evaluation de l’application des mesures

La procédure s’ouvre le plus souvent par une rencontre qu’organise le consultant avec les représentants du tribunal. Les mesures et méthodes concrètes sont planifiées et arrêtées en concertation avec le président du tribunal et, par la suite, avec les autres personnels d’encadrement. Lors de cette rencontre, les buts et les paramètres du projet doivent être formulés sur la base, par exemple, des informations que les différents services du tribunal doivent fournir au projet et des modalités de communication de ces informations. La réunion de planification dure environ 2 heures (Notat om Bedste Praksis-projektet ved Danmarks Domstole 27.2.2006, Danemark).

Peu de temps après la réunion de planification, on organise un séminaire à l’intention de tous les personnels des services en question, auquel les juges et les avocats participent également. Les employés sont répartis en petits groupes dans lesquels ils procèdent à un examen critique des méthodes de travail actuelles. Les consultants ne se prononcent pas sur les actions à mettre en oeuvre, mais font des observations et donnent leur avis sur les idées du personnel. Ils alimentent le débat à l’aide d’idées présentées au sein d’autres tribunaux. L’ensemble du séminaire a pour objet de recueillir des idées permettant d’améliorer les méthodes de travail. Les idées sont mises par écrit avant leur mise en forme par le tribunal, afin d’apporter aux mesures et aux idées les modifications permettant de mieux répondre aux besoins du tribunal en question.

Après le séminaire, le tribunal dispose d’une période plus longue, d’une durée généralement comprise entre six et 12 mois, pour approfondir et appliquer les propositions avancées pendant le séminaire. La procédure s’achève par un séminaire d’évaluation au cours duquel le tribunal et les consultants examinent ensemble leurs réalisations. Les stades décrits donnent une idée simplifiée de la procédure prise dans son ensemble. Il est bon également de noter que les contacts entre les consultants et les tribunaux sont entièrement confidentiels. Le rôle d’acteurs indépendants qui est celui des consultants implique qu’ils ne communiquent les résultats ou certaines informations à l’Administration Judiciaire Nationale qu’avec l’autorisation du tribunal.  Outre la mise en oeuvre de la cette procédure, les consultants en procédure servent d’intermédiaires pour l’échange d’idées et de données d’expérience entre les divers tribunaux. Ils le font par exemple en utilisant l’intranet des tribunaux et en restant en contact avec le personnel chargé de la formation des nouveaux membres du personnel judiciaire.

Les projets de ce type ont jusqu’ici donné des résultats généralement bons. La majorité des tribunaux qui ont suivi cette procédure ont exprimé un avis positif à son sujet. De plus, les juges comme les personnels administratifs ont salué les résultats obtenus. Un grand nombre de tribunaux ont fait observer qu’il leur avait été très utile d’examiner en détail et selon une perspective nouvelle leurs diverses méthodes de travail. On a également indiqué que la réunion d’évaluation renforce la détermination du tribunal à approfondir et à appliquer les idées débattues. Au demeurant, une enquête de l’Administration Judiciaire Nationale montre que la productivité des tribunaux d’instance a augmenté de 20 % depuis 2000 pour les tâches administratives et de 10 % pour le travail des juges. Cet accroissement de productivité est incontestablement dû en partie à la contribution des consultants en pratiques optimales. Le projet relatif aux pratiques optimales a remporté un succès tel que trois de ces consultants travaillent à présent à plein temps à ce projet (Notat om Bedste Praksis-projektet ved Danmarks Domstole 27.2.2006, Danemark).

2.3       Organisation précoce des tâches et de la prise de décisions dans la chaîne de traitement des affaires

L’une des mesures adoptées pour réduire la durée globale des procédures judiciaires a trait à la possibilité d’autoriser d’autres acteurs à se charger de tâches jusqu’ici confiées aux tribunaux eux-mêmes. Il s’agit notamment de confier une affaire ou la prise de décisions à des personnes intervenant plus tôt dans la procédure de traitement des dossiers, ce afin d’éviter les retards. 

La Suède offre un exemple de ce type de procédure : les procureurs y sont habilités à prendre certaines mesures normalement prises par les tribunaux. Cette initiative vise à réduire le délai s’écoulant entre la décision de mise en accusation et la tenue de l’audience principale devant le tribunal. Dans la plupart des cas, les poursuites sont engagées lorsque le procureur introduit auprès du tribunal une demande d’assignation. Le tribunal rend alors une ordonnance de comparution, demande au prévenu de répondre à l’accusation, fixe la date et l’heure de l’audience principale et délivre une convocation à l’audience principale. Si le prévenu ne fait pas l’objet d’une mesure d’arrestation ou de détention, plusieurs mois peuvent s’écouler entre l’engagement des poursuites et l’audience principale. Toutefois, le tribunal peut charger les procureurs de rendre une ordonnance de comparution et de délivrer une convocation à l’audience principale. Avant de prendre cette décision, le tribunal doit consulter le procureur ou l’autorité poursuivante. La mission ainsi confiée au procureur peut soit concerner des dossiers spécifiques, soit avoir une portée générale, ce qui permet au procureur de rendre des ordonnances de comparution et de délivrer des convocations de façon plus régulière (Mémorandum du 27.5.2005, Suède).

Afin d’accélérer encore davantage la procédure, le procureur peut, en Suède, décider également d’ouvrir une enquête sur les conditions de vie et la situation du suspect. Un rapport d’enquête doit dans de nombreux cas être disponible lors de l’audience principale afin que le tribunal puisse fixer la peine et ce rapport est en principe demandé par le tribunal après qu’il a été saisi d’une demande d’assignation. Le droit du procureur d’ouvrir une telle enquête, ce dès le stade de l’enquête préliminaire, associé à la possibilité susvisée de rendre une ordonnance de comparution et de délivrer une convocation à l’audience principale, peut diminuer sensiblement le laps de temps qui s’écoule entre l’engagement des poursuites et l’audience principale (Mémorandum du 27.5.2005, Suède).

D’une manière générale, il importe notamment, pour réduire la durée des procédures pénales, de pouvoir compter sur des pratiques pertinentes permettant de recenser les affaires qui méritent l’ouverture d’une enquête. De plus, on considère important que l’accélération des procédures ne nuise pas à la qualité ni n’influe sur le nombre des affaires réglées. La formation et le perfectionnement du personnel sont primordiaux pour les avocats et les enquêteurs (Prosjekt hurtigere straffesaksbehandling. (Arbeidsgruppe I, sluttrapport 2000, 7-8, Suède).

En ce qui concerne le modèle de "procédure accélérée" en Suède (voir 2.3.2), un groupe de travail a proposé une procédure accélérée qui couvrirait la majorité de ce que l’on appelle les "affaires tranchées par un notaire" (notariebrottmål). On a estimé que la police devrait se voir habiliter à engager une action en justice dans le cas des affaires d’infractions punissables d’une simple amende. De la sorte, elle pourrait se charger de la mise en accusation et délivrer sur-le-champ à l’accusé une ordonnance de comparution et une convocation à l’audience principale. Le jour de cette audience, c’est le procureur qui se chargerait de la conduite de la procédure. Toutefois, cette procédure ne serait pas applicable aux personnes âgées de moins de 18 ans. 

2.3.1     Remise de l’avis de comparution

L’annulation d’audiences principales contribue à accroître les coûts et est une source de difficultés tant pour la société que pour les particuliers. La raison la plus courante d’annulation est l’absence de comparution du prévenu à l’audience. Pour des raisons financières, il est essentiel que l’audience principale puisse se tenir même en l’absence du prévenu. Il importe également que les tribunaux se prévalent de cette possibilité d’une manière efficace. Plusieurs initiatives visant à simplifier la remise de l’avis de comparution et la délivrance de l’assignation ont été prises dans les pays nordiques ces dernières années.

On en a un exemple avec la proposition formulée par un groupe de travail suédois qui consiste à concevoir des moyens de réduire le nombre d’annulations d’audiences principales dans les affaires pénales jugées par les tribunaux d’instance. Le groupe de travail a privilégié les dispositions réglementaires guidant et définissant les procédures judiciaires et a estimé qu’il conviendrait de multiplier les possibilités de trancher des affaires dans les cas où le prévenu ne comparaît pas à l’audience (Inställda huvudförhandlingar i brottmål I 2000, 18-20, Suède).

Ce groupe de travail a examiné la question spéciale de la remise de l’avis de comparution, question qui peut influer sur la nécessité d’organiser des audiences principales, mais qui ne nécessite pas de modification des textes réglementaires. La difficulté de joindre les parties devant se présenter aux audiences est un problème général tant pour les tribunaux que pour d’autres autorités. C’est la raison pour laquelle il est extrêmement important que la procédure de signification d’actes soit organisée d’une manière efficace et que les méthodes de signification soient bien formulées de façon à faciliter la procédure. L’énorme volume de travail du service des mandats de comparution, qui tient à un manque de ressources, est jugé particulièrement préoccupant. Les autorités ont donc commencé à recourir aux services d’entreprises privées de signification d’actes et certaines autorités suédoises en ont été très satisfaites. Par exemple, le recours à ces entreprises pour accomplir cette tâche dans la police a permis de réduire les coûts. La promotion de la concurrence économique parmi la police et l’externalisation des tâches ont amélioré la qualité du service de signification d’actes (Inställda huvudförhandlingar i brottmål I 2000, 40, Suède).

En 2004, on a organisé une rencontre entre 40 présidents de juridiction suédois. Les discussions de groupe ont été l’occasion d’aborder des questions concernant la coopération des diverses composantes du système judiciaire, les modifications aux textes de loi, les méthodes de travail des tribunaux, et l’éducation et la formation. Les groupes de discussion ont été nombreux à proposer un recours plus fréquent aux entreprises privées de signification d’actes. Les personnes qui y avaient eu personnellement recours s’en sont félicitées. L’un des avantages offerts par les entreprises privées était que l’on ne devait payer que lorsque la remise de l’acte avait effectivement eu lieu. Il a également été proposé que chaque juge ait son propre responsable de la remise d’assignations et, dans la même veine, que l’on puisse affecter un ou plusieurs de ces responsables à un tribunal donné. Cela devrait permettre de renforcer la coopération. Beaucoup de participants ont estimé que la coopération entre les tribunaux d’instance et les services de signification d’actes devrait être mise en pratique au niveau local (Inställda huvudförhandlingar i brottmål II 2005, Suède).

De nombreux participants ont indiqué qu’il faudrait accroître les possibilités de simplification de la signification d’actes. On a également jugé utile d’étudier la possibilité de donner à la police ou au parquet le droit de participer aux audiences en lieu et place du demandeur, du prévenu et des témoins. Il semble que les juges s’accordent à considérer que la formation des greffiers devrait nettement privilégier les questions concernant la signification d’actes et examiner les possibilités de l’améliorer (ibid., 71 à 79).

Il a également été proposé en Suède qu’un "responsable de l’assignation" puisse dans certains cas remettre une assignation à une personne autre que la personne visée, par exemple à un membre de la famille ou un propriétaire. Il a également été proposé d’autoriser la signification d’actes par coursier employé par une entreprise privée ou par télécopie (Delgivning 2002, Suède). On a également mentionné la possibilité d’afficher sur les pages Web du tribunal l’obligation de participation aux audiences. Enfin, on a proposé de renforcer la coopération entre différents responsables en ce qui concerne les questions de signification d’actes et de remise de citations à comparaître (Inställda huvudförhandlingar i brottmål II 2005, Suède).

En Norvège, on a estimé nécessaire d’étudier la possibilité de remanier la procédure de citation du prévenu et des témoins actuellement mise en oeuvre par la police. On a proposé d’envisager d’en confier la responsabilité au tribunal. De plus, si les mandats de comparution ne sont délivrés que par les tribunaux, il conviendrait de nommer des membres du personnel qui seraient spécialement chargés de s’acquitter de cette tâche dans les tribunaux importants (Prosjekt hurtigere straffesaksbehandling. Arbeidsgruppe II, sluttrapport 2000, 28-31, Norvège).

2.3.2     Procédure accélérée

Le Gouvernement suédois a lancé le 1er juillet 2004 le projet expérimental “Procédure accélérée” afin de réduire les délais de traitement des infractions mineures. Il s’agit d’obtenir plus rapidement une condamnation dans les affaires les moins graves et faciles à instruire. Pour donner aux organes du système judiciaire la possibilité de réaliser cet objectif, on avait modifié la législation de façon à pouvoir notifier la demande d’assignation présentée par le procureur et l’assignation elle-même selon une modalité simplifiée pendant la période d’essai en les adressant au suspect. Deux semaines plus tard, ce dernier serait considéré comme s’étant vu remettre la requête, à la condition toutefois que la police ou le parquet lui ait fait savoir que la procédure d’assignation simplifiée pouvait être utilisée et lui ait expliqué en quoi elle consistait (Mémorandum du 27.5.2005, Suède).

Ce projet pilote devait initialement s’étaler sur deux ans. Le Gouvernement envisage à présent de prolonger la période d’essai de deux années supplémentaires, soit jusqu’à la fin de juin 2008. Selon un rapport d’évaluation présenté en mai 2005, le temps de traitement des dossiers auxquels a été appliquée la procédure accélérée a diminué par rapport au temps de traitement des autres affaires pénales, encore que le nombre de dossiers traités dans le cadre du projet ait été inférieur aux prévisions. Le temps de traitement s’écoulant entre l’enregistrement de la notification de l’infraction et le moment où le suspect est réputé avoir reçu l’assignation et le mandat de comparution devant le tribunal ne doit pas dépasser cinq semaines.  En d’autres termes, la police et le parquet ne disposent que de 2,5 semaines pour enquêter sur l’affaire. Les autorités de lutte contre la criminalité sont donc fortement incitées à enquêter aussi vite que possible sur les infractions mineures (Mémorandum du 27.5.2005, Suède).

Si l’on réduisait le laps de temps s’écoulant entre la commission de l’infraction et la décision judiciaire par la mise en oeuvre de ces mesures, l’efficacité des procédures concernant les simples "affaires punissables d’une amende" augmenterait. L’éventualité de voir le prévenu faire comme si aucun acte ne lui avait été signifié diminuerait, ce qui réduirait d’autant le nombre des annulations d’audience. Comme on n’avait aucune expérience concrète de ce type de procédure, il a été proposé de les expérimenter. Il a également été proposé d’adopter un amendement qui viserait à simplifier la procédure d’assignation des prévenus au pénal. Les dispositions de certaines assignations (selon lesquelles l’affaire peut être tranchée en l’absence du prévenu) devraient figurer sur toutes les assignations et ne pas s’appliquer uniquement à certaines affaires (Ett snabbförfarande för notariebrottmål. Kallelser till den tilltalade 2001, Suède).

3.         SPÉCIALISATION DES TRIBUNAUX

La spécialisation des tribunaux est un moyen d’améliorer à la fois la qualité et la rapidité de leur travail. Elle comprend en gros deux catégories : la spécialisation interne et la spécialisation externe (tableau 5). Relève par exemple de la spécialisation interne un modèle qui s’applique à tous les juges du tribunal à la différence d’un modèle qui ne concerne que certaines affaires judiciaires et, partant, certains juges seulement. La méthode de spécialisation mise en oeuvre dépend de la taille du tribunal en question. L’extension de la spécialisation à tous les juges est considérée comme débouchant sur une amélioration de la qualité et de la rapidité du règlement de tous les types d’affaires portées devant un tribunal. Dans ce modèle, tous les juges bénéficient des mêmes possibilités de se perfectionner. Il peut aussi exister des raisons de limiter la spécialisation à certains juges ou à certaines affaires, comme la complexité de l’affaire et le fait qu’elle crée des déséquilibres au sein du tribunal. La compétence spécialisée de certains juges peut également simplifier l’adoption de méthodes de travail spéciales dans le domaine considéré (DV-rapport 2003, 37-38, Suède).

La façon la plus simple de mener à bien une spécialisation externe, telle qu’elle est exposée dans le rapport suédois (DV-rapport 2003, Suède), consiste pour les juges intéressés de se faire connaître à une "banque de compétences" dans une région donnée. Cette banque de compétences renseigne sur les intérêts et l’expérience du juge dans un certain domaine. Cette banque doit être accessible à tous les tribunaux dans une certaine région. Un tribunal qui le souhaiterait pourrait, dans des affaires complexes, consulter un juge dont le nom figure dans la banque afin de lui demander des conseils et son aide pour régler l’affaire dont il est saisi. Il serait alors possible d’enregistrer les compétences particulières que certains juges possèdent déjà pour certaines affaires avec un minimum de formalités administratives. On pourrait également lancer une spécialisation externe en mettant sur pied un réseau de coopération avec plusieurs tribunaux où l’on pourrait examiner des questions judiciaires dont les tribunaux pris isolément ont rarement l’occasion de traiter. Ce type de modèle permettrait également de se concentrer sur des affaires particulièrement complexes. La coopération entre tribunaux permettrait à chaque juge de recevoir la formation nécessaire au règlement d’affaires complexes et d’utiliser leurs compétences pour rendre plus rapidement un jugement de meilleure qualité (ibid.).

Tableau 6.   Modèles de spécialisation des tribunaux  

Interne

Externe

Méthodes

Tribunaux spécialisés (tous les juges)

Banque de compétences

Spécialisation concernant certaines affaires judiciaires (certains juges)

Réseaux de coopération

La question de la spécialisation se heurte naturellement au problème qui se pose dans les pays relativement peu étendus (comme les pays nordiques), à savoir que le modèle de la spécialisation des tribunaux pris individuellement pourrait ne pas être une solution très rentable. Dans bien des cas, les distances sont longues et ce type de modèle pourrait en venir à compromettre la protection juridique des citoyens. Il pourrait d’ailleurs se révéler assez difficile de recruter des juges spécialisés et d’autres personnels dans des tribunaux d’instance de petite taille. S’agissant d’évaluer les modèles de spécialisation interne, il semble que la meilleure solution soit de limiter la spécialisation, au sein des différents tribunaux, à certains juges ou à certaines affaires.

En ce qui concerne les modèles de spécialisation externe, la notion de "banque de compétences" pourrait également s’avérer difficile à concrétiser. Tout d’abord, il serait nécessaire de pouvoir faire appel à une autorité chargée de classer les juges en fonction de leur niveau de compétences et de choisir les personnes pouvant devenir membres de la banque, ce qui risquerait de faire naître un sentiment d’injustice parmi les juges. Ensuite, la mise en place concrète de ce système pourrait s’avérer difficile au regard des contrats de travail, par exemple dans les cas où un juge "expert" est simultanément employé à la "banque" et par un tribunal. Cela étant, la mise en place d’un réseau de coopération entre les différents tribunaux pourrait s’avérer fructueuse pour accroître l’échange d’idées et de méthodes. Il n’en reste pas moins que ce modèle pourrait également être difficile à appliquer étant donné le caractère limité des ressources dont disposent les tribunaux pour assurer une participation active aux réunions et aux discussions du réseau. 

3.1        Expériences en matière de spécialisation

L’Administration Judiciaire Nationale de la Suède a recensé certaines des difficultés liées à la spécialisation des juges (DV-rapport 2003, Suède). Les juges suédois ont été interrogés sur leur expérience de la spécialisation et sur ses avantages et ses inconvénients (tableau 3). Un grand nombre de juridictions ordinaires a estimé que le principal avantage de la spécialisation est que la durée globale des procédures est raccourcie et le traitement et le règlement sont plus efficaces. Plusieurs réponses ont exprimé l’idée que le renforcement de la spécialisation offre davantage de possibilités d’acquérir auprès des juges spécialisés des compétences et une expérience sur des questions spécifiques, au profit de la continuité et de la qualité des jugements. Plusieurs juges interrogés estimaient que la spécialisation débouche sur une pratique judiciaire plus solide. Beaucoup d’entre eux ont fait observer que plus importante est la spécialisation, plus indépendant est le domaine de compétence en question (comme la formation de la propriété, les questions d’environnement et les questions économiques). La spécialisation peut être nécessaire dans ces domaines de compétence pour permettre aux juges d’acquérir les compétences professionnelles nécessaires.

Tableau 7.   Avantages et inconvénients de la spécialisation selon l’expérience des juges suédois

Avantages

Inconvénients

Diminution des temps de traitement

Problèmes de remplacement du personnel

Pratique judiciaire plus solide

Répartition des affaires en fonction des besoins

Uniformité, solidité et efficacité des jugements

Inégale répartition de la charge de travail

Renforcement des compétences, de l’expertise et de l’efficacité

Renforcement de la monotonie

Développement peu souhaitable de la pratique judiciaire

L’inconvénient le plus souvent mentionné de la spécialisation au sein des juridictions ordinaires était qu’en cas d’absence du juge spécialisé, il peut être difficile de lui trouver un remplaçant, ce qui peut vulnérabiliser le système des juges spécialisés. Par ailleurs, il peut s’avérer difficile de répartir les affaires en fonction des capacités disponibles. Autre inconvénient évoqué, la charge de travail risque d’être inégalement répartie, certains juges ayant trop d’affaires à trancher et certains autres juges n’ayant que rarement ou pas du tout l’occasion de juger une affaire relevant d’une catégorie donnée. Beaucoup de tribunaux ont considéré comme un inconvénient le fait de ne s’occuper que d’une seule catégorie d’affaires, le travail risquant de devenir trop monotone. On peut y remédier en instituant une rotation des juges et/ou des affaires entre les différents services d’un tribunal. On a également mentionné l’inconvénient de voir la spécialisation déboucher sur une situation dans laquelle les "spécialistes" élaborent leur propre pratique judiciaire. Ce risque existe en particulier si un juge rend, dans certains domaines de compétence, des jugements  dans des délais excessifs (ibid., 13-14.).

Les tribunaux administratifs ont cité comme avantage le fait que la spécialisation permette une concentration plus poussée sur des affaires de caractère plus insolite, ce qui favorise l’acquisition d’un certain niveau d’expertise. Plusieurs tribunaux ont indiqué que dans les services où ont été centralisées les affaires fiscales et les affaires relatives aux assurances sociales, l’efficacité des jugements et la compétence des juges ont augmenté. Par ailleurs, la spécialisation a renforcé l’uniformité et la solidité des jugements et a permis aux juges de se concentrer l’esprit tranquille sur l’examen d’affaires importantes et complexes telles que les affaires fiscales. Du point de vue des tribunaux, la spécialisation permet à l’employé de s’absorber dans son travail en fonction des divers besoins du tribunal selon les situations, ce qui améliore l’efficacité du travail (ibid., 13-14.).

3.2       Répartition des tâches

La principale raison d’être du système de délégation des tâches consiste à donner au juge plus de temps pour s’acquitter de ses "tâches prioritaires" (telles que le règlement d’une affaire) en confiant certaines "tâches secondaires" (telles que le travail administratif) à d’autres membres du personnel. On présume que si l’on donne au juge la possibilité de se concentrer sur ses tâches principales, les niveaux de qualité et de productivité augmenteront et les ressources du tribunal seront utilisées d’une manière plus efficace. La délégation des tâches assume des proportions probablement très variables selon les tribunaux. Ces variations peuvent s’expliquer pour une large part par les différences de compétence ou de ressources en ce qui concerne le temps de traitement des dossiers. Il est par ailleurs tout à fait naturel que la délégation de fonctions soit plus répandue dans les tribunaux qui ont créé des postes administratifs (directeurs administratifs, etc). Mais il existe des raisons de penser que les variations entre tribunaux dépendent également du talent et des compétences du président du tribunal. Le chef de l’administration détermine les tâches considérées comme pouvant être déléguées et fixe les modalités de cette délégation (rapport LOK 11 2004/2005, 4, Norvège).

Une demande de renseignements adressée en 2004 par courrier électronique à tous les tribunaux d’instance et cours d’appel norvégiens a révélé que la délégation de fonctions est le plus souvent absente des tribunaux. Le faible taux de réponse peut également vouloir dire que la plupart des tribunaux soit ne savent pas très bien de quoi il retourne, soit ne voient pas la nécessité de nouvelles modalités de répartition des tâches. Sur les 17 réponses obtenues au total, 11 tribunaux ont indiqué que ce sujet ne les concernait pas (ibid., 4-5).

Au sein du parquet, la spécialisation progresse depuis quelques années en Suède. Les affaires pénales exigeant des compétences spéciales sont confiées à certains procureurs afin d’accélérer la procédure. La spécialisation se déroule dans le cadre d’un travail d’équipe et de groupes de travail.  Depuis quelques années, les parquets ont été de plus en plus nombreux à adopter des pratiques consistant à confier des affaires d’infractions punissables d’une amende à certains procureurs et l’enquête préalable au procès à la police. Cette méthode a une eu une incidence positive sur les temps de traitement globaux (Mémorandum du 27.5.2005, Suède). Concrètement, les autorités de poursuite ont commencé à pratiquer une gestion/un pilotage plus actif des enquêtes préalables dirigées par les procureurs et renforcé la coopération avec les responsables de la lutte contre la violence familiale (les responsables du soutien aux victimes, par exemple). De plus, les discussions avec les chefs de l’administration des services de police sur l’organisation et les pratiques se sont multipliées afin d’accélérer la conduite des enquêtes préalables dirigées par la police.

La Loi sur les tribunaux norvégiens comporte une disposition selon laquelle l’attribution des affaires est laissée à l’appréciation du président du tribunal. Cette disposition n’est pas sans ambiguïté, l’étendue effective du pouvoir d’appréciation du président du tribunal ayant suscité quelques commentaires. Jusqu’à présent, cela n’a pas créé beaucoup de problèmes. Dans les tribunaux norvégiens, les affaires sont souvent réparties selon un système de rotation fixe (Tilfeldighetsprinsippet), qui a institué une sorte de répartition égale des affaires basée sur une certaine formule mathématique. Dans la plupart des cas, cela implique que les affaires sont réparties selon l’ordre chronologique (Hagedal 2004, 2005, Norvège).

S’ils veulent rendre la procédure plus efficace, les tribunaux doivent impérativement adopter une attitude souple et pragmatique à l’égard du système de rotation fixe. Une enquête menée à l’automne 2004 auprès des tribunaux de première instance et des cours d’appel norvégiens a révélé que 69 % des tribunaux de première instance et 100 % des cours d’appel avaient choisi ce mode de répartition des affaires. Toutefois, ils faisaient parfois une exception dans le cas d’affaires qui étaient spéciales ou exceptionnelles à un titre ou à un autre, dans les situations où il fallait tenir compte de la charge de travail de certains juges et dans les cas où le délai alloué à une affaire donnée avait des répercussions sur la répartition des tâches. Par ailleurs, le recours à ce système dépend du degré d’intérêt et de compétence des différents juges. Afin de ne pas pouvoir être soupçonnés d’utilisation abusive du système, les responsables de la répartition des affaires leur signalaient que ce système allait également leur être appliqué en l’absence de tout obstacle judiciaire (rapport LOK 3, 2004/2005, Norvège).

On a estimé en Norvège que la coopération en matière de répartition devrait être renforcée. On pensait que cela déboucherait sur une procédure mieux ciblée et, partant, sur une meilleure allocation des ressources. En d’autres termes, il faudrait abaisser le seuil à partir duquel on appliquerait une méthode de répartition différente de la méthode habituelle. Cette option pourrait par exemple être mise en oeuvre dans les situations caractérisées par d’importants écarts de charge de travail entre juges. De plus, la méthode de rotation fixe ne devrait pas être considérée uniquement comme un "instrument de crise", mais comme  une mesure ordinaire de garantie d’une procédure rapide (ibid.). 

3.3       Spécialisation dans les pays nordiques

Comme le donnent à voir les exemples de spécialisation fournis dans le présent chapitre, il importe de faire la distinction entre la spécialisation entre les différents tribunaux et la spécialisation parmi les juges d’un même tribunal. Toutefois, il n’existe dans les pays nordiques aucun modèle ou régime universel de spécialisation. Les approches retenues varient également au sein d’un même pays.

Au Danemark, les juges sont pour l’essentiel des "juges de droit commun", à l’exception de ceux qui travaillent au Tribunal maritime et commercial de Copenhague. Certaines affaires, comme les affaires fiscales, peuvent être traitées dans certains tribunaux d’instance. En deuxième lieu, la spécialisation peut intervenir dans un même tribunal, certaines affaires étant traitées dans un service donné ou par un certain juge. Toutefois, cela ne veut pas dire que les services ou les juges en question ne traitent que certaines affaires. Il est important que les juges demeurent des "généralistes" et que cette fonction puisse être associée aux objectifs de la spécialisation entre services et juges de sorte que les juges puissent acquérir des connaissances et des compétences spécifiques. On peut citer comme exemples d’affaires pour lesquelles ce type de spécialisation pourrait être fructueux les affaires fiscales et les affaires de brevets. En troisième lieu, le mode de spécialisation susvisé peut également être appliqué aux greffiers (DV-rapport 2003:3, 17-18, Suède).

On peut diviser en trois groupes les types de spécialisation dont peuvent se prévaloir actuellement les juges. Il s’agit de la spécialisation dispensée en regroupant le traitement de certains dossiers, en premier lieu, dans les tribunaux spécialisés, en deuxième lieu, dans  un ou plusieurs tribunaux et, en troisième lieu, au sein d’un même tribunal. Les deux premiers types se rapportent à certaines lois et/ou textes réglementaires tandis que le troisième résulte de l’initiative prise par un tribunal donné de fonctionner en spécialisant certains juges dans certains domaines (DV-rapport 2003:3, Suède).

L’absence de pratiques universelles en matière de spécialisation tient sans doute, entre autres causes, au fait que les tribunaux diffèrent beaucoup par la taille. Dans certains tribunaux, la spécialisation est menée à bien grâce à une répartition des tâches entre les différents services, tandis que dans d’autres tribunaux, la spécialisation n’existe pas. On peut présumer qu’en Finlande, au moins, les différences de taille demeureront très importantes également à l’avenir, si bien que point n’est besoin de s’évertuer à instituer une pratique commune (Tuomioistuinlaitoksen kehittämiskomitean mietintö 2003, 335, Finlande). Par ailleurs, le nombre des affaires judiciaires, les compétences spécialisées des juges et d’autres facteurs de ce genre peuvent être tellement différents d’un tribunal à l’autre que les solutions individuelles peuvent donner de meilleurs résultats qu’un régime général.

Les débats soulignent un problème persistant dans l’organisation des tribunaux. La spécialisation semble être une arme à double tranchant. Les juges spécialisés sont censés être plus efficaces. Dans un laps de temps donné, ils traitent plus de dossiers et travaillent mieux que les juges non spécialisés. Toutefois, ils créent une certaine rigidité dans la mesure où toutes les affaires relevant de leur compétence spécialisée sont censées être traitées par eux, et non par d’autres juges non spécialisés. Par ailleurs, si ces juges spécialisés sont trop peu nombreux au regard du nombre de dossiers à traiter, ils peuvent créer des goulets d’étranglement. De même, les tribunaux spécialisés améliorent la qualité et la rapidité du type d’affaires dont ils se sont fait une spécialité. En revanche, ils risquent de diminuer la compétence globale des juridictions ordinaires et de les rendre moins efficaces en tant qu’entités aptes à résoudre toutes sortes de problèmes. De plus, les tribunaux spécialisés ne font pas bon ménage avec la souplesse : si l’un d’entre eux a un stock d’affaires en attente très important, il peut devenir un goulet d’étranglement s’il est difficile de transférer l’arriéré à une juridiction ordinaire. De même, si le nombre des dossiers à traiter par un tribunal spécialisé baisse fortement, il peut perdre de son efficacité si l’on ne peut pas lui transférer d’autres types de dossiers.

4.         LES NOUVELLES TECHNOLOGIES ET LA GESTION DES RESSOURCES

À l’heure actuelle, les systèmes judiciaires des pays nordiques considèrent que toutes les informations doivent être collectées une fois seulement ou un nombre de fois aussi limité que possible et transmises par le système à l’aide des protocoles servant à impulser ces transmissions.  Dans les tribunaux, cette idée bouscule la conception traditionnelle consistant à séparer les fonctions d’enregistrement des fonctions exercées dans la salle d’audience. Les tribunaux des pays nordiques se tournent de plus en plus vers la technologie pour essayer de résoudre le problème de la croissance du nombre de dossiers à traiter. Les personnels et administrateurs judiciaires doivent collaborer à l’utilisation rationnelle de la technologie compte tenu en particulier du principe traditionnel de l’indépendance de la justice. La séparation des fonctions d’enregistrement implique que les renseignements figurant sur les registres ne sont plus aisément accessibles aux fins de la procédure judiciaire.

4.1       Visioconférence

La visioconférence et les audioconférences sont des outils importants au service de l’accélération de la procédure. Le renforcement de la coopération internationale va vraisemblablement rendre la visioconférence de plus en plus indispensable à l’avenir. Celle-ci peut réduire sensiblement les coûts tant pour les parties que pour la société. Le témoin n’a plus à se déplacer sur de longues distances. Le coût du transport d’un témoin de Tallinn à Helsinki, par exemple, peut être élevé.

Récemment, il a été proposé d’apporter au Code de procédure judiciaire suédois – qui s’applique à la fois aux affaires civiles et aux affaires pénales – des modifications permettant de moderniser la procédure des juridictions ordinaires. Plusieurs propositions concernent l’utilisation des nouvelles technologies. Les parties ou les témoins pourront prendre part à la procédure judiciaire par visioconférence au lieu de comparaître dans la salle d’audience. Au moment de décider de laisser une personne participer par liaison télévisuelle, le tribunal doit tenir compte du coût ou du désagrément entraîné par la solution classique et aussi de la question de savoir si l’intéressé(e) ne souhaite pas comparaître en personne. Le recours à la visioconférence est subordonné à la condition de ne pas être réputé inapproprié. De plus, la déposition faite au tribunal d’instance donne lieu à la réalisation d’un vidéogramme. Ce vidéogramme est utilisable devant la Cour d’appel. De la sorte, la Cour d’appel ne délibère que sur les faits qui étaient connus du tribunal de première instance. L’utilisation de la technologie vidéo diminue le risque de devoir reporter la procédure parce que les témoins et les parties ne se sont pas présentés à l’audience. Elle facilite par ailleurs la planification et la tenue d’autres audiences, ce qui accélère le procès.

Il est également proposé que le tribunal puisse rejeter des moyens de preuve lorsque, malgré tous les efforts déployés, il s’avère impossible d’auditionner les témoins et que le tribunal ne puisse plus reporter le prononcé du jugement. Au pénal, la procédure normale consiste à tenir une audience principale avant de trancher l’affaire. A l’avenir, néanmoins, le tribunal d’instance pourra statuer sur des affaires pénales sans tenir d’audience principale lorsqu’il n’y a aucune raison d’infliger une peine autre qu’une amende, à moins qu’une partie exige une audience principale ou si celle-ci est nécessaire pour les besoins de l’enquête judiciaire (Mémorandum du 27.5.2005, Suède).

Une proposition a été présentée concernant les appels formés devant la Cour d’appel. Il a été proposé, par exemple, d’étendre à la plupart des dossiers civils le système de l’autorisation d’appel (dispense d’examen). Il a également été proposé de limiter les délibérations de la Cour d’appel aux faits qui étaient connus du tribunal de première instance. Ainsi, les dépositions des témoins devant le tribunal de première instance seraient enregistrées en vidéo en vue de leur utilisation devant la Cour d’appel. De plus, on propose une procédure obligeant le tribunal et les parties à fixer des délais afin d’accélérer le jugement d’une affaire (Mémorandum du 9.3.2005, Suède).

Depuis le début de 2000, il est possible de recourir à la visioconférence dans le cadre d’un projet pilote dans certaines juridictions ordinaires de la Suède. Dans les tribunaux administratifs, un projet pilote analogue a été exécuté en 2001 (Videoneuvottelutyöryhmän raportti 2004, 17, Finlande). 

L’Administration Judiciaire Nationale a recueilli des informations concernant les besoins généraux et les situations concrètes des juridictions ordinaires en matière de visioconférence. Le rapport final indique que la plupart des expériences d’utilisation de la visioconférence sont positives. Elle a été utilisée tant au civil qu’au pénal et tant pendant les séances de mise en état que pendant les audiences principales. La quasi-totalité des parties à la procédure y ont participé par visioconférence : les défendeurs ou prévenus, les témoins, les avocats, les interprètes et les experts. La visioconférence a été le plus couramment employée dans les audiences principales de jugement d’affaires pénales (DV-rapport 2002, 5, Suède). L’expérience de la Suède montre que les problèmes les plus fréquents posés par la visioconférence sont des défaillances techniques. Il s’agit notamment de pannes de la chaîne de connexion et de divers problèmes de qualité du son et de l’image. L’application du projet pilote dans les tribunaux administratifs de la Suède a donné lieu à des expériences de nature très voisine (Videoneuvottelutyöryhmän raportti 2004, 19, Finlande).

La Finlande met en œuvre actuellement un projet pilote de visioconférence. L’utilisation de la visioconférence dans les procédures judiciaires y est autorisée par la législation depuis 2002. Toutefois, un très petit nombre de tribunaux seulement se sont prévalus de cette législation, ce qui fait que les expériences de cette technologie sont encore très limitées. La principale raison pour laquelle la visioconférence n’est pas utilisée dans les tribunaux est le manque de matériel (Videoneuvottelutyöryhmän raportti 2004, Finlande).

Le ministère finlandais de la Justice a nommé en 2003 un groupe de travail chargé de planifier et d’exécuter un projet pilote concernant l’utilisation de la vidéo dans 1) les procédures judiciaires nationales entre tribunaux, 2) les procédures impliquant des mesures de contrainte, de façon à rendre inutile le transport d’un prévenu placé en détention jusqu’au lieu de l’audience et 3) les procédures judiciaires qui ne sont pas limitées au territoire national. L’une des principales missions du groupe de travail était d’étudier la possibilité de mettre au point des techniques de visioconférence entre Helsinki et Tallinn (Estonie). Le projet se proposait également de permettre d’utiliser la visioconférence entre la prison de Vantaa et les tribunaux de la zone métropolitaine d’Helsinki. Avant de lancer le projet pilote, le groupe de travail a demandé à 16 tribunaux d’instance et à toutes les cours d’appel de le renseigner sur leurs besoins en visioconférence. Les réponses ont montré que la principale raison pour laquelle il était rarement recouru à cette technologie était le manque de matériel dans les tribunaux.

Dans le tribunal d’instance d’Helsinki, le projet pilote a donné des résultats positifs. La plupart des visioconférences qui s’y sont tenues concernaient des dossiers transfrontaliers financés par l’aide juridictionnelle. Par ailleurs, "l’audioconférence" est très largement employée par ce tribunal d’instance. Il s’agit d’une technique en vertu de laquelle le juge appelle le témoin, dont la déposition est entendue dans la salle d’audience. C’est ainsi, par exemple, qu’un médecin très occupé peut déposer depuis son lieu de travail. Dans certains cas, le témoin peut également déposer par téléphone depuis les locaux d’un service de police (Puusaari 2006, 14-16, Finlande).

4.2       Systèmes de données

Le traitement électronique des dossiers accroît l’efficacité en "recyclant" l’information et en simplifiant les pratiques. Le plus souvent, les dossiers sont enregistrés par l’autorité chargée de leur traitement. Si d’autres autorités peuvent à un stade ultérieur de la procédure utiliser les mêmes informations enregistrées, il devient possible de faire des économies importantes sur le plan des ressources. Il est également courant qu’une autorité qui n’est pas chargée de traiter le dossier interprète et formule l’information enregistrée. Cela n’est guère approprié du point de vue de la répartition des ressources et de la qualité. Il a été noté que l’autorité qui a établi le document devrait avoir la responsabilité des informations enregistrées (Elektronisk samhandling i straffesakskjeden 2003, Norvège).

En Norvège, on a également étudié la possibilité de simplifier les tâches d’enregistrement et d’adopter d’autres méthodes efficaces par le biais des technologies de l’information. On s’est notamment demandé s’il existait des solutions à base de TI permettant de transmettre rapidement des données entre différents responsables et, dans l’affirmative, quelles étaient les solutions qu’il conviendrait d’approfondir afin de rendre la communication entre les divers acteurs de la procédure pénale la meilleure et la plus rapide possible (Prosjekt hurtigere straffesaksbehandling. Arbeidsgruppe I, sluttrapport 2000, 5 Norvège; voir également la deuxième partie : 8 (p. 16 sur les Systèmes de contrôle).

4.2.1     Gestion électronique des dossiers en Suède

Tous les tribunaux suédois ont commencé à utiliser le nouveau système de gestion électronique des dossiers Vera. La base de données de Vera permet de combiner des informations à diverses fins. Le système SIV (Statistics in Vera) recherche les informations stockées dans Vera et synthétise les données sur la base des rapports établis par les tribunaux. Les informations stockées dans Vera ne servent pas seulement à établir des rapports statistiques : les outils du système permettent également de procéder à d’autres analyses. Par exemple, il est possible d’établir un rapport de synthèse, qui présente toutes les procédures dans lesquelles telle personne est actuellement impliquée, en utilisant la fonction Recherche de Vera. Cette fonction peut, avec les rapports SIV, être utilisée à d’autres fins avec les fonctions de calcul de Excel, par exemple (Promemoria du 21.10.2005, Suède). Il est notamment possible d’élaborer un modèle qui montre la mesure dans laquelle tel tribunal ou tel service d’un tribunal respecte les délais administratifs. 

Le système Vera est constamment amélioré et les possibilités de produire de nouvelles informations semblent s’accroître. La principale question qui se pose actuellement est celle de la définition du type d’informations qui est utile. Mais il faut préalablement définir un certain nombre de notions. L’une des plus importantes est celle des délais de procédure. Si l’on définit le délai de procédure comme le temps qui s’écoule entre le moment où un tribunal est saisi d’un dossier et celui où il achève de traiter ce dossier, la tâche est aisée. Dans ce cas, deux dates doivent être rapprochées. Toutefois, on a noté que, dans le cas des affaires pénales, il ne suffit pas d’évaluer le temps de traitement à compter du moment où une affaire est enregistrée dans un tribunal : le temps de traitement court à partir de la date de dépôt de la première demande d’assignation. Ce simple exemple montre à quel point il est important de bien définir les notions utilisées avant d’aller plus loin (Promemoria du 21.10.2005, Suède).

En considérant que le délai de procédure court à compter du dépôt d’une demande d’assignation et s’achève avec le jugement, on obtient une image plus réaliste de la situation. À l’automne 2006, Vera prendra cette option en charge. Il est également prévu d’intégrer Vera au système Cobra du parquet de façon qu’une demande électronique d’assignation puisse être adressée au tribunal (Promemoria du 21.10.2005, Suède).

4.2.2     Services en ligne dans les tribunaux finlandais

Dans les tribunaux finlandais, les systèmes de données couvrent toute la gamme des actes de l’administration judiciaire. Les systèmes les plus anciens encore utilisés datent des années 80. Néanmoins, la nécessité de l’intégration des systèmes était évidente dès le départ. Les outils et les technologies ont évolué au fil des années, mais les systèmes ont été conçus et programmés en tenant compte du fait que l’information, une fois enregistrée dans un système, doit circuler à travers toute la chaîne des activités et des autres organisations desservant chaque utilisateur, que ce soit dans les tribunaux ou d’autres autorités, et aussi profiter au public (Kujanen 2005, Finlande).

On a élaboré en Finlande deux systèmes qui permettent de faire amplement usage des TI aux fins de l’étude préliminaire du dossier : il s’agit du système de gestion des dossiers TUO­MAS et du système de transfert électronique SANTRA. Le système SANTRA permet aux tribunaux de recevoir chaque année environ 65 % des requêtes en ligne. Les requêtes peuvent également être envoyées par courrier électronique ou par télécopie. Les demandeurs qui utilisent SANTRA transfèrent chaque jour les données consignées sur toutes leurs requêtes à la ‘boîte aux lettres’ commune des tribunaux. Ce système transmet ensuite les requêtes aux boîtes aux lettres de chaque tribunal, qui met alors à jour son système TUOMAS sur la base des données reçues. Il est également possible d’adresser une requête aux tribunaux par courrier électronique. Le tribunal peut ensuite utiliser le texte de la requête pendant la procédure. Le tribunal cite le défendeur ou le prévenu à comparaître, le plus souvent par voie postale. La Poste finlandaise gère un service de poste électronique que le tribunal peut utiliser car il n’est pas tenu de signer les assignations et l’original de la demande n’a pas, dans la plupart des cas, à être envoyé.

Les documents ou fichiers nécessaires aux assignations sont produits par le système TUOMAS. L’envoi des fichiers à la Poste finlandaise est automatisé tant dans le TUOMAS que le SANTRA. Le TUOMAS suit les dates limites imposées aux défendeurs pour leur réponse. S’ils laissent passer la date qui les concerne, le TUOMAS est utilisé pour produire la décision du tribunal, qui s’appuie sur les données figurant dans la demande et dans l’assignation. Dans bien des cas, le tribunal doit en aviser le demandeur. Il peut le faire par courrier électronique ou télécopie si le demandeur lui a indiqué que l’adresse où expédier le message est une adresse électronique. Dans les phases ultérieures de la procédure, au moment de fixer la date de l’audience et d’y convoquer les parties, un logiciel de courrier électronique peut être utilisé.

TUOMAS stocke et suit tous les docu­ments se rapportant à une affaire; si un document a été affiché électroniquement, il peut être utilisé dans des documents ultérieurs. Les dépositions faites pendant l’audience principale sont enregistrées sur bande magnétique audio. L’audience donne toujours lieu à l’établissement d’un procès-verbal, mais il ne s’agit plus d’un compte rendu in extenso. Il rend simplement compte de ce qui s’est passé à l’audience. Si l’on veut savoir ce qu’un témoin a dit, il suffit d’écouter la bande audio. Naturellement, le produit final du procès, c’est-à-dire la décision, reste un document écrit. Le juge peut utiliser les textes de la demande et de la récapitulation des éléments de preuve pour rédiger la décision, s’ils ont été stockés dans le système TUOMAS.

Dans les affaires de recouvrement de créances, un demandeur qui utilise SANTRA reçoit également la décision, adressée à son système de données par l’intermédiaire de SANTRA. Ces données peuvent être utilisées pour demander l’exécution de la décision. Le système automatisé d’exécution des autorités compétentes peut utiliser directement ces données. Par ailleurs, une copie papier de la décision est adressée par la poste au demandeur car, même si l’on peut déposer une demande d’exécution en ligne (85 % des dépôts sont effectués en ligne), il faut toujours une copie papier de la décision pour le dépôt officiel de la demande d’exécution. Il est prévu de remanier sous peu l’ensemble de législation sur l’exécution en Finlande; lorsque cela sera chose faite, l’autorité chargée de l’exécution procédera à l’extraction de la décision dans le système du tribunal et le demandeur n’aura pas à déposer une demande en ce sens (ibid.).

La Loi sur la procédure pénale est entrée en vigueur le 1er octobre 1997. Un système de gestion des dossiers se rapportant à des affaires pénales a alors été élaboré, en vue de sa mise en place en 2000. Au pénal, la gestion des dossiers est plus complexe qu’au civil, car elle fait intervenir la police, le parquet, les parties lésées et les tribunaux. Le système de gestion des dossiers SAKARI prend en charge l’ordonnancement des opérations des procureurs et des tribunaux et fait sa jonction avec les systèmes utilisés par la police. Dans la prochaine phase, il prendra également en charge le système des décisions judiciaires et les autorités qui y sont connectées. Le nouveau système comporte à peu près les mêmes éléments de gestion des dossiers que le système TUOMAS pour les affaires civiles, mais il fait une plus grande place à la gestion des informations se rapportant à une affaire (au lieu de privilégier la gestion des dossiers au tribunal).

4.2.3     Systèmes reposant sur les TI dans les tribunaux danois  

Au Danemark, l’Administration Judiciaire Nationale a élaboré des systèmes reposant sur les TI capables de prendre en charge le traitement d'affaires simples. Ce système est utilisé pour enregistrer les dossiers, mettre en état les affaires et aider à arrêter une date pour l’audience. Ce système a pour principal avantage, en enregistrant des codes spéciaux pour les affaires à trancher et des codes pour l’“échelle mobile” des affaires, de faciliter le calcul des ressources nécessaires aux différentes phases de la procédure. Il existe également différents systèmes à base de TI pour différents types d'affaires (Notat om kort beskrivelse af it-systemerne ved Danmarks Domstole 9.3.2006, Danemark).

Le système a notamment l’avantage de présenter automatiquement des informations sur les affaires reçues, les affaires tranchées et les affaires en instance. Il est relié à un module statistique dans chaque système de traitement des dossiers. En d’autres termes, chaque tribunal peut assez facilement adresser à l’Administration Judiciaire Nationale un fichier électronique contenant six ou douze mois de statistiques. Les données peuvent ensuite être très facilement récapitulées en ce qui concerne les juridictions ordinaires et les tribunaux d’instance. On espère qu’un entrepôt de données spécial sera mis en place pour réceptionner les données de tous les dossiers, ce qui évitera à l’administration d’avoir à les traiter manuellement. À l’heure actuelle, l’Administration Judiciaire Nationale procède à une modification du système reposant sur les TI. Cette Administration centralise actuellement l’utilisation de tous les systèmes de ce type, avec le concours de consultants extérieurs. 

Les tribunaux utilisent ce système depuis 2000 pour en obtenir des directives sur l’emploi des ressources. La majorité des personnels des tribunaux mettent ce système à contribution pour déterminer la mesure dans laquelle leur milieu de travail satisfait aux normes et comparer leur productivité à celle des autres tribunaux. Le système a deux objectifs principaux. En premier lieu, il se concentre tout spécialement sur les temps de traitement des dossiers par les tribunaux de première instance, en évaluant les résultats obtenus par les différents tribunaux pour ce qui est du respect des délais qui ont été fixés en coopération avec l’Administration Judiciaire Nationale et les représentants des tribunaux. En second lieu, le système montre la productivité des tribunaux d’instance. La productivité concerne les informations concernant le nombre d’affaires tranchées et l’utilisation des ressources (effectifs). Des descriptions du système sont affichées chaque année pour tous les tribunaux d’instance sur l’intranet des tribunaux. En d’autres termes, chaque tribunal d’instance a la possibilité de prendre connaissance des informations détenues par les autres. Les tribunaux de première instance peuvent envoyer 2 ou 3 pages de notes concernant les chiffres présentés sur l’intranet. De plus, une liste indiquant la productivité de tous les tribunaux divisée par leurs effectifs est publiée sur l’intranet (Notat om Bedste Praksis-projektet ved Danmarks Domstole 27.2.2006, Danemark).

Une fois par an, l’Administration Judiciaire Nationale évalue avec les représentants des tribunaux les types de délais de procédure qui sont fixés pour les différentes affaires judiciaires. Ces délais de procédure font l’objet de rapports annuels depuis 3 ou 5 ans. Le système rend compte des résultats obtenus par les tribunaux au cours des années récentes en ce qui concerne les objectifs fixés. Il montre parallèlement les temps de traitement moyens par catégorie de dossiers et établit une liste des dix meilleurs tribunaux. Les statistiques concernant les temps de traitement des dossiers reposent sur les informations recueillies deux fois par an auprès des tribunaux.

La productivité concerne le nombre d’affaires réglées chaque année. Elle est calculée d’une façon globale pour chaque tribunal (tous personnels confondus), mais aussi pour chaque juge et, enfin, pour le personnel administratif. De plus, elle est calculée séparément pour chaque catégorie de dossiers. On calcule d’abord la "production de dossiers pondérée" par tribunal et par type d’affaires. On affecte à cette fin un coefficient de pondération à chaque affaire tranchée en calculant le volume approximatif de ressources nécessaire pour chaque affaire. Ce coefficient est défini en coopération avec les tribunaux. Il s’est agi de calculer le nombre annuel d’années-personnes utilisé par chaque tribunal. Chaque membre du personnel des tribunaux rend compte à l’Administration Judiciaire Nationale des tâches qu’il a accomplies pendant ses heures de travail, en répartissant le temps de travail selon chaque type de tâche judiciaire.

4.3       Modèle danois de répartition du temps (Tidsfordelningsmodel)

Au Danemark, une enquête conduite pendant l’été 1997 visait à analyser la répartition des tâches au sein des tribunaux. Il s’agissait de se faire une idée de l’allocation des ressources par les tribunaux pour pouvoir ensuite planifier l’allocation de nouvelles ressources en vue du traitement d’affaires simples. Le modèle de répartition du temps consiste en premier lieu à faire consigner par chaque employé d’un tribunal la répartition des différentes tâches à lui confier par rapport au nombre global de ses heures de travail. Après avoir combiné ces pourcentages avec la structure des salaires, on peut répartir entre les différentes affaires judiciaires le montant total de la rémunération et le temps passé à l’accomplissement des différentes tâches. L’enquête a fait apparaître d’importantes variations du temps utilisé selon les affaires judiciaires et les groupes d’employés, en relevant toutefois que ces variations tenaient pour l’essentiel aux caractéristiques propres à chaque cas d’espèce (Delberetning 1 om domstolenes sagbehandlingstider 1998, 46-47, Danemark).

S’appuyant sur les enquêtes statistiques réalisées, le groupe de travail a présenté un manuel sur les délais des procédures pénales, qui a été adressé à tous les tribunaux d’instance danois. Le manuel proposait ce qui suit :

1)     ajouter à la liste des dossiers toutes les affaires pénales un jour après la saisine,

2)     les documents sont remis au secrétaire du tribunal le lendemain matin au plus tard,

3)     toutes les dates de procédures distinctes au sein d’une procédure donnée sont arrêtées et inscrites au calendrier des juges et des avocats dans les meilleurs délais possibles,

4)     les affaires ne doivent pas être regroupées; si la police souhaite que certaines affaires soient traitées ensemble, cela est possible à condition de fixer immédiatement les dates de chaque procédure et de les communiquer à la police,

5)     les temps de traitement doivent être aussi courts que possible, mais pas au point de ne plus permettre de respecter les règles de procédure; le délai normal doit être compris entre 4 et 6 semaines; toutefois, on peut exceptionnellement dépasser ce délai dans le cas des affaires particulièrement ardues et complexes (Delberetning 1 om domstolenes sagbehandlingstider 1998, 41-43, Danemark).

4.4        Système norvégien de pondération des dossiers à traiter (Belastningsmodell)

Le ministère norvégien de la Justice a élaboré une norme statistique et un modèle d’affectation des ressources en personnel des tribunaux à la fin des années 80 et au début des années 90. Le modèle repose sur l’idée que chaque type d’affaire judiciaire consomme une certaine quantité de temps de travail (en minutes). Ce temps de travail total est réparti entre les différentes tâches accomplies par les juges et le personnel administratif d’un tribunal. On obtient un modèle idéal de répartition des ressources en personnel en rassemblant les données concernant le temps utilisé (en minutes) pour toutes les tâches.

           

Ce modèle a été retenu par l’Administration Judiciaire Nationale et il est prévu d’élaborer un modèle analogue pour les cours d’appel. Les résultats obtenus en 2002 en appliquant ce modèle montrent que la répartition des ressources est compatible avec le modèle dans la plupart des tribunaux. Le principal avantage du système de répartition des ressources en personnel est de permettre de déterminer rapidement et simplement s’il est nécessaire d’étoffer ou de réduire les effectifs de chaque tribunal (Hagedal 2004, 226-227, Norvège).

Lorsque le volume de travail est examiné sur une période d’un an, Hagedal (ibid.) relève que l’immense majorité des tribunaux norvégiens de première instance a un nombre de dossiers à traiter analogue, à quelques exceptions près. Le volume de travail des tribunaux semble également très stable lorsqu’on l’examine sur une période plus longue. Toutefois, on assiste depuis quelques années en Norvège à une augmentation du nombre de dossiers à traiter alors que le financement des tribunaux semble être devenu plus précaire. Hagedal (ibid.) propose d’expliquer cette augmentation par l’accroissement des effectifs de la police et du parquet. Si le renforcement sans cesse demandé des effectifs de la police devient une réalité, le volume de travail de l’appareil judiciaire pourra augmenter encore davantage à l’avenir. Ce dernier pourrait se retrouver dans une situation où il ne pourrait plus faire face à ses obligations. Par ailleurs, les stratégies d’accélération du traitement des dossiers par la police et le parquet analysées dans la deuxième partie de ce rapport pourraient alourdir la charge de travail des tribunaux – au moins pendant un certain temps.                                              

L’Administration Judiciaire Nationale norvégienne élabore actuellement à l’intention des tribunaux d’instance un nouveau système de pondération des dossiers à traiter. Les tribunaux de première instance signalent depuis longtemps les défauts du système actuel en indiquant qu’ils remettent en question la fiabilité des informations sur l’allocation des ressources budgétaires, point de vue que partage l’Administration Judiciaire Nationale. Le système a été élaboré entre 1992 et 1996; depuis, on lui a apporté des corrections et des améliorations, par exemple en modifiant les textes de loi et les procédures administratives et en précisant les caractéristiques de certaines affaires judiciaires. Au cours des 10 années d’existence du système, plusieurs éléments sur lesquels le modèle initial s’était appuyé ont changé (Ny belastningsmodel for tingsrettene 2005, Norvège).                     

On s’efforce actuellement de perfectionner ce modèle et de corriger certaines erreurs au niveau des fonctions qui ont été découvertes au cours de la décennie écoulée. Par exemple, le modèle ne tient pas encore compte de certaines modifications législatives et de certains changements au niveau des procédures administratives au sein de l’appareil judiciaire. Il y a lieu également de se demander si l’on ne pourrait imaginer d’autres outils permettant de mieux répartir les ressources entre les tribunaux. On a constitué un groupe chargé de la planification du nouveau modèle concernant les tribunaux d’instance. Par ailleurs, on a créé un groupe de référence, composé de représentants des tribunaux. Ces derniers sont chargés de commenter le travail du groupe de planification du nouveau modèle. Les tribunaux sont associés en amont à ce travail de conception en participant à des rencontres régionales, dans le cadre desquelles le groupe de planification rend compte de ses travaux et se les voit commenter. Il s’agit là d’une phase importante de la conception du nouveau modèle. Celui-ci devrait être finalisé à l’automne 2006 et pouvoir être utilisé en 2007 (Ny belastningsmodel for tingsrettene 2005, Norvège).

                       

Pour élaborer un nouveau système de pondération des dossiers, il importe de disposer d’information de base sur le temps utilisé et le coefficient de pondération affecté aux différents dossiers par le système. A cette fin, une étude sera réalisée dans certains tribunaux. Afin de pouvoir expliquer les différences de temps utilisé selon les affaires judiciaires, on enregistrera et analysera les caractéristiques divergentes des dossiers. Cela est d’autant plus important que l’un des reproches adressés au système actuel est de ne pas tenir compte de la complexité d’une affaire donnée. Le groupe de planification a retenu 25 tribunaux pour participer à l’étude. L’enregistrement du temps s’effectuera sur deux périodes de quatre semaines. Chacun des tribunaux retenus choisira un représentant qui sera responsable du travail concret d’enregistrement du temps au tribunal.

L’objectif général est de permettre au système de concourir à la réalisation de plusieurs objectifs, s’agissant par exemple de la répartition des tâches et des crédits budgétaires, et de tenir compte des changements intervenant dans les tribunaux et dans la société. Dans ce débat, les tribunaux eux-mêmes sont considérés comme des acteurs clés. Beaucoup d’aspects sont en évolution constante : les affaires judiciaires, les justiciables, les employés des tribunaux, la société, les procédures, les outils et la législation. Il convient d’en tenir compte dans le cadre de la conception du nouveau système. De plus, il s’impose, au moment d’appliquer les modifications apportées à la législation et à la pratique, de s’interroger de façon plus approfondie sur les conséquences que ces modifications peuvent avoir pour l’évolution du traitement des dossiers par les tribunaux. Il en va de même pour les changements d’ordre administratif, technique et organisationnel. Il est nécessaire de disposer de critères objectifs et appropriés lorsqu’il s’agit de répartir des fonds importants. Lorsque les critères du système sont simples et clairs, le travail de répartition des ressources de l’Administration Judiciaire Nationale s’en trouve simplifié.           

Les différentes phases d’une affaire sont censées être les mêmes pour tous les tribunaux. On présume également que même si le volume de travail concernant certaines affaires peut être temporairement différent, il finit par se régulariser. Il se peut également qu’il existe entre les tribunaux des différences permanentes dans certains domaines que le modèle est incapable d’évaluer. Le travail d’élaboration du nouveau système consiste en particulier à préciser les différences objectives les plus importantes entre les tribunaux et à procéder à des analyses qui permettent de calculer l’importance du coefficient de pondération à affecter à ces différences. Ce travail doit permettre d’établir un lien objectif entre le nombre de dossiers traités et le niveau de ressources qui leur sont consacrées (Ny belastningsmodel for tingsrettene 2005, Norvège).

                       

Le modèle actuel s’appuie sur les statistiques de l’année antérieure pour calculer la répartition des ressources. Cette méthode présente l’avantage de rendre l’information facilement accessible. Les changements enregistrés au niveau des ressources nécessaires ne peuvent être suivis que deux ans après que ces changements sont intervenus. C’est là un défaut : la décision de répartition devra à l’avenir être prise en fonction du niveau d’activité enregistré au cours de l’année en question. Il serait irréaliste de vouloir élaborer un système qui prenne en compte toutes les composantes de l’environnement judiciaire. Un modèle, quel qu’il soit, implique une simplification de la réalité. Au demeurant, un modèle très élaboré ne serrera pas nécessairement de plus près cette réalité qu’un modèle plus simple. L’Administration Judiciaire Nationale indique qu’un modèle doit être un outil utile, mais qu’une exactitude à 100 % n’est pas un objectif réaliste. Le nouveau système devrait être un élément parmi d’autres à mettre en oeuvre aux fins de l’allocation des ressources aux tribunaux de première instance. Le projet de budget et le dialogue entre tribunaux renseignent l’Administration Judiciaire Nationale sur les tâches et les situations dans les tribunaux. En d’autres termes, cette Administration découvre d’autres éléments lorsqu’elle répartit les ressources. Le modèle doit devenir un outil utile pour le dialogue entre l’Administration Judiciaire Nationale et les tribunaux de première instance, l’attribution de nouveaux postes dans les tribunaux et dans leur budget et le dialogue entre cette Administration et le Parlement au sujet de la nécessité de débloquer des fonds supplémentaires pour les tribunaux (ibid.).


DEUXIÈME PARTIE

UNE JUSTICE PÉNALE PLUS RAPIDE EN NORVÈGE

Phase préalable au procès - de la notification de l’infraction à l’engagement des poursuites à la diligence de la police

Examen de “Prosjekt  hurtigere straffesaksbehandling”. Rapport I

Jon T. Johnsen, Professeur de droit,

Faculté de droit de l’Université d’Oslo, Norvège

Membre de la CPEJ-TF-DEL


1.         INTRODUCTION

1.1       Le projet norvégien “Une justice pénale plus rapide” comme exemple de bonne pratique

La rapidité de la procédure pénale est souhaitable pour plusieurs raisons : 1) Il importe d’appliquer rapidement les sanctions pénales. Il ne faut pas laisser un délinquant commettre de nouvelles infractions avant qu’il ait purgé les peines infligées pour des infractions commises antérieurement; 2) Les suspects qui sont innocents doivent être disculpés aussi vite que possible; 3) Le public veut voir les infractions graves dépistées aussitôt que possible; 4) Les décisions rapides correspondent le mieux à l’intérêt des victimes et des témoins : en particulier, les victimes d’infractions graves pourraient avoir du mal à tirer un trait sur l’incident tant que l’affaire n’est pas définitivement tranchée. Par ailleurs, les prévenus qui veulent rompre avec leur comportement criminel peuvent ressentir l’attente du procès et d’une autre décision définitive comme un obstacle; 5) Le principe de la matérialité des faits est le mieux respecté si les preuves sont présentées sans attendre au tribunal. Les souvenirs s’effacent, le préjudice et le stress émotionnel associés à l’infraction disparaissent et, avec le temps, des explications fallacieuses font leur apparition.    

Entre 1999 et 2003, le ministère norvégien de la Justice a mis en œuvre un vaste projet sur l’accélération du traitement des affaires pénales. Ces affaires sont traitées par une filière complexe aux multiples acteurs et phases, qui vont de la découverte ou de la notification de l’infraction jusqu’à l’exécution du jugement et la clôture de l’affaire. Le projet s’adressait à l’ensemble de la filière, ciblant les goulets d’étranglement et faisant le point sur la collaboration. Il a proposé une série de mesures à prendre pour améliorer la rapidité et la qualité.

En tant qu’exemple de bonne pratique, on a choisi l’un des rapports établis sur le projet, qui est axé sur le temps de traitement par la police et couvre deux phases de la filière de traitement du dossier pénal, à savoir la phase de l’enquête et la phase des poursuites. Le rapport a été publié en 2000[8].

La principale raison qui pousse à utiliser cette étude est la très grande place qu’elle fait aux stocks d’affaires en attente et, en particulier, au temps où un dossier ne donne lieu à aucune activité. La Ligne d’action 11 du Programme-cadre de la CEPEJ recommande aux gouvernements de redoubler d’efforts pour réduire le temps d’attente. Le rapport norvégien fournit des outils pour la compréhension de la dynamique des stocks d’affaires en attente et un aperçu des stratégies permettant de diminuer ces stocks et de les faire disparaître. 

Il y a une autre raison : les affaires pénales sont un aspect important du problème européen des retards auquel la CEPEJ ne s’est pas encore vraiment intéressée. Le traitement de ces affaires est par ailleurs très différent du traitement des affaires civiles, surtout avant que l’affaire ne soit portée devant le tribunal. Les parties civiles organisent le traitement des différends selon les normes qu’elles fixent elles-mêmes. En règle générale, il appartient aux parties de décider si et quand elles veulent porter un différend devant les tribunaux. Une partie peut décider d’exercer des poursuites à un stade précoce ou tardif d’un différend ou de ne pas les exercer. Il s’ensuit que le “retard” mis à présenter des contestations civiles aux tribunaux est pour l’essentiel en dehors du champ d’application de la CEDH et ne relève pas non plus du mandat de la CEPEJ-TF-DEL. A la connaissance de l’auteur, il n’existe pas en Europe de point de vue solidement ancré au sujet du délai optimal dans lequel il conviendrait de porter devant les tribunaux des litiges de droit civil. Les normes relatives aux délais sont principalement applicables à compter du moment où une demande est déposée.

Les affaires pénales sont différentes. L’exigence du droit à un procès équitable “dans un délai raisonnable” court à partir du moment où une personne est “accusée” d’une infraction. En gros, ce statut est atteint lorsque les éléments de preuve contre le suspect ont acquis un certain poids – lorsqu’il semble assez vraisemblable qu’il ait commis une certaine infraction. Le statut d’accusé est souvent atteint à un stade précoce de l’enquête et généralement bien avant que ne soit prise la décision définitive de le mettre en examen et de transmettre le dossier au tribunal. Il s’ensuit qu’au pénal, l’exigence du “délai raisonnable” s’applique à la plus grande partie du travail de la police et que le retard pris à ce stade peut influer sensiblement sur l’évaluation des pauses éventuelles[9].          

Dans les affaires civiles, les demandeurs peuvent être de pauvres gens connaissant mal les règles de procédure ou de grosses sociétés ou des institutions publiques qui ont fréquemment recours à la justice. Dans la plupart des pays, les affaires pénales sont traitées dans le cadre d’un système national uniforme reposant sur la police et le parquet depuis la phase préalable au procès. Le respect de l’égalité et de l’équité et le traitement correct et rapide du dossier sont généralement exigés du système. Contrairement aux tribunaux, l’appareil chargé de l’enquête et des poursuites est, dans la plupart des pays – sinon dans tous – bureaucratique et hiérarchisé, en ce sens que le procureur national est habilité à donner ses instructions à tous les échelons de l’appareil sur la façon d’utiliser leurs compétences dans le traitement de chaque affaire, des questions d’orientation générale et des questions d’organisation. Les procureurs de district exercent tous la même autorité sur les commissariats de police relevant de leur secteur. Alors que les acteurs des litiges civils agissent en ordre dispersé, un acteur principal domine dans la plupart des pays le traitement des affaires pénales en ayant à sa disposition des outils puissants lui permettant d’agir d’une manière coordonnée et uniforme dans l’ensemble de la juridiction. Au reste, la police et le parquet se trouvent dans une position bien meilleure que les parties aux affaires civiles pour faire pression sur les tribunaux au comportement atypique.

Pour la CEPEJ-TF-DEL, l’accent est mis sur les délais optimaux, ce qui est une norme plus exigeante que “dans un délai raisonnable”. Du point de vue des victimes, des témoins, du public et, souvent, de l’auteur de l’infraction lui-même, ce n’est pas seulement le temps qui s’écoule entre l’accusation et la décision de justice qui compte. Pour eux, c’est naturellement aussi une source de stress si le délai séparant la détection ou la notification d’une infraction et l’inculpation de son auteur devient excessif. Cela justifie que l’on prenne en compte le temps utilisé depuis le début de l’enquête, ce qui est conforme à l’approche adoptée dans le rapport norvégien.

Par ailleurs, la chaîne de traitement des affaires pénales est un système à haut débit. Ces dernières années, la Norvège, qui est un petit pays de 4,6 millions d’habitants et dont le taux de criminalité est faible, a traité entre 400 000 et 500 000 infractions pénales par an. Le nombre de dossiers traités par la police est comparable à celui des autres organismes publics traitant un volume important de cas, comme les demandes de prestations sociales, la sécurité sociale, les permis de construire et les déclarations d’impôts. Le volume des affaires judiciaires potentielles est énorme par rapport à ce que doivent traiter les différents intervenants dans les affaires civiles. La fonction de filtrage de la police et du parquet a un impact très important sur la charge de travail des tribunaux. Sur les 487 000 infractions traitées par la police norvégienne en 1999, 96 000 seulement ont été renvoyées devant les tribunaux, soit moins de 20 %. Si ceux-ci en avaient reçu 10 % de plus, leur volume de travail aurait été augmenté de 50 % et aurait entraîné une accumulation de dossiers difficile à gérer. Tout plan d’action contre les retards qui ne ciblerait pas la police et le parquet ne pourrait qu’être incomplet.    

Ces observations mettent le doigt sur un autre élément stratégique. Si les stocks d’affaires en attente dans une juridiction sont importants et que la police et le parquet constituent un appareil relativement uniforme, il sera sans doute plus facile et rapide d’obtenir des résultats en se concentrant sur les retards accumulés au stade préalable au procès que sur les tribunaux. En dépit de l’importance des différences organisationnelles entre la police et le parquet, d’une part, et les tribunaux, d’autre part, un grand nombre d’outils d’analyse et de stratégies de réduction du temps utilisé élaborées dans le rapport peuvent également être adaptés à la gestion du temps dans les tribunaux.

Le rapport intégral représente plus de 170 pages. L’auteur s’est efforcé d’en extraire les points qui présentent un intérêt particulier pour les travaux de la CEPEJ et a adapté l’exposé à cette fin. Les analyses des retards ont été nettement simplifiées et ses principales recommandations ne sont présentées que sous une forme résumée. Par ailleurs, certaines observations analytiques sur l’applicabilité du rapport ont été insérées lorsque cela paraissait opportun.               

1.2        Enquête et poursuites en Norvège

Pour schématiser, le système norvégien de poursuites pénales comprend trois niveaux. Les procureurs de la police constituent le premier niveau. Le pays est divisé en 54 districts de police[10]. Tous les districts de police emploient plusieurs juristes qui remplissent des fonctions de procureur, tout en accomplissant souvent d’autres tâches de police, sous la responsabilité principale du commissaire de police.

Les procureurs de district constituent le deuxième niveau. Ils coiffent l’engagement des poursuites dans plusieurs districts de police et sont les supérieurs hiérarchiques des procureurs de la police pour toutes les questions de fond se rapportant au traitement des infractions pénales. Les procureurs de district sont des procureurs à plein temps. La Norvège compte actuellement 10 districts placés sous l’autorité d’un procureur.  

L’ensemble du système de traitement des infractions pénales – enquête judiciaire, poursuites, plaidoirie en première instance et contrôle de l’application – est dirigé par le Procureur national. En tant qu’autorités supérieures, les procureurs de district et le Procureur national sont habilités à intervenir dans tout dossier traité par les procureurs de la police lorsqu’ils le jugent nécessaire.   

L’enquête judiciaire est ouverte par la police et le commissaire de police de district a la haute main sur la répartition des ressources. Pendant la phase préalable au procès, les décisions de fond prises par les procureurs de la police peuvent concerner les moyens d’investigation, le recours à des mesures de coercition et la décision finale d’inculper l’intéressé ou de classer l’affaire. 

Les décisions en matière de poursuites sont prises aux différents niveaux du système de poursuites. En ce qui concerne les infractions mineures et les infractions les plus courantes, ce sont les procureurs de la police qui prennent toutes les décisions en matière de poursuites. Pour d’autres infractions graves, le procureur de district prend la décision finale de poursuivre ou de mettre en examen. En pareil cas, le procureur de la police ou le commissaire de police transmet une recommandation de poursuivre au nom du district de police. La recommandation précise s’il convient de mettre la personne en examen ou non. Si la mise en examen est recommandée, elle propose un acte d’accusation décrivant l’acte présumé, assorti d’un renvoi à la disposition pénale applicable, et une sanction. Si la mise en examen n’est pas recommandée, elle propose une décision définitive qui peut être le classement de l’affaire ou le retrait de l’accusation, une amende ou le renvoi de l’affaire à une autre instance, telle qu’un service psychiatrique, un service de protection de l’enfance, un conseil de règlement des différends, une autorité poursuivante étrangère, etc.     

                       

2.         Statistiques concernant les dossiers en attente

2.1        Districts relevant d’un procureur

L’étude a rassemblé des statistiques sur le temps de traitement des dossiers et les stocks d’affaires en attente dans les dix districts relevant d’un procureur. On a étudié à la fois les chiffres globaux et les données concernant trois grandes catégories d’infraction, à savoir les infractions commises avec violence, les infractions motivées par l’appât du gain et la narco-criminalité. La fig. 1 montre les conclusions concernant les deux districts au plus fort et au plus faible taux de dépistage.

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Fig. 1: Variations des taux de dépistage entre districts relevant d’un procureur. Norvège 1998

Les taux globaux de dépistage ont fait apparaître des écarts très importants. Le taux le plus fort se situait à 20 points au-dessus du plus faible. Les écarts entre les deux principales catégories d’infractions (les infractions commises avec violence et les infractions motivées par l’appât du gain) ont également signalé des différences intéressantes. Étant donné que le taux de dépistage est un indicateur important de la qualité du traitement des affaires pénales, les chiffres signifiaient que la qualité était inégale et pouvait être améliorée. 

La Fig. 2 montre les écarts de temps de traitement entre les deux districts relevant d’un procureur où le temps de traitement est le plus court et le plus long, respectivement.


Fig. 2: Écarts de temps de traitement entre districts relevant d’un procureur. Norvège 1998

Le temps de traitement entre le moment où l’infraction est signalée et la prise de la décision en matière de poursuites, toutes infractions confondues, s’échelonnait entre 126 et 232 jours, soit une moyenne de 199 jours. On constatait des écarts analogues pour les trois principales catégories d’infractions étudiées.

Le taux de dépistage et le temps de traitement présentaient tous deux des écarts importants entre districts relevant d’un procureur. Les différences frappantes constatées ne pouvaient s’expliquer par des différences de volume ou de complexité des dossiers. Le rapport n’a pas présenté de données sur la corrélation statistique entre le taux de dépistage et le temps de traitement, il a conclu que les résultats obtenus donnaient fortement à penser que des améliorations d’efficacité importantes étaient possibles.

2.2        Dossiers en attente et profils d’accumulation dans les districts de police

Le rapport a alors procédé à une étude plus approfondie dans 7 des 54 districts de police. On a rassemblé auprès du registre central de la police des données statistiques concernant six grandes catégories d’infractions, à savoir les dommages, la narco-criminalité, les infractions sexuelles, la violence, les infractions motivées par l’appât du gain et la criminalité économique, en sus des données concernant toutes les infractions.  Les taux moyens de dépistage oscillaient entre 23 % pour les dommages et les infractions motivées par l’appât du gain et 91 % pour la narco-criminalité. Le temps de traitement moyen s’échelonnait entre 151 jours pour la narco-criminalité et 360 jours pour la criminalité économique.

Le rapport a également évalué les stocks d’affaires en attente dans certains districts de police. On a, au niveau du district de police, divisé le temps de traitement en deux phases, à savoir la phase d’enquête et la phase de poursuites. La phase d’enquête a été calculée à compter de la date à laquelle l’infraction est signalée jusqu’à de ce que le procureur de la police en soit saisi pour décision finale en matière de poursuites. La phase des poursuites a été calculée comme s’étendant depuis la fin de la phase d’enquête jusqu’à ce que le procureur de la police se prononce définitivement sur la mise en examen. Si la décision en matière de poursuites devait être prise par le procureur de district, le délai courait jusqu’à ce que le district de police ait transmis sa recommandation au procureur de district. Ces limitations impliquaient que le temps utilisé par les procureurs de district et le Procureur national se situait en dehors du champ de l’étude en question. 

L’étude a présenté des profils d’accumulation en fonction de l’âge des dossiers. Le temps de traitement a été divisé en quatre tranches correspondant au temps de traitement utilisé au moment de l’évaluation : 0 à 3 mois, 4 à 6 mois, 7 à 12 mois et plus de 12 mois. La dimension des tranches d’accumulation a été mesurée en pourcentage du volume annuel d’affaires tranchées. La figure 3 montre les deux extrêmes – représentés par les districts de police de Troms et de Hordaland – et la moyenne nationale.

Fig. 3: Profils d’accumulation. Districts de police de Troms et de Hordaland et ensemble du pays. 1999

Les stocks d’affaires en attente représentaient 15 % du résultat annuel dans le district de police de Troms, mais ce taux passait à 49 %, soit trois fois plus, dans le district de police de Hordaland. Le taux de Hordaland était d’ailleurs très supérieur à la moyenne nationale (27 %). L’écart était le plus important dans les tranches correspondant aux retards les plus longs.

Les différences de taux de criminalité et de profils de criminalité ne permettaient pas d’expliquer pareil écart entre les temps de traitement dans les deux districts de police. Tout portait à croire que d’autres facteurs étaient en jeu, et qu’ils avaient trait à des différences au niveau du système de traitement des affaires pénales. Étant donné que le traitement des dossiers pénaux dans les districts de police présentait une structure officielle et organisationnelle uniforme, il existait des raisons de penser que la principale cause de la différence de profil d’accumulation tenait à des différences dans le fonctionnement pratique du système de traitement des dossiers.   

La ventilation des stocks d’affaires en attente en tranches correspondant au temps de traitement utilisé (tranches d’âge) a fourni des informations supplémentaires. Pour l’ensemble de la Norvège, ces stocks ont été assez stables. Le profil du pays a montré que la moitié des affaires en attente se situaient dans la tranche 0 à 3 mois et l’autre moitié dans les trois autres tranches, tandis que le district de Hordaland avait moins de 40 % des affaires en attente dans la première tranche. La tranche des 7 à 12 mois, en particulier, était relativement  importante et pourrait, avec le temps, grossir les stocks de la tranche supérieure à 12 mois. Le rapport a considéré un temps de traitement supérieur à six mois comme exceptionnel. Dans le district de Hordaland, 19 % des affaires en attente se situaient bien dans ces tranches, contre 5 % dans le district de Troms et 8 % au niveau national. Le profil du district du Hordaland permettait de penser que les stocks d’affaires en attente continueraient à y grossir si certaines mesures préventives n’étaient pas appliquées.

           

2.3        Étude “approfondie” des facteurs d’accumulation des dossiers

Le rapport a également étudié la localisation de l’accumulation, pour savoir qui était chargé des affaires en question. Étant donné qu’un dossier pénal passe par différentes phases (enquête, décision en matière de poursuites, préparation du procès, audience principale, appel, exécution du jugement, etc.), la localisation de l’accumulation dans la chaîne de traitement des affaires pénales fournit également des informations importantes sur le retard si on la rapproche du profil d’accumulation. Si l’essentiel des affaires qui se situent dans la tranche de plus de 12 mois sont encore traitées par la police, cela veut dire qu’elles n’ont pas dépassé le stade de l’enquête et que le retard excessif potentiel est très préoccupant. Si la plupart de ces affaires ont atteint le stade de la procédure d’appel, les dossiers peuvent sembler faire leur chemin. 

Le groupe de travail a donc procédé à une étude approfondie de l’accumulation des dossiers. Il a étudié de plus près le temps de traitement et ses composantes. Au lieu des sept districts de police et des six grandes catégories d’infractions retenus auparavant, il a décidé de ne retenir que cinq districts de police et de se concentrer sur les dispositions pénales qui étaient souvent violées. Il a choisi les infractions relevant des catégories suivantes :

– infractions motivées par l’appât du gain (en particulier le vol),

– narco-criminalité,

– infractions commises avec violence (en particulier les lésions corporelles),

– dommages.

Il a ajouté les infractions au code de la route en tant que catégorie d’infractions statistiquement importante. Il a sélectionné 20 affaires réglées dans chaque catégorie d’infractions et chaque district de police, à l’exception d’Oslo, où il en a retenu 50 en raison du volume des dossiers à traiter. Dans chaque district et catégorie d’infractions, les dossiers ont été choisis au hasard. Les 20 (50) premiers affaires enregistrées comme réglées après une date fixée ont été inclus dans l’échantillon, qui a alors représenté 650 affaires. Le temps de traitement a été étudié sur la base des informations figurant au dossier des affaires en question.

Le groupe de travail s’est concentré sur le temps de traitement aux différents stades du traitement des dossiers en établissant une distinction importante entre le stade de l’enquête et le stade des poursuites. Le stade de l’enquête représentait la période écoulée entre l’enregistrement de l’affaire et son renvoi au procureur pour décision en matière de poursuites et le stade des poursuites durait jusqu’à ce qu’il ait été décidé d’engager ou non l’action publique.

Le groupe de travail a constaté que le temps de traitement moyen au stade de l’enquête s’échelonnait entre 39 et 118 jours selon les districts de police, toutes catégories d’infractions étudiées confondues, tandis que l’écart au stade des poursuites oscillait entre 43 et 190 jours. Le temps de traitement global jusqu’à la prise de la décision en matière de poursuites variait de 82 à 307 jours.  

Comme on s’y attendait, le temps de traitement variait encore davantage selon les catégories d’infractions. Toutefois, l’écart constaté entre les districts de police rapides et lents se retrouvait largement entre les infractions choisies.  

2.4        Temps de travail et temps morts

Le groupe de travail a décomposé le temps de traitement en deux éléments principaux : le temps de travail et les temps morts[11].Il a choisi le jour comme unité de calcul et défini le temps de travail comme le nombre de jours donnant lieu à la mise en oeuvre de certains moyens d’investigation pouvant être enregistrés à partir des documents. L’activité s’étalant sur une partie d’une journée seulement a été comptabilisée comme une journée d’activité. En revanche, si plusieurs personnes travaillaient sur une affaire le même jour, une seule journée d’activité était comptabilisée. Le groupe de travail a exclu le vol et les dommages de cette partie de l’étude, qui a alors porté sur 390 affaires.

Les données recueillies sont frappantes. Le temps de travail total oscillait entre deux et cinq jours tant selon les districts de police que les catégories d’infractions, mais les temps morts s’échelonnaient entre 43 et 309 jours. Le temps de travail ne représentait qu’entre 1 et 7 % du temps de traitement total, tandis que les temps morts en représentait entre 93 et 99 %. D’autres méthodes de comptage auraient pu donner des résultats un peu différents, mais il semblait ne faire aucun doute que les temps morts représentaient l’essentiel du temps de traitement.

Cette conclusion semblait sauter aux yeux pour le stade des poursuites. Le temps de travail a été comptabilisé pour un jour pour toutes les affaires. En moyenne, les procureurs de la police prenaient connaissance de plusieurs affaires relevant des catégories retenues et les tranchaient en l’espace d’une journée de travail, ce qui contrebalançait le cas des quelques affaires auxquelles il fallait consacrer plus d’une journée. Il s’ensuit qu’un jour au plus du temps de traitement compris entre 43 et 190 jours était du temps de travail et que cette journée était manifestement consacrée à l’affaire vers la fin du temps de traitement. Lorsque les dossiers parvenaient au procureur, ils étaient placés au bas de la pile, où ils attendaient leur tour.

Par ailleurs, les données recueillies pour le stade de l’enquête ont été très voisines pour les trois catégories d’infractions. Entre 57 et 84 % ou davantage du temps de travail concernaient les 30 premiers jours de l’enquête. Au-delà de 90 jours, il se passait fort peu de choses.

L’étude a recensé les goulets d’étranglement possibles. Le groupe de travail a étudié le temps de réponse aux demandes présentées par la police en vue d’obtenir des rapports sur l’histoire personnelle du suspect et différents types de preuves fournies par des examens de laboratoire, tels que des analyses de médicaments et d’autres produits chimiques et du niveau d’intoxication par l’alcool et d’autres drogues, des preuves documentaires et des preuves manifestes, des empreintes digitales, les fouilles des scènes d’un crime, des autopsies, des analyses d’empreintes génétiques, d’autres rapports d’experts, etc. D’une façon générale, il a constaté que le temps de travail ne représentait qu’une petite partie du temps de traitement. L’essentiel du temps de réponse était du temps mort. La plupart des instances interrogées ont reconnu qu’elles pourraient réduire sensiblement le temps de traitement.

           

2.5        Conclusions

Le rapport a conclu qu’un temps de traitement global moyen de 198 jours entre l’enregistrement ou la notification de l’infraction jusqu’à la décision en matière de poursuites était manifestement trop long. On ne pouvait pas imputer les écarts importants entre districts de police aux seules différences de taux de criminalité ou de ressources. Les temps morts semblaient excessifs, en particulier au stade des poursuites, mais aussi à celui de l’enquête. Un écart important entre les temps de traitement moyen et médian (non décrit ici) impliquait que pour une minorité de dossiers, le temps de traitement était extraordinairement long. Il importait que les districts de police fassent une large place aux pratiques de contrôle capables de repérer les dossiers de ce type avant qu’on en perde la trace.

Même en tenant compte de marges très importantes, le temps de travail moyen était très en deçà de 10 jours et ce chiffre ne pouvait être attribué à une qualité du travail inférieure aux normes. La plupart des dossiers examinés concernaient des infractions mineures et avaient été traités de manière suffisamment consciencieuse. Le problème le plus grave était les temps morts. L’essentiel du temps de travail intervenait pendant le premier mois du temps de traitement. Le groupe de travail a donc demandé si les districts de police s’attachaient suffisamment à clore un dossier sans retard. Il semblait que lorsque l’essentiel du travail était fait, la police traitait en priorité les nouvelles affaires au lieu de clore les anciennes. Les goulets d’étranglement liés aux fournisseurs extérieurs d’expertises retardaient bien certains dossiers, mais pas la majorité d’entre eux.

On pourrait bien évidemment appliquer à d’autres pays les outils d’analyse mis en oeuvre pour étudier les retards constatés dans les districts de police norvégiens. Ils sont également applicables aux tribunaux, encore que le taux de dépistage en tant qu’indicateur de qualité doive être remplacé par d’autres indicateurs. La plupart d’entre eux pourraient également être appliqués aux affaires civiles. Les écarts de temps de traitement des dossiers, les profils d’accumulation d'affaires selon les tranches d’âge et le type d’affaire et la ventilation du temps de traitement en temps de travail et en temps morts pourraient également être analysés également pour les tribunaux. Un autre rapport établi dans le cadre du projet norvégien sur l’accélération de la justice pénale a bel et bien analysé certaines de ces variables pour les tribunaux[12]. Il a constaté des écarts très importants de temps de traitement entre les tribunaux (p. 24). 

           

3.         MESURES a CARACTeRE GeNeRAL a PRENDRE CONTRE LE RETARD

Le rapport a proposé une série de moyens pour réduire le temps de traitement. Certains d’entre eux ont un caractère général en ce sens qu’ils sont conçus pour influer tant sur le temps de travail que les temps morts. Les autres se rapportent spécifiquement aux temps morts: la liste sera donnée au paragraphe suivant. Les mesures à caractère général concernent :

Les preuves résultant d’examens de laboratoire. Réduire le recours aux analyses chimiques dans les affaires de narco-criminalité.

La concentration maximale admissible d’alcool ou d’autres drogues dans le sang des conducteurs

Comme bien d’autres pays, la Norvège a institué un taux légal d’alcoolémie pour les conducteurs (qui, à l’heure actuelle, ne doit pas excéder 0,2 pour 1000). Le fait de fixer un taux à ne pas dépasser simplifie singulièrement la recherche des preuves nécessaires pour une condamnation, en rendant superflus les examens cliniques et les dépositions de témoins au sujet du comportement du conducteur. Dans la plupart des cas, la preuve principale est un examen du sang. Le groupe de travail a étudié la possibilité de procéder à des examens analogues pour les autres drogues, mais y a renoncé, en partie parce que la tolérance des individus aux drogues est nettement plus variable qu’en ce qui concerne l’alcool, en partie parce que certaines drogues étaient utilisées aussi comme médicaments et en partie parce que les personnes conduisant en état d’ivresse avaient souvent utilisé plusieurs drogues à la fois.

L’obligation de se présenter aux interrogatoires de police.

Le groupe de travail a constaté que les suspects ou les témoins avaient de plus en plus tendance à ne pas se présenter de leur plein gré aux interrogatoires de police, ce qui entraînait des retards, et il a proposé d’autoriser la police à rendre obligatoire pour les témoins de s’y présenter en cas de besoin. S’agissant des suspects, il a jugé suffisantes les autorisations existantes en matière d’arrestation et de détention.

La réduction de peine.

Le temps de traitement des affaires pénales est largement influencé par les aveux. Ils augmentent le taux de dépistage et diminuent le volume de ressources nécessaire pour obtenir une condamnation. La réadaptation des victimes et des délinquants est généralement facilitée par les aveux. Le groupe de travail a donc proposé des réductions importantes de peine en faveur des suspects qui seront passés aux aveux. Le principal critère ne doit pas être le remords et les mobiles ont moins d’importance; ce qui compte, c’est en quoi les aveux ont facilité le dépistage et diminué le temps et les ressources nécessaires à la police et au parquet. Les aveux intervenant au début de l’enquête doivent compter davantage qu’au stade du procès et ils doivent également être considérés comme plus importants lorsque les autres éléments de preuve n’étaient guère de nature à emporter la conviction. Il s’agit également de récompenser le suspect pour avoir donné des informations décisives sur d’autres infractions commises soit par lui, soit par autrui, en particulier lorsque l’on a affaire au crime organisé.

Les amendes de police normalisées.

Le rapport a également étudié la question d’accroître le recours aux amendes normalisées infligées par la police pour plusieurs infractions mineures, telles que les infractions au code de la route, les infractions mineures liées à la drogue et à l’alcool, le vol simple, le vagabondage, le non-renvoi du formulaire de déclaration d’impôt et les infractions à la législation douanière. Toutefois, si l’on rapproche ces amendes de celles qui peuvent actuellement êtres infligées par l’autorité de poursuite, les gains d’efficacité – y compris en ce qui concerne le temps de traitement – ont semblé limités et, dans une certaine mesure, préjudiciables à d’autres valeurs que la justice pénale était censée promouvoir.

La transaction pénale.

La transaction pénale au sens américain n’est pas autorisée en Norvège. Le groupe de travail a proposé d’étudier plus avant le système et a abordé succinctement un certain nombre de questions importantes, à savoir 1) le type de réductions de peine qui pourraient être accordées au suspect, 2) le type d’infractions, 3) la compétence de l’autorité de poursuite en matière d’accord de réduction de peine, 4) la publicité de l’accord, 5) le contrôle exercé par l’autorité de poursuite supérieure et les tribunaux,  6) les mesures de sécurité contre les réductions de peine mal fondées. La réduction de peine en échange d’informations susceptibles d’aider l’enquête sur des infractions commises par des tiers n’a pas été recommandée.

Les délais.

Le rapport a établi une distinction entre les délais légaux de forclusion, les délais légaux  prorogeables et les délais internes fixés par l’autorité de poursuite. Il a écarté les délais de forclusion, qui impliquaient que les auteurs d’infraction ne seraient poursuivis que si le délai était respecté. En revanche, il a été favorable à une utilisation accrue des délais prorogeables en fonction de critères spécifiés, soit sous la forme de prorogations automatiques, soit à la suite d’une décision de justice.

Il a recommandé la fixation de délais plus stricts pour les progrès de l’enquête lorsque le suspect était placé en détention, et il a distingué quatre catégories de mesures : 1) prorogation d’un à quatre jours du délai ordinaire de présentation du détenu à un juge, mesure qui, selon le groupe de travail, devrait réduire sensiblement tant le nombre de comparutions que la nécessité de périodes de détention plus longues. Lorsque le suspect était présenté au juge un jour seulement après son arrestation, les principaux moyens d’investigation n’avaient pas encore été mis en oeuvre et il était difficile de fixer un calendrier précis pour la suite de l’enquête, ce qui entraînait généralement des durées de détention comprises entre une et huit semaines. Un délai de quatre jours inciterait la police à relâcher la plupart des suspects avant son expiration et rendrait plus fiable l’estimation de la durée du reste de l’enquête; 2) la fixation de durées maximales de détention plus strictes; 3) une meilleure coordination entre les progrès de l’enquête et les durées de détention. Il ressortait d’études que le plus clair du temps de travail pendant l’enquête intervenait vers la fin de la période de détention provisoire et que les temps morts représentaient la plus grande partie de cette période; 4) l’instauration de délais maximaux de détention plus stricts, assortie d’un renforcement du contrôle par les tribunaux. Le groupe de travail a également proposé un nouveau délai de six semaines pour la prise par l’autorité compétente de la décision de poursuivre ou non un jeune délinquant (âgé de moins de 18 ans). 

Le rapport a proposé d’instituer progressivement des délais internes pour la prise par la police d’une décision en matière de poursuite et proposé de fixer, dans un premier temps, un délai de 60 jours pour atteinte à l’intégrité physique. Les procureurs de district appliquaient déjà un délai général, en disant que 90 % des dossiers à traiter devaient être tranchés dans les 30 jours, que le groupe de travail a choisi de conserver. Ce dernier a également examiné des outils de TI plus efficaces pour contrôler le respect des délais.

L’extension des pouvoirs des procureurs de la police.

Le groupe de travail a évalué la répartition des attributions en matière de poursuite entre les procureurs de la police et les procureurs de district en ce qui concerne les infractions courantes. Pour économiser du temps de traitement au niveau des procureurs de district, il a proposé d’étendre sensiblement les pouvoirs des procureurs de la police en les habilitant à prendre la décision finale en matière de poursuite.

L’intégration de l’activité de poursuite et de l’activité d’enquête.

Le groupe de travail a insisté sur une meilleure intégration de l’activité de poursuite et de l’activité d’enquête, méthode de travail connue depuis longtemps. Les procureurs devraient être impliqués dans l’enquête, préciser les questions juridiques pour les enquêteurs et les aider à cibler leur activité. En vertu de la réglementation en vigueur, le procureur de police était chargé de superviser toutes les enquêtes de façon à en garantir la qualité professionnelle et juridique, tandis que le service administratif avait la haute main sur la répartition des ressources. L’efficacité de l’enquête commandait d’instaurer une coopération étroite entre les responsables des décisions d’ordre professionnel et administratif. L’intégration de l’activité de poursuite avait également des retombées au stade des poursuites. De la sorte, les procureurs de police connaîtraient déjà le dossier à fond et ne devraient pas avoir besoin de beaucoup de temps de travail pour prendre la décision en matière de poursuite. Dans la plupart des cas, cette décision pouvait être prise dès la fin de l’enquête.

L’utilisation des ressources.

La police n’utilisait pas ses ressources globales d’une façon optimale. Les enquêteurs et les juristes consacraient trop de temps aux tâches administratives et autres et, pendant ce temps-là, ne traitaient pas les affaires pénales. Il semblait nécessaire d’instituer un ordre de priorité plus strict. Par ailleurs, la clôture des dossiers sans délai n’était pas entrée dans les moeurs de la police. La pratique du transfert des dossiers en cas de vacance de poste avait également ses inconvénients.

L’examen de la répartition actuelle des ressources en personnel en fonction des tâches.

En Norvège, un district de police accomplit plusieurs tâches autres que le traitement d’affaires pénales. Ses effectifs sont constitués de juristes, de policiers et des représentants de diverses catégories de personnel administratif qui ne sont pas membres du service de police. Il s’imposait de repenser la répartition des tâches. Etait-il possible de confier des tâches de traitement d’affaires pénales accomplies par des juristes et des policiers au personnel administratif et le personnel employé à d’autres tâches pourrait-il se voir confier le traitement d’affaires pénales ?

- L’éducation.

L’éducation des procureurs de police laissait à désirer. Leur formation universitaire était axée sur les principes du droit pénal et du droit processuel et ils n’avaient pas été suffisamment formés aux difficultés du travail de direction d’enquêtes judiciaires ou de la prise de décision en matière de poursuite. Le taux élevé de renouvellement des procureurs de police était une autre difficulté. Le groupe de travail a recommandé 1) des cours fondamentaux obligatoires pour les nouveaux procureurs de police, 2) des cours de formation spécialisée à certaines infractions, telles que la criminalité économique, la narco-criminalité organisée et les agressions sexuelles, ainsi qu’aux moyens d’investigation extraordinaires, tels que la surveillance des locaux, l’écoute et la lecture des communications, le travail d’infiltration, les leurres, les machinations, etc.; 3) des cours sur la plaidoirie en première instance dans des affaires pénales complexes, 4) sur la direction de l’activité de poursuite, et 5) des cours de perfectionnement professionnel.

La promotion de l’accélération de la justice ne doit pas aboutir à faire tomber la qualité au-dessous de normes acceptables. Le rapport norvégien a exigé que le taux de dépistage n’ait pas à se ressentir des mesures qui seraient prises pour réduire le temps de traitement dans la police.

Bon nombre des mesures proposées pourraient également influer sur le temps de traitement au niveau des tribunaux. La diminution de l’utilisation des preuves résultant d’examens de laboratoire, la concentration maximale admissible d’alcool ou d’autres drogues dans le sang, l’augmentation du taux d’aveux et l’amélioration de la formation des procureurs de la police diminueraient la durée des audiences, tandis que l’augmentation des amendes de police, la transaction pénale et la prorogation du délai de présentation des détenus à un juge pourraient réduire le volume des affaires pénales dont les tribunaux sont saisis.     

4.         Mesures VISANT À RÉDUIRE LEs TEMPS morts

Le groupe de travail a transmis plusieurs propositions tendant à améliorer l’organisation, les pratiques et les méthodes de travail de la police et du parquet, et essentiellement axées sur la réduction des temps morts. Il a ainsi défini cinq objectifs :

-    l’enquête s’ouvre immédiatement,

-    toutes les enquêtes ont besoin d’objectifs bien définis,

-    l’enquête doit se poursuivre sans interruption jusqu’à ce qu’elle soit achevée,

-    différents moyens d’investigation doivent, dans la mesure du possible, être mis en oeuvre simultanément,

-    la décision finale en matière de poursuite doit être prise dès l’enquête achevée,

-    toutes opérations d’expédition doivent se faire sans retard,

-    le dépôt et l’enregistrement des dossiers doivent être faits dans les règles et les données doivent être mises régulièrement à jour.

Le groupe de travail a constaté que la principale raison expliquant l’importance de l’écart par rapport au temps de traitement optimal était les temps morts. Il a opéré une distinction entre les temps morts internes, qui sont le retard au sein de la police et du parquet eux-mêmes, et les temps morts externes, qui désignent le retard pris par d’autres instances associées à l’enquête.

Il a insisté sur deux stratégies principales de réduction des temps morts internes : 1) nette amélioration du contrôle et du suivi de chaque dossier et du nombre total de dossiers des districts de police; 2) modification de la charge de travail des enquêteurs et des procureurs de la police.

Le groupe de travail a évalué la capacité globale du système norvégien d’enquête et de poursuite.  Les taux de criminalité ont augmenté bien plus que les ressources au cours des deux décennies écoulées, mais les ressources ont nettement progressé dans la deuxième moitié des années 90. Les stocks d’affaires en attente ont légèrement diminué ces dernières années tandis que le taux de dépistage est resté stable. Ces constatations ne permettaient pas de conclure à l’existence d’une disparité importante entre les ressources et la charge de travail et donnaient à penser qu’il pourrait suffire de transférer des ressources entre districts de police et de les augmenter à titre temporaire dans les districts où les stocks d’affaires en attente étaient importants. Pour le reste, il s’agissait  surtout d’un problème d’organisation et de gestion. Les taux de dépistage, compris entre 20 et 30 %, ont été jugés trop faibles et devraient être portés à 40 ou 50 % comme dans les années 70. Il semblait également que cet objectif puisse être atteint sans accroissement important des ressources. Plusieurs mesures ont été proposées pour réduire les temps morts :  

Améliorations au stade de l’enquête.

Le groupe de travail a analysé les différentes phases de la procédure d’enquête et transmis plusieurs propositions tendant à les améliorer. Il a évalué le traitement des nouveaux rapports signalant la commission d’infractions, la décision d’ouvrir ou non un enquête, les moyens d’investigation immédiatement mis en oeuvre, la répartition des tâches et leur transfert pendant l’enquête, la prise immédiate de décisions en matière de poursuite (amendes) pour les infractions les plus courantes, les dossiers ne prêtant pas à contestation, tels que les infractions au code de la route, les voies de fait simples, le vagabondage et la consommation de drogue, et la pratique des réunions quotidiennes pour coordonner l’enquête sur les nouvelles infractions signalées au cours des 24 dernières heures, et les améliorations proposées. Il a également recommandé, dans les affaires complexes, de recourir davantage aux équipes d’enquête dirigées par un chef d’équipe.

Procureurs de police.

Le problème d’accumulation de dossiers le plus grave est lié aux temps morts au niveau des procureurs de police. Ils représentent un sérieux goulet d’étranglement qui irait en s’aggravant si le taux de dépistage s’améliorait. Le groupe de travail a donc proposé d’augmenter de 16 % les postes permanents de procureur de police, soit en transférant des postes, soit en en créant de nouveaux.

Délais internes distincts pour les décisions en matière de poursuites à prendre par la police.

Il a semblé approprié de recommander un délai distinct pour la décision en matière de poursuite. Le rapport a proposé un délai de 30 jours, ce qui implique une réduction importante par rapport au temps moyen enregistré dans les différents districts de police, qui est compris entre 43 et 190 jours. Toutefois, compte tenu d’un temps de travail moyen d’un jour, les temps morts représenteraient toujours 97 % du temps de traitement lors de la phase de poursuite. Pour que ces délais soient effectifs, il est indispensable que les responsables des poursuites – les commissaires de police et les procureurs de district – exercent pleinement leur fonction de contrôle et de supervision.

Priorités.

S’agissant de certaines catégories d’affaires, un temps mort un tant soit peu important est inacceptable. Le groupe de travail a attiré l’attention sur les priorités fixées par le Procureur national, qui concernent les infractions les plus graves mettant en danger la vie ou la santé, telles que le meurtre, l’incendie criminel, le viol, la narco-criminalité organisée, la conduite imprudente, la criminalité économique ou environnementale grave et les affaires dans lesquelles le suspect a été placé en détention et les cas où le suspect est âgé de moins de 18 ans. Ces dossiers devraient être envoyés dans une filière séparée et tranchés sans temps morts importants.  Les autres dossiers ne devraient pas non plus passer par la même filière. Les petits dossiers devraient également être tranchés sans temps mort. Il était généralement plus efficace de prendre la décision immédiatement que de conserver le dossier avec les autres dossiers accumulés et de l’étudier à nouveau plus tard pour prendre la décision finale.

Jonction d’instances.

Beaucoup de dossiers n’étaient pas transmis au procureur immédiatement après la fin de l’enquête parce que le suspect faisait l’objet d’une enquête pour d’autres infractions et qu’il semblait préférable de joindre les instances. Le groupe de travail a conseillé de ne pas retarder les dossiers dans le but de les joindre, à moins que cela ne soit justifié par de solides considérations de preuve ou de procédure.

Capacité de gestion.

Les districts de police dont les stocks d’affaires en attente sont excessifs ont également beaucoup de mal à les gérer. Ils devraient s’efforcer de les ramener à un niveau gérable. Dans la mesure où ces stocks déclinent au plan national, il devrait être possible de trouver les ressources nécessaires dans les limites des budgets existants.

Analyse des stocks d’affaires en attente.

L’analyse des stocks à intervalles fixes pourrait aider à prévoir leur évolution et permettre d’appliquer des mesures préventives. Les stocks grossissent-ils et dans quelles tranches d’âge ?

Graphiques des progrès des affaires.

Le groupe de travail a insisté sur la nécessité de suivre de près les progrès du traitement des affaires. Il a préconisé d’insérer dans le fichier de chaque dossier un graphique distinct qui montrerait tous les moyens d’investigation mis en oeuvre chaque mois, et chaque semaine lorsque le suspect avait été placé en détention, en marquant séparément la fin du stade de l’enquête et le début du stade des poursuites. Le graphique enregistreur devrait figurer à la partie supérieure du fichier du dossier, permettant à tous les responsables du traitement de se faire immédiatement une idée d’ensemble des progrès réalisés, afin d’éviter tout temps mort excessif ou inutile et de repérer rapidement les dossiers qui faisaient fausse route et les remettre sur les rails.

Réduction des stocks d’affaires en attente : projets pilotes.

Il importait d’affecter temporairement des ressources supplémentaires aux districts de police dont les stocks étaient les plus importants, pour qu’ils puissent les réduire dans une proportion suffisante.  Le groupe de travail a proposé de leur accorder les moyens d’accomplir le travail supplémentaire nécessaire, notamment sous la forme de “brigades volantes”. L’octroi des ressources supplémentaires serait subordonné à l’élaboration par les districts concernés à la fois d’un plan pour le projet pilote contenant un plan pour la période d’ajustement d’une durée ne dépassant pas six mois et un plan permanent à mettre en oeuvre par la suite. Le plan permanent devrait être basé sur un temps de traitement moyen ne pouvant dépasser 100 jours, et 60 jours pour les infractions au code de la route, et sur un taux de dépistage au moins aussi élevé qu’avant la période d’ajustement. Le ministère de la Justice a été chargé d’allouer les fonds nécessaires aux projets pilotes.

Stratégies temporaires de gestion des stocks d’affaires en attente.

Le groupe de travail a également préconisé des mesures extraordinaires, particulièrement bien adaptées au cas des districts de police dont le stock d’affaires en attente était stable et  pour lesquels on pouvait s’attendre à ce qu’une réduction ponctuelle de ce stock puisse avoir un effet permanent sur le temps de traitement. Les stratégies de renoncement aux poursuites dans le cas de dossiers anciens, de sélection plus rigoureuse des notifications d’infractions pouvant donner lieu à l’ouverture d’une enquête et d’enquêtes moins poussées et de sélection plus rigoureuse des affaires à faire passer en jugement permettraient toutes de réduire le temps de travail moyen par dossier et libéreraient des ressources que l’on pourrait affecter à la réduction des stocks, moyennant bien entendu une diminution du taux de dépistage. Une baisse temporaire de ce taux pourrait néanmoins se défendre s’il retrouvait son niveau normal une fois le problème principal réglé et s’accompagnait d’une réduction importante et durable des temps morts.

“Modèle de Stockholm”.

Le groupe de travail a mis en exergue le “modèle de Stockholm”, projet de réduction des stocks d’affaires en attente exécuté entre 1997 et 1999. La police de Stockholm avait généré un très important stock d’affaires en attente : on disait que plus de 50 000 dossiers attendaient leur tour. Un groupe de travail spécial d’une trentaine de membres a été créé pour une période de deux ans, et comprenait cinq unités dont les juristes et les enquêteurs travaillaient de concert en équipes. Le groupe a fait transférer 20 000 dossiers en attente et à la fin de la période, 140 dossiers seulement restaient à clore. Le groupe de travail a recommandé la mise sur pied d’un projet analogue pour la police du district d’Oslo, en estimant qu’une équipe pourrait clore entre 3 500 et 4 000 dossiers sur deux ans, soit un peu moins que leurs collègues suédois.    

Système de suivi.

La Norvège avait un système centralisé ancien et très complexe de TI pour le suivi des affaires pénales par la police. Le groupe de travail a formulé une série de propositions concernant les améliorations à lui apporter pour établir les rapports statistiques nécessaires à un suivi efficace, et a préconisé que chaque district de police publie une réglementation très détaillée permettant d’obtenir les données adéquates auprès de la base de données centrale et que les nouvelles affaires soient enregistrées correctement et sans temps mort. Les instructions devraient préciser la ventilation des responsabilités du système de suivi entre les fonctionnaires de police, et le commissaire de police devrait être chargé de le superviser. Les systèmes à base de TI doivent être mis à jour. Les données ne pouvaient pas être transmises sous formes de graphiques, mais seulement de tableaux, et il n’était pas possible de les relier aux autres systèmes à base de TI utilisés par la police, le parquet ou les tribunaux.

Le fait que le rapport soit centré sur le temps mort montre bien l’importance qu’il y a à établir une nette distinction entre le temps mort et le temps de travail. L’essentiel du retard enregistré se rapporte aux temps morts. Le groupe de travail montre de façon très convaincante que les mesures applicables aux temps morts sont différentes de celles qui visent à réduire le temps de travail. Le rapport des dossiers nouveaux aux dossiers tranchés a donné à penser au groupe de travail que la plupart d’entre elles sont peu onéreuses et pourraient être mises en oeuvre à l’aide des ressources déjà disponibles. C’est plus une affaire de réorganisation que de développement des capacités de la police. Toutefois, la réduction des stocks existants requiert plus de moyens que de les empêcher de se constituer ou de grossir. Cela dit, un développement temporaire des ressources suffira.

Plusieurs des stratégies de réduction des temps morts au niveau de la police semblent pouvoir être appliquées également aux tribunaux. Les six principes-objectifs du groupe de travail pourraient tous être facilement adaptés au stade du procès[13].Une analyse détaillée des temps morts et de ses causes à la fois avant l’audience principale et entre la fin de cette audience et l’exécution du jugement pourrait, comme l’examen des temps morts avant la décision en matière de poursuite dont il est question dans le rapport, indiquer que les choses pourraient aller mieux là aussi. On pourrait procéder à un examen critique du traitement simultané de différentes infractions pénales.

Le recours aux systèmes de suivi, les délais internes, la fixation de priorités et le mode de fonctionnement multifilières font déjà partie intégrante des stratégies de gestion des tribunaux dans plusieurs pays. Il en va de même des stratégies de réduction des stocks d’affaires en attente. Cela étant, les techniques spéciales recommandées par le rapport pourraient se révéler utiles.      


DÉFINITION DES PRINCIPALES NOTIONS

Le temps de travail correspond àla période ou au délai pendant lequel l’affaire est prise en mains.  Les parties débattent de l’affaire ou se présentent à une audience, les avocats étudient les pièces du dossier ou plaident l’affaire, le juge rédige une décision, les pièces de procédure sont transférées du tribunal de première instance à la cour d’appel, etc. On peut aussi parler de périodes d’activité. L’expression s’applique à tous les progrès d’une affaire.

Le temps mort est le temps pendant lequel le dossier ne donne lieu à aucune activité. L’affaire est au point mort ou a cessé d’avancer. Un témoin ne peut être joint et l’audience principale ne peut avoir lieu sans lui. Les avocats ou le juge étudient d’autres dossiers. Le témoin expert est en vacances, etc. On parle aussi de “temps d’attente”, d’inertie judiciaire ou de période d’inactivité. L’expression s’applique à n’importe quel type d’interruption, quelle qu’en soit la raison.

La gestion du temps s’entend d’une administration et d’un pilotage systématiques ou méthodiques du temps utilisé dans les systèmes judiciaires. Il s’agit d’appliquer au temps de traitement des affaires des normes bien définies et de faire en sorte que les ressources disponibles soient réparties d’une manière équitable et efficace entre les affaires en instance.  

La qualité du travail s’entend des efforts systématiques qui sont faits pour améliorer l’efficacité et la qualité du service rendu par les tribunaux et de leur milieu de travail.    


RÉFÉRENCES 

 

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Rapport om pilotprojekt om øget processtyring i civile sager (2002). Domstolsstyrelsen,  Danmarks Domstolene. [Rapport concernant un projet pilote relatif au renforcement du pilotage dans les affaires civiles. Administration Judiciaire Nationale du Danemark.]

Revideret oplæg om målsætningen for sagbehandlingstider i 2005. Memorandum 24.2.2005. [Édition révisée des objectifs concernant les temps de traitement des dossiers pour 2005.Mémorandum. Administration Judiciaire Nationale du Danemark.]

Rikollisuustilanne 2000. Rikollisuus ja seuraamusjärjestelmä tilastojen valossa (2001).Oikeuspoliittisen tutkimuslaitoksen julkaisuja 183, Helsinki. [Criminalité et justice pénale en Finlande 2000. Institute national de recherche sur la politique juridique, Finlande.]

Sagbehandlingstider i voldssager (2001). Circulærskrivelse til domstolene 18.9 2001.Domstolsstyrelsen, Danmarks Domstolene. [Les temps de traitement des affaires d’infractions avec violence. Lettre aux tribunaux. Administration Judiciaire Nationale du Danemark.]

Status med hensyn til den opstillede målsætning for en hurtig behandling af voldssager ved domstolene (2004). Domstolsstyrelse, Danmarks Domstolene. [Objectifs d’accélération du traitement des dossiers dans les affaires d’infractions avec violence. Administration Judiciaire Nationale du Danemark.]

Videoneuvottelutyöryhmän raportti (2004). Oikeusministeriö, Lausuntoja ja selvityksiä 2004:19. [Rapport du groupe de travail sur la visioconférence. Ministère finlandais de la Justice.]

Yleisten tuomioistuinten ja työtuomioistuimen tulostavoitteet vuonna 2006. Oikeusministeriö 18.1.2006. [Objectifs de résultats pour les juridictions ordinaires et les conseils des prud’hommes 2006. Ministère finlandais de la Justice.]



[1] Voir CEPEJ-TF-DEL (23004) 4.

[2] Voir CEPEJ-TF DEL (2005) 11.

[3] Commission européenne pour l’efficacité de la justice : Systèmes judiciaires européens. Édition 2006 (données 2004).

[4] Voir CEPEJ (2004) 19 Rev.

[5] Dans le cas des pays nordiques, le nombre d’arrêts rendus dans des affaires concernant la durée des procédures par la Cour européenne des droits de l'homme entre le 1er janvier 1985 et le 19 octobre 2006 est le suivant : Danemark : 16 (2 violations), Finlande : 23 (17 violations), Norvège : 2 (0 violation), Suède : 14 (5 violations)  (CEPEJ-TF-DEL (2006) 3,  59-60).

[6] Le projet Rovaniemi s’est vu attribuer le prix “Balance de Cristal” en 2005.

[7] Une réforme judiciaire actuellement en préparation devrait intervenir au 1er janvier 2007. Elle vise à ramener le nombre des tribunaux d’instance de 82 à 22. Parallèlement, un profond remaniement des règles de procédure applicables aux affaires tant civiles que pénales est en cours, qui a pour objet de diminuer d’une façon générale les temps de traitement.

[8]Prosjekt hurtigere straffesaksbehandling. Arbeidsgruppe I. Sluttrapport. Justis- og politidepartementet (Projet relatif à l’accélération de la justice pénale. Groupe de travail. Rapport final. Ministère norvégien de la Justice). Présenté le 20 juin 2000. Certaines des mesures présentées dans le rapport sont également décrites dans le rapport intitulé “La gestion du temps dans les tribunaux des pays nordiques” (voir également la première partie, p. 23).

[9] Cf.  CEPEJ –TF-DEL (2006) 3 pp. 22-23 : Il y a accusation lorsqu’une personne reçoit d’une autorité compétente notification d’une allégation selon laquelle elle aurait commis une infraction pénale ou lorsqu’elle subit nettement d’une autre façon le contrecoup de la situation.  

[10] Il y en a 27 depuis 2002.

[11]La CEPEJ parle également de “temps d’attente”.  Le “temps mort” correspond aux périodes pendant lesquelles les dossiers en attente ne font l’objet d’aucun travail, pour quelque raison que ce soit (voir p. 5). Le document CEPEJ-TF-DEL (2006) 3 analyse la durée acceptable de la procédure en s’appuyant sur la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l'Homme. L’arrêt de la procédure en raison de l’inactivité des autorités judiciaires pendant une longue période est généralement jugé inacceptable (pp. 34-35).

[12]Prosjekt hurtigere straffesaksbehandling. Arbeidsgruppe II. Sluttrapport. Justis- og politidepartementet. (Projet sur l’accélération de la justice pénale. Groupe de travail II. Rapport final. Ministère norvégien de la Justice) Présenté le 26 juin 2000 (mentionné dans la première partie, p. 25).

[13] Exemples :

– la préparation du procès doit commencer dès que le tribunal est saisi de l’affaire,

– la préparation du procès et les audiences ont besoin d’objectifs bien définis,

– la préparation doit être menée sans interruption jusqu’à son terme,

– dans toute la mesure possible, les différentes tâches de préparation doivent être menées de front,

– le jugement doit être rendu immédiatement après la fin de l’audience principale,

– il faut procéder sans délai à toutes les expéditions,

– le dépôt et l’enregistrement des dossiers doivent être effectués selon les règles et les dossiers mis à jour.